Virus oncogènes chez l`homme

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Cancérologie 19-20, Dr. Heidi BARTH
Cours du 07/10/11 de 14h à 16h
Groupe 10
Master physiopathologie
Geoffrey GINOT et Stéphane GIORGIUTTI
________________________________________________________________________________
Cancérologie virale
15% des cancers ont une étiologie virale et ces cancers viraux sont la cause d’environ 1.5
millions de nouveaux cas par an et de 900 000 décès par an dans le monde.
Les cancers viraux associés sont un problème de santé public :
- Le papillomavirus est associé à près de 90% des cancers du col
- 75 % de la totalité des hépatocarcinomes sont liés au virus des hépatites B et C
On distingue cinq catégories de virus oncogènes que ce soit des virus à ARN ou des virus à
ADN.
Virus oncogènes chez l’homme
Famille
Virus à ARN Retroviridae
Exemple
Hôte
naturel
Mode d’infection
Pouvoir
oncogène
HTLV-1
Homme
Chronique
leucémies T
Virus de l’hépatite C
Homme
Chronique
carninomes
hépatocellulaires
Virus à ADN Papovaviridae
Papillomavirus de
types 16, 18
Homme
Abortive
cancer du col
Herpesviridae
Virus Epstein-Barr
Homme
Latente
lymphomes B,
carcinomes
Herpèsvirus humain 8
Homme
Latente
maladie de
Kaposi,
lymphomes
Virus de l’hépatite B
Homme
Chronique
carcinomes
hépatocellulaires
Flaviviridae
Hepadnaviridae
La cancérologie virale est un sujet très complexe et difficile à résumer en un cours  on en
étudiera trois différents : HTLV-1, EBV et HPV.
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Il faut connaître :




les protéines virales principalement impliquées dans la cancérogenèse
les mécanismes de la transformation cellulaire
les étapes de la cancérogenèse virale
le type de cancer associé au virus
I) HTLV-1 : Human T cell leukemia virus
C’est le premier virus cancérigène isolé en 1980 dans le laboratoire de Robert Gallo aux
Etats-Unis. Il a une taille d’environ 100 nm.
Voici une photographie de microscopie électronique
avec des particules virales de l’HTLV dans l’espace
extracellulaire d’une lignée cellulaire T.
A. Structure du virus
Il appartient à la famille des retroviridae (comme l’HIV) du genre deltaretrovirus
Son génome est constitué de 2 molécules d’ARN de polarité linéaire. Ces molécules d’ARN
se trouvent dans une nucléocapside dans laquelle on trouvera également les enzymes virales
(intégrase, transcriptase inverse et la protéase). L’ensemble est entouré d’une membrane
lipidique dans laquelle sont intégrés des glycoprotéines de surface (gp21 et gp46)
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L’organisation génomique du virus.
Ce virus possède les gènes gag, pol et env.
- Gap code pour les protéines de la nucléocapside
- Pol pour la polymérase (protéines de la réplication et de l’intégration de l’ARN)
- Env pour les glycoprotéines d’enveloppes.
Le génome est encadré par deux régions non codantes dites LTR (long terminal repeat)
indispensables à l’intégration dans l’ADN de la cellule et dans les signaux d’initiation et d’arrêt
de la transcription.
On retrouve deux protéines régulatrices
- tax : régulateurs de l’expression virale et des gènes cellulaires.
- rex : passage des ARNm vers le cytoplasme
Des structures impliquées dans l’entrée du virus…
Les principales cibles du virus sont les lymphocytes T CD4+.
Les récepteurs impliqués dans le processus d’entrée sont :
- HSPG (héparane sulfates protéoglycans) : semble intervenir dans l’absorption de la
particule virale à la surface des Lymphocytes CD4+
- NRP1 (neuropiline 1) : liaison avec HSPG
- GLUT-1 (transporteur du glucose) : formation du complexe entre NRP1 et GLUT-1
pour internalisation de la particule virale dans la cellule CD4+.
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Après internalisation, la nucléocapside est dégradée, l’ADN est libéré est retrotransrit en
ADN. L’ADN double brin est transporté dans le noyau et s’intègre dans l’ADN génomique
pour former un provirus stable. Chez la plupart des personnes, cela reste latent. Parfois après
une stimulation de la transcription, il y a transcription des protéines virales, qui formées,
peuventt être libérée par bourgeonnement.
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B. Epidémiologie et modes de transmission :
20 millions de personnes sont infectées dans le monde par ce virus
Il est endémique dans certaines parties du Japon, Amérique du Sud, Afrique et Caraïbes.
Le virus se transmet :
- par voie parentérale (toxicomanie intraveineuse, transfusion)
- par voie sexuelle
- par voie verticale (de la mère à l’enfant lors de l’allaitement)
Les particules virales libres ne sont pas très infectieuses mais le virus se transmet très
efficacement par voie cellulaire (par passage de lymphocytes CD4+ infectés). Le virus se
transmet donc par contact de cellule à cellule.
En fait, le virus induit la formation d’une synapse virologique.
Lors de la rencontre entre une cellule infectée et saines, Les protéines Gag et Tax
s’accumulent au niveau de cette synapse  voie de la transmission très efficace.
3 ( ??) molécules sont importantes pour la synapse virologique : ICAM-1 (molécules
d’adhésion intercellulaire), LFA-1 (antigène associé à la fonction des lymphocytes)
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C. Pouvoir pathogène du virus
Ce virus est responsable de deux maladies :
 La paraparésie spastique tropicale (TSP) = maladie neuro-dégénérative (HAM) du SNC
 La leucémie/lymphome T de l’adulte : prolifération maligne de Lymphocytes T-CD4+
activés (cellule anormale). Le noyau est « comme une fleur » c’est-à dire multisegmenté (voir
l’image)
La voie de transmission est un facteur de risque de développer l’une ou l’autre de ces
maladies. La transmission sanguine ou sexuelle est responsable de la TPS (1 mois à 4 ans
après la primo-infection). Plus fréquemment, on aura une leucémie après transmission par
voie verticale lors de l’allaitement. La leucémie apparaît 30 à 50 ans après la primo-infection.
Histoire naturelle de la leucémie T de l’adulte / HTLV-1
Environ 2-3 % de la population infectée par HTLV-1 développe une leucémie ce qui
correspond à 1 cas par an pour 1000 porteurs. Après une latence de 30 à 50 ans.
Les facteurs de risque sont mal connus sauf le mode de contamination. (On a des facteurs
génétiques, environnementaux et viraux)
Les formes aigu de la leucémie T sont rapidement mortelles : de l’ordre de 6 mois de survie.
Les signes cliniques associés sont
- Une lymphoadénopathie
- Une hépatomégalie
- Une splénomégalie
- Des lésions cutanées.
Il n’y a pas de traitement efficace ni de vaccin.
Au Japon, il y a 700 nouveaux cas de leucémies T par an.
 L’infection peut induire une prolifération maligne des lymphocytes T. Quel est le
mécanisme de la transformation ?
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D. Les mécanismes de la prolifération maligne
Le virus persiste dans la cellule infectée par un provirus mais l’ADN proviral n’est pas intégré
à proximité d’un proto-oncogène ni d’un gène suppresseur de tumeur. Il ne code pas non plus
pour un oncogène viral.
En fait, le virus code pour une protéine régulatrice qui va interagir avec des protéines
cellulaires, ce qui peut modifier des voies de signalisation cellulaire.
Par exemple, la protéine Tax active les effecteurs du cycle cellulaire et réprime les inhibiteurs
de ce cycle.
Un rappel sur le cycle cellulaire :
4 phases : G1, S, G2 et M
Les complexes cyclines dépendantes des kinases sont les activateurs ou effecteurs du cycle
viral. Ces complexes phosphoryle Rb ce qui va libérer le facteur E2 nécessaire pour activer
les gènes de la phase S.
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Actions de Tax :
TAX stimule
Conséquences
•
les activateurs du cycle cellulaire
(CDK2, CDK4)
→ perturbe le point de contrôle
G1/S, hyper-réplication d’ADN
•
activation transcriptionnelle de
gènes de cytokines (Il-2) et de leur
récepteurs (IL-2R)
→
stimule
la
prolifération,
l’activation et la survie de la cellule
TAX réprime
• les inhibiteurs du cycle cellulaire
(p15, p16, ..)
→ accélère la progression de la
phase G1 à la phase S, l’activation
du cycle cellulaire de façon
permanente
• le suppresseur de tumeur p53
(inhibiteur du cycle cellulaire
inducteur de l’apoptose)
→ l'inhibition de l'apoptose,
favorisant la survie de la cellules
cancéreuse
• l’ADN polymérase B
( la réparation de l’ADN)
et
→ alteration génetiques, instabilité
génomique
Donc Tax est très importante dans la transformation cellulaire, elle recrute de nombreuses
protéines cellulaires. Elle active des facteurs impliqués dans la réplication, la réparation de
l’ADN, empêche l’arrêt de cycle cellulaire et l’apoptose. Donc la réplication cellulaire est
incontrôlée et très importante, favorisant ainsi l’instabilité génomique et l’immortalisation des
cellules.
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Voici un schéma récapitulatif :
Il y a donc une expansion polyclonale des cellules après plusieurs mécanismes impliqués
dans la transformation.
Quand la leucémie est présente, il est intéressant de voir que l’expression de la protéine Tax
diminue avec une extinction progressive de l’activité du promoteur de la protéine Tax.
En fait, la réponse cellulaire T est très active et cette protéine Tax est une cible de la réaction
immunitaire. Les lymphocytes CD8+ reconnaissent et détruisent les cellules CD4+ infectées.
Tax donne des avantages à la cellule infectée puis elle diminue.
On pense que Tax est importante dans les étapes préleucémiques mais une autre protéine
joue un rôle au stade leucémique : la protéine HBZ
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La protéine HBZ
La protéine HBZ a été identifiée récemment. Elle est traduite à partir d’un ARN antisens
(négatif) du virus. Elle est exprimée dans les cellules leucémiques (ALT). C’est un facteur de
transcription, qui augmente la prolifération des cellules leucémiques et contrôle l’expression
de la protéine Tax.
Elle joue un rôle essentiel dans la partie tardive de la leucémie.
E. Rappels
•
•
•
•
•
Premier rétrovirus oncogène découvert chez l’homme en 1980
HLTV1 se transmet par contact cellule-cellule
HTLV1 est l’agent étiologique de deux maladies très sévères: ATL, TSP/HAM
La TAX joue un rôle fondamental dans la transformation cellulaire et lors des étapes
préleucémiques
La protéine HBZ joue un rôle essentiel au cours des phases tardives du processus
leucémogène.
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II) Le virus Epstein-Barr (EBV)
Ce virus a été découvert en 1964 dans une lignée du lymphome de Burkitt qui est un cancer
de la joue.
On voit ici une particule de ce
virus au MET.
A. Structure du virus
C’est un virus enveloppé qui fait environ 150nm.
Il appartient à la famille des herpesviridae qui compte actuellement 8 membres et 3 sousfamille (α-herpesvirinae, β-herpesvirinae et γ-herpersvirinae)
EBV appartient à la sous-famille gamma avec HHV8.
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C’est un virus à ADN. Cet ADN est
situé dans une nucléocapside
(VCA) entouré d’une membrane
lipidique avec des glycoprotéines.
L’enveloppe est séparée de la
nucléocapside par le tégument qui
est une structure protéique
fibrillaire.
L’organisation génomique du virus.
Ce virus possède un ADN double brin de polarité positive d’environ 172 kbp et toujours sous
forme linéaire.
Il est organisé en une série de domaines de séquences uniques (U1 à U5), de domaines
répétés internes (IR1 à IR4) et de domaines répétés terminaux (TR).
Il code pour environ 120 protéines voir plus (nombreux)
Les gènes sont exprimés aux différentes phases de l’infection.
- Dans la phase de latence, le virus exprime les gènes de latence.
- Dans la phase lytique (cycle de production des virions), on distingue 3 types de gènes :
o des gènes très précoces
o précoces
o tardifs.
Comme les autres herpes-virus l’infection commence par la fixation de la particule virale sur
la membrane, puis dans le cytoplasme la nucléocapside est transportée jusqu’à la membrane
nucléaire. L’ADN est libéré et transporté dans le noyau.
Dans le noyau, l’ADN se circularise sous forme d’un épisome et un programme de réplication
commence. Ce programme est une expression successive de trois lots de gènes viraux.
Les gènes très précoces codent pour les facteurs de transcription qui vont stimuler
l’expression des gènes précoces. Ceux-ci codent pour des enzymes de synthèse virale et de
réplication de l’ADN viral. Puis à partir des nouvelles molécules d’ADN sont exprimés les
gènes tardifs : ce sont la nucléocapside et les glycoprotéines, à partir de là la particule virale
est assemblée dans le noyau et libérée par bourgeonnement de la membrane nucléaire.
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B. Propriétés biologiques :
C’est un virus ubiquitaire plus de 80 % de la population mondiale adulte a été infectée. Il se
transmet par la salive, mais il est également transmissible après une transplantation d’organe
ou une greffe de moelle osseuse car l’EBV se trouve dans les cellules de donneurs sains.
Il a un double tropisme infectant 2 types de cellules :
- les cellules épithéliales
- les lymphocytes T
Dans les cellules épithéliales le cycle lytique (ou productif) est présent, caractérisé par la lyse
de la cellule et production des virions. Dans les LB surtout dans une phase de latence.
La phase de latence
Donc dans le LB on distingue une infection productive et la phase de latence pendant laquelle
le génome viral persiste dans le noyau sous forme d’ADN circulaire non intégré (épisome) Il
n’y a pas de réplication virale, durant la phase de latence le nombre de protéines exprimés
est faible, il s’agit des protéines de latence.
On distingue 4 types de latence en fonction des différents gènes exprimés.
Les différents programmes de latence aboutissent quelquefois à une lymphoprolifération ou
une immortalisation cellulaire.
Etapes cellulaires de l’infection
EBV infecte le LB et le récepteur d’entrée est le CD21 (récepteur
du complément), le génome se circularise sous forme épisomale.
Puis expression des gènes de latences  9 protéines de latence
dont 6 nucléaires (EBNA 1,2,3A,3B,3C) et 3 protéines
membranaires (LMP1,2,3). Deux ARN sont produits, EBER A et 2
mais ils sont non codants.
En 48h, l’expression des gènes de latence permet la prolifération des lymphocytes B.
A la fin, on obtient ainsi une lignée lymphoblastoïde caractérisée par l’expression des
marqueurs d’activation et des molécules d’adhésion.
Phase de latence III : tous les gènes de latence sont exprimés.
La protéine EBNA 1 est aussi une protéine très importante car elle maintien le génome sous
forme épisomale dans la cellule infectée et est aussi impliquée dans la réplication.
Le virus veut persister donc il est important que chaque cellule fille possède le génome. La
protéine EBNA 1 assure que l’ADN viral de l’épisome se réplique de façon synchrone et que
l’épisome soit présent dans toutes les cellules filles.
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Le passage de la latence à un cycle viral productif/phase lytique
En général, l’EBV persiste dans les cellules B mémoires du sang périphériques. In vitro on
observe le passage de production virale ou cycle lytique spontanément ou après activation
(observation in vitro). In vivo, cela reste mal connu.
Le passage de la phase de latence vers un cycle réplicatif est possible. On sait qu’une
protéine est très importante pour ce passage : ZEBRA. Cette protéine fonctionne comme un
commutateur. Quand elle est active, elle permet la synthèse des protéines précoces puis
l’ADN se réplique ce qui est suivi par la synthèse des protéines tardives et enfin la phase
lytique est induite et la cellule B produit des virions.
L’EBV a 2 programmes, une phase de latence et une phase lytique. Pour les deux
programmes l’EBV utilise 2 origines de réplication distinctes :
- phase de latence : origine P (pour plasmide)
- phase lytique : origine L qui assure la production de nouvelles molécules d’ADN et de
particules virales
EBV, transformation cellulaire et oncogénèse
L’infection par le virus d’EBV de lymphocytes B humaines
entraine l’établissement d’une lignée lymphoblastoïde B. Les
protéines de latence LMP1 et EBNA-2 jouent un rôle dans
l’immortalisation et activent la prolifération et augmentent la
survie des cellules infectées.
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Rôle de LMP1 dans la transformation cellulaire
LMP1 interagit avec les voies de signalisation et d’activation cellulaire et « re-programme »
les lymphocytes B.
Cette protéine est localisée dans la membrane plasmique, analogue des CD40 (un membre
de la famille du récepteur du TNF). Ce qui mime la signalisation CD40-CD40 ligand  voie
de signalisation NF-KB qui est un facteur de transcription majeur pour la croissance et la
survie des cellules. L’activation des voies de signalisation NF-KB protège en principe les
cellules de l’apoptose et augmente la prolifération cellulaire.
Effets de cette activation :
- Dérégulation du cycle cellulaire
- Inhibition de l’apoptose : surexpression des protéines anti-apoptotique (BCL2, MCL1, BFL-1,
A20)
- Dérégulation de l’expression cytokinique (IL-8, 6, 10) et de l’expression des marqueurs
d’activation et des molécules d’adhésion.
En conclusion LMP1 est indispensable à l’initiation et au maintien de la prolifération cellulaire
Rôle d’EBNA2 dans la transformation cellulaire
C’est un équivalent fonctionnel de Notch-1 qui est un facteur de transcription qui se fixe sur
l’ADN par l’intermédiaire de RBP-Jk.
EBNA remplace Notch-1 et stimule la transcription de gène cellulaire stimulant les promoteurs
cellulaires et viraux.
- Transactive les promoteurs viraux : LMP1
- Module l’expression de gènes cellulaires (l’oncogène c-fgr, tyrosine kinase impliqué
dans la régulation de la croissance cellulaire)
- Régulation du cycle cellulaire (active CDK2, facilite l’entrée des cellules en phase
G1/S)
EBNA3A et EBNA3C jouent aussi un rôle dans le cycle cellulaire mais ce n’est pas clair.
 Connaître les deux protéines +++
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C. Physiopathologie de l’infection
Transmission par la salive
Infection et multiplication dans les cellules épithéliales de l’oropharynx.
Infection des lymphocytes B dans les organes lymphoïdes de l’oropharynx, induisant une
expansion polyclonale. Mais le contrôle immunitaire est très efficace et l’infection est
contrôlée.
L’EBV échappe au système immunitaire car dans le lymphocyte B mémoire il ne reste aucune
protéine de latence exprimée.  si aucune protéine virale n’est exprimée, la réponse
immunitaire ne peut pas rencontrer de cellule alors le virus persiste toute la vie et peut être
réactivé mais en général la réactivation est asymptomatique car le système immunitaire est
très efficace.
Manifestations cliniques
La majorité des primo-infections touchent les enfants et sont généralement asymptomatiques.
Quand l’infection survient chez l’adolescent ou l’adulte jeune dans 50% des cas on a une
mononucléose infectieuse. C’est une maladie lymphoproliférative B généralisée et transitoire
après une phase d’incubation de 30 à 50 jours.
Les signes biologiques sont : une hyperlymphocytose sanguine avec présence de
lymphocytes atypiques correspondant en majorité à des lymphocytes CD8 activés.
La réponse immunitaire humorale est forte et se caractérise par l’apparition des anticorps
dirigés contre les protéines de latence et précoces.
La cellule LT CD8+ contrôle l’infection car on trouve une réponse cellulaire T forte et
oligoclonale dirigée contre les différents antigènes de latence (EBNA2, LMP1, LMP2 et
surtout EBNA3A, 3B,3C) ainsi que les antigènes du cycle lytique (MA). Les cellules T CD8+
peuvent atteindre 48% des cellules CD8+ totaux au cours de la primo-infection.
-
EBV a des stratégies pour échapper au contrôle immunitaire.
LMP1 stimule la synthèse de l‘IL-10, cytokine immunosuppressive de la réponse T
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-
BRCF (gène tardif) : code pour un homologue viral de l’IL-10
EBNA1 seul protéine indispensable à la survie du virus ne peut pas être présentée
dans les molécules CMHI
L’EBV survit à long terme à l’état latent dans les cellules B mémoires, sans aucune
conséquence pathologique apparente pour l’hôte infecté mais il existe des cancers
liés à l’EBV.
- Le lymphome de Burkitt :
Associé à l’EBV dans 95% des cas
- Le carcinome nasopharyngé
Associé à l’EBV dans 100% des cas
- La maladie de Hodgkin :
Associé à l’EBV dans 40% des cas
- Le lymphome B chez les sujets immunodéprimés (des greffés)
Le lymphome de Burkitt :
C’est une tumeur de la joue :
- Prolifération maligne d’un clone de lymphocyte B
- Incidence la plus élevée : Enfants de 6 – 9 ans surtout de sexe masculin
- Distribution géographique : Zones endémiques : Nigéri, Ouganda, Mozambique,
Nouvelle Guinée, Malaisie, Brésil = régions équatoriales chaudes et humides, où le
paludisme est aussi endémique
- Critères d’association à l’EBV : expression des marqueurs viraux dans les cellules
tumorales, expression de EBNA I. On observe une réponse immunologique spécifique
EBV avec titres élevés.
Cofacteurs
On ne connait pas les mécanismes exacts de l’émergence de la tumeur mais on pense que le
paludisme est un cofacteur car il a la même répartition géographique et est aussi un
activateur des LB et diminue les LT cytotoxiques.
Anomalie chromosomique : une translocation qui fait passer l’oncogène myc situé dans le
8ème chromosome sous contrôle des très puissants promoteurs des immunoglobulines des
chromosomes 14, 2 ou 22.
30% présentent aussi une mutation du gène répresseur de tumeur de la p53.
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Hypothèses :
Le mécanisme n’est pas clair mais l’immortalisation par l’EBV et le paludisme peut augmenter
le pool de Lymphocytes B et le risque d’accident cytogénétiques.
Le cancer du nasopharynx :
C’est une tumeur épithéliale du nasopharynx
Prévalence élevée en Afrique du Nord, Asie du Sud, Chine et Arctique.
Facteur d’association
* Marqueurs viraux dans les cellules tumorales : Expression de EBNA1,
aaaaaaLMP1 et/ou LMP2A,B (Latence II)
* Augmentation des taux d’anticorps anti-EBV.
On a observé une incidence plus élevée avec certaines habitudes culturelles : consommation
de poissons salés (rôle de cofacteurs ? car on sait que les nitrosodiméthylamines peuvent
induire des cancers)
-
D. Résumé :
-
L’EBV est un herpesvirus qui infecte 95% de la population mondiale
L’infection est généralement asymptomatique chez l’enfant
Responsable du développement de la mononucléose infectieuse chez le jeune adulte
Le virus survit à long terme à l’état latent dans les cellules B mémoires
Les protéines de latence LMP1 et EBNA-2 sont indispensables au processus
d’immortalisation
Le virus est associé au développement de certaines formes de cancer
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III)
Le papillomavirus humain (HPV)
A. Structure du virus
Virus de petite taille de 45 à 55 nm de diamètre, non enveloppé. Ce sont des virus nus qui
possèdent une capside icosaédrique à symétrie cubique composées de 72 capsomères.
Le papillomavirus contient un ADN double brin de 8000 paires de bases, circulaire, superenroulé.
Le génome est entouré d’une nucléocapside constituée de deux protéines : L1 (protéine
majeure de la capside) et L2 (protéine mineure de la capside).
Les papillomavirus sont largement représentés dans la nature. Les papillomaviridae sont une
très grande famille classée en 8 genres et 10 espèces et plus de 100 génotypes (génotypage
basé sur les séquences de L1, 10% de différence définissant un nouveau génotype)
Plus de 80 génotypes humains découverts.
B. Epidémiologie et modes de transmission :
L’HPV constitue un problème majeur de santé publique car près de 100% des cancers du col
(99.7% pour être précis) et des verrues génitales sont dues à ce virus.
Transmission :
Il se transmet :
- Par voie sexuelle
- Par contact direct car ce virus est très résistant (linge, sol des piscines)
- Transmission in utero a travers le placenta ou à l’accouchement.
La transmission sexuelle :
Le pic de prévalence se situe entre 20 et 25 ans, près de 40% de femmes ont été infectées
par un HPV.
Plus de 50 % des femmes sexuellement actives sont susceptibles d’être infectées par un ou
plusieurs HPV à un moment de leur vie.
Prévalence plus faible chez l’homme (20% à 80% mais les études sont plus rares)
En 2008, Harald zur Hausen obtient le prix Nobel de médecine pour avoir identifié ce virus.
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L’infection à HPV est le plus souvent transitoire, dans la majorité des cas, il y a élimination
dans la 1ère ou 2eme année. Mais chez certaine femme, il persiste pouvant donner lieu à des
lésions. L’évolution vers le cancer est longue 10 à 20 ans voir plus.
Epidémiologie du cancer du col de l’utérus :
Le cancer du col de l’utérus est le 2ème cancer le plus fréquent dans le monde avec 500000
nouveaux cas par an et 250000 à 300000 décès par an.
En France, on a 3600 nouveaux cas et près de 1600 décès par an
L’infection est essentielle au développement du cancer mais il y a des cofacteurs pour la
persistance du virus et l’évolution vers le cancer. Quels sont les facteurs de risques ?
 L’infection avec un HPB de génotype 16, 18
 Des facteurs endogènes comme l’immunosuppression (induite par des médicaments ou
l’infection au VIH) ainsi que le nombre de partenaires sexuelles (+++)
 Des facteurs exogènes : tabac et les traitements hormonaux ( ?)
On distingue des papillomavirus a haut risque, haut risque probable et bas risque
génotype 16 et 18 ++++ facteur de risque d’évolution d’une lésion de bas grade vers une
lésion de haut grade du cancer de l’utérus.
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Figure de prévalence :
Les HPV de bas risque sont les types 6 et 11 surtout, responsables de 90% des verrues
génitales. On les trouve aussi dans les lésions cervicales de bas grade.
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C. Les mécanismes de la prolifération maligne
L’organisation génomique de l’HPV 16:
Le génome est un ADN circularisé où l’on distingue une région E et une région L.
La région E code pour des protéines non structurales (E1 à E7)
La région L code pour les protéines de capsides (L1 et L2)
En plus, on trouve une région régulatrice LCR qui contrôle la réplication et la transcription
des gènes viraux
Les protéines virales E :
Les protéines E ont des rôles :
- E1 : réplication de l’ADN possédant une activité hélicase. Mais la réplication de l’ADN
se fait par l’ADN polymérase cellulaire.
- E2 : régulation de la transcription des oncogènes viraux E6 et E7 et joue aussi un rôle
dans l’activation de la réplication de l’ADN
- E4 : Maturation et relargage des particules virales
- E5 : Situle la prolifération cellulaire
- E6 et E7 : Transformation et immortalisation des cellules
Les cellules cibles du virus
L’HPV a un tropisme épithélial infectant les cellules germinales de la couche basale des
épithélium malphigien
L’entrée cellulaire est mal connu mais on pense que le récepteur des héparanes sulfates
(HSPG) et des intégrines jouent un rôle (en particulier les intégrines α6β1 et α6β4)
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Le cyclé viral est lié a la différenciation des cellules épithéliales c’est-à-dire la kératinisation.
L’expression des gènes viraux est régulée par la différenciation progressive de ces cellules.
Puis l’HPV infecte les cellules de la couche basale qui sont peu différenciées mais la
production virale se fait uniquement au niveau des couches superficielles (cellules
différenciées)
Le modèle de l’infection :
Le virus infectent les cellules situées à la base de l’épithélium, peu différenciées
Au niveau des cellules basales, seul les gènes précoces (E) sont exprimés
Lors de l’ascension des cellules vers la couche superficielle de l’épithélium, la réplication
virale s’intensifie.
Les gènes tardifs (L1 et L2) sont exprimés par des cellules fortement différenciées, proche de
la desquamation.
Les cellules chargées de virions desquament et se lysent à l’épithélium de surface.
L’infection s’accompagne d’une prolifération cellulaire et d’un effet
cytopathique
caractéristique : la koïlocytose. Les cellules sont à noyaux volumineux, à chromatine
irrégulière, avec une vacuole intracytoplasmique refoulant le noyau en périphérie.
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Au cours de la progression vers le cancer, le cycle viral se modifie. Le nombre de cellules qui
produisent le virus est très faible au cours d’un cancer. Ces cellules sont caractérisées par
une expression très forte de E6 et E7.
L’ADN viral est circularisé au début et s’intègre dans l’ADN génomique. On a observé que
l’ADN viral s’intègre à proximité des proto-oncogènes (c-myc par exemple qui joue un rôle
dans la croissance et la prolifération des cellules. Donc en fait, HPV stimule C-myc)
L’intégration de l’ADN viral dans l’ADN génomique interrompt le gène E2, d’où une
dysrégulation de l’expression de E6 et E7 (qui augmentent finalement)
Dès lors, E7 dégrade pRB/E2F et E6 dégrade p53.
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Rappel sur le cycle cellulaire :
p53 contrôle le cycle cellulaire car stimule des inhibiteurs comme p21.
Donc, la dégradation perturbe les points de restriction du cycle cellulaire. De plus, les p53
participe au mécanisme de l’induction de l’apoptose donc celle-ci est supprimée.
Par ailleurs, E5 interagit avec les récepteurs aux facteurs de croissance (EGF…)
E5 stimule l’expression de E6 et E7.
Résumé des étapes moléculaire de la carcinogénèse :
-
Persistance de l’infection par HPV haut risque (facteurs immunitaires et hormonaux)
ce qui correspond à 15 % des infections.
-
Intégration de l’ADN et inactivation de E2 => dérégulation de l’expression de E6 et E7
inactivant les suppresseurs de tumeur. Les proto-oncogènes sont stimulés.
-
On aboutit à la prolifération, une instabilité génique, une augmentation du risque de
mutation et d’altérations génétiques qui sont impliquées dans la transformation
cellulaire.
D. Traitement et prévention :
Il n’existe pas de traitement antiviral spécifique.
On réalise une exérèse complète des lésions précancéreuses, ce qui est efficace dans 95 %
des cas.
Par ailleurs, il existe un vaccin prophylactique (Cervirix et Fardasil) qui protège des infections
à HPV 16 et 18 et cette vaccination va prévenir les 2/3 des cancers du col. Il est recommandé
de vacciner les jeunes filles de 14 ans.
.
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Il s’agit d’un vaccin recombinant constitué des protéines L1 (protéine majeure de la capside)
Ces particules virales non infectieuses induisent la production d’anticorps anti-L1 (Anticorps
neutralisant). Ces Anticorps fixent la capside virale et empêche l’initiation d’une infection.
CONCLUSION sur la cancérogénèse virale :
•
•
•
Processus multi-étapes
Persistance du génome viral dans la cellule infectée
Mécanismes de la transformation cellulaire « viro-induite »
– Activation de plusieurs voies de signalisation impliquées dans la
prolifération et la croissance cellulaire
– Activation de proto-oncogène (p.ex. c-myc, bcl-2)
– Inactivation des gènes suppresseurs de tumeur (p.ex. p53, pRb)
 L'accumulation d'altérations géniques successives
favorisant l'instabilité génétique des cellules
• Manifestations cliniques → Cancer
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