GALILEE astronome et père de la science moderne. L’autre jour j’étais avec Claud à la fac d’Avignon et nous assistions à une conférence sur le Boson de Higgs. En attendant le début de la conférence, je lui disais que j’avais du mal avec sa demande d’une courte intervention sur Galilée pour ce soir. En effet je lui fis part du fait que je ne voulais pas parler que de Galilée astronome, bien sûr, mais aussi de Galilée chercheur impénitent dans beaucoup d’autres domaines. Elle essaya de m’en dissuader en m’indiquant que, vu le contexte de la soirée, vous étiez venu entendre parler d’astronomie. Ayant bien réfléchi, j’ai décidé de désobéir à ma présidente chérie. Pourquoi ? Parce que je voudrais vous montrer que Galilée est, à plus d’un titre, le père de la science moderne, et que cela reste surement dans le champ de vos attentes supposées. Je compte sur vous pour me dire, à la fin de cet exposé, si j’ai eu tort ou raison. Galiléo Galiléi est né à Pise le 15 février 1564. Il est l’ainé de 7 enfants : 2 garçons et 4 filles. Retenez bien ces chiffres, ils auront une importance capitale dans sa vie. Son père est un excellent luthiste et un théoricien de la musique. Pour faire vivre sa famille, il doit ouvrir un commerce. C’est la raison de son arrivée à Pise, alors que sa famille était établie et fort connue à Florence. Première collaboration avec son père : une étude sur la théorie des cordes vibrantes. Déjà intéressé par les mathématiques, il propose une mise en équations. A 17 ans il entreprend des études de médecine à l’université de Pise. Il les abandonne au bout de 4 ans. Un ami de la famille, Ostilio Ricci, l’initie alors aux mathématiques. Passionné par cette science, l’élève dépasse rapidement le maître, et continue seul ses études. Sa tournure d’esprit d’ingénieur lui commande d’envisager les mathématiques non pas comme une science abstraite, mais comme une science applicable à bon nombre d’activités humaines. Il a une admiration sans borne pour Archimède pour son esprit à la fois mathématique et expérimental. Vous souvenez-vous de son principe bien connu ? Non pas « Tout corps plongé dans l’eau en ressort mouillé » Mais « Tout corps plongé dans un liquide en reçoit une poussée verticale égale au volume du liquide déplacé » Appliquant ce dernier principe, il améliore la balance hydrostatique qui permet de calculer la densité d’un corps, et conçoit une méthode pour mesurer la proportion d’un alliage. En 1583 le balancement de grands lustres dans la cathédrale de Pise le conduit à s’intéresser à l’isochronisme du pendule et à en formuler les équations . Il suggèrera l’application possible à la régulation des horloges, mais c’est Christian Huygens qui la réalisera. Toujours à la recherche de finances pour aider sa famille à vivre, et payer la dot de ses sœurs, il donne des cours de mathématiques. Mais cela ne suffit pas. En 1589 il obtient une chaire de mathématiques à l’université de Pise. Il s’intéresse à la chute des corps. La légende rapporte une expérience où il aurait lâché, du haut de la tour de Pise, deux sphères du même métal, l’une pleine et l’autre creuse, faisant constater que les deux arrivaient ensemble au sol. Il fait réaliser un plan incliné avec une rigole où se déplace une bille. Le parcours est jalonné de clochettes équidistantes. Il constate que les tintements ne sont pas séparés par des temps égaux, mais par des temps de plus en plus courts. Il déplace alors les clochettes pour qu’elles tintent à des intervalles de temps égaux. Il en déduit que la chute est uniformément accélérée, et en écrit les équations. (accroissement de la vitesse proportionnelle au carré de la distance) Son idée de mathématiser la physique va le conduire à bon nombre de découvertes. Nous en venons maintenant à ce pourquoi GALILEE est plus connu ; je veux parler de ses observations astronomiques. Soyons clair : il n’a pas inventé la lunette que la tradition lui attribue. Elle était « dans les cartons » d’italiens, de néerlandais, et d’allemands. D’après Descartes son invention serait attribuée à Jacques METIUS, un néerlandais. GALILEE l’améliore. Les verreries de Murano toutes proches, étaient susceptibles de lui fournir du verre d’excellente qualité. Il lui ajoute un pied pour stabiliser les observations, et un arc gradué, mais il reconnait que sur les quelques 70 lunettes réalisées, bien peu étaient de bonne qualité. Il la présente aux doges de VENISE qui sont impressionnés lors de leur première observation du haut du campanile de la Place Saint Marc : l’île de Murano distante de 2,5km ne semble être qu’à 300m. Ils en perçoivent immédiatement les applications militaires. En fin stratège, il fait cadeau de 2 lunettes à la République de Venise, et lui en concède les droits. En retour il est confirmé à vie à son poste de PADOUE, et son salaire doublé. Un peu libéré de sa recherche de subsistance, il entame une campagne d’observations. D’abord la Lune. Il découvre sa structure, proche de celle de la Terre : il y voit des mers et des montagnes, et en nomme certaines. Il s’intéresse aussi au soleil dont l’observation lui coûtera plus tard des problèmes oculaires. Il étudie les taches solaires. Il dénombre aussi les étoiles de la constellation d’Orion, et là où ses contemporains ne voyaient qu’une étoile, il constate qu’il s’agissait en fait d’un amas. Le 7 janvier 1610, il fait une découverte qui va modifier sa conception du système solaire : en observant Jupiter, il remarque une étoile à droite, et trois à gauche. Une autre nuit, deux étoiles de chaque côté, et une autre trois à gauche et une à droite. Il en déduit qu’elles tournent autour de Jupiter, et que ce sont ses satellites. Il les nomme étoiles médicéennes en hommage à ses protecteurs les Médicis. On les nomme aujourd’hui « satellites telluriques galiléens ». Mais c’est un autre astronome qui leur donne leurs noms actuels, un certain Simon Marius ou Mayr, plagiaire notoire, qui revendique leur découverte plus d’un an après. Cet escroc donne à ces satellites les noms de maîtresses du dieu Jupiter : Io changée en vache qu’il séduit en prenant l’apparence d’un taureau, Europe. Pour la séduire, Jupiter se change en taureau blanc pour endormir sa méfiance, Callisto, la plus belle en grec, que Jupiter séduit sous les traits d’Apollon. et Ganymède. Un prince que Jupiter enleva dans le ciel sous la forme d’un aigle. A croire que les habitants de l’Olympe étaient pour le mariage pour tous ! Jupiter, je parle de la planète, est une énorme boule de gaz. Tellement énorme qu’elle contiendrait l’ensemble du système solaire, excepté le soleil. Elle contiendrait 1321 Terres. Son influence sur Io est telle que les déformations qu’elle y produit entretiennent une activité volcanique sur une planète qui devrait être froide depuis longtemps. Les différentes sondes spatiales, Pioneer 10 et 11, Voyager, Cassini et Galileo ont permis de découvrir 67 satellites dont le diamètre s’échelonne de 5.000km (Ganymède) à 1km. Ce sont des satellites telluriques, de tellus telluris, comme on disait en 6ème quand on y apprenait encore le latin, ce qui permettait grâce à l’étymologie, de comprendre la signification de mots français inconnus. Tellus, traduction : la terre. Tellurique caractérise des planètes solides et non pas gazeuses comme Jupiter , Uranus, Saturne et Neptune. Mais revenons à Galilée observant les satellites de Jupiter. Il imagine que Jupiter et ses satellites pourraient être un modèle du système solaire. A cette époque c’est le géocentrisme qui est la seule conception du système solaire admise par l’Eglise toute puissante à cette époque. Elle est connue depuis l’antiquité avec Aristote et Ptolémée. L’Eglise, pour sa part, ne peut imaginer que la Terre qui a vu naître le Christ ne soit pas le centre du Monde ! Mais depuis quelque temps certains savants émettent une autre théorie. D’abord Giordano BRUNO, un dominicain, qui propose l’héliocentrisme, de hélios, en grec, le soleil : le système solaire tourne autour du soleil. Condamné par Rome, il y sera brûlé vif. De quoi refroidir les partisans de l’héliocentrisme. En 1533, un savant polonais, Nicolas COPERNIC fait parvenir au pape Paul III un exemplaire dédicacé de la première version de son livre De revolutionibus coelestium. Il n’est pas inquiété de son vivant, mais son livre a peut-être été archivé dans l’Enfer de la bibliothèque Vaticane. Mais la polémique continue, surtout quand Galilée publie le Sidereus Nuncius. Il clame haut et fort que sa théorie n’est pas basée sur le prestige de Ptolémée et d’Aristote, comme ses détracteurs, mais sur de nombreuses expériences et observations. Galilée est convoqué le 16 février 1616 par le Saint-Office pour l'examen des propositions de censure. Les 25 février et 26 février 1616, la censure est ratifiée par l'Inquisition et par le pape Paul V. Galilée n'est pas inquiété personnellement mais est prié d'enseigner sa thèse en la présentant comme une hypothèse. Cet arrêté s'étend à tous les pays catholiques. Mais Galilée ne peut s’empêcher de continuer à soutenir sa théorie en publiant d’autres ouvrages. Le 22 juin 1633, au couvent dominicain de Santa-Maria, la sentence est rendue : « Il est paru à Florence un livre intitulé Dialogue des deux systèmes du monde de Ptolémée et de Copernic dans lequel tu défends l'opinion de Copernic. Par sentence, nous déclarons que toi, Galilée, t'es rendu fort suspect d'hérésie, pour avoir tenu cette fausse doctrine du mouvement de la Terre et repos du Soleil. Conséquemment, avec un cœur sincère, il faut que tu abjures et maudisses devant nous ces erreurs et ces hérésies contraires à l’Église. Et afin que ta grande faute ne demeure impunie, nous ordonnons que ce Dialogue soit interdit par édit public, et que tu sois emprisonné dans les prisons du Saint-Office. » Galilée est obligé d’abjurer en ces termes : « Moi, Galiléo, fils de feu Vincenzio Galilei de Florence, âgé de soixante-dix ans, ici traduit pour y être jugé, agenouillé devant les très éminents et révérés cardinaux inquisiteurs généraux contre toute hérésie dans la chrétienté, ayant devant les yeux et touchant de ma main les Saints Évangiles, jure que j'ai toujours tenu pour vrai, et tiens encore pour vrai, et avec l'aide de Dieu tiendrai pour vrai dans le futur, tout ce que la Sainte Église catholique et apostolique affirme, présente et enseigne. Cependant, alors que j'avais été condamné par injonction du Saint-Office d'abandonner complètement la croyance fausse que le Soleil est au centre du monde et ne se déplace pas, et que la Terre n'est pas au centre du monde et se déplace, et de ne pas défendre ni enseigner cette doctrine erronée de quelque manière que ce soit, par oral ou par écrit; et après avoir été averti que cette doctrine n'est pas conforme à ce que disent les Saintes Écritures, j'ai écrit et publié un livre dans lequel je traite de cette doctrine condamnée et la présente par des arguments très pressants, sans la réfuter en aucune manière; ce pour quoi j'ai été tenu pour hautement suspect d'hérésie, pour avoir professé et cru que le Soleil est le centre du monde, et est sans mouvement, et que la Terre n'est pas le centre, et se meut. J'abjure et maudis d'un cœur sincère et d'une foi non feinte mes erreurs … Il aurait ajouté en aparté: « E pur si muove », ce qui se traduit par « Et pourtant elle tourne ! » Légende ou vérité, l’histoire ne le dit pas. Il faut noter que les interdits ne seront levés qu’en 1741 et 1757 par Benoît XIV. Le 15 février 2009, soit 445 ans jour pour jour après la naissance de Galilée, le président du Conseil pontifical pour la culture célèbre une messe en l'honneur de Galilée en la basilique Sainte-Marie-des-Anges-et-des-Martyrs Il finit sa vie, aveugle, dans sa villa d’Arcetri près de Florence. Il s’y éteint le 8 janvier 1642. Ainsi finit la vie d’un savant que l’on peut considérer non pas seulement comme un astronome de génie, mais aussi comme le père de la science moderne : - par son acharnement à expérimenter, à une époque où la science était très empirique. - par l’application des mathématiques aux phénomènes qu’il observait. Pierre VINCENT