A la découverte de l’Histoire
Cours d’Histoire 2013/2014. G. Durand
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HISTOIRE DE LA MESOPOTAMIE
COURS 1 : LES PERIODES D’URUK ET
DES DYNASTIES ARCHAÏQUES
I/ La période d'Uruk est un stade de développement protohistorique de la Mésopotamie, qui couvre à peu près
le IVe millénaire av. J.-C. Comme son nom l'indique, elle a été identifiée à partir des fouilles archéologiques de
la cité d'Uruk, en Basse Mésopotamie, qui ont livré pour cette période un ensemble monumental dépassant
largement ce qui se faisait ailleurs à la même époque. Plus largement, cette période concerne également les
régions voisines du Moyen-Orient (Syrie, Iran occidental, Anatolie du sud-est), qui ont connu une certaine
influence mésopotamienne durant certaines phases de développement de la culture d'Uruk.
La chronologie de la période d'Uruk est très discutée et donc encore très imprécise. On sait qu'elle couvre une
grande partie du IVe millénaire av. J.-C. Mais il n'y a pas d'accord sur la datation de ses débuts, de sa fin, et les
grandes césures internes qu'il faut y distinguer. Cela est d'abord dû au fait que la stratigraphie d'origine, celle
identifiée dans le quartier central d'Uruk, est ancienne, comporte des zones d'ombres, et ne répond pas forcément
aux problématiques récentes du fait de l'ancienneté de ses fouilles (années 1930). Ensuite, ces problèmes sont en
grande partie liés à la difficulté qu'éprouvent les spécialistes à établir des synchronismes entre les différents sites
archéologiques, et donc à établir une chronologie relative des sites de la période qui permettrait de mettre au
point une chronologie absolue plus fiable.
La chronologie traditionnelle, très imprécise, est donc établie à partir des niveaux repérés par sondage dans le
quartier de l'Eanna à Uruk. Les niveaux les plus anciens de ce sondage (XIX-XIII) sont ceux de la période
d'Obeid final (Obeid V, de 4200 à 3900-3700), la poterie caractéristique de la période d'Uruk commençant à
apparaître dans les niveaux XIV/XIII. La période d'Uruk est traditionnellement divisée en plusieurs phases. Les
deux premières sont l'« Uruk ancien » (niveaux XII à IX du sondage de l'Eanna) puis l'« Uruk moyen » (niveaux
VIII à VI). Ces deux premières phases sont mal connues, et leurs bornes chronologiques sont mal définies, on
trouvera souvent des découpages chronologiques différents. À partir du milieu du IVe millénaire, on glisse
progressivement vers la phase la mieux connue, celle de l'« Uruk récent », qui dure jusque vers 3200 ou 3100.
C'est en fait cette période qui rassemble les traits généralement attribués à la civilisation de la période d'Uruk :
haut développement technique, développement d'agglomérations urbaines importantes avec leurs monuments
imposants, les plus caractéristiques étant ceux du niveau IV de l'Eanna, avec l'apparition de l'État, et l'expansion
de la culture urukéenne dans tout le Moyen-Orient. Cette phase de l'Uruk récent est suivie d'une autre phase
(niveau III de l'Eanna) qui voit le déclin de la civilisation d'Uruk, et l'éclatement du Moyen-Orient en plusieurs
cultures locales bien distinctes : on l'appelle couramment période de Djemdet Nasr, d'après un autre site
mésopotamien. Sa nature exacte est très discutée, et il est difficile de distinguer clairement ses traits de la culture
d'Uruk. On considère donc parfois qu'il s'agit d'une période d'« Uruk final ». Elle s'achève vers 3000 ou 2900.
Plus récemment, une nouvelle chronologie a été proposée par des participants d'un colloque réuni à Santa Fe,
reposant sur les fouilles récentes de sites, notamment hors de Mésopotamie. Elle reprend le terme de
chalcolithique, considérant la période d'Uruk comme un Late Chalcolithic (Chalcolithique tardif), abrégé en LC.
Le LC 1 correspondrait à l'Obeid final, qui s'achève vers 4200 quand commence le LC 2, première phase de la
période d'Uruk, donc Uruk ancien, lui-même divisé en deux phases dont la césure est à situer vers 4000. Vers
3800 débute le LC 3, qui correspond à une phase moyenne, qui dure jusque vers 3400 quand lui succède le LC 4,
alors que le LC 5 (Uruk récent) prend le relais rapidement et dure jusque vers 3000. Selon cette chronologie, la
période d'Uruk est donc étalée sur plus de 1000 ans, ce qui complexifierait encore plus son étude.
La Basse Mésopotamie est le cœur de la culture de la période d'Uruk, la région qui semble bien être le centre
culturel de cette époque, celle où on a retrouvé les principaux monuments, les traces les plus évidentes d'une
société urbaine complexe avec un appareil bureaucratique mis en place durant la seconde moitié du IVe
millénaire, le premier système d'écriture, et dont la culture matérielle et symbolique a le plus d'influence au
Moyen-Orient.
C'est la région du Moyen-Orient qui est la plus prospère grâce à son agriculture irriguée élaborée depuis le VIe
millénaire, reposant sur la culture de l'orge (associée à celle du palmier-dattier et différents fruits et légumes),
ainsi que sur l'élevage des ovins fournissant de la laine. Bien que dépourvue de ressources minérales importantes
et située dans un espace aride, elle dispose d'atouts géographiques et environnementaux indéniables : il s'agit
d'un vaste delta, une région plane parcourue par des cours d'eau, donc d'un espace agricole utile potentiellement
vaste sur lequel les communications (par voie fluviale ou terrestre) sont aisées. Elle peut ainsi devenir une région
très peuplée et urbanisée au IVe millénaire, connaître une hiérarchisation sociale plus poussée, accompagnée par