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10. Les sources littéraires de l’histoire de la Grèce (VIes.
a. C.
-IIes.
p. C.
)
Document commenté
LAPRISE DE CORINTHE EN 146 A.C..
16,7. […] Cependant, le troisième jour après la
bataille, Mummius prit Corinthe d’assaut et la fit
brûler. 16,8. Les Romains massacrèrent la majorité
des prisonniers ; Mummius vendit les femmes et
les enfants. Il vendit aussi tous les esclaves qui
avaient été affranchis et avaient combattu au côté
des Achéens sans avoir trouvé la mort. Parmi les
offrandes et autres œuvres d’art, celles qui susci-
taient le plus d’admiration étaient emportées;
celles qui, en revanche, n’avaient pas la même
valeur, Mummius en fait don à Philopœmen, le
stratège envoyé par Attale; et même de mon
temps encore, il y avait à Pergame des dépouilles
corinthiennes. 16,9. Mummius faisait détruire les
murs des cités qui avaient combattu contre Rome
et y confisquait l’armement avant même que des
commissaires fussent envoyés de Rome. Et quand
arrivèrent ceux qui étaient chargés de délibérer
avec lui, il était en train de mettre fin aux régimes
démocratiques et d’établir des magistratures
fondées sur la fortune. En outre, un tribut fut
imposé à la Grèce et ceux qui avaient des biens
n’avaient pas le droit d’en acquérir au-delà des
frontières. Les Assemblées confédérales de
chaque nation, en Achaïe ou bien en Phocide, en
Béotie ou bien partout ailleurs en Grèce avaient été
toutes également supprimées. 16,10. Quelques
années plus tard, les Romains furent pris de pitié
pour la Grèce et rendirent à chaque nation son
ancienne Assemblée confédérale et le droit d’ac-
quérir des biens au-delà des frontières; ils suppri-
mèrent aussi toutes les amendes qu’avait infligées
Mummius. Car il avait imposé aux Béotiens et aux
Eubéens de payer cent talents aux gens d’Héraclée
et aux Achéens de payer deux cents talents aux
Lacédémoniens. Les Grecs obtinrent donc des
Romains remise de ces dettes; pourtant, jusqu’à
mon époque encore, on envoyait dans le pays un
gouverneur [hègemôn]: les Romains l’appellent
gouverneur non pas de la Grèce mais de l’Achaïe,
parce que les Achéens étaient à la tête du peuple
grec au moment où ils soumirent les Grecs […].
17,1. Ce fut alors surtout que la Grèce en vint à un
dénuement total, elle qui avait été abîmée région
par région et ravagée depuis le début par la divi-
nité […]. 17,2. […] Et au moment où, péniblement,
comme d’un arbre gâté et presque tout desséché,
le rameau achéen, en Grèce, redevint florissant, ce
fut la corruption des chefs militaires qui le mutila
une fois de plus alors qu’il grandissait. 17,3. Par la
suite, la puissance impériale échut à Néron, et
Néron rendit la liberté à tous, ayant fait un échange
avec le peuple des Romains :il leur donna, à la
place de la Grèce, l’île de Sardaigne qui était parti-
culièrement florissante […]. 17,4. Les Grecs cepen-
dant n’eurent pas la possibilité de tirer profit de ce
présent. Après Néron en effet, sous le règne de
Vespasien, ils furent entraînés dans une guerre
civile, et Vespasien leur imposa d’être à nouveau
soumis à un tribut et d’obéir à un gouverneur,
parce que, affirmait-il, le peuple grec avait désap-
pris la liberté.
Pausanias, Périégèse,VII, 16, 7-17, 4.
Remarques préliminaires : les principaux centres d’intérêt du texte
Évidents dès le premier abord:
– évocation de la prise de Corinthe par Mummius et de ses conséquences;
–définition du statut de la Grèce à l’époque romaine (IIesiècle a. C.-IIesiècle p. C.).
Apparents dans un second temps:
– présentation d’un processus de déchéance subi par la Grèce;
–une histoire écrite du point de vue d’un Grec attaché au passé glorieux de la Grèce.
1-Présentation
La naturede la source
Il s’agit d’un extrait du livre VII de la Périégèse de Pausanias, consacré à l’Achaïe. Le
texte se situe à la charnière entre une partie à caractère historique, où Pausanias recom-