L`Etat vu par les historiens. Lecture croisée franco

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 rEr ‐ réseau Etat recomposé L’Etat vu par les historiens. Lecture croisée franco‐américaine. Sarah Gensburger Working paper n°1 Projet transversal rEr sur les recompositions de l’Etat contemporain Décembre 2009 En France comme aux Etats‐Unis, l’intérêt des historiens pour l’Etat est relativement récent. Il date de la fin des années 80. S’il prend parfois la forme d’une histoire de l’Etat – terme que j’emploierai par commodité par la suite ‐, il se manifeste plus exactement par la prise en compte de l’Etat dans des travaux historiens. L’émergence de ces recherches entretient dans les deux cas un rapport différencié à la science politique et notamment à l’institutionnalisme historique. Une brève présentation de la genèse de ce sous‐champ fournit ainsi des éléments de réflexion sur la prise en compte du passé dans l’analyse des recompositions contemporaines de l’Etat (I). Bien que diverse, l’histoire de l’Etat compte une grande ligne de convergence qui conduit aujourd’hui à des propositions de reformulation de l’objet. Elle invite à dépasser l’approche unidimensionnelle de l’Etat, le plus souvent exprimée en termes de plus/moins ou de fort/faible (II). Cette révision d’une des grandes catégorisations de l’histoire politique conduit à trois nouvelles voies d’analyse : respectivement une approche organisationnelle, une approche relationnelle et une prise en compte de l’Etat à travers les catégories à la fois cognitives et sociales qu’il a construites (III). 2
L’Etat : objet d’histoire En 1989, encore, Pierre Rosanvallon dresse le constat que : « Le très petit nombre des travaux consacrés à l’histoire de l’Etat français contraste singulièrement avec la vigueur des jugements qui s’expriment à son propos. D’où le décalage : L’Etat comme problème politique, ou comme phénomène bureaucratique, est au cœur des passions partisanes et des débats philosophiques tout en restant une sorte de non‐objet historique » (Rosanvallon, 1990 [1989] : 9). A peine trois ans plus tôt, Outre‐Atlantique, William Leuchtenburg, historien du politique et alors président de l’Organization of American Historians, considère de même que l’histoire de l’Etat américain constitue un nouveau domaine, « the new frontier », à explorer pour sa discipline (Leuchtenburg, 1986 : 589) 1 . Les deux auteurs s’accordent sur une première cause commune de ce long désintérêt historien pour l’Etat : la prédominance d’une histoire sociale quantitativiste inscrite sur la longue durée, héritée de l’école des Annales 2 . Dans le cas français, le « tournant critique » de l’école des Annales a effectivement joué un rôle moteur dans le développement d’une approche historienne de l’Etat (Annales. ESC, 1988) 3 . Le « retour aux acteurs » (Boucheron, 1998) que cette rupture a entraîné a conduit à redécouvrir l’Etat et a simultanément structuré les modalités de cette redécouverte. Il ne s’est pas agi de s’intéresser directement aux institutions ou aux fonctions de l’Etat mais à ceux qui le font, à ses « acteurs », que ceux‐ci se situent à l’intérieur de la sphère étatique ou à l’extérieur. Cette origine explique pour partie la nature des travaux qui seront présentés dans la suite de cette note. Elle a joué un rôle encore plus net dans le cas américain où l’histoire de l’Etat a d’abord, et pendant longtemps, pris la forme d’une histoire sociale d’acteurs qui rencontrent 1
Une évolution comparable se retrouve en Allemagne même si elle prend d’autres formes. L’Etat cesse alors d’être
une donnée et un des facteurs pris en compte dans l’histoire sociale mais l’objet même de l’interrogation des
historiens qui le considèrent alors comme « une entité, une structure historiquement variable d’organisation et
d’institutions » dont il s’agit d’étudier le fonctionnement social (Gosewinkel, 2006). En comparaison, il semble que
les histoires politiques italienne et britannique fassent peu de place à l’Etat en tant que tel (Pasqualino, 2009 ;
Readman, 2009). Les travaux de G. Meilis sur l’histoire de l’administration italienne font à cet égard figure
d’exception (Melis, 1996). L’« Etat » est par contre au cœur des travaux de micro-histoire.
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Cette cause est explicitée par la plupart des auteurs qui ont écrit sur la question depuis (Par exemple, Chatriot,
2006 ; Balogh, 2003 ; Guery, 1997 ; Boucheron, 1998 ; Revel, 1995).
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Il ne s’agit pas ici de prétendre que les historiens, et notamment les modernistes, ne se sont pas intéressés à l’Etat
auparavant (sur ce point voir, Guenée, 1971 et Genet, 1995 : 10) mais de tenter de retracer à grand trait et les
principales étapes qui ont conduit plusieurs chercheurs à se revendiquer comme travaillant d’une manière ou d’une
autre sur l’Etat.
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l’Etat que ce soit pour subir sa contrainte ou pour tenter de s’en affranchir. L’Etat n’était pas alors l’objet propre de l’analyse. Comme l’a clairement résumé Brian Balogh – qui est aujourd’hui l’un des principaux historiens américains de l’Etat ‐ dans un premier temps, « social and cultural historians followed their stories inside City Hall [and] state houses » (Balogh, 2003 : 458). Ce premier groupe de travaux sur l’action collective concerne notamment le genre (Gordon, 1994), l’ethnicité et la citoyenneté, la conquête de l’Ouest (White, 1991) ou encore les questions environnementales (Hays, 1987). L’historiographie française En France comme aux Etats‐Unis, c’est finalement la question du rapport entre recherche et politique qui a permis, dans un second temps, une forme d’institutionnalisation d’un domaine propre pour l’histoire de l’Etat. Dans l’Hexagone, la création de comités d’histoire par des ministères a peu à peu favorisé la constitution d’un champ de recherche. Si le Comité d’histoire de la Sécurité Sociale est créé dès 1972, la fin des années 80 voit la multiplication de ce type de structures, porteuses de financement et d’incitations pour les historiens. En 1986, par exemple, le Ministère de l’Economie, des Finances et du Budget crée le Comité d’histoire économique et financière qui jouera un rôle moteur dans le développement de plusieurs des recherches détaillées plus bas. A la même époque, des financements du CNRS et de la Fondation Européenne pour la Science au profit d’un programme européen d’envergure sur la « Genèse de l’Etat moderne » permettent un deuxième axe d’institutionnalisation pour les historiens intéressés par l’Etat. Tandis que les premiers sont plutôt des historiens du contemporain, les seconds relèvent d’abord de l’histoire médiévale, spécialisation qui, en France, est pionnière dans le développement de recherches collectives sur l’histoire de l’Etat (Schaub, 1996). Peut‐être du fait de cette césure entre historiens aux périodes de spécialisation différentes et malgré un certain nombre de travaux historiographiques qui tentent de théoriser l’histoire de l’Etat aujourd’hui (Chatriot, 2006 ; Friedenson, 2003 ; Quennouëlle, 2002), cette dernière reste éclatée et n’a pas connu de processus d’institutionnalisation intégrée. Il n’existe, par exemple, pas de revue spécialisée dans l’histoire de l’Etat ou même dans l’histoire des politiques de celui‐ci. Cet état de fait peut être mis en perspective avec la relativement faible et surtout récente coopération de cette histoire avec la science politique qui s’intéresse à l’Etat et notamment avec la socio‐histoire avec laquelle ils 4
ont finalement peu de réels points d’échange (Pour des exceptions, Quennouëlle, 2002) 4 . A cet égard, les travaux les plus récents produits par de jeunes docteurs marquent une rupture. Ce ne sont pas alors l’analyse politiste de l’Etat proprement dite mais l’analyse des politiques publiques qui est mobilisée. Celle‐ci est censée aider à renouveler l’approche historienne de l’Etat (Capuano, 2009 ; Delalande, 2009) 5 . L’historiographie américaine L’évolution américaine est à cet égard inversée 6 . Le premier mouvement eut lieu dans les années 70 pour partie comme la résultante de la pénurie d’emplois académiques offerts aux historiens. Le Public History Movement aboutit à la création d’une association professionnelle et d’une revue, The Public Historian. Dans cette première période, destinée aux décideurs, cette approche n’a pas vraiment d’impact sur la production académique. A cet égard, la tenue d’une importante conférence pluridisciplinaire à la Harvard Univeristy Business School en novembre 1978 marque un tournant. Organisée par Thomas McCraw et Morton Keller, elle tente de susciter des travaux et place au cœur de ceux‐ci la question de la relation entre privé et public (Zelizer, 2000). En 1987, une nouvelle revue, The Journal of Policy History, est créée. Si la Policy history ne traite pas uniquement de l’Etat, la question de la nature, du fonctionnement et des recompositions de celui‐ci y tient une place croissante. Elle va progressivement acquérir une véritable légitimité et s’institutionnaliser dans le paysage académique. Si les historiens en ont donné l’impulsion, cet état de fait doit cependant être d’abord rapporté au rôle structurant qu’a joué le développement parallèle et infiniment plus puissant de l’institutionnalisme historique américain 7 . Comme le résume Juliane Zelizer, historien américain responsable du Journal of Policy History : « Given the state of politics within the history profession, some of the most prominent political historians by the 1990s tended to be political scientists » (Zelizer, 2004 : 128). Si, à l’image de la part respective entre études de sources primaires et volonté de théorisation, plusieurs aspects distinguent les approches historiennes et celles de l’institutionnalisme historique ou plus largement de 4
Comme le montre d’ailleurs de manière exemplaire la table des matières de Marc-Olivier Baruch et Vincent
Duclert, Serviteurs de l’Etat (2000).
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Pour une réflexion écrite du point de vue de la science politique sur le lien entre étude des « Welfare policies » et
des « Welfare States », la lecture de l’article de Margitta Mätzke est stimulante (Mätzke, 2009).
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Pour une histoire détaillée du développement de ce sous-champ (Zelizer, 2000 ; Graham, 1993).
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Sur ce point voir la discussion organisée à l’occasion des cinquante ans après la parution de Building a New
American State (Balogh et al., 2003).
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l’American political development 8 , les uns et les autres font référence indifféremment aux travaux de l’autre discipline, sans d’ailleurs le plus souvent préciser ce glissement disciplinaire. Dans ce qui suit, il a donc été décidé de présenter et de faire référence à certains de ces travaux de science politique avec lesquels les historiens américains qui travaillent sur l’Etat dialoguent le plus souvent. La question de la continuité et du changement est au cœur de ce dialogue, l’enjeu pour l’histoire étant de savoir : d’un côté, s’il peut vraiment être question de state building, c’est‐à‐dire d’un début et d’une fin (Schiller, 2005), de l’autre et de manière liée, si l’Etat (en l’espèce américain) a le même sens, le même but et le même pouvoir aux différentes époques (Balogh, 2009). Là encore, dans un tout autre paysage académique, cette interrogation se retrouve dans l’Hexagone : « Tout se passe en effet comme si l’on considérait que l’Etat n’avait pas véritablement d’histoire, son développement n’étant que la pure reproduction, sans cesse agrandie, d’une figure qui aurait été formée à l’origine » (Rosanvallon, 1990 : 10). Qu’est ce que l’Etat et que veut dire écrire son histoire ? Malgré l’éclatement des approches historiennes françaises de l’Etat et la reprise par les historiens américains de nombreuses grilles d’analyse construites par la science politique de l’American political development, de grands paradigmes se dessinent et plusieurs définitions existent. La plus importante, en ce qu’elle a notamment influencé une jeune génération d’historiens français, est bien entendu celle de Pierre Rosanvallon. Dans son ouvrage manifeste où il appelle précisément les historiens se saisir de l’Etat, il explicite quatre impératifs de méthode, autant de préalables à la définition même de l’objet : la déglobalisation ; la hiérarchisation ; l’articulation et la totalisation. Ce dernier impératif fait particulièrement écho à l’analyse des politiques publiques. « S’il faut déglobaliser la question de l’Etat, le fait de découper son action en « domaines » spécialisés – économie, social, justice, police, défense etc. – ne permet pas d’en saisir les ressorts. Découper l’action de l’Etat en secteurs d’intervention conduit en effet à renforcer, en la raffinant, une conception purement instrumentale (L’Etat comme structure extérieure à la société qui agit sur elle). L’histoire de l’Etat n’est pas une addition d’histoires sectorielles ou spécialisées » (Rosanvallon, 1990 [1989] : 14). Une autre proposition théorique consiste, elle, à contourner explicitement la question de la définition de l’objet en proposant de s’intéresser à la science de l’Etat, de « faire l’histoire de l’Etat au second degré en soumettant cette littérature, ce jus publicum, cette 8
Pour un débat sur ce point (Zelizer, 2005 ; Pierson, 2005). Le statut de la biographie constitue un bon exemple de
la différenciation éventuelle des sources et des échelles d’analyse entre les deux disciplines (Berkowitz, 1995 ;
Zelizer , 1998 ou encore Boucheron, 1998).
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production bureaucratique immense, mais mal connu, à une lecture historique et sociologique, de prendre au sérieux la prose administrative, les genres rhétoriques nouveaux forgés dans la pratique quotidienne des agents de l’Etat, des bureaux, des commissions, des assemblées ». L’objectif est alors « de ne plus confondre les représentations idéales et en grande partie imaginaires que l’Etat, par l’intermédiaire de quelques‐uns de ses théoriciens appointés, a voulu donner de lui‐même, et la réalité des pratiques intellectuelles, des formes de pensée et de mise en ordre du monde, des routines bureaucratiques par lesquelles il se forme, se perpétue, se légitime jour après jour avec ce que l’on appelle aujourd’hui la continuité de l’Etat » (Bourdieu, Christin et Will, 2002 : 6). Mais peu de ces définitions entreprennent de définir l’Etat en tant que tel. Les travaux sur « l’Etat moderne » font à cet égard figure d’exception 9 . Dans l’enquête européenne de 1986, un Etat moderne y est défini comme « un Etat dont la base matérielle repose sur une fiscalité publique acceptée par la société politique (et ce dans une dimension territoriale supérieure à celle de la cité) et dont tous les sujets sont concernés » (Genet, 1997 : 3). Autre participant au débat sur l’Etat moderne, Alain Guéry définit lui l’Etat comme « une des formes de [l’] organisation des pouvoirs et des vouloirs dans la société. Et cette forme elle‐
même, qui n’est pas une permanence historique, a de multiples avatars, qui peuvent apparaître, se succéder, s’effacer » (Guery, 1997 : 245). Au‐delà de la question de la définition formelle, et si, du point de vue de la science politique, ce sont probablement les travaux sur l’histoire contemporaine (XIX‐XX) qui sont peut‐être les plus directement mobilisables, il est vrai que les travaux sur la formation de l’Etat moderne et plus largement sur le moyen‐âge jouent un rôle pionnier. Leur évolution récente témoigne ainsi d’une transformation plus générale, ailleurs plus diffuse et éclatée, de l’appréhension de l’objet Etat par les historiens. Alors que dans les années 70 puis dans les années 90, l’accent avait été mis sur les facteurs, respectivement économiques et géopolitiques (Tilly, 1975 et 1990) de la formation des Etats modernes, les recherches les plus récentes conceptualisent différemment le pouvoir de l’Etat en refusant de le réduire à l’extraction (impôt) et la coercition (guerre) (Gorski, 2001). Ils mettent l’accent sur la nature négocié du pouvoir et portent ainsi attention aux simples « sujets » du roi, considérés comme une voie pour comprendre l’Etat (Te Brake, 1998). Quelles que soient l’historiographie ou la période dont ils relèvent, ces divers travaux ont donc donné naissance à des paradigmes analytiques différents qui sont autant d’approches sur lesquelles il conviendra de revenir plus bas. Mais elles possèdent aussi quelques grandes lignes de convergence qui constituent le socle des apports de l’histoire de l’Etat à ce jour. 9
Cette question et sa conceptualisation ont donné lieu à de nombreux débats (Descimon et Guéry, 1989).
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La remise en cause d’une approche unidimensionnelle de l’Etat « States are often thought to differ mainly in having stronger or weaker abilities and desires to intervene. They all do much the same thing, in others words, but do it more or less. Recent comparative scholarship across a variety of public policies has demonstrated , however, that such a simple two dimensional view of what states do fails to account for the full range of their activities. In fact, states make choices among a variety of solutions that are not merely more or less interventionist but are simply different. Comparative policy history has helped uncover the extent to which similar problems are dealt with among nations via different statutory tools. The times has come to modify our overall conception of the state in accord with this ever more nuanced historical understanding of what public authorities actually do at the coalface. State are, in this sense, qualitatively different, not merely stronger or weaker than one another” 10 (Baldwin, 2005b). Cette citation de l’historien Peter Baldwin résume parfaitement les conclusions auxquelles les travaux historiens sur l’Etat ont abouti ces dernières années. Si les historiens ne sont pas les seuls à avoir remis en cause cette opposition entre Etat fort et Etat faible (Rose, 1991), leurs recherches empiriques fournissent le plus souvent la matière première de la plupart des travaux convergents, y compris politistes. Une histoire comparatiste Une large part de ces travaux sont intrinsèquement comparatistes. Ce genre relève plus fondamentalement de la sociologie historique mais se construit en dialogue avec l’histoire. L’ouvrage de Thomas Ertman relève de ce groupe de travaux. Dans Birth of the Leviathan, il reprend la thèse classique du rôle de la guerre dans la naissance de l’Etat pour, à partir de se point de départ, s’interroger plus spécifiquement sur les causes de la différenciation entre des régimes dotés d’administrations bureaucratiques et d’autres structurés autour d’une dynamique principale de patrimonialisation (Ertman, 1997). Au terme de son propos, il propose de dépasser l’opposition entre Etat absolutiste et Etat constitutionnaliste qui fait écho à celle entre Etat fort et faible, incarnés respectivement par la France et la Grande‐Bretagne. Il construit alors une nouvelle typologie qui croise l’axe absolutisme/constitutionnalisme (regime structure) et l’axe patrimonialisme/bureaucratie (administrative infrastructure). « On devine à quel point cette façon de catégoriser les Etats change les choses : l’Etat absolutiste français 10
Du point de vue ici de la science politique, la passionnante note de lecture de Georges Lavau parue à l’occasion de
la sortie de l’ouvrage de Bertrand Badie et Pierre Birnbaum en 1980 faisait déjà le même constat (Lavau, 1980).
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que l’on avait l’habitude de considérer comme un Etat bureaucratique se trouve maintenant rangé dans la catégorie des Etats à structure patrimoniale au motif que, pour Ertman, la dépatrimonialisation ne se serait ici accomplie que tardivement au XVIIIème siècle ; à l’inverse l’Etat anglais que l’on avait tendance à voir comme un modèle d’autogouvernement indépendant du pouvoir central est rangé dans la catégorie des Etats dotés d’une bureaucratie ‘protomoderne’ » (Mann, 2000 : 333‐334). Les travaux comparatifs sur la Prusse et la Grande‐
Bretagne dirigés par John Brewer et Eckhart Hellmuth suivent le même cheminement. Restreints au XVIII siècle, ils partent de l’opposition entre les conceptualisations traditionnelles des Etats respectivement prussien (bureaucratique, absolutiste, militaire) et britannique (constitutionnaliste, parlementaire, commercial) (Brewer et Hellmuth, 1999) pour, à leur tour, en souligner les limites. Dans la suite de l’ouvrage pionnier de J. Brewer (1990), et comme les travaux de Thomas Ertman, les contributions de cet ouvrage traite d’abord des fonctions régaliennes de l’Etat (fiscalité et guerre) et pas tant de la question de son rôle social. Mais, même lorsque les travaux historiens sur l’Etat sont d’ordre monographique, ils ont pour horizon implicite la comparaison entre les deux pôles d’un axe où les Etats sont positionnés du moins au plus : un Etat américain, traditionnellement caractérisé par son absence ou du moins sa faiblesse au regard d’une « société civile » qui tient le premier rôle et un Etat français, vu comme le modèle du véritable Etat doté d’une administration forte imperméable aux corps intermédiaires et acteurs privés. A cet égard, la remise en cause progressive et simultanée de ces deux visions archétypales marque un tournant dans l’histoire de l’Etat. L’activisme de l’Etat américain Dans cette évolution, l’historiographie américaine joue un rôle moteur et propose une véritable révision de l’histoire de l’Etat outre‐Atlantique. La vulgate historienne a longtemps considéré que l’Etat fédéral américain était traditionnellement inexistant et que le principe du laissez‐faire avait longtemps caractérisé son action. Seul le tournant de la Progressive Era du début du XX siècle et surtout la mise en place du New Deal auraient donné naissance à un véritable Etat qui, malgré les signes de puissance au niveau international, continuait à être considéré comme en retrait. Bien entendu les travaux de Stephen Skowronek et d’autres ont marqué une première remise en cause de cette lecture. Mais une nouvelle vague de travaux a poussé encore plus loin le retournement de perspective. Tandis que S. Skowronek se limitait au XIXème siècle et, tout en affirmant l’existence et l’autonomie de l’Etat, le décrivait comme structuré par les partis et les cours et donc dans un état d’incomplétude par rapport aux Etats européens, les recherches historiennes ont depuis mis en évidence l’existence d’un Etat administré et centralisé et ce bien avant la fin du XIXème siècle. Comme, dans un article de 9
synthèse récent, William Novak le résume , « the most significant and lasting tenet of this revisionism is that the American state is and always has been more powerful, capacious, tenacious, interventionist, and redistributive than was recognized in earlier accounts of U.S. history » (Novak, 2008 : 758). L’histoire du droit constitue un premier terrain pour cette révision. L’ouvrage du même William Novak sur la régulation publié en 1996 a ouvert la voie 11 . Il s’appuie sur un corpus juridique (lois, ordonnances municipales, arrêts des cours de justice…) qui avait jusqu’ici été presque totalement négligée par l’histoire de l’Etat. A partir de ces sources, il s’intéresse à des domaines variés qu’il conceptualise comme des secteurs où une limitation publique de l’activité privée a existé : l’économie, l’urbanisme et les transports, les mœurs, l’hygiène et la santé publique. « Law and the state were not simply reflectors or instruments or facilitators of natural evolutions in the market or civil society. They were creative and generative » (Novak, 1996 : 236). Il forge alors le concept de « well‐regulated society », une articulation entre gouvernance et police où les intérêts et les droits des individus sont encadrés et rendus possibles par l’action publique. Novateur, son travail a cependant le défaut de se limiter aux textes normatifs et donc de laisser ouverte la question de la mise en œuvre et du respect de cette réglementation effectivement importante comme celle, encore plus complexe, du dissensus et de la construction par l’Etat des non‐droits et des discriminations (esclavage et ségrégation notamment). Des études thématiques qui mêlent sources législatives et archives de la mise œuvre des décisions de l’Etat permettent en effet une vision plus complexe du processus. Peut‐être le plus évident, un premier domaine est celui de l’économie où l’Etat apparaît comme ayant fortement encadré, permis et organisé le développement économique du pays du « laissez‐
faire ». L’étude de la création du système postal par Richard John (John 1995) fait figure de classique. Il y montre comment le développement d’un réseau postal est l’œuvre du gouvernement fédéral et le rôle central que celui‐ci a joué dans la naissance d’une économie nationale, en dessinant par exemple les voies de communications et d’échange comme le rythme même de la vie économique (travail le dimanche notamment). L’ouvrage de Richard Franklin Bensel met, lui, en évidence de manière plus systématique la manière dont l’industrialisation des Etats‐Unis a été encadré, porté et facilité, dès l’origine, par l’action de l’Etat fédéral (Bensel, 2000). 11
Plus récemment, Jerry L. Mashaw a mis en évidence l’existence dès la création des Etats-Unis d’un véritable droit
administratif qui témoigne à sa façon de la présence d’une administration centralisée (2005).
10
Un second grand domaine d’étude concerne la définition de l’espace national et de ceux qui en sont membres ou en sont exclus 12 . L’ouvrage de Richard White sur l’histoire de l’Ouest Américain montre par exemple comment, loin d’être un lieu de non droit, cet Ouest fut une création continue du gouvernement fédéral (White, 1991). En retour, le développement de cet Ouest américain a structuré la mise en place d’une véritable bureaucratie, importante en nombre et répartie sur l’ensemble du territoire à tel point que, symbole de l’individualisme américain, l’Ouest apparaît en réalité comme le laboratoire du « big government ». Parmi les politiques mises en œuvre par l’administration dans l’Ouest figure bien entendu celle de la catégorisation des citoyens et des non‐citoyens come des questions ethniques et de l’esclavage. Comme, en science politique cette fois‐ci, les travaux de Desmond King notamment l’ont parfaitement montré (1995 et 2009 13 ), la mise en place de l’esclavage puis de la ségrégation raciale constitue ainsi une illustration particulièrement saisissante de l’existence d’un Etat interventionniste aux Etats‐Unis. L’étude des questions raciales, d’immigration ou encore de genre ont ainsi donné lieu à de nombreuses études de cas (Fehrenbacher, 2001 ; Ngai, 2005). Lié à cette question, le « police power », qui va jusqu’au contrôle des mœurs et des comportements constitue également un champ d’étude important (Barriger Gordon, 2002). Concernant notamment des attitudes relevant potentiellement du privé, par leur nature, ces tentatives de contrôle étatique manifestent avec d’autant plus de force l’existence d’un Etat américain bien avant le début du XX siècle (Stearns, 1999) et plus encore l’ampleur de son interventionnisme comparé à celui de ses équivalents européens. Les travaux sont nombreux dans ce domaine. Définissant l’Etat et sa capacité comme un « phenomena of police », les historiens du droit y tiennent une large place et ont montré précisément que le « police power » a été une modalité puissante d’affirmation de l’Etat fédéral aux Etats‐Unis (Tomlins, 2008). 12
Dans cette catégorie figure bien entendu les travaux sur le rôle fondamental joué par la Civil War dans le
développement de l’Etat américain (par exemple Wilson, 2006). Ce thème pourrait faire l’objet d’un working paper
spécifique.
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Voir cet ouvrage pour une bibliographie conséquente et également la bibliographie note 6 dans (Hacker, 2005).
11
L’entre‐deux : le cas britannique Le changement de paradigme se retrouve également dans l’étude du cas britannique. Les travaux de Martin Daunton (2001 et 2002) portent sur la mise en place de la taxation en Grande‐Bretagne de 1799 à 1979. Ils ont montré comment les institutions britanniques et notamment l’articulation entre gouvernement central et pouvoirs locaux ont permis le développement, au XIXème siècle, d’un système fiscal qui a rendu possible la collecte d’un pourcentage du revenu national bien supérieur aux prélèvements alors effectués par l’Etat français à la même époque ; la contraction d’emprunts d’Etat par un nombre de citoyens largement supérieurs à l’équivalent français et la mise en place d’impôts directs plus tôt et plus largement que dans les cas français et allemand 14 . Dès lors que l’on considère que le prélèvement fiscal et le consentement à l’impôt comptent parmi les critères principaux d’existence d’un Etat, il apparaît qu’une plus faible institutionnalisation de l’Etat britannique a permis à celui‐ci d’être plus fort 15 . L’étude de Peter Baldwin sur la mise en place au XIXème et au début du XXème siècle de ce que l’on appellerait aujourd’hui des politiques de santé publique arrive exactement à la même révision (Baldwin, 1999). A l’époque des grandes épidémies, les Etats allemand et français sont connus pour avoir mis en place à leur frontière des contrôles et des restrictions strictes à l’inverse de leur voisin britannique. Cela a longtemps été interprété comme un indice de la puissance des premiers et de la faiblesse des seconds. Pourtant, cet interventionnisme à la marge du territoire n’a fait que compenser l’impuissance de leur administration à mettre en place les actions nécessaires à la prise en charge de l’épidémie à l’intérieur du pays. A l’inverse, fort de leur expérience en matière d’hygiène publique et de lutte contre l’insalubrité, les britanniques disposaient d’un ensemble de services dédiés, dépendant de l’Etat central mais dans un rapport articulé avec les pouvoirs locaux et notamment les villes. Ce maillage les a conduit à laisser franchir leur frontière y compris aux malades qu’il était possible de veiller et de surveiller. « In fact, seen from another angle, the British were much more interventionist. Their sanitationist agenda involved statutory incursions into civil society and presupposed a wealth and willingness to act on the part of the authorities, both central and local, that put Continental efforts to shame. Quarantinist public health was, from this vantage, not the tactic of strong states but precisely that of weak administrations able to enforce their power only at particular bottlenecks, but otherwise unconvinced of their ability to penetrate civil society very 14
Pour la période précédente voir les travaux de Michael J. Braddick (1996).
Voir également les travaux de David Stasavage qui est lui politiste (NYU) mais qui travaille sur la longue durée
(Stasavage, 2003).
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far. A strong state, one might be tempted to conclude, is not seen, while a weak one flails about noisily” (Baldwin, 2005 : 24). Là encore, il peut être envisagé que « still interventions run deep ». Là encore émerge la nécessité d’une réflexion qualitative et non plus quantitative sur l’Etat. Apparaît alors la question, qui est au cœur des travaux les plus récents sur l’Etat américain qui seront abordés en propre plus loins, du rapport entre existence, visibilité et efficacité de l’Etat. Toujours à partir de l’étude du cas anglais, envisagé dans son rapport à l’exemple français, Cécile Laborde, historienne des idées politiques, travaille sur l’Etat à partir d’une analyse de l’utilisation du terme dans le débat politique. Ce faisant, elle met dos à dos les tenants de l’idée dominante que l’Angleterre serait non seulement sans Etat mais qu’elle ne connaîtrait pas jusqu’au concept même d’Etat (Nettl, 1968 ; Badie et Birnbaum, 1979 et Dyson 1980), d’un côté, et leurs contestataires qui, preuves à l’appui, montrent que l’Angleterre a connu historiquement un tel concept – entendu comme l’Etat fort bureaucratique ‐ dans son débat politique (Meadowcroft, 1995). Elle montre que le concept d’Etat n’est pas plus présent en France qu’en Angleterre, ni l’inverse, mais que le même mot désigne des réalités différentes et que l’étude des « représentations » de l’Etat permet de saisir ces « réalités ». Son objet est la pensée pluraliste anglaise ente 1880 et 1920. Celle‐ci développe de manière continue une critique de l’Etat. « Il peut sembler paradoxal d’utiliser l’anti‐étatisme comme grille de lecture d’une tradition de l’Etat. Le paradoxe, cependant, se dissout si l’on veut bien admettre que l’anti‐étatisme présente une image inversée assez précise de la tradition étatique nationale, dans la mesure où sa rhétorique radicale tend à accentuer les traits marquants de ce qu’elle rejette, les rendant plus saillants » (2000, 73). Précisément, les discours et stratégies argumentatives mise en œuvre témoignent d’une société où il est devenu impossible de penser le politique sans le concept d’Etat. Son acception est par contre différente. Si l’anti‐
étatisme de ces radicaux britanniques frappe par sa modération, c’est précisément parce que l’Etat britannique, contrairement au cas français, « apparaît rarement comme le représentant d’un ordre normatif supérieur à l’ordre de la société civile. […dans le cas anglais] l’apologie de la « société civile » contre « l’Etat » a peu de sens, même dans la mouvance radicale, précisément parce que le concept d’Etat n’apparaît pas dans le discours politique comme l’anti‐thèse normative de la société » (Laborde, 2000 : 77). De manière significative, le terme « the state » est d’ailleurs à l’époque utilisé pour parler tantôt de l’autorité politique constituée, tantôt de la société dans son ensemble. A partir d’une posture et d’un objet radicalement différent de Peter Baldwin, Cécile Laborde arrive ainsi à la même conclusion. « La recherche comparative sur le concept d’Etat serait affinée, dès lors, si au lieu de distinguer 13
entre traditions « avec Etat » et traditions « sans Etat », on s’attachait à analyser les différents degrés et types de contestabilité du concept dans des traditions différentes. Et qui sait si, dans cette optique, les étrangers ne nous apparaîtront, non plus comme désespérément dépourvus, mais plutôt comme différemment dotés » (82). La faiblesse de l’Etat fort : retour critique sur le paradigme français On l’aura compris dans ces travaux, l’Etat français apparaît comme le référent canonique. Cette révision concerne donc également son histoire. Symétriquement, la force et la centralité de l’Etat français sont elles aussi remises en cause comme paradigme d’analyse. Dans son ouvrage, Origins of the French Welfare State, Paul V. Dutton met par exemple à mal la vision d’un Etat centralise et jacobin où l’intérêt général et le traitement universaliste prévaudrait. A travers l’étude de la mise en place des allocations familiales et de l’assurance sociale, il montre au contraire que l’Etat social français s’est construit dans une négociation permanente avec un grand nombre d’acteurs collectifs, au premier rang desquels les sociétés d’aide mutuelle et les associations familiales (Dutton, 2002). Plus généralement, depuis quelques années, les travaux se sont multipliés pour mettre fin à une opposition entre « jacobinisme » et « corporatisme » (Lemercier, 2005). L’étude sur la longue durée met ainsi en évidence que l’Etat français ne s’est pas construit contre la société civile mais dans un rapport complexe et évolutif avec elle. Le rôle de relais mais aussi d’expertise ou encore d’informateurs joués par plusieurs organisations ou groupements privés dans la conduite et la détermination de l’action de l’Etat au XIX siècle a été nettement mis en évidence (Kaplan et Minard, 2004). Pierre Rosanvallon fait le même constat et parle d’un « impératif de gouvernabilité » qui expliquerait, des l’origine, le statut donné à certaines organisations collectives détentrices d’un savoir et d’une compétence dont l’administration a été et est dans l’histoire le plus souvent dépourvue (Rosanvallon, 2004). Rejoignant de nombreux travaux de micro‐histoire, il insiste de même sur la perméabilité qui existe entre Etat et notables. Situé à une échelle différente, mais portant également sur le XIX siècle 16 , les travaux de Maurizio Gribaudi sur l’administration arrivent au même constat. Dans un article récent, il étudie les 534 employés et fonctionnaires qui ont travaillé dans les bureaux chargés de la tutelle des organismes de la Santé et e l’Hygiène publiques au ministère de l’Intérieur et à celui de l’Agriculture et du Commerce entre 1803 et 1910. Il montre alors que « loin d’apparaître comme un organisme bien structuré et délimité par ses fonctions, l’administration se révèle donc plutôt comme une ruche bourdonnante et totalement intégrée à l’intérieur d’une société qui se transforme sous le tiraillement de forces 16
Pour d’autres références intéressantes de cet auteur (Gribaudi, 1999 et 1998).
14
contradictoires. L’apparente continuité de ces pratiques relationnelles masque difficilement les changements plus qu’importants qui s’opèrent au cours du temps. Ces changements vont globalement dans le sens d’une ouverture et d’une démocratisation des administrations centrales, mais marquent aussi le déplacement de leurs racines d’une zone à une autre de la société française […]Le fonctionnement administratif lui‐même ne peut sortir indemne de ces transformations ; il n’est pas non plus autonome par rapport aux tensions, tant profondes que souvent invisibles, produites par les différentes appartenances sociales originaires des employés, par les relations qu’ils nouent aussi à travers l’administration, par la configuration complexe et variable dans laquelle ils sont inscrit au fil de leur carrière » (Gribaudi, 2009 : 37 et 38). Vers une nouvelle théorisation de l’Etat Ce cheminement croisé des historiographies nationales convergent vers des reformulations et donnent donc forme à de nouveaux questionnements. Appliqué à l’Etat américain, la question n’est plus « why is it so weak in comparison to some European equivalents, but why is so much of it arranged outside the state ? » (Baldwin, 15). Du point de vue français, le « problème théorique » devient de même celui de « l’organisation des rapports entre Etat et société civile » (Lemercier, 2005 : 169 ; Rosanvallon, 2004). On l’aura compris les quelques points de convergence entre les principaux travaux historiens sur l’Etat produit au cours de ces dix dernières années invite à mettre fin aux conceptualisations qui continuent à structurer les réflexions sur l’Etat. Le dépassement de la distinction entre Etat faible et fort et celui, lié, de la distinction entre « Etat » et « société civile » appelle par exemple à reconsidérer les critères d’analyse de l’Etat formalisés par Bertrand Badie et Pierre Birnbaum au premier rang desquels celui de l’institutionnalisation de l’Etat avec la mise en place d’une bureaucratie centralisée et indépendante. Pourtant, malgré les importants acquis historiens qui viennent d’être présentés, le constat d’une relative faible conceptualisation alternative s’impose. « A larger reconceptualization of the state still awaits us. Ever more sophisticated monographs on specific policy fields have appeared, as well as empirically‐based works ruminationg more broadly on the state. […] When theorized, the state is an often lamentably provincial concept, reflecting the national experiences and preiudices of its formulator. When comparing states to one another, the distinguishing concepts tend to be simple binary categorizations : bureaucratic versus 15
patrimonial, centralized versus federal, and, above all, laissez‐faire versus interventionsit” (Baldwin, 2005b : 15). Cette absence d’une théorisation intégrée s’explique bien sûr par le goût pour le particulier et la contextualisation (toujours singulière) de la discipline historique. Mais elle le dépasse largement. Les politistes américains qui dialoguent avec les historiens dressent le même constat d’une absence notable d’explication integrée (Hacker, 2005 : 128) même s’ils tentent avec plus de systématisme de faire émerger de nouvelles grilles d’analyse (Hacker, 2005 et Jacobs et King, 2009, chapitre 11). Cependant, à chaque fois, et puisque les historiens fournissent la matière première de la plupart des travaux de science politique avec lesquels ils dialoguent, les propositions théoriques qu’ils formulent s’accompagnent de considérations méthodologiques. Je parlerai donc d’« approches » historiennes de l’Etat plutôt que de « théories ». Il est possible de distinguer trois grandes approches aujourd’hui. Cette typologie est nécessaire à la présentation mais reste bien entendu pour partie artificielle. Chacune de ces approches compte des liens étroits avec les autres. Elle fait par ailleurs plus ou moins l’objet d’une explicitation formelle. L’Etat comme organisation : de la nécessité des jeux d’échelle La première est la plus explicite et peut‐être la plus révisionniste en ce qu’elle rompt avec la conception weberienne de l’Etat comme, avant tout, une bureaucratie centralisée et impersonnelle qui constituait encore l’arrière‐plan théorique de la première vague de travaux sur l’histoire de l’Etat réalisés dans la lignée de Theda Skocpol. Pour ce qui est du champ français, cette nouvelle approche a notamment été théorisée par Patrick Fridenson puisque, s’inspirant de l’histoire des entreprises, il propose de construite « une histoire de l’état contemporain comme organisation » c’est‐à‐dire la mise à « jour des stratégies des principaux rouages de l’Etat, l’évolution de leurs structures, en faisant toute leur place aux pratiques et aux représentations des usagers comme des agents de l’Etat » (Fridenson, 2000, lecture en ligne). Sans pour autant être explicitement attribué à cette approche, le concept d’« articulation » en relève. Les travaux issus du programme européen sur la genèse de l’Etat 17 concluent ainsi de manière unanime que la naissance de l’Etat ne peut se comprendre que dans son rapport aux structures de pouvoir (en l’espèce au premier rang desquelles les villes ou cités) qui sont déjà là ou se forment par ailleurs, avec lesquels il est parfois en symbiose, parfois en concurrence, toujours en négociation et en interaction (Genet, 1995). C’est ainsi en s’appuyant sur les 17
Là encore le lien entre théories, conclusions et historiographies nationales doit être souligné. La présence
d’historiens citoyens d’Etats où les villes ont été historiquement des structures sociales de pouvoir ont joué un rôle
moteur dans la prise en compte de ces différentes échelles.
16
autorités existantes et en créant avec elle une véritable organisation que l’Etat exerce son pouvoir. L’étude désormais classique d’Ovaldo Raggio sur la République de Gênes aux XVI et XVII siècles en fournit une illustration. « Dans les deux bourgs de la Fontanabuona qu’il observe, l’Etat moderne en formation est une réalité lointaine. Ce qui ne veut pas dire qu’il soit absent : mais il n’existe qu’au prix de composer avec les règles locales : celles, coutumières, de ces communautés montagnards, et plus profondément avec celles qui sont liées au fonctionnement de la parenté » (Revel, 1995 : 83) 18 . Plusieurs contributions de l’ouvrage déjà évoqué de J. Brewer et E. Hellmuth traitent également de cette question. Il apparaît que, pour la Grande‐Bretagne certes mais également pour la Prusse du XVIII siècle, le pouvoir de l’Etat, sa capacité à se faire obéir, n’a rien d’absolu, il n’existe que comme conséquence de l’habileté de celui‐ci à mettre en place une coopération avec les autorités déjà établies, comme les villes, les provinces, les états ou encore les élites sociales. Joanna Innes, l’une des contributrices à l’ouvrage propose ainsi le même concept que Pierre Rosanvallon, sans y faire nulle part référence. Elle suggère de porter attention à « l’articulation » tandis que les directeurs de l’ouvrage proposent dans la même perspective une nouvelle définition de l’Etat comme « a conglomerate of all institutions which spend public money and exert legitimate force » (Brewer et Hellmuth, 1999 : 20). Cette reformulation théorique renverse donc l’équivalence entre l’existence d’une bureaucratie et celle de l’Etat. L’Etat peut exercer un réel pouvoir par d’autres voies et notamment en s’appuyant sur des autorités intermédiaires et non centralisées. Tandis qu’elle contient un dépassement de la distinction entre « centre » et « périphérie » qui a longtemps structuré certaines approches classiques de l’Etat, cette proposition de conceptualisation contenue dans la notion « d’articulation » trouve des échos dans plusieurs travaux récents de science politique qui ne font finalement que « redécouvrir », sans forcément y faire référence, les conclusions des historiens modernistes 19 . Reprenant la distinction de Michael Mann entre « despotic power » et « infrastructural power », respectivement la capacité coercitive de l’Etat et celle de mettre en œuvre les décisions en s’appuyant sur des relais au croisement de l’Etat et de la société (Mann, 1993), Daniel Ziblatt compare la construction des états italiens et allemand (2006). Le fédéralisme allemand s’explique alors par l’existence préalable de structures intermédiaires de pouvoir sur lesquelles 18
Pour une lecture critique par cet auteur du concept même d’Etat dans son acception courante (Raggio, 1995).
Dont elle limite, toutefois, ce faisant la nature novatrice qui leur est parfois attribuée. Je fais référence ici aux
commentaires de D. King et R.C. Liberman (2009) sur l’ouvrage Daniel Ziblatt (2006) et Kimberley S. Johnson
(2007). Ce que montrent ces ouvrages a été à plusieurs reprises mis en évidence par les historiens modernistes qui se
sont intéressés à l’Etat.
19
17
la construction de l’Etat allemand va s’appuyer. L’infrastructural power existant sert d’appui pour développer un despotic power. Dans cette conception, le fédéralisme is « an outgrowth of a very specific path of nation‐state formation in which state building and political development precede national unification, leaving in place a set of states that can both negotiate the terms of national unification and effectively govern after natinoal unification » (Ziblatt, 2006 : 16). La conception de l’Etat comme organisation conduit ainsi à cesser de voir le fédéralisme comme un obstacle à l’action et à l’existence de l’Etat mais plutôt comme un des moyens possibles de l’action de cet Etat. Dans le cas américain, cette vision a conduit à reconsidérer la question du rapport entre l’Etat et les états pour ne plus les considérer dans un rapport de concurrence ou même de subsidiarité mais pour faire de l’articulation entre ces deux composantes de l’organisation l’objet même de l’analyse (Howard, 1999) et un « pattern of American Governance » (Gerstle, 2009). Dans un ouvrage de science politique récent, Kimberley S. Johnson montre comment, bien avant le New Deal et dans une période que l’historiographie a jusqu’à récemment eu tendance à décrire comme celle du « laissez‐faire », l’Etat central a ainsi agi directement sur la société et l’économie en utilisant ce qu’elle appelle des « intergovernmental policy instruments » comme, par exemple, des prêts fédéraux aux états. Des réflexions comparables sont aussi appliquées à l’étude de l’Etat à travers l’articulation entre l’action des cours de justice et celle de l’administration fédérale (Schiller, 2005). Dans le cas français, et en l’absence du fédéralisme, c’est l’Etat bureaucratique lui‐même qui s’est d’abord vu décomposé comme une organisation, un ensemble d’éléments articulés, du plus grand (le corps d’Etat et le ministère) au plus petit (le serviteur de l’Etat). Cette approche de l’Etat comme organisation a notamment inspiré toute une vague de travaux au croisement de l’histoire de l’Etat et de l’histoire économique : de l’étude de la direction générale des impôts (Tristram, 2005) aux directeurs généraux des douanes (Clinquart, 2000 et Bordas, 2004) en passant par la direction du Trésor (Quennouëlle, 2000), l’organisation de la prévision économique au ministère des finances (Terray, 2002). Comme le résume l’un de ces auteurs, « la relation qui s’établit entre le fonctionnement intérieur de l’Etat et son action sur l’économie et la société est l’une des perspectives de l’histoire de l’Etat les plus récentes, qui devrait permettre d’apprécier les liens entre les choix délibérés des hommes politiques et des acteurs administratifs – qu’il s’agisse d’individus, de groupes, de corps ou d’institutions – et leurs effets sur les décisions publiques et donc sur la société » (Quennouëlle, 2002 : 73). 18
S’ils ne se revendiquent pas de cette appellation pour utiliser davantage le terme de « système » que celui‐ci d’« organisation » 20 , les travaux de Marc‐Olivier Baruch et Vincent Duclert sur l’administration, ou plus exactement sur les serviteurs de l’Etat que sont les administrateurs, relèvent de cette approche 21 (Baruch et Duclert, 2000). Ils portent ainsi une attention particulière aux services interministériels. Entrepris sur la période 1875‐1945, puis appliqués à l’étude de la IVème République, ce travail se propose « moins ici d’étudier la nature des politiques – économiques, sociales, diplomatiques, militaires etc.. – conduites par le régime que de descendre dans la salle des machines pour tenter de comprendre l’Etat de la IVème République comme système administratif. Il s’agira de prêter attention à ce auquel on en prête habituellement peu : services de gestion (directions de personnel et de budget, contrôles financiers), lieux de coordination administrative (secrétariats généraux, administration préfectorale), institutions périphériques aussi, dont certaines sont bien connues (commissariat général au plan), d’autres beaucoup moins. Comprendre les stratégies institutionnelles et les choix des acteurs implique de percevoir enjeux et ressources qu’ils mobilisent, de reconstruire les images qu’ils se font du présent, du passé et de l’avenir, de décrypter derrière les pratiques administratives les stratégies d’obéissance ou au contraire d’évitement, de mesurer les marges de manœuvre et la connaissance qu’en avaient les acteurs » (Baruch et Duclert, 2003 : 505). Particulièrement mis en évidence à travers l’étude de l’Etat en situation extrême (régime autoritaire ou régime colonial), le fonctionnement de l’appareil d’Etat vu comme organisation révèle la fluidité et la nature diffuse du pouvoir partagé entre plusieurs des rouages de l’Etat et des strates du pouvoir politique comme de l’administration (Baruch, 1997 et Baruch et Duclert (dir.), 2003). Dans le cas soviétique également, l’administration organisée, en ce « qu’elle consiste à étouffer activement la politique », constitue une objet intermédiaire particulièrement pertinent pour étudier l’Etat (Cohen, 2003 : 269). A l’image de l’étude de l’articulation entre « Etat » et « états » dans le fédéralisme américain, cette approche de l’administration comme système va de pair avec l’adoption de changements d’échelles, en l’espèce hiérarchique mais aussi géographique. Fortement développée en France où elle fait figure de principale approche historienne de l’Etat, cette approche n’est pas 20
Lui-même également utilisé puisqu’il est question « d’organisation de l’Etat », (Baruch et Duclert, 2003 : 509).
Les termes employés relèvent de l’organique à l’image de « machinerie de l’Etat » ou d’« appareils d’Etat » (Baruch
et Duclert, 2000 : 6-7). Dans ces premiers travaux, M-O Baruch emploie le terme d’ossature en précisant de quelle
manière, à travers l’administration, c’est bien de l’étude de l’Etat dont il est question : « sans que l’administration se
confonde juridiquement avec l’Etat, elle en constitue l’ossature » (Baruch, 1997 : 14).
21
Je présenterai ici principalement ces travaux qui font figure d’exemples dans l’historiographie française, mais ils
ne sont pas les seuls à avoir réintroduit l’histoire sociale et politique de l’administration comme une voie d’accès à
celle de l’Etat (Kott, 1995 et Viet, 1994, par exemple). Egalement pour une approche de l’administration du
renseignement, (Laurent, 2007 et 2004).
19
sans parallèle Outre‐Atlantique. Un des premiers travaux à se présenter comme relevant d’une histoire de l’Etat et à l’inverse de la conception tocquevillienne dominante, Brian Balogh (1991) a montré, par exemple, comment la politique énergétique de développement du nucléaire aux Etats‐Unis ne pouvait se comprendre que par l’organisation administrative et l’action de certains membres des administrations de l’Etat centrale alors que la « demande sociale » tant des groupes d’intérêt économiques que des citoyens, était totalement inexistante. Plus récemment, et venant lui de la science politique, l’ouvrage désormais classique de David Carpenter n’est pas sans écho avec l’approche de V. Duclert et M.O Baruch puisqu’il s’intéresse également aux fonctionnaires de niveau hiérarchique moyen et à la manière dont ils se situent les uns par rapport aux autre (2001). Par son approche des réseaux, il relève cependant plus centralement de la seconde approche, bien entendu liée. Plus récemment le développement d’une histoire transnationale de l’Etat peut être rattaché à la définition de celui‐ci comme une organisation. Ce n’est plus seulement son organisation interne qui est étudiée mais son articulation avec d’autres Etats ou plutôt d’autres organes de l’Etat dans une dynamique et une organisation en réalité trans‐étatiques et trans‐
ministérielles. Les recherches de Caroline Douki, David Feldman et Paul‐André Rosental sur l’articulation entre les actions des ministères du travail respectivement italien, anglais et français s’inscrivent dans cette perspective (2006). Ces auteurs qualifient cependant leur démarche comme la construction d’une « histoire relationnelle ». L’Etat comme relation et le croisement des points de vue Le terme relationnel n’est en effet pas étranger à la reconceptualisation en cours de l’Etat par les historiens et l’idée d’un Etat relationnel recoupe pour partie la précédente. Mais ce second paradigme s’en distingue en ce qu’il prend comme point de départ non tant à les relations entre des parties de l’Etat‐organisation que celle entre Etat et Société. Là encore, cette reformulation est commune à l’ensemble des historiographies considérées. A partir de son analyse des différences entre les gestions des risques sanitaires par les Etats européens au moment des grandes épidémies (plus haut présentée), Peter Baldwin suggère de dresser une typologie des Etats en fonction des modalités de leur interaction avec la société civile 22 . Sur ce point, il converge avec la théorisation de Pierre Rosanvallon lorsque celui‐ci considère que « faire l’histoire de l’Etat consiste à analyser les conditions dans lesquelles se sont formées des 22
En l’espèce, Peter Baldwin suggère la possibilité de typologie de la relation Etat/société civile en fonction de la
nature, « curative » ou « preventive », de la gestion du risque par le premier. Son étude de la mise en place
différentielle des politiques de financement de la recherche sur le Sida en est une illustration.
20
figures du rapport Etat/société. Car il n’y a pas d’histoire de l’Etat hors de la saisie d’une relation : l’Etat n’existe que par rapport à la société » (1990 : 15). Il s’agit ainsi de saisir la nature « privée » des serviteurs de l’Etat comme celle « publique » des initiatives d’acteurs privés. Par ce qu’elle prend l’individu comme unité d’analyse, l’histoire de l’administration construite par M‐O Baruch et V. Duclert relève ainsi également de cette conceptualisation. Le « serviteur de l’Etat » y est pris en compte dans sa globalité et donc est replacé dans l’ensemble de ses relations, par l’étude de ses origines sociales, sa trajectoire, sa formation et bien sûr ses engagements puisqu’il est question d’une « histoire politique de l’administration ». Dans cette perspective, le terme de réseaux est fortement mobilisé. (Baruch et Duclert, 2000). Pour ce qui est de l’étude de l’administration de la IVème République, la conduite d’une analyse de l’Etat à la fois organisationnelle et relationnelle permet aux deux auteurs d’expliquer « l’impossible réforme de l’Etat ». Il s’agit en effet de « tenter de comprendre pourquoi [la] conversion au keynésianisme, donc à une forme de modernité économique, ne trouva pas son pendant en matière d’organisation de l’Etat » (Baruch et Duclert, 2003 : 509). Tandis que des administrations nouvelles et légères créées sur des bases relationnelles, issues des anciens réseaux de résistance et/ou de formation initiale, conduisent la réforme de la politique économique, le fonctionnement organisationnel de l’Etat perdure sur le modèle classique de la pyramide administrative, chefs de bureau/sous‐
directeurs/directeurs. L’analyse de réseau est également le trait distinctif du travail de D. Carpenter qui explique le gain d’autonomie des administrateurs américains par le fait qu’ils ont pu s’appuyer sur de nombreux réseaux au croisement des champs économique, social et ethnique notamment. Ici, et de manière à première vue paradoxale, c’est les relations entretenues avec le privé qui permettent aux acteurs du public de gagner en autonomie administrative. Sur un plan méthodologique, cette redéfinition relationnelle de l’Etat conduit à un usage extensif de la méthode prosopographique, y compris à l’aide d’outils informatiques dédiés (Genet, 1995, Lemercier, 2005b). La reconstitution de réseaux et de trajectoires croisées s’est ainsi largement développée dans l’histoire de l’Etat ces dernières années pour en devenir un point de passage obligé. Elle a donné naissance à plusieurs concepts. Là encore, les travaux des historiens modernistes, malheureusement peu cités par les historiens du contemporain et surtout les politistes qui travaillent sur le passé, ont donné lieu à d’importantes avancées conceptuelles. La notion d’« élites au pouvoir » est particulièrement intéressante. Elle correspond au refus de l’un des membres du projet européen sur la genèse de l’Etat à se limiter à l’étude des assemblées représentatives comme il lui était originellement demandé. A 21
la place, il a proposé de s’intéresser à un ensemble des relations sociales au sein d’un groupe d’acteurs à la fois privés et publics saisis dans un continuum : les « élites au pouvoir » (Reinhard, 1996). Cette approche permet de saisir la genèse de l’Etat moderne non seulement à partir du haut mais également à l’aune de l’action des acteurs du sujet à l’homme du commun en passant par les membres des dites assemblées. Issu lui d’historiens spécialistes des XIX et XXème siècle, le projet de saisir l’Etat par ses marges et la notion de « pratiques consultatives de l’Etat » (Chatriot et Lemercier, 2008 : 191) semblent également opératoires. « Une fois reconnue l’inanité d’une vision qui laisserait face à face Etat et individu », elle entend aider à « comprendre ces relations entre corps intermédiaires, entre concurrences, alliances et répartition des rôles (Lemercier, 2005 : 174) ». L’Etat est alors saisi à travers ses relations entretenues avec les chambres de commerce (Lemercier, 2003), le conseil national économique (Chatriot, 2002), les prudhommes (Cottereau, 1987) ou encore les chambres syndicales ouvrières (Soubiran‐Paillet et Pottier 1996) Mais c’est, sans surprise, au sein de l’historiographie américaine que cette relation entre public et privé qui se joue au cœur de l’Etat et lui est constitutive a donné lieu à la conceptualisation la plus poussée 23 . Pas forcément intégrée comme un champ unique, un nouveau paradigme d’analyse de l’Etat existe pourtant aujourd’hui. Il s’articule autour ce qui peut être qualifiée d’une réflexion sur l’« invisibilité » de l’Etat américain c’est‐à‐dire la manière dont le privé et le public s’articulent pour donner leurs contours aux politiques de l’Etat. Il fait de l’étude de l’évolution et des changements de cette interaction entre privé et public un fil rouge particulièrement prometteur pour la compréhension de l’Etat américain et des transformations contemporaines. Bien que l’idée soit nettement plus ancienne (Balogh, 2009) et que la nature hybride public/privé de l’Etat américain ait donné lieu depuis longtemps à des travaux historiens (Katz, 1986), la conceptualisation de l’Etat américain comme un « hidden State » est due non à historien mais à un politiste et est à l’origine restreinte à l’étude du Welfare State. En 1997, Christopher Howard propose de redéfinir la politique sociale de l’Etat américain en ne prenant plus seulement en compte les dépenses mais également les déductions fiscales accordées par le gouvernement au titre de l’action sociale (tax expenditures with social welfare purposes). Il désigne alors cette politique sociale ainsi redéfinie comme celle d’un « hidden welfare state ». Pour étudier ce dernier, il s’inscrit dans une perspective historique (ce qui en fait aujourd’hui une référence systématique des travaux 23
Les débats déjà anciens qui ont suivi le développement de la micro-histoire italienne et son traitement de l’Etat
semblent également porteurs de réflexions intéressantes (Chittolini, 1995 ; Guarini, 1995). Il est à cet égard
surprenant de voir que ces travaux sont rarement cités dans les débats des politistes contemporains qui semblent
redécouvrir aujourd’hui plusieurs des thèmes abordés à l’époque dans ces débats.
22
historiens) en conduisant des études de cas de l’amont comme de l’aval de quatre programmes fédéraux de déductions fiscales décidés respectivement en 1914, en 1926, en 1975 et 1978. Il arrive à deux principales conclusions. La première est que, ainsi calculées, les « dépenses » de Welfare State aux Etats‐Unis atteignent un niveau comparable à celui des pays européens. Plus encore, dès lors que cet instrument particulier est mis en place, la chronologie de l’Etat providence américain est nettement différente. Contrairement aux représentations dominantes, le New Deal ne marque pas alors de réelle rupture puisque deux des tax cuts considérées lui sont antérieures. La seconde conclusion qui nous intéresse ici est que la différence entre les deux types d’Etat doit être rapportée à la différence des instruments de politique publique qu’ils mobilisent. Faisant finalement écho à la réflexion de K. Johnson sur l’existence d’instruments propres au fédéralisme, ce second point a conduit, plus récemment, Christopher Howard à reformuler sa question de recherche. It « may not be why the U.S. government does relatively little compared to European governments. Rather, the question is why governments of similar size devote comparable resources to pursue similar policy objectives through such a diverse mix of policy tools” (2003 : 415). Plusieurs travaux historiens s’inscrivent dans la suite de cet intérêt pour le « hidden state » 24 et de cette réflexion sur les instruments. Deux catégories peuvent être identifiées. La première concerne toujours et uniquement la question du Welfare. La seconde pousse la logique plus loin et s’interroge sur l’invisibilité de l’Etat américain y compris dans ces fonctions régaliennes. Le premier groupe de travaux confirme l’intuition de C. Howard sur la nature cachée de l’Etat américain en matière de Welfare. Mais il rejette simultanément l’idée que les objectifs de ces politiques soient les mêmes que dans le cas des pays européens qui privilégient l’instrument de la dépense publique. Ils sont notamment beaucoup moins redistributifs et plus inégalitaires 25 . Le choix de l’instrument n’est pas neutre et soulève la question de la nature de cet « hidden state » comme de sa comparabilité. Exactement contemporain du travail de Christopher Howard, l’ouvrage de Sanford M. Jacoby sur la politique sociale de trois firmes américaines et sur la manière dont celle‐ci a évolué en fonction de l’action syndicale d’une part, de la politique sociale du gouvernement de l’autre, lui fait écho. Il déconstruit notamment l’idée que le « welfare capitalism » aurait disparu avec la mise en place des réformes sociales à l’époque du New Deal. Il met en évidence sa recomposition dans un rapport complexe avec le développement d’actions sociales directement pilotées par l’Etat fédéral. Toutefois, s’il offre une matière première intéressante, il ne conceptualise pas vraiment la manière dont, à travers, sa recherche il aborde cette question de l’interaction 24
25
Pour une prise en compte historienne convergente du welfare (Katz, 2001)
Pour une discussion explicite de ce point (Hacker, 2005).
23
entre privé et public au cœur du welfare aux Etats‐Unis. Le travail de Marie Gottschalk sur ce qu’elle appelle le « Shadow Welfare State » 26 s’inscrit lui explicitement dans la voie ouverte par C. Howard. L’auteur tente d’expliquer pourquoi les Etats‐Unis n’ont pas d’assurance maladie universelle et notamment pourquoi les syndicats américains n’ont pas obtenu sa mise en place. Elle trouve sa réponse dans l’existence d’un « peculiar employment‐based welfare system that is neither wholly private or public ». Ce n’est pas l’impuissance (mythique) d’un syndicalisme pourtant structuré et puissant qui permet de comprendre l’absence d’une telle assurance maladie mais plutôt l’existence d’un “shadow welfare state” en ce que celui‐ci structure les intérêts et les représentations des acteurs syndicaux soucieux de voir une action directe se substituer à un système de santé assis sur l’emploi et qu’ils aient eux‐mêmes contribués à mettre en place (Gottschalk, 2000) 27 . Plus récemment, Jennifer Klein a à son tour traité de cette question mais depuis un autre point de vue : ce n’est plus la position des syndicats qui doit être expliquée mais celles des employeurs et des compagnies d’assurance à l’égard, respectivement, de l’assurance maladie et de la retraite obligatoire (Klein, 2003). En 2002, Jacob Hacker a publié un ouvrage qui est désormais un classique et qui généralise l’approche de C. Howard tout en s’en distinguant sur la question de la neutralité de l’instrument. Tandis que l’un prenait comme objet intermédiaire les déductions fiscales, l’autre étudie les politiques sociales assises sur l’emploi comme un croisement entre action de l’Etat et des employeurs. Il conclut à son tour que « what is most distinctive about American social welfare practice is not the level of spending but the source » (Hacker, 2002 : 7). L’imbrication entre publique et privé est elle‐même soumise aux jeux des intérêts et de la temporalité de l’action publique. C’est ainsi la chronologie différentielle de l’action directe de l’Etat, respectivement en matière de retraite et de sécurité sociale, qui explique la part respective qu’y jouent les canaux publics ou privés. Cependant à la différence de C. Howard, Jacob Hacker constate que les effets des différents types d’instruments ne sont pas le mêmes (vertical/horizontal welfare state) (Hacker, 2006). Il reformulerait lui la question en ces termes : « by what standard are we to call the indirect policy tools and government‐supported private benefits that are characteristic of American social provision part of that body of state activity conveniently, if often imprecisely, termed the « welfare state » ? » (Hacker, 2005 : 139). 26
27
Le terme lui-même est emprunté (Martin, 1998).
Sur cette question, éhalement (Gordon, 2003).
24
Plus récemment, cette notion d’« invisibilité » de l’Etat américain a été reprise par des historiens de l’Etat au‐delà de la seule question du Welfare. L’ouvrage de Max M. Edling sur la vision de l’Etat de la Constitution américaine et des pères fondateurs est à cet égard symbolique. L’auteur entend démontrer comment les Fédéralistes ont développé « a conceptual framework that made it possible to accomodate the creation of a powerful national government to the strong anti‐statist current in the American political tradition” (Edling, 2003 : 219). Cette tension, entre un Etat fort et sa nécessaire invisibilité, expliquerait plusieurs des traits des actions du gouvernement dans les premiers temps de la République. Les fonctions d’extraction et de conscription traditionnellement considérée comme les attributs de l’Etats en constituent la meilleure illustration. En lieu et place d’une conscription obligatoire qui s’imposerait aux citoyens, c’est la voie d’une armée de métier, faite d’hommes volontaires, payés et entraînés qui a été choisi. Cette tension explique également le recours traditionnel au protectionnisme et à la dette comme mode de financement d’un Etat fédéral interventionniste mais pour lequel le recours à l’impôt direct, quasi monopole des états, n’était pas envisageable. Dans un ouvrage récent, Brian Balogh poursuit cet angle d’analyse et le pousse à son terme. Il traite du XIX siècle, considéré comme celui du laissez‐faire, pour faire précisément de l’« invisibilité » une caractéristique de l’Etat américain : « a government out of sight ». « Acknowledging that government action is sometimes most powerful when it is least visible changes the stale debate that pits big vs small government and pubic vs private administration » (Balogh, 2009 : 6). On retrouve ici sous‐jacente l’idée que le type d’instruments utilisés est susceptible de constituer la spécificité d’un mode de fonctionnement étatique. Les analyses de Christopher Howard peuvent alors nourrir à nouveau la réflexion. L’étude du vote des déductions fiscales à but social montre en effet que, contrairement à celui des instruments d’action directe de l’Etat providence, celui‐ci se déroule facilement et fait l’objet d’un relatif consensus. Ces divers travaux invitent ainsi à s’interroger sur la nature « visible » de l’Etat français et sur ses implications. D. King et R.C. Lieberman se sont récemment interrogés afin de savoir si l’étude de l’Etat américain pouvait permettre de proposer un cadre théorique comparatif pour penser l’Etat contemporain (« how American patterns offer comparative lessons », King et Lieberman, 2009 : 549). A ce stade, la présentation parallèle des historiographies française et américaine de l’Etat indique que, précisément, les travaux historiens sur l’Etat français et sur l’Etat américain se déploient selon des axes communs qui dessinent bel et bien un nouveau cadre théorique disponible pour l’analyse comparative. Les approches qui viennent d’être détaillées font ainsi directement écho à la grille théorique multidimensionnelle proposée par D. King et 25
R.C. Lieberman. L’Etat comme organisation embrasse ainsi tant la notion d’« Administrative State » que celle de « Fragmented State » tandis que l’Etat comme relations correspond à celle d’ « Associationnal State ». L’Etat comme matrice cognitive et la construction d’une histoire au second degré Il en va de même des deux autres dimensions mises en évidence par D.King et R.C. Lieberman. Le « Standardizing State » et le « Segregated State » correspondent eux à une troisième approche historienne de l’Etat que d’aucuns qualifient de « science de l’Etat » (Bourdieu, Christin et Will, 2002) ou de science pratique de la puissance publique. L’idée sous‐jacente est que l’Etat « se perpétue par les catégories par lesquelles il pense et donne à penser ce qu’il pense » (Lenoir, 2000 : 96). Comme une fois de plus, le formulait déjà Pierre Rosanvallon dans son ouvrage programmatique : « L’Etat n’est pas seulement un appareil administratif, il est également une figure politique abstraite, en tant qu’il incarne le principe de souveraineté. Il est une forme efficace de représentation sociale […] L’Etat travaille la société en même temps qu’il est constitué par l’image que celle‐ci se fait de lui » (1990 : 14). En lien avec l’approche de l’Etat comme organisation et comme relation, l’étude du colbertisme à travers celle du corps des inspecteurs des manufactures (1669‐1791) réalisée par Philippe Minard relève de cette approche. Cette « histoire concrète des pratiques administratives » de contrôle de la société donne à voir la manière dont l’Etat encadre la vie économique et la normalise, au sens fort du terme. En s’intéressant à la manière dont les fabricants ont réagi à l’institutionnalisation de contrôle étatique, il parvient à saisir cette imbrication entre Etat et société. De manière plus générale, un certain nombre de travaux sur la statistique s’inscrivent également dans cette perspective. En considérant que les représentations sont des réalités et en produisent, l’histoire des catégories et du calcul statistiques constitue une forme d’étude de l’Etat (Desrosières, 2008 et 2005 ; Karady, 2008). Aux Etats‐Unis, William R. Childs a par exemple mis en évidence comment, sur la période 1889 à 1945, l’Etat central américain a utilisé les statistiques pour uniformiser la politique de régulation qu’il mettait en place pourtant à travers les états (Childs, 2001 et pour une note de lecture sur la littérature anglo‐saxonne sur cette question, Haggerty, 2002). En France, l’ouvrage d’Eric Brian sur la « mesure de l’Etat » fait figure d’exemple. Il y retrace l’histoire administrative et intellectuelle des dénombrements de population dans la France du XVIIIème siècle, en prenant l’œuvre de Condorcet comme fil rouge (Brina, 1994). Ambitieux cet ouvrage fait notamment le lien entre la division du travail statistique et la nature de ce travail saisie à travers la catégorisation du monde qu’il produit. A travers l’histoire de l’outil statistique, l’Etat est alors saisi au‐delà de la distinction entre représentations et réalités. L’ouvrage 26
contemporain, et désormais classique, d’Alain Desrosières suggère lui que l’histoire et les contours différentiels de la statistique administrative permettent de comparer les conceptions et l’organisation des Etats entre eux (en l’espèce France, Royaume‐Uni, Allemagne et Etats‐
Unis). Faisant écho aux travaux de D. King sur la place structurante pour l’Etat (et la société) de la catégorie de race, un important groupe de travaux traite précisément de la question des catégories démographiques. Comme, à partir de l’étude du cas soviétique 28 , le résument clairement Alain Blum et Catherine Gousseff, « l’histoire de la statistique démographique » est un « domaine qui revendique une forte perspective comparative et qui s’offre comme un point de vue privilégié pour appréhender certains aspects de la construction de l’Etat, des relations entre administration et pouvoir politique d’une part, et entre Etat et société, de l’autre, à travers notamment la construction des représentations sociales » (1997 : 441). Ces recherches, menées à l’origine de manière relativement isolées les unes des autres, ont finalement dessiné ce que Paul‐André Rosental a appelé « une histoire politique des populations » (2006). Cette histoire tente de saisir les processus d’« auto‐création » des sociétés et, notamment d’y cerner, le rôle d’un Etat conçue d’emblée comme organisation et relation, à l’image des travaux de Paul‐André Rosental sur l’interministériel en matière de travail ou encore de migrations. Poussée à sa limite, cette approche devrait amenée à une réflexion épistémologique sur la manière dont l’histoire comme discipline a conceptualisé l’Etat à travers le temps et l’espace. L’histoire de l’Etat se situe alors au croisement de l’histoire sociale et de l’histoire des idées. L’ouvrage classique de Quentin Skinner constitue à cet égard un modèle (1978). Pour le cas français, l’ouvrage de Pierre Rosanvallon sur les limites d’une approche de l’Etat français en terme de jacobinisme consacre une large place à une analyse du succès qu’à jusqu’ici rencontré ce concept pour analyser le modèle politique français (2004). L’article de William Novak sur le mythe de la faiblesse de l’Etat américain s’engage sur cette voie (2008) comme la récente contribution de Desmond King et Marc Stears (Jacobs et King, 2009). Ces derniers s’y interrogent sur les raisons du peu d’intérêt pour l’Etat de la science politique américaine dans l’après Seconde Guerre mondiale. L’histoire de l’Etat nous apprend ainsi que toute réflexion sur les recompositions contemporaines de l’Etat devrait inclure une réflexion au second degré sur les recompositions du regard que le chercheur, historien mais aussi politiste ou sociologue, pose sur cet objet. En 1980, commentant l’ouvrage de Pierre Birnbaum et Bertrand Badie, George Lavau considérait déjà que « plus on voit fonctionner le couple conceptuel « société civile » ‐ « Etat », plus grandit la perplexité. D’abord parce qu’il n’est pas sûr que ce couple 28
Ce terrain a donné lieu à une recherche collective et est donc le sujet de plusieurs publications dans la
bibliographie.
27
conserve beaucoup de sens lorsqu’on le détache des configurations théoriques d’ensemble (chez Hegel, chez Marx, chez Gramsci) à l’intérieur desquelles les éléments de ce couple faisaient sens ». La longue durée sur laquelle s’inscrivent les travaux historiens dans leur diversité invitent alors à s’interroger sur la radicalité et la nouveauté des recompositions contemporaines de l’Etat en portant attention à la part que jouent dans cette « découverte » non seulement les transformations de l’objet mais également celle du regard et des concepts des chercheurs qui tentent de l’appréhender. 28
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