Des besoins éducatifs particuliers115
non verbaux (gestes, images, etc.), insister sur la
prononciation, vérifier encore plus souvent qu’avec les
autres enfants l’intégration du lexique.
L’enseignant est attentif aux signes qui manifestent :
– que l’enfant a repéré les signaux en usage dans la
classe pour indiquer tel moment (conte, rassemble-
ment, récréation, départ en salle de motricité, passage
aux toilettes, sortie);
– qu’il comprend, du fait de l’intonation, de la posture
du maître ou d’autres signes, les situations de
consignes ou d’ordres, les questions, les explications;
– qu’il peut exprimer, même de façon non verbale,
un besoin, une émotion ; il met des mots sur ces
situations : «tu ne veux pas monter sur la poutre?
tu as peur? je te donne la main» ; « tu es contente,
tu danses bien, continue, encore, encore », il fait
répéter certaines formules («j’ai envie de faire pipi»;
«est-ce que je peux aller faire pipi?»).
S’il y a des problèmes, il mime, montre un autre
élève qui fait ce qui est attendu, il demande à un
autre élève de démontrer, etc. Il ne contraint pas
l’enfant à répéter devant les autres. Pour les situa-
tions de rencontre avec l’écrit, les moments de lec-
ture sont préparés (voir au chapitre «Une première
culture littéraire » la partie : « Préparation de la
compréhension ») ; les textes sont lus et relus, la
mise en mémoire étant plus délicate et plus lente.
Veiller à la dimension sonore du langage
Le français a des caractéristiques sonores nouvelles
pour l’enfant qui arrive1(phonologie, prosodie, rythme,
accentuation); la perception auditive et les capacités
articulatoires de l’enfant doivent s’adapter. Il n’y a pas
lieu de tout focaliser sur «la bonne prononciation»
car il est plus important que l’enfant acquière vite des
conduites discursives diversifiées, mais l’enseignant doit
veiller à renvoyer en écho de bonnes formulations, à
articuler, même exagérément, certains mots.
Les enfants n’ont pas acquis la conscience phonolo-
gique dans leur langue maternelle; toute solution qui
pourrait permettre d’engager les enfants dans des acti-
vités favorables à cette acquisition dans leur première
langue est bienvenue. Les parents doivent être incités à
dire des comptines, à raconter.
Toutes les activités prévues sur les dimensions sonores
de la langue ont pour ces enfants une importance cru-
ciale; il n’est pas nécessaire d’en inventer de spéciales
mais il faut se soucier de leur participation active.
Réserver de courts moments à ces enfants
Sauf cas particuliers, ils n’ont pas besoin de rééducation
ou d’activités spécifiques avec des maîtres spécialisés
mais il leur faut de petits moments de langage avec le
maître. Celui-ci y est sensible lors des temps «sociaux»
(accueil, habillage, déshabillage, collation, récréation)
où il ne manque pas d’échanger en situation.
Il accorde cinq minutes par jour à un échange
particulier avec chaque enfant non francophone
de la classe, dans une des activités de la classe.
Deux fois par semaine, un atelier particulier d’un
quart d’heure permet de revenir, avec un tout
petit groupe, sur des apprentissages langagiers
spécifiques (échanges sur un livre, relecture avant
échanges, jeu sur les syllabes ou les sons, dictée
à l’adulte) ou de préparer une activité (compré-
hension d’une histoire).
Il ne s’agit pas de faire autre chose mais de créer des
conditions de renforcement par une relation et un
étayage plus «serrés» que dans un groupe plus large.
Faire une place aux diverses langues
maternelles dans la classe
Ce parti pris est une forme de valorisation des cultures
d’origine qui rassure les enfants sur le statut de leur
langue, mais il a aussi d’autres dimensions non
négligeables, liées à la citoyenneté (ouverture à la
différence qui est ouverture au monde et incitation
à la décentration, reconnaissance des différences
culturelles comme valorisation de l’altérité) et à
l’apprentissage : les comparaisons entre langues,
même à un niveau accessible en maternelle, aident
à l’analyse.
Aussi, l’enseignant adopte-t-il quelques règles cons-
tantes quand il a des élèves dont la langue première
n’est pas le français :
– à l’oral, il les laisse s’exprimer dans leur langue
et communiquer entre eux s’ils sont plusieurs ; il les
invite à «enseigner » à leurs camarades des saluta-
tions et formules de politesse (bonjour, merci, par-
don, s’il te plaît, bon anniversaire, etc.), des mots
usuels (jours de la semaine, nombres, etc.) ; il les
invite aussi à dire des comptines ou à chanter des
chansons; quand ils ont les mots pour le faire (plu-
tôt en section de grands), il pousse à des compa-
raisons entre la langue première et le français;
– à l’écrit, il n’oublie pas de faire une place aux
contes et à la littérature des pays d’origine, à choisir
des documentaires qui en parlent, à introduire des
ouvrages bilingues s’il en existe, à valoriser les sup-
ports divers (cartes, journaux, emballages, etc.);
– dans les activités artistiques, dans les activités
décoratives à dominante graphique ou les jeux, il
intègre des éléments intéressants pour tous venus des
cultures premières de tous ses élèves.
1. Les personnels des centres académiques pour la scolarisation des nouveaux arrivants et des enfants du voyage (CASNAV)
peuvent apporter des informations sur les comparaisons entre le français et les langues d’origine; ils disposent d’outils permettant
des évaluations des acquis des élèves dans certaines langues.
LangageCoeur(7) 10/04/06 9:26 Page 115