Sémantique de la phrase

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Sémantique de la phrase
Jacques Moeschler
Cours 4
Sémantique
24 octobre 2016
1. Logique des propositions
2. Logique des prédicats
3. Catégories linguistiques et types sémantiques
4. La quantification
5. Le carré logique
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Logique des propositions et des
prédicats
Les langages logiques sont des langages désambiguïsés.
Leur but est de traduire les phrases en représentations sémantiques ou formes logiques.
Ces formes logiques sont ensuite interprétées dans un modèle.
Un modèle est une représentation du monde.
Nous allons examiner deux langages logiques classiques:
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1. Logique des propositions
La logique des propositions permet de rendre compte du raisonnement naturel et des principes
d’inférences valides.
La logique des propositions contient des variables de propositions et des connecteurs logiques.
Les connecteurs logiques ont une sémantique définie une fois pour toutes.
Ce sont des constantes logiques.
La logique des propositions est une logique bivalente.
1. la logique des propositions (inanalysées)
a. Principe de bivalence: « p et non-p est faux »
2. la logiques des prédicats (les propositions sont analysées)
b. Tiers exclus: « une proposition est vraie ou fausse » p ou non-p
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non (p et non-p)
Sémantique des connecteurs
logiques
p
Usages linguistiques des
connecteurs logiques
Conjonction
Disjonction
Conditionnelle
Équivalence
Négation
p et q
p ou q
si p alors q
si et seulement p,
alors q
non-p
p∧q
p∨q
p→q
p↔q
¬p
q
1
1
1
1
1
1
1
0
0
1
0
0
0
1
0
1
1
0
0
0
0
0
1
1
0
La conjonction en français n’est pas symétrique: p et q ≠ q et p
1. C’est toujours la même chose dans les réceptions: ou je me saoule et personne ne me parle, ou
personne ne me parle et je me saoule.
La disjonction en français est exclusive (vs inclusive en logique) et traduit l’ignorance du locuteur:
2. A: Où est maman?
B: Dans la cuisine ou à la salle de bain.
La conditionnelle en français est utilisée comme une biconditionnelle ou comme une contrefactuelle:
3. Si tu es sage, tu auras du dessert.
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4. Si j’étais riche, j’achèterais une île du Pacifique.
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Règles de déduction logique
Deux types de règles de déduction:
a. p ∨ q, ¬p ⊢ q
règle d’introduction
b. p ∨ q, ¬q ⊢ p
règle d’élimination
4. Introduction de ou
1. Modus ponens (élimination de si)
p⊢p∨q
p → q, p ⊢ q
5. Élimination de et
p ∧ q ⊢ p, q
2. Modus tolens (contraposition)
p → q, ¬q ⊢ ¬p
6. Introduction de et
p, q ⊢ p ∧ q
3. Modus tollendo tollens (élimination de ou)
2. Logique des prédicats
Une proposition est composée d’un prédicat (terme général) et d’un ou plusieurs arguments
(termes particuliers).
Le prédicat est généralement réalisé linguistiquement par le verbe.
Mais un nom, un adjectif, une préposition peuvent être des prédicats.
1. Jacques donne le cours de sémantique.
2. Jacques est linguiste.
3. Alexandre est célibataire.
4. Les livres sont sur le bureau.
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Prédicat et argument
Les prédicats peuvent avoir 0, un ou plusieurs
arguments:
a. Un terme est une constante ou une
variable d’individus.
1. Il neige.
b. Une variable (x, y, z) est un terme dont
l’interprétation n’est pas fixe.
2. Axel dort.
Une variable est libre ou liée à un quantificateur.
3. Axel mange un abricot.
a. Quantificateur universel:
4. Axel donne un livre à sa sœur.
a. ∀x = pour tout x
Les prédicats sont des constantes (non
logiques).
b. Quantificateur existentiel:
Les arguments du prédicat sont des termes.
a. ∃x = il existe (au moins) un x
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3. Catégories linguistiques et
types sémantiques
Principe de compositionnalité
La valeur sémantique d’une phrase est fonction de la valeur sémantique de ses parties.
Dans l’analyse sémantique logique, chaque constituant linguistique reçoit en plus d’une valeur sémantique
un type sémantique.
La valeur sémantique est la dénotation du constituant dans le modèle.
Le type sémantique est la valeur sémantique abstraite générale d’un constituant linguistique.
Types sémantique:
e (entity),
t (truth)
Les autres types sémantiques sont composés à partir de e et de t.
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La notion de variable
En langue naturelle, les pronoms illustrent la
notion de variable:
3. Chaque concurrent espère qu’il va
gagner.
1. Il arrive
≠ Chaque concurrent espère que chaque
concurrent va gagner
∃x (x arrive)
= Pour chaque x qui est concurrent, x
espère que x va gagner
2. Pierre a téléphoné: il arrive
∃x (x est Pierre ∧ x a téléphoné ∧ x
arrive)
∀x[x est concurrent → x espère (x va
gagner)]
Un argument pour la nécessité des variables
dans l’interprétation des phrases d’une langue
naturelle:
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Types sémantiques
Analyse sémantique
4. La quantification
a. Nath caresse Feng.
Quelle différence entre (1) et (2)?
b. Nath caresse ce chien.
formes logiques
a. quelques étudiants
1. Marie aime cet étudiant.
{x: x est une personne que Marie
aime} ∩ {x: étudiant} ≠ ∅
a. caresse (Nath, Feng)
2. a. Marie aime quelques étudiants.
b. Marie aime tous les étudiants.
c. Marie n’aime aucun étudiant.
b. caresse (Nath, ce chien)
types sémantiques des mots de la phrase
a. Nath: e
b. tous les étudiants
{x: étudiant} ⊆ {x: x est une
personne que Abi aime}
cet étudiant est une expression
référentielle de type <e>
b. Feng: e
c. caresse ce chien: <e, t>
c. aucun étudiant
quelques/tous/aucun étudiants sont des
expressions quantifiées, qui introduisent
des relations entre ensembles
d’individus.
caresse: <e, <e, t>>
d. ce chien: e
chien: <e, t>
ce: <<e, t,>, e>
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5. Le carré logique
On peut représenter la relation
entre les quantificateurs de la
logique et leurs correspondants en
langue par le carré logique.
A et E sont les universaux
I et O sont les particuliers
A = tous (∀x)
Les sommets du carré sont
représentés par des lettres: A, E, O, I.
I = quelques (∃x)
E = aucun (¬∃x)
A et I sont les positifs (AffIrmo)
O = pas tous (¬∀x)
E et O sont les négatifs (nEgO)
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{x: x est une personne que Abi aime}
∩ {x: étudiant} = ∅
Le carré logique
Relations entre les termes du
carré
A implique I: si A est vrai, I est vrai
E est contradictoire à I: si E est vrai, I est faux /
si I est vrai, E est faux
tous ont réussi IMPLIQUE quelques-uns ont
réussi
aucun n’a réussi EST CONTRADICTOIRE À
quelques-uns ont réussi
E implique O: si E est vrai, O est vrai
A est contraire à E: A et E ne peuvent pas être
vrai ensemble
aucun n’a réussi IMPLIQUE quelques-uns n’ont
pas réussi
tous ont réussi EST CONTRAIRE À aucun n’a
réussi
A est contradictoire à O: si A est vrai, O est faux
/ si O est vrai, A est faux
I est subcontraire à O: I et O ne peuvent pas être
faux ensemble
tous ont réussi EST CONTRADICTOIRE À
quelques-uns n’ont pas réussi
quelques-uns ont réussi EST SUBCONTRAIRE
À quelques-uns n’ont pas réussi
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Lectures
Allwood J., Andersson L.-G. & Dahl Ö. (1077), Logic in Linguistics, Cambridge,
CUP, chapitres 4 et 5.
Moeschler J. & Auchlin A. (2013), Introduction à la linguistique
contemporaine, Paris, A. Colin (Cursus), chapitre 10.
Moeschler J. & Reboul A. (1994), Dictionnaire encyclopédique de
pragmatique, Paris, Seuil, chapitre 6.
Zufferey S. & Moeschler J. (2012), Initiation à l’étude du sens, Auxerre,
Sciences Humaines Editions, chapitre 4.
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