4ANTOINE CHAMBERT-LOIR & ANTOINE DUCROS
restreindre aux modèles réguliers dont la fibre spéciale est un diviseur à croisements
normaux stricts. Lorsque la caractéristique résiduelle de Rest strictement positive,
cela les oblige à admettre l’existence d’une résolution des singularités plongée. In-
dépendamment de cette restriction (le cas où R=C((t)) est déjà très intéressant),
leur théorie reste de nature très algébrique : formes, courants sont définis comme
des systèmes compatibles de cycles sur les différents modèles (pour des applications
convenables fournies par la théorie de l’intersection).
Dans le cas des courbes, la thèse [54] d’A. Thuillier fournit une théorie d’Arakelov
analytique à toutes les places fondée sur les espaces de Berkovich aux places ultra-
métriques et sur l’analyse complexe aux places archimédiennes. Dans le cas d’une
courbe sur un corps ultramétrique, il y développe aussi une théorie du potentiel
formellement analogue à celle qui vaut sur les surfaces de Riemann. Le cas de la
droite projective a été développé indépendamment par [4, 3]. Ces considérations
recoupent aussi les travaux de [50, 36, 37] en dynamique non archimédienne.
En dimension arbitraire, la théorie des mesures sur les espaces de Berkovich (due
au premier auteur [22] et raffinée par [39]) fournit une troisième incarnation de cette
idée. Si Xest propre, de dimension n, et si ¯
Lest un fibré en droites sur Xmuni d’une
métrique admissible au sens de [59], on construit une mesure sur l’espace analytique
Xan associé à X/K par Berkovich que nous notons c1(¯
L)n. En effet, cette mesure est
un analogue de la mesure de même nom lorsque ¯
Lest un fibré en droites hermitien sur
une variété analytique compacte de dimension n. Sa masse totale est égale au degré
deg(c1(L)n|X)de Xpour L. Elle donne aussi lieu à des théorèmes d’équidistribution
des points de petite hauteur tout à fait analogues à ceux évoqués plus haut dans le
cas archimédien ([22, 4, 36, 40, 58]). Voir aussi [23] pour un survol de la théorie
qui met en parallèle les cas archimédien et ultramétrique. Dans [40], Gubler montre
comment les idées de [55, 60] se transposent et permettent de prouver la conjecture
de Bogomolov sur les corps de fonctions lorsque la variété abélienne sous-jacente est
« totalement dégénérée ».
Divers mathématiciens se sont aussi intéressé à l’analogue du théorème de Yau
(conjecture de Calabi) dans ce contexte. Citons un travail non publié de Kontsevich
et Tschinkel (2000). Plus récemment, l’unicité d’une métrique conduisant à une
mesure prescrite (théorème de Calabi) est prouvée dans [57] en adaptant la preuve
de [12]. L’article [45] construit quelques solutions dans le cas de variétés abéliennes
totalement dégénérées. Les articles [19, 20] prouvent l’existence de solutions dans
de nombreux cas algébriques.
0.2. Cet article
(0.2.1). — Dans le cas d’un fibré en droites hermitien ¯
Lsur une variété complexe X
c1(¯
L)est une forme différentielle de type (1,1) et sa puissance c1(¯
L)nest une forme
de type (n, n), laquelle donne lieu à une mesure si Xest de dimension n. La théorie
des mesures de [22] avait ceci d’insatisfaisant qu’elle définissait une mesure c1(¯
L)n