02/04/2015 Lucile MONTEIL, L3 CR : INGHILTERRA

publicité
Hormonologie - Anomalies moléculaires et pathologies endocrines
02/04/2015
Lucile MONTEIL, L3
CR : INGHILTERRA Jérôme
Hormonologie et reproduction
Pr Anne BARLIER
6 pages
Anomalies moléculaires et pathologies endocrines
« Les maladies de la transduction du signal »
Apport de la biologie moléculaire à leur prise en charge
Plan :
A. Généralités
B. Récepteurs à 7 domaines trans-membranaires : exemple du récepteur à la TSH
I. Mutations activatrices
II. mutations inhibitrices
C. Récepteurs à 1 domaine trans-membranaire: exemple du récepteur à tyrosine-kinase et de la NEM
I. La néoplasie endocrinienne multiple de type 2
II. Traitements et intérêt de la détection de la mutation de RET
D. Récepteurs nucléaires
A. Généralités
Nous allons voir dans ce cours l'apport de la biologie moléculaire dans la prise en charge diagnostique et
thérapeutique. En endocrinologie la maladie est souvent un défaut de transduction du signal.
Nous allons voir l'exemple de la thyroïde. Le cœur de l'axe thyréotrope est le rétrocontrôle négatif des
hormones thyroïdiennes sur l'hypothalamus et le premier étage de la transduction est le récepteur.
3 grands types de récepteurs nous intéressent en endocrinologie :
– Récepteurs à 7 domaines trans-membranaires : TSH, LH, FSH
– Récepteurs à 1 domaine TM : GH, prolactine, insuline....
– Récepteurs nucléaires : œstrogènes, androgènes, hormones thyroïdiennes...
+ Récepteurs >10 domaines TM : très peu d'applications en endocrinologie, surtout vus en neurosciences.
Les mécanismes des pathologies sont dus à différents types de mutations :
– Mutation du site de liaison du ligand → Perturbation de la liaison du ligand à son récepteur qui
modifie l'affinité. Exemple : récepteur à la TSH
– Mutation d'une boucle intracellulaire du récepteur à 7 DTM → perturbe la transduction du signal
mais l'hormone se lie à son récepteur.
– Anomalies du trafic intracellulaire du récepteur lorsqu'il va à la membrane. Il reste intracellulaire.
– Mutation qui entraîne une activation constitutive du récepteur = indépendante du ligand
– Anomalies quantitatives : sur ou sous-expression. Ex : modification du niveau de transcription à cause
d'une altération du gène du facteur de transcription, d'anomalies épigénétiques, etc …
Presque tous les récepteurs peuvent être sujets à des mutations et entraîner des maladies endocrines.
1/6
Hormonologie - Anomalies moléculaires et pathologies endocrines
Plus rarement, il peut s'agir du gène de l'hormone qui porte une anomalie génétique.
Il y a des mutations activatrices et inhibitrices.
Exemples :
- TSH : mutation activatrice → hyperthyroïdie et inhibitrice → hypothyroïdie
- Récepteurs à T3 : inhibitrice → résistance aux hormones thyroïdiennes
Les mutations inhibitrices entraînent des résistances aux hormones.
Les résistances sont de degrés variables : modérées, l'organisme peut compenser en hypersécrétant l'hormone
(la découverte est alors biologique), mais lorsqu'elles sont sévères, l'organisme ne peut plus compenser, le
patient présente des signes d' hypofonctionnement.
Les mutations activatrices donnent souvent un processus tumoral car l'hypersécrétion est associée à
une prolifération cellulaire accrue.
Rappel qui ne mange pas de pain :
Pertes de fonctions = mutations inactivatrices
- Peuvent être situées n'importe où sur le gène
- Plutôt autosomiques récessives
Gains des fonctions = mutations activatrices /
activation constitutive
- Situées à un endroit précis sur le gène
- Plutôt autosomiques dominantes
B. Récepteurs à 7 domaines trans-membranaires : exemple du récepteur à la TSH
Les récepteurs à 7 DTM sont les RCPG (Récepteurs Couplés aux Protéines G).
Caractéristiques des RCPG :
– ils sont couplés aux protéines G (je pense qu'on commence à le savoir …)
– ce sont les plus nombreux (>1000), ils représentent 1% du génome
– ils ont une grande diversité de ligands (et on ne les connaît pas encore tous)
– en endocrinologie, certains médicaments ont pour cible des RCPG (près de 60% des médocs)
Exemples : le principal inhibiteur de la sécrétion de GH est la somatostatine dont il existe des
analogues utilisés en cas d'hypersécrétion de GH. Le principal inhibiteur de la prolactine est la
dopamine : il existe des médicaments analogues de la dopamine.
I. Mutations activatrices du récepteur de la TSH
Elles entraînent :
– une hypersécrétion de T3/T4
– puisque la TSH est impliquée dans la prolifération des cellules thyroïdiennes → adénome, goitre...
Il peut y avoir 2 types de mutations :
–
somatiques : sur un contingent de cellules de l'organisme (donc pas de goitre), elle est acquise et non
transmissible, du récepteur de la TSH → adénomes toxiques (il y a longtemps, on croyait les patients
en hyperthyroïdie intoxiqués) hypersécrétants. Hyper T3 et T4.
2/6
Hormonologie - Anomalies moléculaires et pathologies endocrines
–
germinales ou constitutionnelles : sur toutes les cellules de l'organisme
– FNAH (Familial Non-Auto-immun Hyperthyroïdism) c'est un maladie rare, il faut la différencier de
la maladie de Basedow, car elles se ressemblent cliniquement (mais ici absence d'anticorps) →
goitre, tableau clinique et biologique d'hyperthyroidie.
– mutations de novo = SCNAH (Sporadic Congenital Non-Auto-immun Hyperthyroïdism) → les
enfants naissent prématurés, avec un petit poids de naissance, un petit goitre, un retard mental, une
craniosynostose (craniosténose), en hyperthyroïdie sévère : c'est un tableau gravissime.
Les mutations activatrices sont situées en priorité dans les DTM et dans les boucles intra-cellulaires. Le niveau
d'activité est variable :
➢ Si la suractivité est faible : tableau de FNAH
➢ Si elle est très sévère : au niveau germinal → SCNAH, au niveau somatique → adénomes toxiques
Les formes familiales sont souvent moins sévères.
Autre cas de sur-activation : Au cours de la grossesse, on a une inondation de la femme enceinte par la
βHCG (surtout au premier trimestre). Il y a une grande similarité entre HCG, TSH, LH, FSH : ce sont des
hormones glycoprotéiques, et ont une sous-unité α commune et une β spécifique.
Le récepteur à la TSH est un peu activé par la βHCG (en grande quantité), on aura physiologiquement une
légère augmentation de T3/T4 et une légère diminution de TSH, ce qui entraîne nausées et vomissements.
Une mutation sur le site de liaison du récepteur de la TSH entraîne une mauvaise reconnaissance du ligand et
une plus grande affinité pour la βHCG : quand la femme est enceinte, ceci entraîne une hyperthyroïdie
majeure pouvant même entraîner un avortement.
II. Mutations inhibitrices du récepteur de la TSH
Elles entraînent :
– une hypothyroïdie
– une T3/T4 normale ou basse
– une TSH élevée
On appelle cela la résistance à la TSH. Ce qui la différencie de l'hypothyroïdie que l'on retrouve dans la
thyroïdite d'Hashimoto, c'est que le corps peut compenser pendant des années avec des T3/T4 normales sans
aucun signe d'hypothyroïdie.
On parle d'hyperthyrotropinémie c'est à dire une augmentation de la TSH avec une euthyroïdie donc une
TSH élevée et T3/T4 normales : le diagnostic est donc difficile. On a une résistance partielle.
On peut avoir des tableaux beaucoup plus sévères dus à des mutations : tableau d'hypothyroïdie avec TSH
très élevée, T3/T4 basses, une glande thyroïde petite. C'est une transition autosomique récessive.
Rappel :
–
–
mutations inhibitrices : autosomiques récessives +++
mutations activatrices : autosomiques dominantes +++
3/6
Hormonologie - Anomalies moléculaires et pathologies endocrines
B. Récepteur à 1 domaine transmembranaire : exemple du récepteur à tyrosine-kinase et de la NEM
I. La Néoplasie Endocrinienne Multiple de type 2 : NEM2
NEM2 = Néoplasie Endocrinienne Multiple de type 2 (il existe un type 1 dont nous ne parlerons pas ici).
Il y a plusieurs lésions endocrines (affection multiglandulaire). Ce qui fait leur gravité est l'atteinte des cellules
C thyroïdiennes, ce qui donne un Carcinome Médullaire Thyroïdien (CMT) dans 100% des cas.
Les signes de l'hypersécrétion de calcitonine : pas de signes cliniques sauf à des niveaux très élevés (de
l'ordre de 1000 à 10000 pg/ml, normale = 30 pg/ml) → flush (malaise, rougeur, tachycardie) et diarrhée.
Le diagnostic est tardif et les signes apparaissent souvent lorsqu'on est déjà au stade métastatique.
Il y a 2 autres grandes lésions dans la NEM2 : un phéochromocytome (sécrète adrénaline et noradrénaline)
et une hyperparathyroïdie (augmentation de la PTH → hypercalcémie).
La transmission de la NEM2 est héréditaire de type autosomique dominante avec une pénétrance de 100%
(tous les individus porteurs de la mutation développent la maladie). La mutation est portée par le gène RET.
Il y a 3 niveaux de sévérité :
– FMTC (Familial Medullar Thyroid Carcinoma) : le moins agressif, les familles n'ont que le CMT.
– NEM2A : CMT + phéochromocytome et hyperparathyroïdie + notalgia (nodules sous-cutanés)
– NEM2B : CMT sévère très métastatique avec phéochromocytome, un syndrome marfanoïde, des
neuromes sous-muqueux et une ganglioneuromatose digestive.
Il existe une corrélation génotype/phénotype. En fonction de la mutation, on peut prédire le devenir et
l'agressivité de la maladie.
Le récepteur a 1 DTM, c'est le récepteur RET : pour être actif, il doit être sous forme de dimère (comme tous
les récepteurs à 1DTM). Il a de la cystéine pour faire des pont cystéines (ou disulfures) intramoléculaires.
Lorsqu'une des cystéines est mutée, l'autre doit faire un pont intermoléculaire avec un autre récepteur.
On a donc en permanence un dimère de récepteur, donc le récepteur est actif en permanence.
On a aussi des mutations du domaine tyrosine kinase qui le rendent actif même lorsqu'il n'y a pas de
dimère = activation constitutive.
Présentation clinique du cas index de CMT (premier cas dont on va faire le diagnostic génétique mais pas
forcément le premier malade de la famille) :
– un nodule thyroïdien non-spécifique, voire un goitre multinodulaire.
– si on a un tableau de diarrhée et flush, mauvais pronostic car le CMT est déjà métastatique.
II. Traitements et intérêt de la détection de la mutation de RET
Traitement :
Le traitement du CMT est la chirurgie +++ (thyroïdectomie totale + curage ganglionnaire), il n'y a pas grand
chose d'autre à l'arsenal thérapeutique.
Le marqueur est calcitonine. Tant qu'il y en a, il y a des cellules métastatiques. L'objectif thérapeutique est de la
rendre indosable. Si le stade métastatique est atteint, la calcitonine est très élevée et la guérison biologique
(calcitonine indosable) est impossible, et cela concerne 30 à 50% des cas.
Il faut donc intervenir le plus tôt possible.
La chimiothérapie marche mal, et la thérapie ciblée donne au mieux une stabilisation (50%).
4/6
Hormonologie - Anomalies moléculaires et pathologies endocrines
Qu'apporte la détection de la mutation de RET ? :
Elle permet de proposer un diagnostic génétique pour les enfants. Après diagnostic, on fait de la
thyroïdectomie prophylactique (car pénétrance de 100%) puis on substitue les hormones thyroïdiennes par
traitement.
Mais quand l'enlever ?
Si on l'enlève trop tôt : on a du mal à substituer les parathyroïdes qui sont difficiles à sauver lors de la chirurgie
et le jeune enfant a besoin de beaucoup de calcium ; il est difficile de ne pas léser la trachée ou le nerf récurrent
durant la chirurgie, certains chirurgiens ont même confondu le thymus (de taille très importante chez
nourrisson) avec la thyroïde …
Ce qui va permettre de choisir l'âge des traitements, c'est la mutation.
Dans le cas de la mutation 634 par exemple, on peut avoir un CMT dès l'âge d'un an, et un envahissement
ganglionnaire dès 14 mois, on va donc enlever la thyroïde très tôt !
On a stratifié les mutations en 4 catégories :
– D = haut risque : CMT toujours avant 1 ans et envahissement ganglionnaire avant 2,5 ans
→ thyroïdectomie totale avant 1 ans, c'est le seul cas.
– C = moyen risque ++ : CMT dès 1 ans et toujours avant 5ans → détection génétique et opération avant
5 ans.
– B = moyen risque - - : surveillance de la calcitonine et on opère dès qu'elle est trop élevée, mais dans
tous les cas avant 18 ans.
– A = bas risque : comme pour B.
Loi : on ne peut faire un diagnostic génétique chez un apparenté mineur que si le résultat permet une prise en
charge diagnostique ou thérapeutique immédiate. Quand le diagnostic aboutit a un acte thérapeutique
irréversible, on doit faire un deuxième prélèvement de contrôle avant l'acte (pour éviter les erreurs techniques).
Intérêt pour le patient :
Fréquence de la maladie : le cancer thyroïdien le plus fréquent est le papillaire.
Le cancer médullaire est rare (5-10% des cancers thyroïdiens), et dans ces cancers médullaires, seul 15%
s'intègrent dans une forme héréditaire qui implique RET. Ces patients qui ont une NEM2 vont être suivis toute
leur vie pour l'apparition de phéochromocytome ou d'hyperparathyroïdie grâce au dépistage.
La survie à 5 ans est de 81% sans dépistage contre quasiment 100% avec → améliore le pronostic +++
Devant tout carcinome de la thyroïde : on analyse le gène RET. Seuls 7 exons sur 21 peuvent être responsables
d'une NEM2.
➔ c'est négatif : CMT sporadique, on arrête le suivi
➔ c'est positif : CMT familial, on fait obligatoirement un deuxième prélèvement. Pour le patient, on
recherche phéochromocytome et hyperparathyroïdie, et on lance un dépistage génétique familial.
Là aussi, prélèvement. Si négatif, stop, si positif, traitement prophylactique ou curatif avec un très bon
pronostic.
5/6
Hormonologie - Anomalies moléculaires et pathologies endocrines
D. Récepteurs nucléaires
Les hormones thyroïdiennes agissent par fixation à des récepteurs nucléaires qui sont organisés en domaines
(ABCDE) et qui se fixent sur leur éléments de réponse TRE (AGGTCA) sous forme de dimères.
De plus ils agissent le plus souvent avec des co-répresseurs ou des co-activateurs. Ils ont une zone charnière
qui leur permet une grande flexibilité dans leur liaison à l'ADN : ils peuvent s'orienter en fonction de
l'orientation des éléments de liaison.
Une résistance aux hormones thyroïdiennes entraîne :
– biologiquement : T3/T4 augmentée et TSH normale (inappropriée en tout cas)
– cliniquement : pas de signe d'hyperthyroïdie, euthyroïdie ou hypothyroïdie et goitre inconstant
– signes périphériques variables et dissociés : dépend du niveau de résistance aux hormones
Dans une maladie de Basedow, on aurait une TSH basse. Ici, la TSH est normale puisque T3/T4 ne peut pas
exercer de rétrocontrôle négatif.
Ce phénomène de résistance se transmet de façon autosomique dominante dans 90% des cas (normalement,
une mutation inactivatrice est récessive) : il existe un phénomène de dominant négatif. Le gène impliqué est
TRα.
La protéine mutée empêche la protéine normale d'agir. Elles forment un hétérodimère [protéine
normale/protéine mutée] qui devient inactif car il empêche la liaison aux co-activateurs.
Toutes ces maladies évoquées restent des pathologies rares. Les pathologies fréquentes de la thyroïde sont la
maladie de Basedow, la thyroïdite d'Hashimoto, les cancers thyroïdiens, etc.
6/6
Téléchargement