LES PROBLEMES DE RECONSTRUCTION APRES LA GUERRE 16 juillet 2014
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Chap. 5
LE JAPON APRES LA GUERRE
- Présenter le sort du Japon après la guerre.
- Dresser le bilan de la guerre pour la Japon.
- Présenter les réformes
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entreprises dans le pays.
INTRODUCTION
Du 4 au 11 février 1945 se tint à Yalta une conférence réunissant le président des États-Unis,
Franklin Roosevelt, le Premier ministre du Royaume-Uni, Winston Churchill et Joseph
Staline, le dirigeant de l'Union des Républiques socialistes soviétiques (URSS). En marge de
son objet principal
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, la conférence s’accorda sur l’engagement de l’URSS à intervenir dans le
conflit contre le Japon, après la capitulation allemande. En échange, elle réclamait la moitié
méridionale de l'île de Sakhaline, les îles Kouriles, et le contrôle des chemins de fer en
Mandchourie. Elle fut suivie par la conférence de Potsdam du 17 juillet au 2 août 1945 devait
préciser et mettre en œuvre les accords clôturant la conférence de Yalta. Au cours de celle-ci,
les Alliés exigent une reddition inconditionnelle du gouvernement japonais cependant que
l'URSS accepta de s'allier aux puissances occidentales afin d'exiger une capitulation
japonaise. Puis, le 6 août 1945, la première bombe atomique est larguée sur la ville
d’Hiroshima. Deux jours plus tard, le 8 août, l’URSS déclare la guerre au Japon, et le 9 août,
une seconde bombe atomique est lancée sur Nagasaki. Les armées soviétiques envahissent la
Mandchourie, le nord de la Corée et Sakhaline. Le Japon est condamné à la défaite. Celle-ci
sera suivie de l’occupation du pays par les forces alliées. Celles-ci mettront cette occupation à
profit pour imposer des réformes au Japon.
I- L’OCCUPATION DU PAYS PAR LES AMERICAINS
Le 14 août 1945, le Japon a accepté la Déclaration de Potsdam juste après les bombardements
atomiques d’Hiroshima et Nagasaki et l’entrée en guerre de la Russie contre le Japon. Le 15
août, l’empereur s’adresse à la nation pour la première fois à la radio pour annoncer la
capitulation
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du Japon. A partir de la fin août 1945, le Japon a été placé sous le contrôle
militaire des Alliés à l’initiative des Etats-Unis. En effet, le 28 août 7 500 militaires
américains débarquent sur l'île de Honshu
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. Le 29 août le président Truman désigne le général
américain Douglas MacArthur comme responsable de la politique alliée en Extrême-Orient.
Celui-ci reçoit le 2 septembre 1945 la reddition officielle nippone à bord du cuirassé Missouri
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Changement radical apporté en vue de l'amélioration de (quelque chose) Exemple : instituer une réforme
monétaire
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La conférence de Yalta porta sur les conditions de la capitulation allemande, aussi bien sur le plan militaire que
politique, ainsi que sur l'organisation de l'Europe après la guerre.
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Cessation des combats face à une armée ennemie Exemple : la capitulation allemande
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Le contingent américain passe à 460 000 soldats au plus fort de l'occupation dont la majeure partie appartient à
la VIIIe Armée américaine, à laquelle il faut rajouter le British Commonwealth Occupation Force qui aura à son
maximum 40 000 militaires. L'occupation militaire américaine a mobilisé l'ensemble du 5th USAAF sur sa zone
de responsabilité géographique (Japon et Corée sous le 50e //).
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ancré en rade de Tokyo. En septembre 1945 sera instituée le « Suprême Commandement des
Forces Alliées » (Supreme Commander for the Allied Powers, en abrégé le S.C.A.P.). Malgré
son nom, il s’agit en fait d’un organisme militaire américain entièrement entre les mains de
MacArthur
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. Le SCAP a des pouvoirs discrétionnaires très étendus. En décembre 1945 seront
institués un Conseil allié Tokyo) et une Commission d’Extrême-Orient siégeant à
Washington et groupant 11 nations. Le S.C.A.P. ne sera supprimé que le 28 avril 1952,
permettant alors au Japon de retrouver sa pleine souveraineté après une occupation américaine
de près de 7 ans
6
.
II- UN PAYS RUINE ET TRAUMATISE
Les pertes démographiques, civiles et militaires, sont considérables : 1,5 à 2 millions de morts
(dont plus de la moitié dans les territoires annexés), 3 à 4 millions de blessés et d’invalides
(sans compter les personnes victimes de radiations atomiques). Il faut d’autre part rapatrier
environ 1,4 million de travailleurs chinois ou coréens réquisitionnés dans les usines japonaises
(600 000 Coréens resteront finalement dans le pays). En revanche, il faut accueillir dans
l’archipel nippon près de 7 millions de Japonais civils ou militaires chassés des territoires
extérieurs perdus (Mandchourie, Corée, Formose…), ce qui pose d’énormes problèmes de
logement et d’emploi dans un pays qui n’est plus guère qu’un champ de ruines.
Ce rapatriement, combiné au « baby-boom » d’après-guerre qui monte le taux de natalité,
accentue la pression démographique. Il s’ensuit la pauvreté, le chômage, l’impossibilité
d’émigrer et la multiplication des avortements clandestins.
Le bilan matériel est particulièrement sévère. La forte densité urbaine et l’utilisation
importante du bois comme matériau de construction expliquent l’ampleur des destructions des
bombes incendiaires américaines : 2 500 000 logements sont en ruine ou en cendres, dont
750 000 à Tokyo. Mis à part Kyoto, épargnée pour ses richesses architecturales, toutes les
grandes villes japonaises sont détruites à plus de 40% : Nagoya à ,75%, Osaka à 70%, Tokyo
à 60%...Les installations portuaires, le réseau routier et ferroviaire sont en grande partie
anéantis. L’industrie, concentrée dans les zones urbaines, est fortement touchée, en particulier
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La comparaison avec l'époque des Empires amène les médias à surnommer MacArthur « vice-roi du Pacifique
». Le général américain se comporte dans ce pays en proconsul et son rôle s'avère aussi déterminant que celui
d'un Chef d'état.
Mac Arthur rencontre le 27 septembre 1945 l'empereur Hirohito et lui fait comprendre qu'il cherchera à
l'exonérer de poursuites criminelles devant le Tribunal de Tokyo. Les échanges se poursuivent par la suite par
intermédiaires et concernent non pas l'abdication mais la reconnaissance de la fin de sa nature divine, crédo à la
base de la société japonaise depuis sa fondation. Cette acceptation de la part de l'Empereur accompagne la
redéfinition constitutionnelle de la Diète précédant la tenue d'élections libres.
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Le 8 septembre 1951, le Japon signait le traité de San Francisco et un traité de sécurité avec les États-Unis. Le
traité de paix fut passé avec 48 États - de nombreux pays ne conclurent pas ce traité comme par exemple la
république populaire de Chine ou l'URSS - et entra en vigueur le 28 avril 1952 qui marque la fin de l'occupation
américaine. Néanmoins, certaines îles, comme par exemple Okinawa, restèrent sous occupation américaine
pendant plusieurs années. D'autre part, les États-Unis gardèrent quelques dizaines de milliers de soldats dans
leurs bases japonaises, comme le traité de sécurité le permettait, le traité de coopération mutuelle et de sécurité
entre les États-Unis et le Japon signé en 1960 renouvelle cette alliance.
Le 27 avril 1952, le Japon signa un traité de paix avec la Chine nationaliste.
Une administration civile américaine demeura en place aux Îles Ryūkyū jusqu'en 1972.
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la sidérurgie (500 000t. d’acier en 1946 contre près de 8 millions en 1943), les constructions
mécaniques et même le textile (2 500 000 de broches à filer le coton utilisables en 1946 contre
14 millions en 1941). L’agriculture, qui manque d’engrais et de matériel
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, ne peut nourrir une
population en hausse rapide. La ration alimentaire à l’automne 1945 au Japon était réduite à
700 calories/jour (Niveau normal : 2 200 cal/jour) et 100 000 personnes sont données pour
étant mortes
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dans les années 1945-48 pour problèmes liés à la sous-alimentation malgré
l'aide américaine1.
Le bilan moral n’est pas moins lourd. Abusés par de longues années de propagande
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mensongère, les Japonais se retrouvent avec le traumatisme d’une défaite impensable et d’une
occupation étrangère inenvisagée. La stupeur, le désarroi, l’apathie, la résignation des
premiers temps vont bientôt faire place à une condamnation violente du militarisme et de
l’ultranationalisme des années 30, rendus responsables de la ruine et des souffrances du pays.
Par une mutation totale, le Japon guerrier découvre après la défaite les bienfaits du pacifisme.
III- LES REFORMES POLITIQUES : DEMILITARISATION
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, LA
DECENTRALISATION ET LA DEMOCRATISATION DU PAYS.
Dès août 1945 des directives avaient été données à Washington demandant de faire en sorte
que le Japon « ne redevienne jamais une menace pour les Etats-Unis ou pour la paix et la
sécurité du monde ». En effet, les Alliés avaient attribué la catastrophe de la Guerre du
Pacifique au militarisme et au centralisme impérialiste japonais
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. C’est pourquoi, l’objet
principal de leur politique pendant la première période de l’occupation du Japon sera la
démilitarisation, la décentralisation et la démocratisation du pays.
1- Epuration
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et démilitarisation
Démilitarisation
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L’arrêt des importations du fait du blocus naval allié privait le Japon de 31 % de son riz, 92 % de son sucre et
de 45 % de son sel d’avant-guerre avant sa capitulation. De plus, la récolte agricole de 1945 atteint seulement
60 % du niveau d’avant-guerre probablement par manque d’engrais et de main d'œuvre
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Le ministre japonais des finances en octobre 1945 a annoncé 10 millions de morts par famine sur l’hiver
suivant sans aide de la part des vainqueurs. Certains disent toutefois qu’il s’agit d’une prévision pessimiste2.
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Le ministre japonais des finances en octobre 1945 a annoncé 10 millions de morts par famine sur l’hiver
suivant sans aide de la part des vainqueurs. Certains disent toutefois qu’il s’agit d’une prévision pessimiste2.
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Mettre fin à l'activité militaire organisée (dans un pays ou un territoire) Exemple : démilitariser la zone
sensible
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« Ulcérés par le traitement accordé à leur nation par les puissances occidentales lors du Traité de Versailles de
nombreux politiciens et militaires japonais, comme Fumimaro Konoe et Sadao Arakiré actualisent la doctrine du
hakko ichi'u (les 8 coins du monde sous un seul toit) et mettent en place une idéologie fondée sur la suprématie
de la race japonaise et son droit à dominer l'Asie. Cette idéologie raciste présente le Japon comme le centre du
monde et prend assise sur l'institution impériale et l'empereur, être divin et descendant de la déesse Amaterasu
Omikami. Elle donne lieu à une tentative de restauration shôwa.
Porté par l'influence des factions militaires, le Japon envahit ainsi la Mandchourie en 1931 puis le reste de la
Chine en 1937 (guerre sino-japonaise (1937-1945). Le refus du Japon de se retirer de l'Indochine, envahie en
1941, et de la Chine, à l'exclusion du Mandchoukouo, mène à l'été de la même année à l'imposition par les États-
Unis d'un embargo sur le
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Politique élimination en faisant exclure du pouvoir pour abus de confiance (un adversaire politique) Exemple :
procéder à une épuration des partis
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Les ministères de l’armée et de la marine sont transformés en « ministère chargés de la
démobilisation » de la totalité des soldats japonais avant d’être ensuite supprimés. Les forces
de police nationale sont congédiées et une clause de non-belligérance interdit spécifiquement
la formation de forces armées japonaises. Les usines d’armement sont fermées. La dissolution
des zaibatsu, « responsables de l’impérialisme nippon », est décidée en novembre 1945 et
commence effectivement en 1946. Toutes les organisations militaristes et nationalistes sont
interdites.
Jugement des criminels de guerre
Comme à Nuremberg, un tribunal interallié est créé à Tokyo : il juge de mai 1946 à novembre
1948 28 grands « criminels de guerre », condamnant à mort 7 des inculpés (dont les anciens
Premiers Ministres Tojo et Hirota).
Epuration
Outre les nombreuses poursuites judiciaires pour crime de guerre, une vaste épuration frappe
plus de 200 000 personnes (dont 180 000 militaires) écartées des fonctions publiques.
2- La démocratisation du pays
Reconnaissance des libertés
Dès septembre 1945, le SCAP rétablit les libertés publiques et abroge les lois répressives du
régime déchu, libérant de nombreux détenus politiques (notamment des communistes).
D’autres réformes s’attaquent aux structures traditionnelles du pays : la noblesse est abolie, le
Shinto n’est plus religion d’Etat…Un rescrit impérial publié le 1er janvier 1946 condamne les
« fictions selon lesquelles l’empereur est un dieu visible, le peuple japonais une race
supérieure aux autres races et pour cette raison destinée à gouverner le monde ».
L’émancipation de la femme, qui accède à l’égalité civique, est confirmée dans le nouveau
code civil de 1948 (droit pour l’épouse de demander le divorce) qui supprime également le
droit d’aînesse. Les manuels scolaires sont expurgés de toute trace de militarisme. Tout est
mis en place pour que le Japon tente une (nouvelle) expérience de démocratie parlementaire.
Démocratie parlementaire
Dès 1946, MacArthur impose au Japon ses nouvelles institutions. Il fait rédiger par ses
services un projet de constitution qu’une Assemblée, élue le 10 avril 1946, adopte avec
quelques retouches en novembre. Remplaçant la constitution de Meiji promulguée en 1889, la
nouvelle constitution japonaise (qui entre en application le 3 mai 1947) s’inspire en grande
partie du modèle britannique toit en faisant quelques emprunts aux institutions américaines,
notamment dans le domaine judiciaire et l’administration locale.
Si l’institution impériale est maintenue
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, le « Tenno » n’est plus que « le symbole de l’Etat et
de l’unité du peuple », aux pouvoirs politiques inexistants. Ce rôle de monarque
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Le Général MacArthur craignait en effet une désintégration de la nation japonaise en cas de destruction de la
fonction impériale.
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constitutionnel n’est pas en fait une totale découverte pour le Japon, mais la constitution de
1946 la démocratise par de nouvelles dispositions : suppression du Conseil privé et de la
Chambre des Pairs, haute administration passant entièrement sous la dépendance du Cabinet
lui-même contrôlé par le Diète (Parlement), suffrage universel total (masculin et féminin).
Le Parlement (Diète) est composé de deux chambres : la Chambre des Représentants (486
membres élus pour 4 ans) et la Chambre des Conseillers (250 membres élus pour 6 ans et
renouvelables par moitié).
Le gouvernement (Cabinet) est composé d’un Premier ministre choisi par la diète en son sein,
et de ministres d’Etat nommés (et révocables) par lui. Il est responsable devant la Diète (il
peut être renversé par un vote de la Chambre des Représentants) et dispose, au nom de
l’Empereur, d’un droit de dissolution. Une cour suprême contrôle la constitutionnalité des
lois.
L’originalité de cette constitution imposée par l’occupant réside essentiellement dans son
article 9 qui engage le japon à n’entretenir « aucune force terrestre, maritime ni aérienne,
aussi bien que nul autre potentiel de guerre. Il ne sera jamais accordé à l’Etat le droit de
belligérance »…
IV- LES REFORMES ECONOMIQUES DU S.C.A.P. ET LE REDRESSEMENT DE
L’ECONOMIE
Reformes économiques
Les réformes économiques imposées par les Etats-Unis au lendemain du conflit portent
principalement sur deux points tendant à modifier les structures traditionnelles du Japon dans
le domaine agricole comme dans le domaine industriel. L’objectif est de limiter la
restructuration économique pour que le pays ne redevienne pas une grande puissance
impérialiste. Il ne devrait répondre qu’à la satisfaction des besoins de sa population en temps
de paix (on voudrait faire du japon la « Suisse e l’Extrême-Orient »).
Dans le domaine agricole, il faut d’abord signaler qu’en 1945-46, l’administration
d'occupation de Mac Arthur fit importer 3,5 millions de tonnes de stocks alimentaires par les
États-Unis pour les 74 millions d’habitants de l'archipel du Japon soit 47 kilos par habitant
(principalement de la farine, du sucre et du corned-beef). Promulguée en octobre 1946, la
réforme agraire est mise progressivement en application de 1947 à 1949. Elle a pour but une
redistribution des terres afin de faire de chaque paysan japonais un petit propriétaire. Pour
cela, toutes les terres cultivables des non-résidents sont vendues à l’Etat à un prix fixé très
bas ; des dimensions maximales sont imposées aux propriétaires résidents mais non-
exploitants (1 ha, sauf Hokkaido), et même aux propriétaires exploitants (3 ha, sauf
Hokkaido), le reste étant vendu à l’Etat. Au bout du compte, ce sont 2 millions d’hectares, soit
environ 70% des terres concernées, qui changent de mains, modifiant la structure agraire du
Japon en faveur de la micropropriété.
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