CURRICULUM Forum Med Suisse No3 15 janvier 2003 41
matiques et découverts fortuitement. S’il y a des
symptômes, il faut soigneusement préciser s’ils
peuvent être ceux de l’anévrisme, car un ané-
vrisme symptomatique a un pronostic nette-
ment moins bon si le patient ne bénéficie pas
très rapidement d’un traitement chirurgical.
Le symptôme dominant est la plupart du temps
la douleur, paravertébrale (interscapulaire à
lombaire basse), rarement rétrosternale, abdo-
minale ou sacrée, qui a souvent un caractère
sourd. Les douleurs purement abdominales
sont extrêmement rares. Les anévrismes très
volumineux peuvent provoquer des phéno-
mènes de compression des organes internes,
comme dysphagie par compression œsopha-
gienne, stase jugulaire par compression de la
veine cave supérieure pour les volumineux
anévrismes de l’aorte ascendante, pneumonies
récidivantes par compression bronchique et
même ballonnements par compression de vis-
cères, tout comme enrouement si atteinte du
nerf vague ou du récurrent. La pression per-
manente peut éroder les structures voisines et
former des fistules aortobronchiques ou aor-
toœsophagiennes. Ce n’est alors souvent que
l’hémorragie dans les organes creux qui met en
route les moyens diagnostiques. Si l’indication
à un traitement chirurgical est donnée, il faut
aller plus loin dans le diagnostic: en raison du
stress considérable pour le système cardiovas-
culaire en cours d’intervention. Il convient de
procéder à un examen de la fonction cardiaque
et rechercher une cardiopathie coronaire ou
des valvulopathies majeures. Une échocardio-
graphie, mais aussi un cathétérisme cardiaque
sont très souvent requis. Il s’agit en outre d’ex-
clure des sténoses carotidiennes par ultrasono-
graphie Duplex, et des artères périphériques
par examen sous occlusion. Un examen de la
fonction pulmonaire est indiqué en préopéra-
toire chez les patients devant subir une thora-
cotomie ou souffrant d’une grave pathologie
pulmonaire. La fonction rénale doit également
être examinée.
La plupart des interventions sur l’aorte thora-
cique se font sous circulation extracorporelle
(CEC). Pour les interventions proches du cœur,
elle permet une mise en arrêt du cœur. Lors du
remplacement de l’aorte descendante, la CEC se
fait à cœur battant et est raccordée aux vaisseaux
iliaques. Ce qui permet d’optimiser le manage-
ment cardiovasculaire, et surtout le contrôle de
la postcharge au moment du clampage du seg-
ment aortique à remplacer, vu que l’ascension
brusque de la postcharge fait courir le risque
d’ischémie myocardique peropératoire. La CEC
permet en outre de maintenir la perfusion vis-
cérale et spinale, en perfusant l’aorte distale, et
de protéger de l’ischémie les organes internes
par abaissement de la température corporelle
centrale à 32° env. (hypothermie modérée), ce
qui diminue leur consommation d’oxygène.
En présence d’un anévrisme de la racine aorti-
que avec dilation de l’anneau valvulaire et de
la portion sinusale, il s’agit d’une ectasie an-
nulo-aortique (EAA, figure 4a, b). En général,
la dilatation de la ligne sinotubulaire que cela
implique, avec écartement des commissures
valvulaires aortiques, provoque une insuffisance
aortique centrale par impossibilité de coapta-
tion des valvules. L’indication opératoire est
donnée par la gravité de l’insuffisance aortique
et de la dilatation. Avec un diamètre de la ra-
cine aortique de plus de 5 cm, le risque de rup-
ture ou de dissection augmente considérable-
ment. L’EAA est souvent associée à un syn-
drome de Marfan, à des anomalies valvulaires
aortiques et à un syndrome de coarctation. Les
symptômes cliniques sont dominés par des pré-
cordialgies et des signes d’insuffisance aor-
tique. Le diagnostic est posé de préférence par
TTE (échographie transœsophagienne) mais
aussi par angio-TC ou IRM.
Si un ou plusieurs sinus de Valsalva sont dila-
tés, il s’agit d’un anévrisme sinusal. Si la valve
aortique est normale, il est possible de rempla-
cer la racine aortique en conservant la valve
aortique native [27] et de ne remplacer que les
sinus dilatés et l’aorte ascendante. L’EAA et les
anévrismes de l’aorte ascendante s’opèrent par
sternotomie. L’EAA avec valvulopathie impose
généralement le remplacement de la racine
aortique avec la valve par «composite graft»,
avec valve mécanique ou biologique, ou par
homogreffe. Chez les adolescents et jeunes
adultes, il est possible en alternative de procé-
der à l’opération dite de Ross: transfert de la
valve pulmonaire en position aortique avec
reconstruction de la sortie du ventricule droit
par un conduit biologique avec valvule. Si la
valve aortique est intacte, il est possible d’en-
visager l’opération de Yacoub [28] (figure 4) ou
de David [29, 30], avec sauvegarde de la valve.
Mais quelle que soit la technique, les ostia
coronaires doivent être réimplantés. Le princi-
pal avantage du remplacement de la racine en
gardant la valve ou en transférant la valve pul-
monaire est l’absence d’une anticoagulation à
vie. Lors de la correction d’un anévrisme isolé
de l’aorte ascendante, il faut implanter une pro-
thèse supracoronaire. Les anévrismes de la
crosse peuvent être abordés par sternotomie ou
par thoracotomie latérale, surtout lors de loca-
lisation distale. Seule une partie peut être rem-
placée si nécessaire, ou l’ensemble de l’arc avec
réimplantation des branches supra-aortiques
en manchette. S’il y a une pathologie du seg-
ment aortique voisin, qui devra probablement
être opéré plus tard, il est possible de mettre un
«elephant trunk» à titre préparatoire [31, 32].
Cette trompe d’éléphant pourra alors directe-
ment être utilisée pour remplacer le reste de
l’aorte, ce qui simplifiera considérablement la
seconde intervention. Après interventions sur