L’Investisseur - 18 novembre 2008
Allocation sectorielle
Selon le cycle conjoncturel en cours, certains secteurs performent
mieux que d’autres. La croissance économique varie selon des cy-
cles.
A côté des cycles économiques longs (cycle de Kon-
dratieff) qui portent sur 50 à 60 ans, il y a aussi les cy-
cles économiques ‘normaux’ qui s’étendent sur une
période de 4 à 6 ans. Nous nous pencherons sur ces
cycles ‘plus courts’.
Attention toutefois car la durée d’un cycle n’est pas
l’autre. La crise du crédit a, plus tôt que prévu, précipi-
té l’économie d’un cycle de haute conjoncture vers un
cycle de basse conjoncture. Le moteur (bancaire)
étant enroué, c’est l’économie au sens large qui paie
les pots cassés. Même la confiance des consomma-
teurs n’est plus en mesure d’offrir beaucoup de résis-
tance. Au contraire ! Les licenciements prévus (ferme-
tures d’usine) risquent de précipiter leur confiance au
point zéro. L’amplitude (vigueur de la hausse ou de la
baisse) et sa durée peuvent grandement varier d’un
cycle économique à l’autre. Mais chaque cycle affiche
une constante : une phase baissière est toujours sui-
vie d’une phase haussière (et inversement). Il ne pour-
rait d’ailleurs en être autrement. Même si la crise fi-
nancière actuelle revêt un caractère exceptionnel, à
un certain moment, l’économie repartira de l’avant et
recherchera de nouveaux sommets.
Rotation sectorielle
Désormais, l’investisseur devrait regarder plutôt la fo-
rêt que les arbres. Chaque phase conjoncturelle, aus-
si bien ascendante que descendante, a ses ‘avanta-
ges’. Suivant la phase dans laquelle le marché se
trouve, certains secteurs spécifiques performent rela-
tivement mieux que d’autres. Sachant cela, il est donc
opportun d’opérer régulièrement des rotations au
sein de votre portefeuille en fonction de la phase con-
joncturelle en cours. Cela s’appelle la rotation de sec-
teurs. Un bon timing est néanmoins essentiel : si
vous anticipez trop tôt une phase déterminée, vous
risquez d’engranger au départ des pertes (importan-
tes). Si vous attendez trop longtemps, vous risquez de
rater une partie importante de la hausse. La meilleure
solution consiste à franchir le pas progressivement.
Mais comme les bourses précèdent toujours un peu la
conjoncture, il convient d’anticiper et donc d’agir
quelque peu à contre-sens (politique ‘contrarian’).
Des secteurs défensifs vers …
Dans quelle phase conjoncturelle sommes-nous actu-
ellement? Quelles actions faut-il avoir en portefeuille ?
Il est clair que nous nous trouvons depuis un certain
temps en phase IV (cf graphique), une phase baissière
se traduisant par un ralentissement économique. Lors
de cette phase, ce sont traditionnellement les sec-
teurs défensifs (alimentation, boissons, pharma, télé-
coms) qui s’en tirent le mieux. Nous nous préparons
toutefois déjà à vivre la phase I, une phase de repli
conjoncturel, synonyme de repli de la croissance. Se-
lon les manuels d’économie, durant cette phase, il
faut garder un cœur de pierre et se défaire progressi-
vement des actions défensives. Selon ces mêmes ou-
vrages, le secteur financier performe le mieux durant
cette phase, du fait de la baisse des taux qui dope
leurs marges d’intérêt et leur assure davantage de bé-
néfices futures. Vu la nature de la crise cette fois, qui
frappe de plein fouet le secteur financier, ce dernier
aura besoin de plus de temps pour sortir du marasme
dans lequel il s’est enfoncé. Et c’est justement parce
que le secteur bancaire met en danger l’ensemble de
l’économie, que des mesures de régulation supplé-
PORTRAIT
Rotation sectorielle vs répartition
du portefeuille
Gérer son portefeuille en fonction de la rotation des secteurs liée aux cy-
cles économiques est sûrement un must. Répartir votre portefeuille sur
plusieurs secteurs ou actions reste le but ultime car il ne convient pas de
mettre tous ses oeufs dans le même panier. Le passage d'un cycle éco-
nomique à un autre ne se fait pas de but en blanc et donne le plus sou-
vent lieu à une zone intermédiaire importante. En sus des facteurs con-
joncturels viennent se greffer des facteurs spécifiques (bonne gestion,
restructurations, …). N'empêche, rééquilibrer son portefeuille en faisant
tourner les secteurs en fonction du cycle conjoncturel s’avère payant.
Dans notre portefeuille, le secteur pharma a ainsi reçu un poids supé-
rieur à la moyenne. Mais ce choix n’était pas uniquement fondé sur la
phase économique en cours mais aussi sur des facteurs comme la valo-
risation, la croissance défensive (Omega Pharma, Arseus, IBA) et la bon-
ne santé financière du secteur. Par contre, les actions cycliques qui affi-
chaient en sus un lourd endettement ont été écartées du portefeuille.
L’Investisseur - 18 novembre 2008
mentaires risquent de brider leur croissance bénéfi-
ciaire future. Dans le pire des scénarios, les banques
se verront dégradées au rang d’entreprises d’utilité
publique, mises au service de l’économie et non in-
versement. Dans ce cas, leurs bénéfices futurs auront
le mérite d’être plus défensifs et transparents au prix
d’un peu de potentiel de croissance sacrifié. A terme,
cette tendance pourrait malgré tout tirer la valorisa-
tion de leurs cours vers le haut.
Le secteur financier a donc encore du potentiel, mais
compte tenu de la nature de la crise, son rebond pour-
rait se faire attendre. Le scénario classique est donc
perturbé par la crise du subprime qui cloue l’ensem-
ble du système financier au sol. Ces incertitudes pour-
raient perdurer un certain temps. Aussi, ne vous tour-
nez que vers les valeurs les plus solvables.
… les cycliques ?
Non, car c’est prématuré. Cette abstention vaut pour
toutes les entreprises et sûrement aussi pour les
grands conglomérats industriels. Ceux-ci reviennent
surtout à la surface en phase II du cycle. Même si les
récentes sanctions de cours ont rendu la plupart des
actions cycliques industrielles bien plus attrayantes,
l’impact de leur sensibilité conjoncturelle sur leur chif-
fre d’affaires et leur bénéfice n’est pas à négliger. Les
résultats trimestriels à venir pourraient encore déce-
voir. De plus, la crise du ‘subprime’ risque de prolon-
ger le cycle conjoncturel baissier. Autrement dit, il est
dans l’ensemble trop tôt pour se rabattre déjà en mas-
se sur des actions cycliques (pétrole, acier, matières
premières, construction, auto).
Mieux vaut attendre le moment où certaines entrepri-
ses (risquent) de basculer et (menaceront) de licencier
en masse. Et ce ‘sommet’ n’est toujours pas atteint.
Dans cette optique, tenez surtout à l’oeil les secteurs
de début de cycle. Si les activités économiques mon-
diales redémarrent, le secteur du transport, notam-
ment, en cueillera immédiatement les fruits. L’indice
de transport de vrac sec, qui reflète l’évolution des ta-
rifs d’un grand nombre de routes maritimes, est à ce
propos un baromètre fiable.
Un autre secteur précurseur est l’intérim. Lorsque
l’économie repart, les chefs d’entreprise se montrent
d’abord prudents et ne se lancent pas directement
dans des embauches coûteuses et à durée indétermi-
née. Ils se rabattent donc sur le travail intérimaire.
L’investisseur qui anticipe peut donc, à condition de
répartir dans le temps et en quantité, prendre de peti-
tes positions. Ne sélectionnez que les entreprises affi-
chant une structure bilantaire saine.
Pour les actions d’acier et des matières premières, il
est préférable de patienter encore. Car vu la très nette
baisse des cours des matières premières, ces entre-
prises risquent de voir leurs résultats (pertes possi-
bles) encore baisser.
Le marché doit prendre conscience que les matières
premières cycliques peuvent encore connaître l’autre
extrême (pertes). Nous laissons également l’or de cô-
té. Cette matière précieuse sert avant tout de refuge
en cas d’inflation. Or comme l’inflation a déjà dépassé
son pic, nous pouvons en conclure que l’or restera
aux oubliettes durant un certain temps.
Les secteurs que nous privilégions actuellement
… hormis le secteur pharma, ils ne sont pas légion pour l'instant. Les ventes massives qui caractérisent l'exercice 2008 n'ont
épargné aucun secteur. Suite à la crise du crédit, les fonds à levier ont vu leur capacité d'investissement se tarir. Idem pour les
fonds classiques, qui ont été assaillis par des investisseurs exigeant leur argent. Conséquence : en vue de libérer des liquidités, ils
ont été contraints de vendre des actions en masse, quelque soit la valorisation des titres. Il en est de même pour les banques qui,
en pleine pénurie du crédit, ont dû trouver du cash. Dans un marché vide (peu ou pas d'acheteurs), ce processus provoque de brus-
ques chutes de cours auxquelles n'échappe aucun secteur. Lors d'un redressement général des bourses, presque chaque secteur
devrait pouvoir remonter. Un rebond technique général au sens large donc. A plus long terme toutefois, il vaut toujours mieux évi-
ter les perdants. De là notre conseil de rester à l'écart d'entreprises cycliques fortement endettées. Celles-ci pourraient encore an-
noncer de mauvaises nouvelles. Leurs cours se retrouveraient alors en queue de peloton.
Rotation sectorielle classique
Phase I Phase II
Phase III Phase IV
Croissance
PIB
Actions cycliques
Actions industrielles
- Energie
- Acier
- Papier
- Chimie de base
Financieres
- Banques
- Assurances
Actions defensives
- Actions d’utilité publique
- Alimentation & Boissons
- Biens de consommation
- Pharma
- Télécom
Actions
de croissance
- Technologie
- Médias
source: Deutsche Bank
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