nutrition nourrir un animal cardiopathe Laurence Yaguiyan-Colliard Unité de Médecine de l’Élevage et du Sport École Nationale Vétérinaire d’Alfort 7 avenue du Général de Gaulle 94704 Maisons-Alfort cedex L’atteinte cardiaque s’accompagne souvent de cachexie, facteur pronostique défavorable à l’animal, et parfois même la cause de sa mort. Ainsi, surveiller le statut nutritionnel et adapter la ration alimentaire permettent de conserver la masse maigre et la qualité de vie du chien, ou du chat cardiopathe. Il est recommandé de faire maigrir un animal cardiopathe obèse, car cela améliore sa qualité de vie (toux, fatigue à l’effort). Objectifs pédagogiques ❚ Évaluer le statut nutritionnel d’un chien ou d’un chat. ❚ Prendre en compte la qualité de vie de l’animal. ❚ Évaluer l’opportunité d’un amaigrissement. ❚ Adapter les apports nutritionnels en fonction de l’évolution de la maladie. ❚ Limiter l’apparition et le développement de la cachexie. 2e Prix éditorial 2012 S i l’origine d’une affection cardiaque varie d’un animal à l’autre, les conséquences métaboliques sont souvent communes et évoluent en fonction de la gravité de l’atteinte organique. ● De façon schématique, la diminution de l’efficacité cardiaque induit une hypoperfusion tissulaire, responsable d’une hypoxie et d’une diminution de l’apport en nutriments aux cellules. Ces phénomènes entraînent des modifications hormonales (insuline, cortisol, catécholamines), responsables d’une augmentation du catabolisme et d’une diminution de l’anabolisme. Ils s’accompagnent également de la production de cytokines inflammatoires, responsables d’une augmentation des destructions cellulaires et de la production de radicaux libres. ● L’augmentation de ce stress oxydant conduit à un stress oxydatif par insuffisance des défenses anti-oxydantes de l’organisme. Les radicaux libres ainsi produits et non neutralisés induisent un syndrome inflammatoire généralisé et une destruction cellulaire [11]. ● Plus la maladie progresse, plus les conséquences métaboliques sont profondes, et plus les signes cliniques sont importants. L’animal devient ainsi dysorexique, puis anorexique, et la dénutrition va s’accentuer. Ce cercle vicieux se prolonge jusqu’à la mort de l’animal. Essentiel ❚ Quelle que soit l’atteinte cardiaque, les modifications métaboliques sont profondes. ❚ Le soutien nutritionnel permet de limiter les effets cataboliques de l’atteinte cardiaque et de conserver une qualité de vie satisfaisante. RUBRIQUE LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE canine-féline vol 12 / n°54 56 - JUIN 2013 56 1 Ce Labrador a une note d’état corporel de 3/9 et un score de masse musculaire de 3 (amyotrophie extrême). - L’atteinte cardiaque associée à une dysorexie marquée a entraîné en quelques semaines un état cachectique. - L’état de dénutrition est sévère et nécessite une prise en charge nutritionnelle rapide (ration appétente, riche en matières grasses et en protéines) (photo L.Yaguiyan-Colliard, CHUVA). ● Le soutien nutritionnel a donc pour but de limiter les effets cataboliques de l’atteinte cardiaque et de conserver une qualité de vie satisfaisante. Un suivi régulier du statut nutritionnel et une surveillance de la prise alimentaire sont donc nécessaires. Il convient de surveiller la masse maigre afin de limiter l’apparition de la cachexie en adaptant la ration à l’atteinte cardiaque et à l’appétit de l’animal (photo 1). L’ajustement en nutriments suit l’évolution de la maladie et l’appétit de l’animal. ● Toutefois, il convient de faire maigrir l’animal obèse si son poids a des répercussions cliniques. LA QUALITÉ DE VIE DE L’ANIMAL CARDIOPATHE Pour les propriétaires de chats et de chiens atteints d’affections cardiaques, il a été montré récemment que la qualité de vie de leur animal est plus importante que sa longévité [15, 16]. Dans ces enquêtes, un questionnaire a été développé pour établir un score de qualité de vie, donc pour tenter d’objectiver partiellement le ressenti des propriétaires. COMMENT SURVEILLER LA CACHEXIE CARDIAQUE ● La cachexie est un phénomène actif (cf définition) que l’on retrouve chez l’homme lors de certaines affections métaboliques, comme l’insuffisance cardiaque, l’insuffisance rénale ou le cancer. Elle est également observée chez le chat et le chien [8].