76. Portrait d’homme (Ptolémée Apion ?)
Ce magnique portrait en bronze est un excellent exemple de la technique de
moulage à la cire perdue, encore utilisée à notre époque par des artistes tels que
Giacometti ou Rodin. Le modèle réalisé en cire est recouvert par deux blocs d’argile
réfractaire an d’y laisser son empreinte en négatif. Lors de la cuisson de l’argile, la
cire fond et s’échappe par des canaux percés dans les blocs. Le bronze est ensuite
coulé dans cette matrice an de réaliser l’épreuve nale.
Ce portrait, découvert dans la Villa des Papyrus à Herculanum, en Campanie (Italie),
a longtemps été identié à Ptolémée Apion, ls de Ptolémée VII. Mais des études
récentes ont permis de découvrir sur le pilastre d’origine une inscription qui l’identierait
à Thepsis, musicien à la cour de Ptolémée Ier. Il est également avancé qu’il pourrait s’agir d’un souverain
d’Arabie, leur silhouette sur les pièces de monnaie arborant le même type de coiffure, insolite dans le
monde hellénistique.
Cette tête présente des traits classiques, immortalisés dans une jeunesse et une beauté sereine et
distante. L’excellence des ateliers des bronziers grecs apparaît ici, de même que le souci d’un naturalisme
exacerbé. Le visage et la calotte crânienne ont été travaillés dans la technique du bronze à la cire perdue,
et les mèches des cheveux rapportées en cuivre. Le cuivre étant un métal plus facile à travailler, il a été ici
utilisé sous forme de lamelles enroulées autour d’un morceau de bois pour imiter les boucles des cheveux.
Le bronze, sorti des ateliers des fondeurs, présente une couleur dorée, le cuivre une teinte rouge plus soutenue :
de cette manière, l’artiste est parvenu à jouer sur les teintes pour immortaliser le portrait du modèle.
164. Tête de femme portant un diadème
Cette fresque décorait le mur d’une domus, une demeure, de la cité romaine d’Herculanum, dans la
région du Vésuve. On retrouve sur ce portrait la coiffure typiquement hellénistique
qu’arborait Cléopâtre VII sur la monnaie d’Ascalon et sur le buste de romain : les
cheveux coiffés en melon sont ramenés en chignon sur la nuque et retenus par un
diadème à bandeau décoré d’un motif de méandre. Le peintre a souhaité, grâce à
sa palette (ensemble des couleurs utilisées), imiter les effets visuels des camées. Le
visage de la femme se détache, à l’aide d’un pigment blanc rehaussé de rose plus
soutenu, sur un fond sombre. Les touches, rapides, fournissent un sentiment de
dynamisme et de vitalité à ce portrait.
Ce type de représentation, peut-être un portrait de la reine, des années après sa
mort et si loin d’Alexandrie, illustre l’engouement qu’a connu le monde romain
pour l’Égypte des Ptolémées, dès le séjour de Cléopâtre à Rome puis sous le règne
d’Auguste. Les femmes romaines arboraient alors par mode ce type de coiffure « à l’égyptienne », bien
qu’il s’agisse en réalité, nous l’avons vu, d’une coiffure hellénistique, et importent des recettes de beauté
orientales pour imiter le soin que Cléopâtre portait à son apparence.
186. Trapézophore
Un trapézophore est un pied de table, servant
à soutenir un plateau. Bien que la technique du
damasquinage (incrustation de métaux précieux
dans un autre métal, ici or et argent dans du
bronze) soit spécique de l’artisanat alexandrin, de
nombreux éléments attirent l’attention : le sphinx
porte bien le némès des pharaons surmonté
de l’uræus, mais il présente également des
membres antérieurs humains, ce qui laisse
penser qu’il a été réalisé dans un atelier
romain. Ces mains tendues sur le devant
servaient probablement à protéger la
amme d’un lumignon placé sur la base.
On remarque également sur la partie
supérieure de l’objet un buste d’Athéna, la
déesse grecque de la sagesse, portant un casque
à cimier et une tête de gorgone sur le buste.
Ce « mélange des genres » est un très bon exemple
de l’« égyptomanie », où les élites campaniennes
et romaines cherchent à acquérir des objets
exotiques inspirés de l’Égypte, symbole de luxe et
de richesse. Ces motifs sont considérés comme
uniquement décoratifs. Ainsi le sphinx est, à
Pompéi, utilisé comme décor de jardin et
n’est plus la représentation de la force et de
la puissance du pharaon.