Quand on parle de mobilité sociale, il faut donc clarifier la segmentation sociale sous-jacente.
La mobilité sociale peut ainsi largement différer selon qu'on considère des catégories socio-
professionnelles, des statuts dans l'emploi, des quantiles de revenus, des quantiles de richesse,
ou de simples dichotomies « pauvres – non-pauvres », des groupes définis par leur niveau
d’éducation formelle, des classes sociales au sens marxiste ou toute autre segmentation ou
classification sociale.
Le degré de mobilité sociale dépend de la construction et du détail de la segmentation sociale
utilisée. Un individu qui passerait progressivement de salarié au salaire minimum à président-
directeur général salarié ne connaitra aucune mobilité sociale si la segmentation sociale
utilisée n'inclut qu'une catégorie "Salariés". Plus la segmentation ou classification utilisée est
détaillée, plus la mobilité apparaitra importante.
Mobilité intragénérationnelle et mobilité intergénérationnelle
On distingue deux types de mobilités sociales selon qu'elles concernent une seule génération
ou des générations successives.
La mobilité intragénérationnelle (aussi appelée, mais plus rarement mobilité sociale
biographique ou mobilité biographique1) concerne les changements de statut social
d'un individu au cours du temps (ensemble de sa vie, période particulière) ou d'un
ensemble d'individus pour une même génération. Par exemple, si la segmentation
sociale considérée ne concerne que l'emploi, on parlera de trajectoires professionnelles
ou de carrières.
La mobilité intergénérationnelle concerne le degré de différence entre le statut social
des parents et celui de leurs enfants.
Elle peut être vue dans une optique de « destinée » : que sont devenus les enfants
d’agriculteurs ? combien sont eux-mêmes agriculteurs (ou agricultrices) ? combien
sont cadres supérieurs ? La fille d’ouvrier est-elle « condamnée » à rester ouvrière ?
La richesse, l’éducation, se transmet-t-ellle de parents à enfants ? etc.
La mobilité intergénérationnelle peut aussi être vue dans l’optique « origine » : que
faisaient les parents des agriculteurs et agricultrices d’aujourd’hui ? combien de cadres
sont fils ou filles de cadres ? combien sont fils ou filles d’ouvriers ?
Les deux optiques sont à la fois différentes et complémentaires. Par exemple, en
France en 2003, 22% des fils d’agriculteurs étaient agriculteurs (optique « destinée ») ;
beaucoup plus (37,3%) étaient ouvriers ; peu (9.2%) étaient cadres ou de profession
intellectuelle supérieure, moins encore (6,3%) artisans, commerçants ou chefs
d’entreprise. Par contre la majorité des parents d’agriculteurs (88,4%) étaient eux-
mêmes agriculteurs ; presque aucun (0,7%) cadres ou de profession intellectuelle
supérieure, ou (0,7%) artisans, commerçants ou chefs d’entreprise. Pour les
agriculteurs français, on peut ainsi dire « tel fils, tel père », mais non « tel père tel
fils ».
De même, en 2003, plus de la moitié (52,5% ) des fils de cadres étaient cadres ; très
peu (8,8%) étaient ouvriers et presque aucun (0.3%) agriculteurs. Par contre, moins
d’un quart des cadres (23,5%) étaient fils de cadre et presque autant (23,1%) étaient
fils d’ouvriers, 11,6% étant fils d’agriculteurs. Si les cadres tendent à transmettre leur
statut à leurs fils, être cadre ne signifie pas être « fils-à-papa ».