Michèle Ressi
L’Histoire de France
en 1 000 citations
(Des origines à nos jours)
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© Groupe Eyrolles, 2011
ISBN : 978-2-212-54304-9
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Gaule
(VIe siècle av. J.-C.- 481 apr. J.-C.)
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« Malheur aux vaincus. »
BRENNUS aux Romains, 390 av. J.-C.
Histoire romaine,
Tite-Live (historien romain né en 59 av. J.-C.).
Brennus est le chef des hordes gauloises qui déferlent sur l’Italie du Nord : conquise,
elle devient la Gaule cisalpine. Rome est prise, pillée, incendiée. Catastrophe nationale
et stupeur de toute l’Antiquité : pour la première et dernière fois (avant sa chute finale,
mille ans après), la capitale de l’Empire romain tombe sous les coups d’une armée
étrangère.
Brennus, vainqueur, jette son épée dans la balance où se pesait la rançon de la ville,
pour augmenter le poids d’or réclamé comme prix de son départ. Aux protestations
des Romains, il répond : « Vae victis. » L’expression, devenue proverbe, signifie que les
vaincus n’ont droit à aucune justice de la part des vainqueurs.
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« Nous ne craignons rien,
sinon que le ciel ne tombe sur nos têtes. »
Un guerrier gaulois à Alexandre le Grand, 335 av. J.-C.
Géographie, livre VII,
Strabon (géographe grec né en 58 av. J.-C.).
Fière réplique, également citée par Arrien, historien romain.
Les Gaulois, tribus nomades, ont traversé l’Europe et poursuivi leur expansion jusqu’aux
rives du Danube. Alexandre, roi de Macédoine, a convié à sa table ces guerriers. Âgé de
20 ans, déjà conquérant dans l’âme et prêt à devenir le héros mythique de l’Antiquité,
Alexandre demande durant le repas aux Gaulois ce qu’ils craignent le plus, s’attendant
naturellement à ce qu’ils répondent que c’est lui. Eh bien, non, ces Gaulois ne craignent
véritablement rien, ni personne.
Un siècle après, « le javelot romain brisa la fierté gauloise », selon Polybe, historien grec
contemporain de ce revers de fortune. La fougue anarchique des Gaulois ne pouvait
résister durablement à la discipline des Romains, dont l’Empire s’étendait sur l’Europe
et au-delà. L’histoire est d’abord une interminable suite de guerres.
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« Quand nous ne formerons en Gaule qu’une seule volonté,
le monde entier ne pourra nous résister. »
VERCINGÉTORIX à ses troupes, mai 52 av. J.-C., à Gergovie.
La Gaule (1947),
Ferdinand Lot.
Les tribus gauloises, victimes de leur désunion, viennent d’élire ce jeune noble, chef
suprême d’une coalition contre les Romains qui se veulent maîtres de l’Europe. Quand
César marche vers la Loire, Vercingétorix ordonne de brûler tous les villages pour affamer
l’ennemi. Mais on ne peut se résoudre à incendier Avaricum (Bourges), seule grande et
belle ville de Gaule, puissamment fortifiée. Après deux mois de résistance, elle tombera,
le 20 avril. Dans sa Guerre des Gaules, César parle de 40 000 morts – il a décuplé le
chiffre. Mais il note, en bon observateur : « Si l’adversité diminue d’habitude l’autorité
des chefs, elle grandit de jour en jour le prestige de Vercingétorix. »
Le mois suivant, le Gaulois remporte la plus grande victoire de sa courte carrière :
Gergovie (près de Clermont-Ferrand). César doit lever le siège, minorant ses pertes à
700 légionnaires. Les statistiques truquées nourrissent la légende ou la propagande,
et l’histoire de Vercingétorix nous est surtout connue par le récit de son adversaire,
César.
« Prends-les ! Je suis brave, mais tu es plus brave encore,
et tu m’as vaincu. »
VERCINGÉTORIX jetant ses armes aux pieds de César, fi n septembre 52 av. J.-C.,
à Alésia.
Guerre des Gaules (à partir du IXe siècle, multiples éditions et traductions
de ce grand texte historique et littéraire),
Jules César.
Ces mots du vaincu rapportés par le vainqueur servent d’épilogue à la brève épopée du
guerrier gaulois, face au plus illustre des généraux romains. En grand stratège, César
est parvenu à enfermer Vercingétorix et son armée à Alésia (en Bourgogne). L’armée
de secours, mal préparée, est mise en pièce par César qui exagère encore les chiffres :
246 000 Gaulois, dont 8 000 cavaliers. Vercingétorix juge la résistance inutile, et se rend,
pour épargner la vie de ses hommes – quelque 50 000, mourant de faim après quarante
jours de siège.
Le vaincu, jeté dans un cachot, exhibé six ans après comme trophée lors du triomphe
de l’empereur César, finira décapité : « Vae Victis ! ».
La chute d’Alésia marque la fin de la guerre des Gaules et l’achèvement de la conquête
romaine. Mais le mythe demeure bien vivant, en France : Vercingétorix, redécouvert
par les historiens au XIXe siècle et popularisé jusque dans la bande dessinée, est notre
premier héros national.
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Gaule (VIe siècle av. J.-C.–481 apr. J.-C.)
« La Paix, cette Cité qui assure les mêmes droits
aux vaincus et aux vainqueurs, aimez-la, honorez-la.
Puissent les leçons de la bonne comme de la mauvaise
fortune vous enseigner de ne pas préférer
la résistance qui perd à l’obéissance qui sauve ! »
Légat Petilius CEREALIS, 70.
Histoires (nombreuses éditions et traductions),
Tacite (historien romain du Ier siècle).
La Gaule est une colonie de l’Empire romain, depuis Auguste (Ier siècle av. J.-C.)
Parent de l’empereur Vespasien et chargé de pacifier la Bretagne, ce général romain
s’adresse aux représentants de tribus gauloises. Il leur vante la fameuse pax romana,
et ajoute : « Vous partagez l’Empire avec nous. C’est souvent vous qui commandez
nos légions, vous qui administrez nos provinces. Entre vous et nous, aucune distance,
aucune barrière. »
Les Gaulois peuvent en effet prétendre à toutes les charges et tous les honneurs romains :
procurateur, officier, légat. Cependant que s’épanouit la civilisation gallo-romaine : « Ces
théâtres, ces cirques, ces aqueducs, ces voies que nous admirons encore, sont le durable
symbole de la civilisation fondée par les Romains, la justification de leur conquête de
la Gaule. » (Jules Michelet, Histoire de France)
La Gaule romaine fut une Gaule heureuse.
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« Je suis chrétienne et chez nous, il n’y a rien de mal. »
BLANDINE à ses juges, Lyon, 177.
Histoire ecclésiastique (premier document sur les débuts de l’Église,
diverses éditions et traductions),
Eusèbe de Césarée.
Évêque, écrivain et grand érudit, il cite la lettre d’un témoin des martyrs de Lyon, qui
se complaît dans la description des monstrueux supplices subis par 48 chrétiens. Parmi
eux Blandine, jeune et frêle esclave, qui montre une constance incroyable : livrée aux
bêtes, qui n’en veulent pas, exposée au gril, offerte à un taureau sauvage qui la lance en
l’air avec ses cornes, elle est finalement achevée par le glaive.
Blandine deviendra sainte patronne de Lyon. Également connu et sanctifié, Pothin,
premier évêque de la ville, âgé de 90 ans et frappé à mort, mais toujours fidèle à sa foi.
Un siècle de persécution commence, ne concernant qu’une minorité : le pays est peu
christianisé au IIe siècle, les dieux romains résistent. Les grands apôtres de la Gaule
(Denis, Gatien, Martial, Hilaire) apparaîtront à partir du IIIe siècle.
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« Par ce signe, tu vaincras. »
CONSTANTIN Ier le Grand, 312.
Dictionnaire philosophique (1764),
Voltaire.
Après l’épisode (assurément authentique) des martyrs de Lyon, le christianisme se
répand, en Gaule comme dans le reste de l’Empire.
À la fin du IIIe siècle, l’Empire est partagé en quatre grandes régions. Constantin, à la
tête de la Gaule, entre bientôt en guerre contre les autres souverains. En 312, il décide
de marcher sur Rome et l’Italie, tenue par Maxence.
Chef avisé, Constantin s’est rendu compte qu’un nombre important de légionnaires
sont chrétiens. Il fait état d’un rêve (vrai ou faux ?). Il aurait vu une croix dans le ciel et
entendu une voix lui dire : « Hoc signo, Victor eris » (« Par ce signe, tu vaincras »). Il mit
cette devise avec la croix, sur son étendard : il s’acquit ainsi les chrétiens de son armée,
aussi bien que ceux de l’armée ennemie.
Voltaire cite la phrase plus complète que dans la plupart des autres sources : « Par ce
signe, tu vaincras tous tes ennemis. »
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« Tu as vaincu, Galiléen. »
JULIEN l’Apostat, mourant en 363.
Histoire de France, volume XVIII (1878),
Jules Michelet.
Mot de la fin du plus redoutable ennemi du christianisme naissant.
Julien a échappé au massacre de sa famille, ordonné par son cousin Constance II,
fils et successeur de Constantin Ier. Éloigné de la cour, le jeune prince se passionne
pour la philosophie néoplatonicienne, alors qu’une éducation chrétienne trop sévère
lui fait prendre cette religion en horreur.
Excellent guerrier, il écrase les Alamans (hordes germaniques) à Strasbourg (357) et
ses soldats le proclament empereur. La mort de son cousin fait de lui le seul maître
de l’Empire, en 361. Il se rallie les hérétiques et s’efforce de rétablir les anciens cultes
païens, d’où son surnom d’Apostat.
En guerre contre les Parthes (maîtres de l’ancien Empire perse) et en pleine débâcle de
l’ennemi, Julien est atteint par un javelot. Il se croit frappé par une main invisible : le
Galiléen Jésus le châtie pour avoir renié le christianisme.
Hors ce règne bref, l’évangélisation des villes, puis des campagnes, se poursuit, le chris-
tianisme devenant religion d’État, en 391.
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