BARBAROUX Sophie TAVOILLOT Camille Cours n°5 du 16/12/2008 PHARMACOLOGIE GENERALE Nous allons voir 3 chapitres : les antispasmodiques, les myorelaxants et les psychotropes (ce sera principalement une classification des psychotropes et une présentation des différentes familles). LES ANTISPASMODIQUES I - Généralités Les antispasmodiques ou spasmolytiques suppriment les spasmes, qui sont des contractions durables et intenses des muscles lisses des organes creux, et qui s’accompagnent de douleurs importantes. Ces substances présentent donc comme intérêt la relaxation des fibres musculaires lisses, ce qui a pour effet de supprimer la douleur. Il faut les différencier des myorelaxants, qui eux agissent sur les muscles striés, et des inhibiteurs du péristaltisme qui sont des morphinomimétiques diminuant le péristaltisme, utilisés dans le traitement de diarrhées. Les fibres lisses concernées sont digestives mais également génitales, urinaires ou bronchiques, même si ces fibres n’obéissent pas toujours aux mêmes actions pharmacologiques. Ces fibres lisses sont restreintes aux fibres contractées par l’acétylcholine (système parasympathique) qui se fixe sur les récepteurs muscariniques de l’appareil digestif, de la vésicule biliaire, des fibres urinaires des uretères et de la vessie. Cette action peut être bloquée par l’atropine. Le but ici va être de traiter notamment les syndromes douloureux abdominaux. II - Indications • Au niveau de l’intestin, les antispasmodiques sont utilisés dans le traitement de coliques (phénomènes douloureux s’accompagnant de contractions de segments intestinaux) et de diarrhées avec hypermotricité. • Ils sont aussi préconisés pour traiter certains troubles des annexes du tube digestif : par exemple, au niveau de l’appareil biliaire, ils sont utilisés en cas de coliques hépatiques, d’obstruction du canal d’Oddi, de lithiases du cholédoque (obturations entraînant des contractions douloureuses),... • Au niveau de l’appareil urinaire, ils sont utilisés en cas de lithiases urinaires ou de coliques néphrétiques, lors desquelles des calculs obturent les voies urinaires (souvent les uretères), ce qui crée des douleurs violentes. Par exemple, chez le chat qui présente fréquemment des lithiases (souvent sous forme de sable) entraînant une obturation de l’urètre, les antispasmodiques permettent aux muscles de se relâcher et à l’urine de s’écouler. 1 III - Méthode d’étude Les muscles lisses (provenant, par exemple, d’un morceau d’intestin) sont étudiés in vitro. On recherche ainsi un effet relaxant vis-à-vis de l’acétylcholine via des substances neurotropes dont le chef de file est l’atropine, ou vis-à-vis du chlorure de baryum (BaCl2) via des substances musculotropes dont le chef de file est la papavérine. Les substances neurotropes agissent donc sur le système nerveux, tandis que les substances musculotropes agissent directement sur la fibre musculaire. Secondairement, on peut rechercher comment ces substances agissent en association avec d’autres substances contracturantes comme l’histamine ou la sérotonine, ou avec d’autres contracturants qui agissent sur des mécanismes intracellulaires comme la vératrine. Un recoupement avec d’autres familles qui agissent sur les muscles lisses peut être fait : parasympatholytiques, ortho sympathomimétiques, antihistaminiques, anesthésiques locaux, etc… IV - Substances utilisées • Ce sont essentiellement des antispasmodiques neurotropes, les plus actifs, dont le chef de file est l’atropine. Des recherches ont été menées pour trouver d’autres substances présentant une action renforcée sur les fibres lisses et un effet moindre sur d’autres fibres comme les fibres myocardiques par exemple. Peuvent être ainsi cités : - l’iodure de tiémonium (Viscéralgine, Spasmodol) - le prifinium, utilisé dans le traitement de syndromes douloureux abdominaux. il est interdit chez les animaux producteurs de denrées, et possède les mêmes contreindications que tous les anti-cholinergiques, c’est-à-dire en cas de glaucome ou de difficulté de miction (diminution de la capacité de contraction de la vessie). Il faut également rester prudent lors d’insuffisance cardiaque. • En ce qui concerne les antispasmodiques musculotropes, leur chef de file est la papavérine, alcaloïde de l’opium (mais qui ne contribue pas aux effets pharmacologiques de l’opium !). Celle-ci entraîne la relaxation de toutes les fibres lisses quel que soit l’organe et le type d’innervation. Elle peut ainsi agir au niveau des vaisseaux, en particulier les vaisseaux cérébraux, des bronches, des intestins, de la vésicule biliaire et des uretères. C’est donc une substance vasodilatatrice et hypotensive. Elle exerce une action de type antiarythmique. C’est une substance de référence à laquelle on compare les autres substances musculotropes. Elle inhibe les phosphodiestérases, enzymes de dégradation de l’AMPc, comme les méthylxanthines. Au niveau du muscle lisse de colon de Cobaye, on peut remarquer un potentiel d’action incluant une entrée calcique inhibée par la papavérine. Les autres substances musculotropes sont : - les méthylxanthines - les dérivés du benzène, qui ont une activité pharmacologique assez faible - les dérivés de l’acide phénylacétique comme la camylofine (Spasfortan, Avafortan) qui présentent un tropisme génito-urinaire. Ils sont utilisés en cas de coliques néphrétiques ou de non dilatation du col, souvent en association avec la noraminopyrine (cela permet une addition des effets antispasmodique et analgésique). D’autres substances musculotropes ne sont plus utilisées (pour mémoire) : les dérivés de pipéridine et ceux de la phénithiazine (voir poly). 2 LES MYORELAXANTS I - Généralités Ils permettent le relâchement des fibres musculaires striées à la différence des antispasmodiques qui agissent sur les fibres lisses. Les médicaments agissant sur les fibres musculaires striées sont les myorelaxants et les facilitateurs, ces derniers n’étant pas utilisés en médecine vétérinaire. Les effets des myorelaxants peuvent être soit périphériques soit centraux. Leurs cibles sont les muscles, la commande au niveau de la plaque motrice et les structures nerveuses en périphérie ou dans le système nerveux central. II - Indications Ils sont préconisés dans différents cas : • syndromes de contraction exagérée comme la tétanie, le tétanos (traitement symptomatique du tétanos chez l’homme, qui est très rare chez le chien) et les convulsions • syndromes où la contracture complique une autre cause morbide : par exemple, en traumatologie • contractions réflexes à point de départ douloureux ; par exemple, lors d’un torticolis. • indications particulières à la chirurgie : essentiellement chez l’homme, par exemple, lors d’intubation trachéale (souvent réalisée avec des curares), d’immobilisation du patient en réduisant les doses d’anesthésique nécessaires, de suppression de mouvements respiratoires (lors d’ouverture du thorax, pour une CEC = Circulation Extra Corporelle). Ils permettent le couchage des grands animaux en médecine vétérinaire, mais dans ce cas, on n’utilise pas des curares. • euthanasie en associant un myorelaxant à un anesthésique ; l’anesthésique est important car sinon l’animal meurt de paralysie des muscles thoraciques (asphyxie) tout en restant conscient. III - Substances utilisées A - Myorelaxants périphériques Se référer au poly, dixit la prof, car elle estime que ces médicaments sont importants pour notre culture pharmacologique mais qu’on ne les utilisera probablement jamais, du moins pas dans un avenir proche… elle nous présente un résumé de résumé... Leur cible est la jonction neuromusculaire. Ils peuvent agir au niveau de la terminaison du nerf moteur, de la fente synaptique et de la fibre musculaire. A-1) Cible : Terminaison du nerf moteur En région présynaptique, ils peuvent inhiber la synthèse d’acétylcholine ou sa libération. Par exemple, la toxine botulique empêche la libération d’acétylcholine, ce qui entraîne une paralysie progressive des muscles striés. On ne connaît aucun médicament agissant via ce mécanisme. 3 A-2) Cible : Fente synaptique Les curares et curarisants agissent en région synaptique. Ils n’ont pas d’effet sur le système nerveux central, ni anesthésique, ni analgésique. Ils n’ont pas non plus d’effet sur la conscience. Ils sont utilisés sous anesthésie chez l’homme, car sinon, ils peuvent générer de l’angoisse. C’est ce que ressentent les patients à qui on injecte une dose insuffisante d’anesthésique avant l’injection de curare, ou lorsque les injections sont effectuées dans le mauvais ordre… Il est donc hors de question aujourd’hui de les utiliser sans anesthésie, même si cela a été fait auparavant, surtout chez les bébés, à qui on injectait une petite dose d’anesthésique (dont on craignait les risques de surdosage) avec une forte dose de curare… En médecine vétérinaire, il serait contraire à l’éthique de les utiliser pour la contention chimique, ou même en anesthésiologie, les moyens d’évaluation de l’anesthésie étant assez frustres, basés sur les réflexes. En outre, on réussit très bien à intuber en médecine vétérinaire sans curariser. Enfin, si on effectuait une curarisation, il faudrait placer l’animal sous assistance respiratoire (très peu répandue en clinique). On distingue deux catégories de myorelaxants périphériques : les acétylcholino-compétitifs et les acétylcholino-mimétiques. • Les acétylcholino-compétitifs se fixent sur les récepteurs cholinergiques, et empêchent toute dépolarisation membranaire (même effet que l’atropine). On peut citer la D-tubocuranine, l’un des premiers curares naturels connus et utilisés sur les flèches par les indiens, et la gallamine. Le poly fournit toute une explication sur leur origine. Le muscle ne répond pas à la stimulation du nerf moteur, mais il se contracte lorsque la stimulation est portée directement dans la masse musculaire. Les curares peuvent être déplacés par excès d’acétylcholine. La néostigmine est un antidote des curares. • Les acétylcholino-mimétiques reproduisent les effets de l’acétylcholine. On peut citer comme exemple la succinylcholine. La dépolarisation au niveau des récepteurs devient continue. De ce fait, un potentiel d’action ne peut ni naître, ni être propagé le long du sarcolemme. La fibre musculaire ne se contracte plus. La diapositive présentée (voir page suivante) est un schéma qui ne ressemble pas à la véritable structure du récepteur. C’est un canal fermé en l’absence de l’agoniste. L’acétylcholine provoque son ouverture. Lorsqu’un inhibiteur compétitif se fixe, le canal reste fermé tandis que lorsqu’il s’agit d’un inhibiteur dépolarisant, le canal reste bloqué ouvert et il n’y a donc pas d’action de l’acétylcholine. Les curares et curarisants sont à garder en mémoire dans un petit coin de notre tête, mais nous ne les utiliserons pas dans un avenir proche en médecine vétérinaire. 4 A-3) Cible :Myocytes Certains principes actifs agissent directement sur les fibres musculaires striées comme, par exemple, le dantrolène. Ce dernier intervient sur le couplage excitation/contraction, en bloquant le Ca2+ dans le réticulum sarcoplasmique. - actif sur les fibres musculaires striées squelettiques mais ni sur le cœur, ni sur les fibres musculaires lisses - pas d’effet dépresseur sur les muscles respiratoires et pas d’effet sédatif - induit une force contractile réduite tandis que les potentiels d’action nerveux persistent - effet marqué sur les fibres lentes : ce sont donc plutôt des actions volontaires qui sont supprimées, tandis que les contractions réflexes et automatiques persistent - actions centrales faibles Le dantrolène est utilisé dans le traitement des hyperthermies malignes, en provoquant une libération massive de Ca2+ dans la cellule. B - Myorelaxants centraux Ils diminuent l’activité motrice, en particulier le tonus musculaire, en inhibant le message moteur, ou sa transmission dans le système nerveux central. Ils sont utilisés dans le traitement de la situation de « spasticité », et ont une action prioritaire sur les systèmes centraux qui règlent le tonus musculaire. Par ailleurs, leurs propriétés sédatives peuvent être intéressantes ; par exemple, lors du déroulement d’une anesthésie. Idéalement, un myorelaxant devrait avoir une grande différence entre la dose sédative et la dose relaxante, ne pas modifier les mouvements volontaires et ne pas avoir d’effet sur la respiration. 5 • Certains myorelaxants centraux ont une action médullaire prédominante : par exemple, les myorelaxants du groupe de la méphénésine. Ils induisent une baisse de l’activité nerveuse motrice et de la réflectivité du réflexe myotatique. La méphénésine n’est pas utilisée. • Le GGE (Ether glycérine de Gaïacol) est voisin de la méphésine. En anesthésiologie, il est sans effet dépresseur respiratoire, et est utilisé lors du couchage des grands animaux. Il doit être administré sous perfusion en vérifiant de ne pas en disséminer au voisinage des veines (risque important de phlébite). Il a un effet inhibiteur sur le réflexe médullaire polysynaptique, peut être associé à pratiquement tous les anesthésiques, et est très utilisé chez le cheval. Ses effets sont brefs, de 15 à 30 minutes. • D’autres myorelaxants centraux ont une action plus large sur le système nerveux central : ce sont les tranquillisants. Ce sont essentiellement les benzodiazépines, dont le chef de file est le diazépam (= Valium). Elles exercent une puissante activité myorelaxante, mais également des effets sédatifs non négligeables. Ceci ne constitue pas un obstacle dans le cadre d’une anesthésie, mais peut être une contre-indication dans d’autres cas. Il existe des tranquillisants autres que les benzodiazépines comme, par exemple, le méprobamate, qui n’est plus utilisé, ou le baclofène qui agit sur les récepteurs GABAB (agoniste). Le baclofène peut également toucher d’autres récepteurs : ainsi, il active les récepteurs aux catécholamines et inhibe les récepteurs de la substance P et de l’acide glutamique. Son action sur les récepteurs GABAB conduit à une diminution de libération du transmetteur par les neurones excitateurs, ce qui engendre une chute de Ca2+ et une augmentation d’AMPc dans la cellule. De plus, cela entraîne une diminution de la décharge des neurones A! et A". L e baclofène est de ce fait le myorelaxant central le plus actif dans les syndromes de spasticité. Il est aussi utilisé lors du syndrome de sevrage alcoolique. Schéma du récepteur GABAB ; celui-ci est relié à des canaux calciques, dont l’ouverture modifie la formation d’AMPc. La fixation des benzodiazépines sur le canal GABAA entraîne l’ouverture de canaux chlorure. Le baclofène se fixe quant à lui sur les autorécepteurs GABAB. Les benzodiazépines sont très utilisées en anesthésiologie, tandis que les curares prennent une part importante dans le poly mais ils ne sont pas liés à la pratique vétérinaire… NB : La dernière diapo du poly a un « problème », la prof s’est aperçue qu’il y avait une erreur dessus, elle va donc la corriger, et je vous enverrai cette diapo à part.... 6 LES PSYCHOTROPES On retrouve ces substances dans les anesthésiques ainsi que dans le traitement de l’épilepsie et des troubles du comportement. Le but ici est de les classer. Ces substances sont destinées à modifier le fonctionnement des structures responsables de l’activité mentale. Elles sont sélectionnées dans le but d’être utilisées chez l’homme pour traiter les affections mentales, qui n’ont pas toujours de correspondance chez l’animal. Certains psychotropes sont utilisés chez les animaux, en anesthésiologie et dans le traitement de troubles du comportement. I - Etudes expérimentales De nombreux essais ont été menés chez l'animal afin d'étudier les effets de ces psychotropes avant de les utiliser chez l'homme. Ces essais ont tout d'abord montré une modification de l’activité spontanée. Ainsi, lors du test de champ ouvert (« open field »), l’animal est placé sur une superficie quadrillée et ses déplacements dans cet espace sont quantifiés : on mesure les activités exploratrice et locomotrice, le nombre de défécations émotionnelles, ... On suit également les zones explorées par l'animal : plus l’animal est anxieux, plus il reste près des parois. Le test est fait sur une période de temps limitée, en dehors de son environnement habituel, ... De même, l’animal peut être placé dans une cage contenant une roue permettant de quantifier son activité, sur un tapis roulant (Treadmill) ou même sur un rotarod (tige tournante), une perte de coordination entraînant sa chute. Les attitudes anormales sont la catalepsie qui suggère une activité neuroleptique, le signe de Staub (queue à la verticale) qui indique une activité morphinomimétique, l'asthénie, l'hypotension, l'excitation et le sommeil. Les mouvements anormaux sont surtout les stéréotypies, qui suggèrent une activité dopaminergique. Ainsi, l’activité locomotrice est augmentée par les psychostimulants et déprimée par les psycholeptiques. Afin de quantifier l’activité exploratoire, l’animal est placé sur une tranche à trous et l'expérimentateur compte le nombre de fois où la souris met son nez dans les trous (cela étant la preuve de la curiosité de la souris). Le test Rotarod permet de mesurer les facultés de coordination de la souris en la plaçant sur une tige tournante. De même, le test de traction et le test de la cheminée permettent d’évaluer les modifications de ces facultés. On peut aussi utiliser un dispositif de labyrinthe en croix possédant une partie avec des bras fermés et une partie avec des bras ouverts. Les bras fermés étant plus rassurants que le bras ouvert, on peut donner un index d’anxiété en mesurant le temps passé entre chaque bras. Ainsi, l’administration d’un tranquillisant augmente le temps passé dans les bras ouverts. La toxicité de groupe est accrue par l’administration d’amphétamines. Des travaux ont été menés sur l’influence des souris les unes sur les autres, notamment sur la transmission de la douleur. 7 Les réflexes conditionnés sont observés par diverses expériences comme la boîte à navette ou la montée au mât, où les souris sont placées dans une boîte avec un mât : on observe si elles ont le réflexe de grimper au mât, après un signal sonore qui prévient d’une décharge électrique. Ces tests permettent de juger de leurs facultés d’apprentissage et de leurs appréhensions, mais aussi d’observer leur gestion des conflits : par exemple, le conflit entre la nourriture et un choc électrique : La souris prend une décharge à chaque fois qu’elle essaie de se nourrir. Après administration de tranquillisants, la souris se rend malgré tout à la mangeoire. Le test de Vogel permet de tester les anxiolytiques : quand les souris vont boire, elles reçoivent une décharge, donc au bout d’un certain temps, elles ne vont plus boire. L’administration de ce type de substances leur fait oublier la décharge. D'autres essais mettent en évidence une modification des effets induits par un autre agent pharmacologique. Par exemple, le temps de sommeil est induit par les barbituriques et la catatonie par les neuroleptiques. Il peut y avoir une modification de comportements induits. Les chercheurs ont essayé de mettre en place des tests pour mesurer le désespoir des souris. Ainsi, lors du force-swimming test (nage forcée), les souris sont placées dans une bassine remplie d’eau sans qu’elles puissent se poser et on mesure le temps qu’elles nagent, jusqu’à ce qu’elles se laissent mourir. De même, lors du test de suspension, les souris sont suspendues par la queue et essaient de se retourner. On mesure le temps nécessaire pour qu'elles renoncent à se débattre. Il est difficile de créer de véritables modèles de dépression chez l’animal car ces tests ne sont pas caractéristiques de la dépression humaine. Nous sommes cependant bien obligés d'avoir recours à ces tests, pour être susceptibles d'utiliser ces substances chez l'homme. Nous allons maintenant étudier les différentes familles de psychotropes en nous basant sur une classification française (Delay et Denniker) qui est différente de celle des anglo-saxons. Cette classification repose sur des caractères hybrides, qui tiennent compte des résultats obtenus sur les animaux de laboratoire et lors de tests cliniques chez l'homme. II - Les psycholeptiques Ils induisent une diminution de l'activité mentale. A) Les hypnotiques Ils sont capables d’engendrer un sommeil plus ou moins proche du sommeil physiologique, tout en diminuant la phase de sommeil paradoxal (phase du rêve). Il existe des différences notables selon les familles. Ils ont été mis en évidence par la mesure du temps de sommeil, qui correspond au temps durant lequel il y a perte du réflexe de redressement. L’électroencéphalogramme permet de caractériser les différents états de vigilance, et de polygraphier les activités corrélées à la vigilance (l'activité oculaire, le tonus musculaire et la fréquence cardiaque). 8 A-1) Les Barbituriques Ce sont des dérivés de la malonylurée. Ils ont été classés en fonction de leur durée d’action. Ils touchent les 3 phases de l'anesthésie (induction, temps de sommeil, réveil) de façon similaire. Ils ont tout d’abord un effet hypnotique. Selon la chronologie ou la dose, ils peuvent induire différents états : - la sédation, se traduisant par une diminution de l’activité locomotrice, une ataxie et quelques phases d’excitation au milieu d’une activité locomotrice normale - le sommeil, différent du sommeil physiologique avec très peu de sommeil paradoxal. Le sujet reste sensible à la douleur - l'anesthésie, qui correspond à l’état de dépression des fonctions nerveuses encore plus poussées. L’animal est en état de perte de la conscience et de la sensibilité générale. Le relâchement musculaire est encore peu important - le coma, à forte dose, pouvant entraîner la mort par dépression respiratoire. Les 2 barbituriques les plus utilisés sont le thiopental sodique, uniquement administré par voie intraveineuse, et le pentobarbital (utilisable par toutes les voies injectables). Le pentobarbital est le plus utilisé en expérimentation animale (la voie parentérale est la plus utilisée chez les souris : injection intrapéritonéale). Les barbituriques ont d’autres effets : - Effet anticonvulsivant qui apparaît à faible dose, à des niveaux de posologie où l’effet sédatif est absent ou peu marqué. Ils sont ainsi utilisés dans le traitement de l’épilepsie. - Dépression respiratoire en diminuant la sensibilité au CO2, à des posologies proches des doses anesthésiques, ce qui constitue le risque majeur de l'utilisation de ces produits en tant qu'anesthésiques. - Effet circulatoire se manifestant par une dépression cardiaque (effet inotrope négatif) - Vasodilatateurs et Hypotenseurs - Effet hypothermisant, en réduisant la thermogenèse - Effet d'induction enzymatique : ils induisent le cytochrome P450 et sont donc dégradés de plus en plus rapidement. On utilise donc les barbituriques comme hypnotiques, anesthésiques et anticonvulsivants. A-2) Les hypnotiques non barbituriques Ils recouvrent des substances très diverses. Le chloralose et l'uréthane sont utilisés en expérimentation. Le propofol, cité à titre d'exemple, est un anesthésique sûr pour les petits animaux. Il permet des phases d'induction et de réveil très rapides, et il est donc fréquemment utilisé lors de la réalisation de radiographies. Il est commercialisé sous le nom de Rapinovet (correspond au Diprivan chez l’homme). B) Les neuroleptiques Ils sont encore appelés « tranquilizers » ou « major tranquilizers » en dénomination angosaxonne, mais attention, ils diffèrent des tranquillisants. Ils sont psycholeptiques mais non hypnotiques : ils induisent une diminution de l'activité du système nerveux central sans engendrer le sommeil. Ils créent une indifférence psychomotrice, diminuent l’agressivité et l’excitation et réduisent également les troubles psychotiques aigus et 9 chroniques. Ils produisent des effets secondaires neurologiques et végétatifs, et ont une action prédominante sur les couches profondes du cortex. Chez l’animal d’expérience, on observe : - diminution de l’activité motrice spontanée tout en conservant les réflexes - catalepsie ou rigidité, mais pas d’abolition du tonus musculaire - potentialisation des dépresseurs du système nerveux central (anesthésiques), ce qui est très intéressant - hypothermie - action sympatholytique alpha - effet antagoniste de la dopamine - effet anti-vomitif Mme Combrisson nous a ensuite passé un film sur l’action des neuroleptiques sur les rats : l’animal est en catalepsie, il ne bouge pas même si on lève sa patte et on la lâche. Par contre, il réagit au pincement de la queue (réflexe douloureux). Donc, avec un neuroleptique, le rat reste sensible à la douleur. La catalepsie correspond ainsi à un état de conscience modifié, mais la sensibilité à la douleur est conservée. On distingue 4 familles : B-1) Les alcaloïdes du Rauwolfia Ils sont cités pour mémoire. Le chef de file est la réserpine. B-2) Les dérivés de la Phénothiazine Le chef de file est la chlorpromazine, mais il existe de très nombreux dérivés comme la lévopromazine, l’acétopromazine, la cyamépromazine. Ils ont un effet dépresseur des fonctions nerveuses supérieures. B-3) Les Butyrophénones Ce sont des substances possédant les mêmes propriétés que les autres familles mais elles sont plus actives. Leur effet sédatif est plus ou moins affirmé selon le principe actif : - Le halopéridol est peu sédatif mais très anti-émétique - L’azapérone est plus sédative et diminue l’agressivité. Elle est utilisée chez les porcs lors de leur transport - Le dropéridol a une cinétique courte, d’où son intérêt en anesthésiologie, en particulier associé aux morphinomimétiques. Par exemple, l'association du dropéridol avec du droleptan entraîne une neuroleptanalgésie (pratique anesthésiologique sans usage d’anesthésique) et est utilisée lors d'expérimentations, ou de certaines investigations en médecine humaine - La fluanisone est utilisée dans les mêmes conditions que le dropéridol B-4) Les Benzamides Ils ne sont pas utilisés comme neuroleptiques. Cette famille comprend le métoclopramide, commercialisé en médecine humaine sous le nom de Prinpéran (anti-vomitif), et le sulpiride. Ce sont des inhibiteurs puissants de la dopamine, d'où leur effet anti-émétique. 10 À plus forte dose, ils modifient le tonus musculaire et provoquent des convulsions chez le chien. ! Tous les neuroleptiques ont un effet antidopamine marqué. Ils antagonisent les effets de la dopamine et de ses agonistes : apomorphine (qui fait vomir), bromocriptine (1ère molécule utilisée pour bloquer la sécrétion du lait). Ils induisent une hyperprolactémie et ont un pouvoir antimimétique marqué : ils réduisent par exemple les stéréotypies induites par les amphétamines, et par l’apomorphine chez les rongeurs. C - Les tranquillisants Ce sont les « minor tranquilizers », encore appelés « anxiolytiques ». Ils diminuent l’activité locomotrice et sont actifs dans les tests de conflit. Ils potentialisent les autres dépresseurs du système nerveux central, comme les hypnotiques ou les anesthésiques. Ils peuvent induire le sommeil mais pas l’anesthésie, en provoquant le relâchement musculaire. Ils suppriment les convulsions induites par le pentétrazole ou la strychnine. Ils n’ont pas d’effet d’inducteur enzymatique, ni d’effet neurovégétatif propre. On distingue 2 familles : C-1) Les Benzodiazépines Ce sont les substances majeures parmi les tranquillisants. Chez l’animal, leurs principes actifs sont utilisés en anesthésiologie (Diazépam), lors de pré anesthésies, ou en association (avec la kétamine, qui ne donne pas de relâchement musculaire par exemple), et comme anticonvulsivants. Elles ont un effet de stimulation des récepteurs GABAA. C-2) Les non Benzodiazépines Elles ne sont pas utilisées. On citera pour mémoire le méprobamate. II - Les psychoanaleptiques Ils sont capables de stimuler l'activité psychique. A - Les nooanaleptiques Ils accroissent l’activité locomotrice, suppriment les effets des hypnotiques et présentent un phénomène de toxicité de groupe. Ils ont également une action anorexigène. Ce groupe comprend les amphétamines. B - Les antidépresseurs Ils sont surtout utilisés pour traiter la dépression chez l’homme. Chez l'animal, ils peuvent êtres utilisés à l'occasion de certaines situations, lors de troubles comportementaux par exemple. 11 On distingue : • Les inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO), comme l’iproniazide : ils réduisent la biodégradation des catécholamines, et font donc persister la noradrénaline plus longtemps dans la synapse • Les antidépresseurs tricycliques, comme l’imipramine et ses dérivés, qui sont des inhibiteurs de recapture de la sérotonine et de la noradrénaline • Les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine, comme la fluoxétine (Prozac). C - Les psychostimulants C’est un groupe hétérogène comprenant des stimulants généralement de moindre efficacité phamacologique, et qui ne sont pas toujours utilisés pour cela. Peuvent être cités : la vitamine C, les stéroïdes, les méthylxanthines (caféine, théine), l'ATP et quelques acides aminés (acides aspartique et glutamique). III - Les psychodysleptiques Ils désorganisent l’activité mentale, en provoquant des délires et des hallucinations. On peut citer le PSD 25 (= LSD) ou la psilocybine (présente dans les champignons hallucinogènes) à titre d'exemples. La kétamine a une action hallucinogène marquée (il paraîtrait qu'elle était parfois utilisée par les étudiants vétérinaires, ce qui a conduit à sa mise sous scellés...) Dans une certaine mesure, des alcaloïdes de l’opium peuvent aussi être considérés comme psychodysleptiques. 12