Collisions cosmiques forgeant de l`or

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COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Bruxelles, le 10 septembre 2011
Collisions cosmiques forgeant de l’or
Le site cosmique où les éléments chimiques les plus lourds, tels que l’or ou le
plomb, sont produits, est sur le point d’être identifié: la matière éjectée lors de la
coalescence d’étoiles à neutrons fournit les conditions idéales. Sur base de
simulations numériques détaillées, les scientifiques de l’Institut d’Astrophysique
du Max-Planck et de l’Université libre de Bruxelles ont vérifié que les réactions
nucléaires prenant place dans un tel environnement conduisent bien à la
production des éléments les plus lourds en conformité avec les abondances
observées dans notre Système Solaire.
La plupart des éléments lourds sont formés au sein des étoiles lors de réactions de fusion
nucléaire. Même dans le centre de notre Soleil, l’hydrogène brûle pour former de l’hélium,
tout en libérant de l’énergie. C’est ainsi que des éléments plus lourds sont produits à partir
de l’hélium quand l’étoile est plus massive que notre Soleil. Ce processus de fusion ne
fonctionne, cependant, que jusqu’à la production du fer. Au-delà du fer, les réactions de
fusion n’engendrent plus le moindre gain net d’énergie. Les noyaux plus lourds que le fer ne
peuvent donc pas être produits par un tel mécanisme. Par contre, ils peuvent être formés
lors de la capture de neutrons par des noyaux “semence” qui se désintégreront
radioactivement par la suite.
Deux processus majeurs de captures neutroniques sont invoqués pour expliquer l’origine des
noyaux plus lourds que le fer: le processus de capture lente de neutrons (processus s, pour
“slow”) qui prend place à de faibles densités neutroniques au sein des étoiles lors des
dernières phases d’évolution et le processus de capture rapide de neutrons (processus r,
pour “rapid”) qui nécessite des densités neutroniques extrêmement élevées. Les physiciens
savent que le processus r est responsable de la production de près de la moitié des éléments
plus lourds que le fer (ceux dont la masse atomique A>80), tels le platine, l’or, le thorium et
l’uranium (Fig.1). Cependant, l’objet cosmique susceptible d’abriter un tel processus reste
inconnu jusqu’à ce jour.
“La source de près de la moitié des éléments les plus lourds dans l’Univers est depuis
longtemps un grand mystère” nous confie Hans-Thomas Janka, chercheur à l’Institut
d’Astrophysique Max-Planck (MPA) de Munich. “L’idée la plus populaire était, et pourrait
encore être, qu’ils proviennent d’explosions supernova, correspondant à la fin de vie des
étoiles massives, mais les modèles les plus récents ne soutiennent pas cette idée.”
Un scénario alternatif est fondé sur la coalescence violente d’étoiles à neutrons dans un
système binaire après que les deux étoiles ont fini par entrer en collision quelques millions
d’années après avoir spiralé l’une par rapport à l’autre. Pour la première fois, des chercheurs
du MPA et de l’Université libre de Bruxelles (ULB) ont simulé a l’aide de modèles numériques
détaillés, toutes les phases des processus ayant lieu lors d’une telle coalescence. Ceux-ci
incluent l’évolution de la matière de l’étoile à neutrons durant la collision cosmique, ainsi que
la formation des éléments chimiques dans la faible proportion de matière éjectée lors de tels
événements, impliquant les réactions nucléaires sur plus de 5000 noyaux atomiques.
“En quelques millièmes de seconde après la coalescence, des forces de marée et de pression
éjectent de la matière extrêmement chaude correspondant à la masse de plusieurs Jupiter”,
explique Andreas Bauswein qui a effectué les simulations au MPA (Fig. 2). Dès que le plasma
a refroidi à des températures inférieures à quelque 10 milliards de degrés, une multitude de
réactions nucléaires, dont des désintégrations radioactives, prend place et permet la
production de noyaux lourds. “Les éléments lourds sont “recyclés” plusieurs fois dans des
chaines de réaction impliquant la fission de noyaux super lourds, ce qui rend la distribution
d’abondances finales fortement indépendante des conditions initiales”, ajoute Stéphane
Goriely, expert en astrophysique nucléaire de l’ULB (Fig. 3). Depuis longtemps, les
chercheurs suspectaient que les propriétés nucléaires des atomes impliqués devaient jouer
un rôle dominant car il s’agit là d’une explication naturelle des distributions identiques en
éléments du processus r telles que observées dans de nombreuses étoiles très vieilles et
dans notre Système Solaire.
Les simulations numériques ont montré que la distribution d’abondances des éléments les
plus lourds (dont le nombre de masse A>140) est en excellent accord avec celle observée
dans notre Système Solaire. Si l’on combine les résultats de ces simulations à ceux du
nombre estimé de collisions d’étoiles à neutrons ayant eu lieu dans la Voie Lactée dans le
passé, les chiffres indiquent que de tels événements pourraient en fait être les sources
principales des éléments chimiques les plus lourds dans l’Univers.
L’équipe compte à présent mener à bien de nouvelles études pour encore améliorer les
prédictions théoriques, et ce par des simulations informatiques permettant de suivre les
processus physiques avec davantage de précision. D’autre part, les astronomes cherchent à
détecter les sources célestes qui peuvent être associées à l’éjection de matière radioactive
lors de la coalescence d’étoiles à neutrons. De par l’échauffement engendré par les
décroissances radioactives, l’éjecta devrait briller d’un éclat presque similaire à celui d’une
explosion Supernova, mais seulement pendant quelques jours. Une telle découverte
correspondrait à la première évidence observationnelle de matière riche en éléments r et
fraichement produite dans son site d’origine. La chasse est ouverte !
Les résultats de cette étude sont publiés dans l’Astrophysical Journal de ce 10 septembre.
Contacts :
Dr. Stéphane Goriely:
Institut d'Astronomie et d'Astrophysique, Université Libre de Bruxelles
Tel: +32 2 6502843 ou Email: [email protected]
Dr. Hans-Thomas Janka :
Max-Planck-Institut für Astrophysik, Garching, Germany
Tel.: +49 89 30000-2228 ou Email: hjankampa-garching.mpg.de
Dr. Andreas Bauswein
Max-Planck-Institut für Astrophysik, Garching, Germany
Tel.: +49 89 30000-2236 ou Email: abausweinmpa-garching.mpg.de
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