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Il y a peu de pays en Amérique sur les commencements
desquels l’on ait tant écrit que sur ceux du Canada, et encore
moins qui soient, après tout, si pauvres en histoires; car on ne
doit pas prendre pour telles, plusieurs ouvrages qui en portent
le nom, et qui ne sont autre chose que des mémoires ou des
narrations de voyageurs, comme, par exemple, l’Histoire de
l’Amérique septentrionale par la Potherie.
Pendant longtemps, l’on vit paraître en France une foule
de livres dans lesquels était soigneusement recueilli tout ce
qui se passait dans cette nouvelle contrée, où une lutte
sanglante s’était engagée entre la civilisation et la barbarie.
Mais ces oeuvres avaient pour la plupart peu de mérite
littéraire, quoiqu’elles continssent, en revanche, une
multitude de choses singulières et intéressantes qui les
faisaient rechercher en Europe avec avidité. Peu à peu,
cependant, cette ardeur s’affaiblit avec la nouveauté des
scènes qu’elles retraçaient, et le Canada occupait à peine
l’attention de la France, lorsque le sort des armes le fit passer
en d’autres mains. Après cet événement, les écrivains, qui
laissent des matériaux pour l’histoire canadienne de leur
temps, deviennent encore plus rares.
Parmi les auteurs dont nous venons de parler, et qui sont
antérieurs à la conquête, il ne faut pas confondre, cependant,
le célèbre Jésuite Charlevoix. Le plan étendu de son Histoire
de la Nouvelle-France, l’exactitude générale des faits qu’il
développe, son style simple et naturel, lui ont assuré depuis