Première partie : QUESTION RELATIVE AUX TEXTES PROPOSES (11 pts) : À partir du corpus proposé, vous analyserez comment la posture de chacun des narrateurs révèle une vision insolite de chaque situation décrite. Corpus de textes : Texte 1 : Montesquieu (1689-1755) ; Lettres persanes ; Folio ;1973. Texte 2 : Vladimir Maïakovski (1893-1930) ; Du monde j’ai fait le tour ; La Quinzaine Littéraire ; 1998. (traduction Claude Frioux) Texte 3 : Etty Hillesum (1914-1943) ; Lettres de Wesrerbork; Seuil ; 1985. (traduction Philippe Noble) Problématique : En quoi la posture « d’étranger » permet-elle aux différents narrateurs de réaliser une critique des sociétés observées. Proposition de plan : 1 - Des énonciateurs étrangers qui fournissent un témoignage authentique de faits en décalage avec leur culture et leurs valeurs a) Des témoignages authentiques pris sur le vif ou se présentant comme tel b) Témoignages émanant de narrateurs ne partageant pas les références culturelles ou les valeurs des lieux qu’ils visitent c) Des narrateurs qui porte un regard plus ou moins ingénu entre émerveillement et surprise 2- Toutefois l’ingénuité du spectateur s’oriente vers une posture critique a) Ce regard ingénu est empreint d’ironie b) Les lieux visités ne le sont pas par hasard c) Leurs observations en révèlent des aspects inattendus 3- Cette posture des narrateurs découvre un satire plus ou moins violente a) Elle révèle une critique de mœurs b) Ainsi qu’une satire morale et politique c) Qui visent à interroger l’ordre social du moment Grille de notation que je vous soumets : Problématique (autre que recopie de la question) : 2pts Présence d’une introduction conforme aux attentes + une conclusion : 2pts Cohérence de la réaction (plan avec sous-parties, transitions, guidage du lecteur) : 3pts Qualité de l’analyse (compréhension des textes, attention à l’esthétique des textes, à leur style, références littéraires) : 4pts Attente en compréhension : - Les narrateurs sont « étrangers » aux scène décrites, il ne font pas partie du groupe social observé, et cela se voit dans leur manière de parler de ce qu’ils voient - Cette description est ironique et sous couvert de l’ignorance des narrateurs, n’est pas valorisante - Les observations qui précèdent permettent donc de lire ces textes comme une critique des pratiques observées c'est, au moyen de l'ingénuité feinte ou Des énoncitaeurs étrangers qui fournissent un témoignage authentique de faits en décalage avec leur culture et leurs valeurs Entrer chez les gens pour déconcerter leurs idées, leur faire la surprise d'être surpris de ce qu'ils font, de ce qu'ils pensent, et qu'ils n'ont jamais conçu différent, la posture de chacun des narrateurs révèle Axes Les éléments communs aux textes Une lettre, l’outil vraiment adéquat : l’ancrage spatio temporel, l’engagement de sincérité par l’usage de la 1ère personne, la communication à un tiers resté au pays (loin des usages vus par le voyageur) donnent un caractère pris sur le vif et inouï aux observations faites. Elle se présente comme un témoignage authentique. Ecrite par des étrangers qui ne partage pas de références culturelles communes avec ceux qu’ils observent. Leur expression trahit cette distance. Ils portent un regard ingénu entre émerveillement et surprise Regard ingénu mais pas innocent car empreint d’ironie: Toutefois l’ingénuit é du specteur s’oriente vers une posture critique La question La citation de P. Valéry qui oriente la réponse Texte 1 : Montesquieu (1689-1755) ; Lettres persanes ; Folio ;1973. Texte 2 : Vladimir Maïakovski (1893-1930) ; Du monde j’ai fait le tour ; La Quinzaine Littéraire ; 1998. Texte 3 : Etty Hillesum (1914-1943) ; Lettres de Wesrerbork; Seuil ; 1985. Usbek écrit à Ricca de Paris. Ainsi il raconte ce qu’il fait et voit, livre ses impressions. Il recopie même une lettre reçue, qui comme une mise en abyme, dit sans dire, comme la lettre Usbeck dit aussi sans dire. Ce n’est pas vraiment une lettre, mais en tant que correspondant pour la Pravda, ces notes sont destinées à préparer des articles. Etty écrit à ses amis restés à Amsterdam et leur fait part de ce qu’elle découvre du camp de transit. Venant de Perse, contrée fort exotique pour l’époque, Montesquieu provoque un très fort contraste culturel entre les voyageurs et les visités. D’ailleurs Usbeck par son langage manifeste qu’il interprète ce qu’il voit à l’aide de ses propres références culturelles : « des hommes et des femmes qui jouent ensemble des scènes muettes, à peu près comme celles qui sont en usage en notre Perse » ; que les princesses qui y règnent ne sont point cruelles » L’autre procédé consiste en l’usage de périphrase : « une espèce de scène que j'ai entendu appeler comédie ; une estrade, qu'on nomme le théâtre ; de petits réduits, qu'on nomme loges » Usbek fait du « tourisme » et rapporte des faits découverts presque fortuitement : « Je vis hier », qu’il va décrire. La vivacité de la description tente de rendre toutes les dimensions du « spectacle » elle épouse la posture du spectateur néophyte et naïf. Il rapporte ce qu’il entend (« On dit que ») et se laisse conduire par les autochtones (« Un de mes amis me mena »). Il rapporte même la lettre que lui adresse une danseuse, feignant de ne pas y voir ce qu’elle signifie réellement. Maïakosvki est curieux d’un système politique qui est différent de celui de son pays, qui vient de vivre une Révolution. Il veut voir et s’interroge à propos de ce qui se passe : « Qui est-ce ? » Il désigne les huissiers par leur attributs d’apparat : des huissiers médaillés ; tout luisants de chaînes » Il désigne même l’organe de direction du parti communiste français avec un mot russe : « les membres du Komintern ». Il croit même voir un général russe. Etty vient au camp non en tant que détenue mais pour faire de l’aide sociale aux détenus juifs ne sont pas originaires des Pays-Bas. Elle découvre le camp, et procède à une sorte d’inventaire, introsuit par l’anaphore du présentatif « il y a ». A-t-on déjà constitué un mini état juif ? Il semble dérisoire et inhospitalier. Ces mots introduisant la lettre marque une sorte de désarroi implicite : « Oui – Westerbork » Le poète déclare « se précipiter pour voir l'organe suprême de la libre république démocratique ». Les mentions qu’il fait de la difficulté à accéder au lieu se lisent à travers des expressions ccomme : « je ne peux pas présenter mon laissez-passer ; Je passe à travers une dizaine d'instances ». La série de questions au début du texte montre qu’il ne comprend pas ce qui se passe, ni les rituels qui encadrent cette séance au Palais Bourbon. Il qualifie même ce qu’il voit de spectacle. Assez vite il manifeste l’ennui inspiré par ce qu’il voit. Ennui contagieux puisque le public comme le poète quittent rapidement – c’est l’impression que laisse cette narration brève – les lieux. La description du camp semble évoquer une petite ville dans laquelle rien ne manque et qui se développe dans un souci de bien être pour tous. Rien n’y manque : « un orphelinat, une synagogue, une morgue et une fabrique de semelles en pleine expansion ; un asile d'aliénés ; une salle de théâtre » Usbek ne manquent pas de formules ironiques « une chose assez singulière ; une espèce de scène ; une comédie particulière ; dans la loge où se déshabillait » et même de litotes évocatrices : « les princesses qui y rè- Etty sait qu’elle va dans un camp qui n’a pas finalité à assurer un vie sereine à ses habitants. Voir les guillemets utilisé pour le terme résident. Elle le présente comme « foyer de souffrance juive ». Elle aussi use de réelle, gnent ne sont point cruelles ; Nous fîmes si bien connaissance, que le lendemain je reçus d'elle cette lettre » Dans des lieux non choisis au hasard une vision insolite de chaque situation décrite Cette posture des narrateurs découvre un satire plus ou moins violente Qui vise une satire sociale et politique, relativisant l’image positive que les sociétés se donnent donner à ressentir toute la relativité d'une civilisation, d'une confiance habituelle dans l'ordre établi Qui montre autre chose que ce qui est attendu Une satire de moeurs Une satire politique et morale Qui interroge les hiérarchies établies Usbek se rend dans les hauts-lieux de la culture française (La Comédie française et l’Opéra) et qui sont fréquentés par la noblesse et la grande bourgeoisie qui occupent les loges, des lettrés moins fortunés qui sont au parterre. Au XVIII° siècle la culture française rayonne en Europe. Usbek nous montre que dans ces lieux de culture, le spectacle est dans la salle : on y vient pour se montrer et être vu, pour intriguer des aventures amoureuses ou en nouer avec les comédiennes. Les termes employés pour désigner les spectateurs relèvent du lexique de la comédie : « une amante affligée qui exprime sa langueur avec des yeux vifs et un air passionné ; toutes les passions sont peintes sur les visages, et exprimées avec une éloquence ; acteurs » L’hypocrisie y règne et Montesquieu la signifie de deux façons : en décrivant le travail des coursiers et messagers relevant de l’exploit physique et du don d’ubiquité et en signalant un accessoire important pour la dissimulation des petits mots échangés : « un manchon, par modestie, pour cacher leurs bras ». D’une part ce lieu exacerbe les rapports humains, puisque « la bagatelle » autorise tout « On dit que la connaissance la plus légère met un homme en droit d'en étouffer un autre », d’autre part la soutane ne cache pas des hommes vertueux. Enfin le faible salaire des comédiennes les encourage à rechercher des « protecteurs ». Montesquieu avec cette lettre poursuit son œuvre critique de la société de son époque, où ce qui en fait figure d’élite se disperse dans une oisiveté ridicule. L’ironie pointe dans cette phrase précédent l’annonce du départ : « Sans vouloir nous faire de compliments, il faut bien dire que même nos jeunes soviets pourraient en remontrer à cette Chambre pour ce qui est du sérieux dans les affaires. » De même que la valeur péjorative du terme « politicailleur » souligne la vanité de ce qui pourrait même faire l’intérêt des débats. Maïakovski vient à Paris dans l’intention d’être critique envers un pays qui n’a pas fait de révolution bolchevique. Dès les premiers mots sybillins de son texte cette posture s’explicite : « voir l'organe suprême de la libre république démocratique » tournures ironiques : « La petite maison d'opérette ; Les barbelés ne sont qu'une question de point de vue » La coexistence de plusieurs nationalités est figurée par « la tour de Babel » vouée à la destruction divine. La captivité est relativisé par cette formule : « Les barbelés ne sont qu'une question de point de vue » Maïakovski ne voit à l’Assemblée Nationale qu’un décorum chargé où se joue un spectacle protocolaire, dans lequel des députés dans des rangs clairsemés, ne s’écoutent pas, et sont occupés à autre chose que les enjeux du débat. La relation de cette visite au parlement, laisse percer l’idée que le protocole, l’agitation du public, l’intérêt pour voir telle ou telle personnalité constituent l’essentiel de ce qui s’y passe. Dans ce lieu sordide se déroule « des crises de cabinet en miniature » de fait un simulacre de vie normale. « Il y a de la boue, tant de boue qu'il faut avoir un soleil intérieur » Le texte met en évidence deux noms députés qui exprime un certain paradoxe : un député royaliste et un avocat célèbre pour avoir défendu les criminels les plus confirmés de l’époque. Comme en soulignant l’absence des communistes en déplacement à Moscou, il questionne leur capacité à faire changer la société française. On peut lire dans ce texte une pique envoyé à la France qui fonde sa république sur sa Révolution de 1789 et méprise une révolution russe qui prétend renouveler les formes démocratiques. Elle montre l’hypocrisie politique et une collusion entre les gouvernents allemands et néerlandais en mentionnant la présence double commandement nuancé habillement par cette formule : « Le premier a plus d'ancienneté, le second plus d'autorité » Ce camp construit au départ pour permettre aux juifs de vivre en attendant l’obtention d’un territoire en Palestine, se transforme en antichambre des camps d’extermination, puisque désormais il y a des convois chaque semaine. Le refus de voir la réalité se lit dans des observations comme celle-ci : « « Il n'y avait ici pas un papillon, pas une fleurette, pas le moindre vermisseau », m'assurent, tout excités, les plus anciens « résidents » du camp. » Et les habitants « des hautes villas qui se dressent tels des geôliers de l'autre côté de la clôture » peuvent-ils vivre en paix ? Quel est le sens d’une action humanitaire : faut-il laisser ces gens mourir deux fois : un lente agonie dans le camp de transit et la mort à Auschwitz, ou leur apporter une aide dérisoire ? Se résoudre à fermer les yeux la fonction de ce camp ?