DES POISSONS D'EAU DOUCE
POUR LE PACIFIQUE
Dans l'article ci-après les résul-
tats des introductions de poissons
d'eau douce faites récemment dans
la région du Pacifique, ainsi que
de l'élevage, à titre d'essai,
d'espèces nouvelles dans les
bas-
sins expérimentaux de la Commis-
sion à Port Laguerre, Nouvelle-
Calédonie, sont résumés
Par H. van PEL*
* * «
Dans la zone d'action de la Commission du Pacifique Sud, les ruis-
seaux, les rivières, les étangs et les lacs sont très peu poissonneux. Pour
expliquer ce fait, on a émis diverses théories sur lesquelles nous n'avons pas
à nous étendre ici. Quelques tentatives d'empoissonnement à l'aide d'espèces
importées ont été couronnées de succès, et l'on a obtenu des peuplements qui
peuvent se comparer à ceux des pays plus favorisés.
Dans une région telle que le Pacifique Sud où le régime alimentai-
re manque souvent des protéines que fournit le poisson, il se pose une question
très importante: peut-on empoissonner l'ensemble - ou la majorité - des cours
d'eau et des étangs, naturels ou artificiels, de la région ?
Les résultats des essais qui ont été faits dans divers milieux du
Pacifique ont permis de résoudre le problème, tout au moins partiellement. Ces
travaux n'ont pu être accomplis qu'avec la collaboration des fonctionnaires
territoriaux et de bien des particuliers. Etant donné la diversité des mi-
lieux, il faut tenir compte de nombreux facteurs biologiques et écologiques
sans oublier que certaines données nous sont encore inconnues.
Jusqu'à présent, huit espèces de poissons ont été introduites
Ce sont l'Helostoma temmincki. le sepat Siam, la truite, le goura-
mi géant, la carpe, 1'Ophicephalus striatus. et deux espèces de Tilapia
(T.
mossambica et T.
Zilli).
Deux Sepat Siam qui proviennent des
bassins de pisciculture de la Commission.
* Chargé des Pêches à la Commission du Pacifique Sud.
100.
Le gourami géant, la carpe et 1'Ophicephalus sont à
l'heure
actuel-
le en observation dans des bassins en Nouvelle-Calédonie et l'on ne peut encore
donner de résultats précis. L'introduction à Guam de Tjlapia zilli est trop-
cente pour pouvoir affirmer qu'elle sera couronnée de succès. Lesgourami, les
sepat et Tilapia mossambica se sont fort bien acclimatés dans certains lacs et
étangs et la dernière espèce nommée prospère également en rivière.
Dans quelques
îles,
la chair de l'Helostoma temmincki et du sepat
est déjà très prisée.
Ces diverses espèces présentent des caractéristiques très différen-
tes.
Toutes sont bonnes à manger, mais certaines comme la truite, 1'Ophicephalus
et le gourami géant ont un goût plus fin que les autres. Les truites ont une
prédilection pour les eaux claires et fraîches alors que 1'Ophicephalus se plait
dans des lacs ou des cours
d'eau
plus tempérés. Les pêcheurs qui aiment le
sport apprécient beaucoup ces deux dernières espèces.
D'autre part, avec le tilapia et le sepat, qui atteignent une lon-
gueur moyenne d'environ 20 cm., on peut escompter un rendement élevé de
pois-
sons de friture; il n'est pas rare d'atteindre et de dépasser 400 Kg. par
acre*
et par an.
Les deux espèces dont les réactions aux divers milieux rencontrés
dans le Pacifique Sud nous sont le mieux connues sont Tilapia mossambica Peters
et Trichogaster pectoraljs Regan (sepat
Siam).
Plusieurs introductions de Tilapia mossambica provenant des Philip-
pines,
de Singapour et d'Hawaï ont été faites. L'espèce est originaire d'Afri-
que.
Bien que ce soit un poisson
d'eau
douce, il
s'adapte
remarquablement bien
aux eaux saumâtres ou salées. Toutefois, il se reproduit difficilement dans
une eau dont la salinité est supérieure à 25 pour 1.000.
Ce tilapia vit très bien sous les tropiques, depuis le niveau de la
mer jusqu'à
2.000
m. d'alti-
tude,
mais se reproduit avec
difficulté au-dessus de 1.900
mètres.
Il prospère à des
températures oscillant entre
20 et 35 degrés C. Il est
arrivé,
en Nouvelle-Calédonie,
que des femelles aient frayé
en plein hiver, mais dans
presque tous les cas les oeufs
ne sont pas éclos lorsque la
température de
l'eau
était in-
férieure à 17° C.
* 1 hectare =2,47 acres.
Ophicephalus adulte. Il s'agit d'une espèce de poisson comestible
nouvellement introduite dans les bassins expérimentaux de la Commission
a Port Laguerre, près de Nouméa.
101.
Les mâles atteignent
une taille supérieure à
cel-
le des femelles. A la matu-
rité,
le mâle prend une tein-
te plus foncée et ses nageoi-
res se bordent de rouge,alors
que la femelle devient olivâ-
tre.
Pour déterminer le sexe
il faut prendre des spécimens
d'environ 8 cm. et les exami-
ners leur sortie de l'é-
tang,
la différenciation de-
venant beaucoup plus diffici-
le si on les garde dans un
récipient transparent ou de
couleur claire à cause du
phénomène de mimétisme qui se produit presque instantanément.
Lorsqu'il est prêt à frayer, le mâle fait un nid dans le fond de
l'étang
ou de la rivière, un trou en forme de soucoupe de 30 cm. à 60 cm. de
diamètre et profond d'environ 8 cm., dans lequel la femelle pond ses oeufs.
Après la fécondation, la femelle (parfois le mâle) ramasse les oeufs dans sa
bouche où elle les laisse incuber. La période d'incubation est courte, mais
le frai continue à se réfugier dans la bouche de la mère en cas de danger.
«^•sr
A leur premier
frai,
les très jeunes femelles pondent environ 80
oeufs,
d'un jaune terne. Plus tard, le nombre des oeufs s'accroît. On a cap-
turé une femelle de 12 cm. de long qui portait 256 oeufs. Nous ne savons pas
exactement combien de fois
les tilapia fraient, mais
très certainement au moins
trois ou quatre fois pas an.
Les femelles sont matures à
quatre mois et le cycle re-
productif se poursuit
jus-
qu'à dix-huit mois au moins,
peut-être même au-delà.
En bassin, on peut ob-
tenir des tilapia de belle
taille en s'attachant à la
culture de mâles seulement,
choisis parmi le frai des
plus grands géniteurs. Comme
nous
l'avons
dit plus haut,
il est facile de reconnaître
En haut pêche, et ci-dessous nettoyage des tilapia introduits il y a
plusieurs années par M. van Pel dans des bassins de pisciculture près de
Rarotonga aux iles Cook.
102.
M. van Pel, avec un assistant, pSche des tilapia au filet dans un des bassins de la Commission
pour les lâcher ensuite dans un bassin naturel.
le sexe de ces poissons, mais il faut veiller à ce que les mâles ne portent
pas d'oeufs ou de frai dans leur bouche, ce qui arrive de temps en temps. Un
moyen très simple d'y obvier est de faire séjourner les poissons sélectionnés
dans un petit bassin pendant une huitaine de jours avant de les transférer
dans le bassin de culture.
Les observations faites dans des bassins naturels ou artificiels
et des séries de tests en aquarium, ont permis de constater que les tilapia
de 8 cm. de long et plus acceptent fort bien les larves de moustiques.
Ce poisson tolère des eaux dont le pH varie entre 6 et 8, mais on
obtient les meilleurs résultats dans une eau légèrement alcaline avec un pH de
7 ou
plus.
Plusieurs autres espèces de tilapia atteignent une taille supérieu-
re à celle de Tilapia mossambica mais ne sont pas si faciles à élever. Comme
nous
l'avons
indiqué plus haut, une de ces espèces, Tilapia zilli. a été intro-
duite dans la région et les possibilités qu'elle peut présenter pour le
Paci-
fique sont à l'étude.
Sepat Siam
Ce poisson nous est venu des Philippines et d'Indonésie. Il vit
normalement dans des lacs peu profonds ou des marais, mais peut également s'é-
lever en bassin. Cette espèce ne tolère que
l'eau
douce.
103.
M. van Pol lâche dos tilapia dans un grand lac d'eau douce, peu profond, situe' sur un plateau
dans le sud de la Nouvelle-Calédonie. A l'arriere-plan, à droite, on aperçoit M. J. Marinet,
Directeur du Service de l'Agriculture, accompagné de M. L. Bernier, Chef du Service des Eaux
et Forets.
Nos observations sur le sepat Siam ont confirmé qu'il prospère
sous les tropiques, depuis le niveau de la mer jusqu'à 200 m. d'altitude, mais
qu'on doit pouvoir obtenir des résultats satisfaisants à des altitudes plus
élevées.
Dans
l'état
actuel de nos connaissances, nous estimons que ce
pois-
son doit pouvoir vivre, croître et se reproduire à des températures allant de
20 à 32° C.
Le sepat commence à frayer à
l'âge
de sept
mois.
Le mâle construit
un nid de bulles dans lequel la femelle pond plusieurs centaines d'oeufs de
couleur jaune. Si la température est favorable, les oeufs eclosent au bout de
36 à 48 heures. Le frai est pourvu
d'une
vésicule vitelline qui l'alimente
pendant trois à sept jours. Cette réserve naturelle épuisée, il se nourrit
d'animalcules et de plantes microscopiques, puis à
l'âge
de deux mois les ale-
vins commencent à manger leur nourriture normale.
A maturité, on distingue les mâles des femelles à leurs stries
beaucoup plus sombres et à leur nageoire dorsale plus allongée.
Le sepat se plaît dans les eaux où les plantes aquatiques poussent
bien.
Cette espèce tolère aisément des eaux faiblement oxygénées et prospère
dans celles dont le pH est de 6,5 à 8.
(voir suite p. 117)
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