AUXILIAIRES, BIODIVERSITE ET VITICULTURE DURABLE Les attaques des insectes et acariens ravageurs en vigne se limitent en général à une ou deux espèces réellement considérées comme nuisibles. La vigne est une culture peu attaquée par les insectes comparativement à d’autres cultures pérennes telle que l’arboriculture fruitière, où le nombre d’insectes ravageurs est beaucoup plus important. A ce jour, seuls les acariens sont réellement régulés au vignoble par leurs prédateurs naturels : les typhlodromes. La lutte contre les insectes ravageurs peut passer par le développement de la faune auxiliaire au moyen de haies et d’enherbement naturel. A l’heure où les restrictions réglementaires en matière de phytosanitaires se renforcent, la lutte intégrée faisant appel aux mécanismes de régulation biologique fait l’objet d’une attention croissante et constitue une voie intéressante pour assurer une viticulture durable. grappes et cicadelles vertes se maintiennent en deçà de seuils d’intervention : une régulation a donc bien lieu. Toute la difculté réside dans le recensement et la caractérisation de la fonctionnalité des auxiliaires vis-à-vis des ravageurs de la vigne : en effet, si certains parasitoïdes spécialisés sont bien présents, ils paraissent incapables à eux seuls de contrôler les pics de population. Il apparaît qu’un certain nombre d’ennemis naturels généralistes s’adaptent pour manger ou parasiter les ravageurs quand ils sont présents, et utilisent d’autres ressources en cas d’effectifs faibles. Les araignées Comment favoriser les auxiliaires ? Les quelques insectes qui posent problème Les vers de grappes sont rapidement nuisibles car ils attaquent directement les fruits et favorisent l’installation du botrytis. Le seuil de population tolérable est donc bas. Ce niveau est peu compatible avec le maintien d’une population sufsante pour qu’une prédation continue puisse s’opérer (Campoplex capitor). Pour la cicadelle verte, le taux de parasitisme avec le parasitoïde Anagrus atomus en première génération est important. Mais par la suite, par manque de synchronisation, les populations du parasitoïde chutent avec pour résultat une non efcacité du contrôle en juillet-août. Pour compliquer le tout, les populations hibernent et se multiplient surtout à l’extérieur des parcelles de vignes et les vagues d’infestations sont surtout importantes en juillet. Dans un certain nombre de situations, les populations de vers de Par un choix judicieux de spécialités phytosanitaires : • En utilisant modérément les produits agrochimiques • En évitant les produits polyvalents • En minimisant les effets non intentionnels indésirables des spécialités en utilisant des produits N (neutres) à faiblement toxiques (NFT) vis-à-vis des prédateurs Rôle et efcacité • Grandes destructrices d’insectes, jouent un rôle important dans l’équilibre de l’écosystème. • Polyphages. • Généralement présentes en grand nombre dans le vignoble. Description et biologie Par le maintien d’un paysage le plus diversié possible (haies, bosquets, enherbement, etc…) et riche en espèces botaniques an de : • Créer des abris pour l’hibernation des auxiliaires • Garantir le développement des hôtes intermédiaires • Offrir une nourriture de substitution • Arachnides de tailles et couleurs diverses. • Une trentaine de familles comprenant plus de 1500 espèces. • Beaucoup d’espèces sont présentes dans le vignoble. • Capturent leurs proies à l’affût dans des toiles ou à la course. Exemples d’auxiliaires présents sur le vignoble : Avril 2008 - Dossier technique n° 11 - Viticulture-Oenologie - Chambre Infos-16 – 7 Les anthocorides • Très bonne efcacité en première génération (généralement sufsante pour maintenir les populations en dessous du seuil de tolérance). • Efcacité insufsante en deuxième génération. Description et biologie • Petites guêpes (hyménoptères) de 0.3 mm. • Déposent leurs œufs dans les œufs de certains lépidoptères. Les coccinelles murs de pierre, fentes rocheuses, piles de bois. • Ponte dès le réchauffement des températures. • Plusieurs centaines d’œufs par femelle et par semaine. • 4 stades larvaires et un stade de chrysalide. • Selon l’espèce, 1 à 3 générations par an. • Migration sur de grandes distances possible. Anagrus atomus Rôle et efcacité • Détruisent pucerons, chenilles et œufs d’insectes et d’acariens. • Peuvent se contenter de nourriture végétale en cas de disette. • Jouent souvent un rôle de stabilisateurs des parasites grâce à leur polyphagie. Description et biologie • Petites punaises (hétéroptères) prédatrices mesurant de 2 à 5 mm. • 2 à 3 générations par an. • Hibernent sous forme adulte. • Certaines espèces pondent leurs œufs dans les tissus végétaux, sans toutefois leur nuire. Les trichogrammes Rôle et efcacité Rôle et efcacité • Grandes dévoreuses de pucerons, chenilles, psylles. • Une espèce s’intéresse tout spécialement aux acariens et aux thrips : Stethorus puncbilum, très petite coccinelle (1 à 15 mm) avec des élytres tout noirs et velus et des pattes jaunes. Description et biologie Rôle et efcacité • Intéressants car parasitent les œufs des vers de la grappe. • Coléoptères. • Dessin et couleur des ailes variables d’une espèce à l’autre. • Possèdent 2 paires d’élytres (ailes antérieures) typiques. • Œufs jaunes orangés en forme de fuseau, pondus en groupe perpendiculairement au revers de la feuille. • Larves fuselées, segmentées et de couleur grise. • Hibernent sous forme adulte dans des cachettes protégées : 8 – Chambre Infos-16 - Viticulture-Oenologie - Dossier technique n° 11 - Avril 2008 • Principal ennemi naturel de la cicadelle verte (Empoasca vitis). • Parasite les œufs de cicadelles. • La présence d’A. atomus dans le vignoble devrait permettre de maintenir un seuil de tolérance relativement élevé pour la cicadelle verte, soit 500 cicadelles par piège et par semaine. Il n’est donc généralement pas nécessaire de traiter dans ces parcelles. Description et biologie • Hyménoptère de 0.3 mm environ. • Couleur généralement claire, de jaune pâle à rouge-brun. • Ailes frangées de longues soies. • Présence de cerques. • Se développe également aux dépens d’autres petites cicadelles se trouvant sur charmilles, églantiers, noisetiers et d’autres arbustes. • Rôle très important de ces cicadelles pour l’hibernage d’A. atomus. Rôle et efcacité • La prédation est surtout l’œuvre des larves. • S’attaquent aux œufs, larves et adultes de divers insectes et acariens (notamment P. ulmi). • Leur mobilité et leur polyphagie les rendent moins efcaces qu’un prédateur spécialisé. • Contribuent néanmoins de manière appréciable et complémentaire à la réduction de divers ravageurs. Les chrysopes Description et biologie • Névroptères. • L’adulte mesure de 1 à 1.5 cm et est de couleur vert à vert-jaune. • Ailes nement réticulées de vert, d’une envergure de 2.5 à 3 cm. • Œufs de forme elliptique et de 1 mm de long, xés à l’extrémité d’un pédoncule exible. • Larves vert-brun avec parfois des stries longitudinales brun-rouge. • Selon les espèces, l’hibernation se fait sous forme adultes ou de larves. • 2 à 3 générations/an. • Ponte de 800 à 1000 œufs par femelle déposés au hasard. • 3 à 15 jours sont nécessaires à la maturation des œufs. • Les larves sont très mobiles, leur développement dure de 8 à 20 jours. Les haies indispensables ! Comment stimuler les espèces d’auxiliaires ? Le développement d’une faune auxiliaire est indissociable de la présence de haies au vignoble. La vigne est une monoculture et constitue un terrain idéal pour les ravageurs qui y trouvent une nourriture abondante sur un végétal de qualité et rencontrent peu d’ennemis naturels, au contraire d’un écosystème naturel où beaucoup d’organismes coexistent. Des chercheurs ont testé plusieurs essences arbustives sur les dynamiques de populations en phytophages et auxiliaires en étudiant plus particulièrement le cas de la pyrale, les tordeuses ou la cicadelle verte. L’aubépine, le chêne, la bourdaine, le sureau noir, l’orme sont des plantes riches en biodiversité en général. De nombreux travaux (INRA ; ENITA) sont menés depuis plusieurs années visant à mieux connaître le rôle des haies dans la stimulation des insectes utiles. Pour stimuler et satisfaire les auxiliaires, il est nécessaire d’avoir plus d’insectes au vignoble. Une inuence certaine mais complexe Diversier un paysage en implantant des haies a tendance à défavoriser les populations de tordeuses de la vigne, mais risque de favoriser la cicadelle verte (cas des ronces). Il convient aussi de surveiller l’agent vecteur du bois noir (Hyalestes obsoletus). En début de saison, en mai, les populations de phytophages sont nombreuses. Ensuite les auxiliaires prennent le dessus et quittent la haie pour aller sur la vigne et s’attaquer aux ravageurs viticoles. Or ces ravageurs sont peu diversiés et ne sont pas présents en quantité importante. Pour satisfaire ces auxiliaires, il est nécessaire d’avoir plus d’insectes au vignoble. Dans ce but, l’enherbement qui a l’avantage de se situer directement au vignoble offre des résultats intéressants. Ce sont les enherbements naturels spontanés qui offrent le plus de biodiversité, bien plus que les enherbements semés de graminées. Les dicotylédones de ce point de vue contribuent le plus favorablement au maintien des populations de typhlodromes. Les recherches doivent encore se poursuivre, notamment pour les haies, mais l’effet combiné de celles-ci avec l’enherbement naturel paraît déjà fort intéressant. Certains vignobles ont lancé des initiatives pour recréer de la biodiversité sur leur aire d’appellation an de faciliter le contrôle des insectes nuisibles par les faunes auxiliaires. Les travaux visent l’élaboration d’actions collectives coordonnées sur les exploitations pour l’aménagement de la lutte intégrée. Bibliographie : Phytoma janvier 2008- Lutte biologique par conservation en vignoble, le rôle des haies et des zones enherbées – monsieur Van Helden - Mondiaviti 2004 Contact : Laurent Duquesne - 05 45 36 34 00 e-mail : [email protected] Avril 2008 - Dossier technique n° 11 - Viticulture-Oenologie - Chambre Infos-16 – 9