26 JARDINS DE FRANCE JUILLET/AOÛT 2006
L
e genre
Alcea
(famille des Malvacées)
comprend une soixantaine d’espèces
de bisannuelles et vivaces éphémères
des régions tempérées d’Europe et d’Asie.
Parmi elles, seules
Alcea ficifolia, Alcea
rugosa
et
Alcea rosea
ont un intérêt horti-
cole.
Alcea ficifolia
, la rose trémière “à feuilles de
figuier”, originaire de Sibérie, est une grande
vivace vigoureuse et robuste, aux feuilles ar-
rondies, nettement lobées, rugueuses, et aux
fleurs simples, jaune pâle. Hybridée avec
Alcea rosea
, elle se décline alors dans d’au-
tres couleurs, roses, rouges ou blanches.
Alcea rugosa
, un peu plus petite, donne des
fleurs jaune citron clair, et les lobes de ses
feuilles sont à peine marqués.
Alcea rosea
(anciennement, mais encore sou-
vent aujourd’hui identifiée à tort comme
Althaea rosea
), la rose trémière classique,
est une vivace spontanée de l’ouest de l’Asie.
Sous nos climats européens – en France, mais
aussi en Grande-Bretagne, au Danemark... –
elle a conquis beaucoup de nos jardins et de
nos villages, jusqu’à devenir un vrai sym-
bole de leur fleurissement. Elle peut y être
traitée comme une vivace de courte durée,
une bisannuelle ou une annuelle.
Toutes simples
ou spectaculaires
La rose trémière est facilement identifiée
avec ses très hautes tiges érigées, qui peu-
vent rapidement dépasser la taille d’un
homme et même grimper jusqu’à 3 m, et
ses feuilles arrondies, vert pâle, recouver-
tes de poils grossiers, légèrement lobées.
Elle épanouit tout l’été, du bas vers le haut,
de grandes fleurs d’une dizaine de centi-
mètres, réunies en bouquets. Elles sont sim-
ples, à cinq pétales, en forme de trom-
pette, ou doubles, pouvant prendre alors
des formes étonnantes et spectaculaires.
Au gré des nouvelles obtentions, la gamme
Plantes fleuries
Connue également sous le nom de passerose, ou passe-
rose, la rose trémière est une fleur de passion qui ne
laisse généralement pas indifférent. Certains détestent,
d’autres adorent ses allures d’échalas dégingandé qui
se couvre de fleurs. Mais que seraient sans leurs roses
trémières les Plus Beaux Villages de France comme
Talmont-sur-Gironde, Saint-Martin-de-Ré ou Saint-Cirq-
Lapopie dans le Lot ?
la trémière
Pas si rose,
la trémière
Texte de Marie-Hélène Loaëc
Alcea ficifolia, aux fleurs simples jaune clair,
une espèce moins connue mais cependant
très intéressante, presque vivace, au port
étroit, résistant mieux à la rouille.
DESCAT / MAP
Malgré leur propension à la rouille, les roses
trémières restent des classiques de nos jardins
que quelques précautions permettent de gar-
der en beauté.
DESCAT / MAP
Les roses trémières, symbole de nombreux
villages de la côte atlantique, inspirent les ar-
tistes, comme ici à Saint-Martin-de-Ré (aqua-
relle de Pierre Sabourin, 1996).
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des couleurs est de plus en plus large, du
blanc pur au presque noir en passant par tou-
tes les nuances de roses, de rouges, d’oran-
gés, de mauves… Les étamines soudées, bien
visibles, ou le cœur des fleurs simples sont
souvent d’une couleur différente de celle du
périanthe. Les fleurs peuvent également être
veinées, tachetées ou striées.
Au jardin, les roses trémières peuvent être ins-
tallées à partir de plants en godets ou semées.
Limiter le stress du godet
La plantation des godets peut se faire en
fin d’été ou au printemps. L’installation est
classique : dans une bonne terre de plate-
bande, préparez les trous, éventuellement
avec un apport d’amendement organique,
faites tremper la motte, retirez du godet et
mettez en place, rebouchez sans enterrer
le collet de la plante, tassez bien et arro-
sez abondamment. Prévoyez quatre à six
pieds au mètre carré. Si vous les alignez,
espacez chacun de 60 à 80 cm.
La meilleure période de plantation des plants
en godets est fin août – début septembre :
la plante aura ainsi le temps de bien s’ins-
taller et d’accumuler des réserves avant l’hi-
ver, elle n’aura en conséquence pas besoin
de protection, et fleurira plus précocement
– et plus haut – l’année suivante.
Il faut mieux acquérir les plus gros godets
possibles et les acheter le plus tôt en saison
possible, afin que les plants n’y aient pas
encore souffert d’un manque d’espace.
Un semis facile
Le semis des roses trémières est particulière-
ment facile et vous donnera des plantes plus
vigoureuses et une floraison plus hâtive qu’une
plantation en godets.
Pour les cultiver en bisannuelles, semez vos
roses trémières en place au printemps ou en
été et repiquez en début d’automne quand sont
apparues deux ou trois vraies feuilles : elles
fleuriront l’année suivante dès le mois de juin.
Pour une culture annuelle, possible pour cer-
taines variétés, semez en février sous abri ou
en avril en place.
Attention si vous récupérez les graines de
vos roses trémières pour les ressemer à l’au-
tomne : elles donneront des fleurs de formes
et de couleurs imprévisibles.
Il est également possible de bouturer de jeu-
nes pousses prélevées au pied de la plante.
Un entretien limité
Les roses trémières demandent un sol ameu-
bli, enrichi et bien drainant, une terre consis-
tante mais jamais trop humide, l’excès
d’eau faisant pourrir les racines. Elles s’ac-
Les roses trémières évoquent le charme des “jardins d’autrefois”, “jardins campagnards”,
“jardins de curé”, “jardins anglais”… autant de qualificatifs très valorisants aujourd’hui.
DESCAT / MAP
La variété Alcea rosea ‘Nigra’ a des fleurs fon-
cées, presque noires.
DESCAT / MAP
commodent aussi d’une terre sablonneuse.
Ce sont des plantes de soleil, mais qui af-
fectionnent les nuits fraîches, et supportent
une ombre partielle. Elles peuvent vraiment
être cultivées sous tous nos climats.
Les roses trémières se montrent tout à fait
capables de se débrouiller seules. Si vous
désirez cependant les “bichonner”, arro-
sez-les en cas de sécheresse et apportez-
leur tous les quinze jours un engrais pour
plantes fleuries (plus riches en P et K qu’en
N). Si la plantation n’est pas très abritée,
prévoyez des tuteurs solides pour mainte-
nir les lourdes tiges couvertes de fleurs.
Enlevez les fleurs fanées au fur et à me-
sure, d’abord pour des raisons esthétiques,
mais également pour éviter qu’elles ne se
ressèment spontanément.
Une grande ennemie,
la rouille
La rouille est la grande ennemie de la rose
trémière. Difficile d’y échapper, car elle
accompagne généralement les graines
elles-mêmes. Elle donne vite triste mine à
la plante, les feuilles jaunissant, séchant et
tombant, dégarnissant d’autant ces gran-
des tiges qui perdent leur belle allure.
Due à un champignon,
Puccinia recondita
,
la maladie se manifeste par l’apparition
de pustules orangées sur les feuilles. Elle
est favorisée par un temps pluvieux, ou au
contraire trop sec.
Dès l’apparition des symptômes, il faut
supprimer les feuilles atteintes le plus rapi-
dement possible pour limiter le développe-
ment et les brûler (ne jamais bien sûr les
mettre dans un compost).
Un traitement préventif, au printemps, avec
un produit à base de cuivre, permet de li-
miter les risques d’apparition. En curatif,
vous pouvez aussi pulvériser tous les quinze
jours un fongicide systémique (à base de
myclobutanil ou de mancozèbe par exem-
ple). Attention, le produit doit comporter la
mention “Emploi autorisé pour le jardin”.
Méfiez-vous des conseils donnés dans de
nombreux livres et articles un peu anciens :
la législation est en pleine évolution et de
nombreuses matières actives ne sont main-
tenant plus autorisées.
Pour limiter les attaques de rouille – en-de-
hors de tout traitement phytosanitaire – il
est conseillé d’installer les roses trémières
dans de bonnes conditions (un terrain pro-
fond), en conservant autour d’elles une
bonne aération, de les cultiver sur deux ans
au maximum, de brûler toutes les feuilles
tombées et les restes de plantes.
Sachez que certains cultivars sont plus sen-
sibles que d’autres, et que les variétés à
fleurs simples sont considérées comme plus
résistantes.
Outre la rouille, vous surveillerez les limaces
et vers gris, friands des jeunes pousses, ainsi
que les pucerons, altises et punaises qui peu-
vent attaquer les plantes par temps sec.
Les emplacements privilégiés
Placez vos roses trémières devant un vieux
mur, à l’arrière-plan d’une plate-bande, le
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Les roses trémières sont des plantes magnifiques qui méritent de retrouver une place de choix dans nos jardins.
GUERRIER / MAP
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long d’une clôture, près d’une pergola,
mais aussi devant une haie de conifères
ou un fond sombre d’arbustes. Elles y as-
sureront un décor coloré tout en hauteur,
ayant aussi l’intérêt d’attirer au jardin les
papillons et les abeilles (surtout les fleurs
simples).
Pour compenser le dégarnissage de la par-
tie inférieure des tiges et masquer cette
partie beaucoup moins décorative, asso-
ciez les roses trémières à de grandes plan-
tes qui ne se montrent pas trop gourman-
des, comme les cosmos et les lavatères.
Une gamme qui
donne le choix
Le choix des variétés disponibles permet
de jouer sur le mode de culture des plan-
tes – annuelles ou bisannuelles – la hau-
teur des plantes, la taille, la forme et la
couleurs des fleurs.
Les coloris des roses trémières sont très va-
riés, dans les tons jaunes, orangés, abri-
cot, roses, rouges, carmin… presque noir
pour la variété ‘Nigra’, et les sachets de
graines généralement proposés contien-
nent un assortiment de plusieurs couleurs.
Il est plus difficile de trouver un coloris bien
défini.
• ‘Summer Carnival’ a été créé pour être
cultivé en plante annuelle, épanouissant
dès juin des fleurs doubles, en couleurs mé-
langées, jaune pâle et rouges. Il fleurit
mieux à la base des hampes que les au-
tres cultivars et se montre plus résistant à
la rouille.
• ‘Majorette’ garde un port relativement
nain et buissonnant, d’environ un mètre de
haut. Il peut être cultivé également en an-
nuel. Les fleurs sont doubles ou semi-dou-
bles, frangées, avec des coloris vifs ou
pâles (jaune, carmin, orangé, rose).
• ‘Annua’ est aussi une variété pouvant
être cultivée en annuelle, aux fleurs sim-
ples.
• ‘Chater’s Double Hybrids’ présente des
pompons doubles, comme des fleurs de pi-
voines, le long de très hautes tiges. Les tons
sont vifs ou pâles, blancs, jaunes, roses,
rouges ou pourpres.
• ‘Indian Spring’ épanouit des fleurs sim-
ples, blanches, roses ou jaunes.
• ‘Pirouette’ garde une taille limitée et offre
un choix de couleurs.
• ‘Farmyard Strain’, de belles grandes fleurs
simples.
• Impossible de ne pas mentionner ‘Nigra’,
une forme étonnante, aux fleurs simples
brun foncé, presque noir à gorge jaune.
• ‘Appleblossom’ est une nouveauté
Thompson & Morgan de cette année, ré-
sultat de cinq ans de recherche, dévelop-
pée à partir de la variété Peaches ‘n’
Dreams. Les fleurs doubles ont une forme
de houppe, dans des nuances de roses
évoquant la couleur délicate des fleurs de
pommiers.
Une plante utile
Les fleurs foncées de la rose trémière
étaient autrefois récoltées à des fins
pharmaceutiques. Elles ont “une ac-
tion émolliente et résolutive des glai-
res et sont employées en cas d’in-
flammation des muqueuses, contre la
toux et l’asthme, dans les soins des
inflammations chroniques de l’esto-
mac et des intestins, contre la consti-
pation”. Elles entrent encore aujour-
d’hui dans la composition de tisanes
aux propriétés calmantes et laxati-
ves.
Ces fleurs étaient utilisées également
pour leurs matières colorantes, pour
teindre des tissus en violet, ou encore
certains liquides, dont le vin.
Les fleurs doubles de roses trémières peuvent
prendre des formes et des couleurs surpre-
nantes.
DESCAT / MAP
La nouvelle variété de Thompson & Morgan
Appleblossom’.
C’est dès de mois d’août qu’il faut penser aux
roses trémières de l’année prochaine.
DIDILLON / MAP
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