110 CHIRURGIE THORACIQUE ET CARDIO-VASCULAIRE - 2014 ; 18(2) : 109-117
capacité d’accueil, qualité d’hébergement et infections nosocomiales
1. INTRODUCTION
Les infections associées aux soins correspondent aux infec-
tions survenant au cours ou à la suite d’une prise en charge
préventive, diagnostique, thérapeutique d’un patient si elles
n’étaient ni présentes ni en incubation au début de la prise en
charge.
Les infections nosocomiales (IN) correspondent par défini-
tion aux infections associées aux soins contractées lors d’un
séjour dans un établissement de santé. Elles représentent un
problème majeur dans les hôpitaux, notamment dans les ser-
vices de chirurgie, les secteurs de soins intensifs et les services
de réanimation. Leur prévalence était évaluée à 5,38 % dans
une enquête menée en 2006 par l’Institut de Veille Sanitaire
et les Centres de Coordination de la Lutte contre les Infec-
tions Nosocomiales (CCLIN) [1]. Dans une étude impliquant
les hôpitaux du nord de la France, le taux de prévalence des
IN est passé de 9 à 8 % entre 1996 et 2001 mais la diminution
n’était pas significative chez les patients à risque : âge supé-
rieur à 65 ans, traitement immunosuppresseur, chirurgie les
30 jours précédents, nécessité d’une voie veineuse centrale ou
d’une sonde urinaire [2].
Chaque structure hospitalière doit être dotée d’une unité
d’hygiène et d’un comité de lutte contre les IN. Ils assurent
les fonctions d’éducation et de prévention en matière d’IN et
ont aussi un rôle de vigilance. Malgré les nombreuses actions
menées : antibioprophylaxie et préparation cutanée de l’opé-
ré en chirurgie, protocoles d’isolement des patients infectés,
hygiène des mains, protocoles de mise en place et de soins
des cathéters périphériques et centraux, campagnes de vacci-
nation pour les personnels soignant, etc, les IN représentent
un problème majeur en termes de morbidité, de mortalité et
de coût.
Les enquêtes réalisées sont généralement ponctuelles et géné-
ralisées, ce qui leur confère une exhaustivité certaine, mais
ne tiennent pas compte de la spécificité des patients pris en
charge par chaque service. De nombreux facteurs peuvent
intervenir dans la survenue d’IN, liés à la qualité de la prise
en charge d’une part mais aussi au type de pathologies trai-
tées. Aucune étude spécifique n’a été réalisée en chirurgie
vasculaire dans ce domaine.
Nous avons réalisé une étude d’évaluation des IN au sein
d’une unité de chirurgie vasculaire et thoracique et recher-
ché un lien entre la capacité d’hébergement et la qualité de
l’accueil des patients d’une part et le taux d’IN d’autre part.
2. MATÉRIEL ET MÉTHODES
Nous avons réalisé une étude rétrospective monocentrique à
l’occasion d’un déménagement de l’unité de chirurgie vascu-
laire et thoracique du CHU de Limoges pour travaux durant 9
mois entre 2007 et 2008. Trois groupes de patients ont été étu-
diés : groupe 1 (n = 132) : patients hospitalisés dans le secteur
d’hospitalisation conventionnelle du service de chirurgie vas-
culaire avant la réalisation des travaux ; groupe 2 (n = 183) :
patients hospitalisés dans un secteur d’hébergement durant
la réalisation des travaux ; groupe 3 (n = 111) : patients hos-
pitalisés dans le secteur d’hospitalisation conventionnelle du
service de chirurgie vasculaire après la réalisation des travaux.
Les équipes médicales et paramédicales sont restées inchan-
gées durant les périodes d’études de chaque groupe. Les
protocoles d’antibioprophylaxie, de préparation cutanée de
l’opéré et de soins sont restés inchangés à l’exception du pro-
tocole de prévention d’escarre (suppression des matelas à eau
et recours aux matelas à air et silicone Simcare®). Les moda-
lités de recrutement des patients n’ont pas changé durant la
période d’étude.
Les groupes étaient représentés par les patients admis durant
une période de 3 mois dans chaque secteur : février, mars et
avril 2007 pour le groupe 1, mai, juin, juillet 2007 pour le
groupe 2 et mars, avril, mai 2008 pour le groupe 3.
Le nombre total de journées d’hospitalisation a été éva-
lué pour chaque groupe ainsi que les durées minimales,
moyennes et maximales de séjour.
L’âge des patients, le sexe-ratio, les facteurs de risque cardio-
vasculaire suivants ont été colligés : diabète, dyslipidémie, hy-
pertension artérielle (HTA), intoxication tabagique ainsi que
la présence d’une infection, une antibiothérapie, un traite-
ment immunosuppresseur corticoïde ou autre à l’admission.
Le nombre de patients dialysés a aussi été évalué.
Le nombre et le type d’interventions chirurgicales ont aussi
été recueillis. Les IN suivantes, diagnostiquées durant le sé-
jour hospitalier, ont été étudiées : infections urinaires, infec-
tions cutanées, infections bronchopulmonaires, infections de
voies veineuses centrales, bactériémies et ISO.
La présence d’un germe à une concentration supérieure ou
égale à 103 UFC/mL lors de la réalisation d’un examen cyto-
bactériologique des urines, 105 UFC/mL lors de la réalisation
d’un examen bactériologique de l’expectoration, 103 UFC/
mL sur l’examen d’un cathéter central, la présence d’hémo-
cultures positives, la mise en évidence d’un ou plusieurs
germes au niveau d’un site opératoire ou d’une plaie survenue
lors de l’hospitalisation (trouble trophique, escarre), toutes
associées à un tableau clinique évocateur (abcès, phlegmon,
hyperthermie, syndrome inflammatoire), étaient considérées
comme IN. N’étaient pas considérées comme IN par défi-
nition, les infections présentes à l’admission qu’elles soient
documentées ou non d’un point de vue bactériologique.
Le nombre d’implants vasculaires et leur type : Dacron impré-
gné ou non de sels d’argent, polytétrafluoroéthylène, polyuré-
thane, stents (nitinol ou acier) ont été revus. Le nombre et la
durée des séjours en unité de soins intensifs ou en réanima-
tion ont été mesurés.
La mortalité hospitalière et la mortalité liée aux infections
nosocomiales ont enfin été évaluées.
L’analyse statistique a été confiée à l’Unité Fonctionnelle de
Recherche Clinique et Biostatistiques (UFRCB) du CHU
de Limoges. Les 3 groupes ont été comparés à l’aide de tests
statistiques pour déterminer s’ils présentaient des différences :
tests de comparaison de moyennes (test de Student) pour les
comparaisons entre variables qualitatives binaires et variables
quantitatives, tests de comparaisons de pourcentages (Chi 2)
pour les comparaisons entre 2 variables qualitatives. Les
conditions d’application de ces tests ont été vérifiées. Le degré
de significativité était fixé à 0,05 pour l’ensemble des analyses.
Compte tenu des différences mises en évidence entre chaque
groupe, une analyse multivariée par régression logistique pas à