L`Euphorbe fausse-baguette (Euphorbia x pseudovirgata)

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Euphorbia x pseudovirgata (Schur) Soo
L’Euphorbe fausse-baguette est une espèce exotique envahissante dont l’origine et le statut taxonomique sont encore
très obscurs. Elle serait issue de l’hybridation entre l’Euphorbe ésule (Euphorbia esula) plante indigène répartie en
Europe occidentale et Euphorbia waldsteinii (=Euphorbia esula subsp. tommasiniana), originaire d’Europe orientale et
centrale. Les modalités de son apparition ne sont, elles aussi, pas clairement identifiées : elle serait apparue dans le
bassin du Danube d’où elle se serait ensuite propagée. Une autre hypothèse est l’importation d’Euphorbia waldsteinii
en Europe occidentale où elle se serait hybridée avec la sous-espèce indigène. Enfin, cette espèce laisse même planer
le doute sur la véritable identité des populations d’Euphorbe ésule, jusque là considérée comme indigène sur notre
territoire. Cela ne permet pas d’avoir une vision claire sur ce groupe complexe dont l’étude nécessite d’être approfondie.
Quoi qu’il en soit, et c’est une certitude, l’Euphorbe fausse-baguette se répand aujourd’hui à grande vitesse dans les
prairies des grandes vallées alluviales, et menace aujourd’hui des habitats à forts enjeux patrimoniaux.
Répartition dans le Nord-Ouest de la France
En Haute-Normandie, l’Euphorbe fausse-baguette n’est
présente que très sporadiquement.
Dans le Nord-Pas de Calais, l’espèce a été observée dans
des sites rudéralisés (accotements routiers, friches, gares…)
mais n’a pas encore été signalée comme envahissante dans
les zones alluviales.
En Picardie, l’Euphorbe fausse-baguette est présente en
contexte rudéral (bords de routes, chemins etc.), mais
surtout au sein des prairies alluviales de la vallée de l’Oise,
dans les environs de Noyon jusqu’aux portes de Compiègne,
où elle semble s’étendre très rapidement. Il s’agit là de la
plus grande station connue à ce jour de la plante dans le
Nord-Ouest de la France.
Comment reconnaître l’Euphorbe fausse-baguette ?
© V. LEVY, CBNBL
Famille : Euphorbiacées
Synonymes : Euphorbia x jucula Prodán
Euphorbia x intercedens Podp.
Floraison : Mai-Juillet
L’Euphorbe fausse-baguette
© V. LEVY, CBNBL
est une espèce herbacée vivace, jauneverdâtre. Elle produit un latex blanc lorsque l’on
casse la tige. Ses feuilles sont linéaires, à côtés parallèles,
de 4-5 mm de largeur. Ses inflorescences, caractéristiques
des euphorbes, sont appelées « cyathes », elles sont jaunâtres,
petites et peu visibles. Elles possèdent des glandes en forme
de croissant. Elles sont entourées d’une paire de feuilles
jaunâtres, les bractées, souvent prises pour des fleurs.
Les « ombelles » principales (en réalité des cymes
simulant une ombelle) sont constituées
de 5-15 « rayons ».
© V. LEVY, CBNBL
L’Euphorbe fausse-baguette
L’Euphorbe fausse-baguette
L’Euphorbe fausse-baguette
Attention, à ne pas confondre avec :
L’Euphorbe fausse-baguette ressemble à ses deux parents et la distinction de ces trois taxons est très délicate.
N’hésitez pas à communiquez vos échantillons récoltés sur le terrain (matériel frais ou planche d’herbier) au CBNBl
afin de vous aider dans leur identification.
Par ailleurs, on peut confondre l’espèce avec l’Euphorbe de Séguier (Euphorbia seguieriana Neck.) : espèce
indigène en Picardie, qui se distingue par des glandes de l’involucre arrondies (elles sont en forme de croissant
chez l’Euphorbe ésule et l’Euphorbe fausse-baguette).
Biologie et écologie
L’Euphorbe fausse-baguette est une plante herbacée pérenne. Elle est capable de se reproduire de façon sexuée en
produisant un grand nombre de graines et végétativement, grâce à un système de rhizomes très étendu. C’est une
espèce au développement précoce, avec une reprise de croissance en été-début d’automne. Ces caractères font de
l’Euphorbe fausse-baguette une espèce compétitive, possédant un potentiel d’invasion élevé. La plante colonise
les bords de rivières et de chemins où elle revêt un caractère plutôt rudéral. Cela dit, elle s’avère particulièrement
envahissante dans les prairies alluviales de fauche (photo de droite). Dans un premier temps, la plante colonise
les habitats ouverts ou perturbés où les graines sont capables de germer. Une fois implantée, elle est capable de
s’étendre grâce à ses rhizomes sur l’ensemble de la prairie.
Modes de propagation
Chaque pied d’Euphorbe fausse-baguette produit un
nombre assez important de graines (30 à 150). Cependant,
celles-ci sont majoritairement dispersées à faible distance,
sauf si elles le sont par les oiseaux ou par hydrochorie, ce
qui génère de nouveaux foyers de colonisation. Sa capacité
de colonisation est renforcée par son système souterrain,
vigoureux, très étendu et capable de se régénérer grâce aux
bourgeons des rhizomes. Lorsque la plante croît en bordure
de rive, elle est susceptible d’être déchaussée par les crues
© A. WATTERLOT, CBNBL
et d’être déposée sur d’autres sites. Ce phénomène peut Chantier expérimental de gestion de l’Euphorbe faussebaguette en moyenne vallée de l’Oise
également se produire par le biais des travaux agricoles.
L’Euphorbe fausse-baguette et ses impacts
Sur l’environnement
L’Euphorbe fausse-baguette entraîne une diminution
locale de la biodiversité. Elle est capable de réduire les
populations des espèces indigènes, et peut aller jusqu’à
former des tapis monospécifiques, notamment au sein
des prairies alluviales de fauche dont une grande partie
est d’intérêt communautaire.
Sur l’économie et
les activités humaines
L’Euphorbe fausse-baguette est toxique pour le bétail.
Elle irrite le système digestif des bovins et des équins.
Sa présence dans les prairies de fauche engendre une
réduction de la production fourragère en rendant le
foin inutilisable.
Sur la santé
La plante ne présente pas de risque pour la santé humaine.
Ce qu’il faut savoir avant toute intervention
A grande échelle, on ne connait actuellement pas de moyens d’éliminer totalement et durablement les foyers
d’Euphorbe fausse-baguette. On ne peut qu’espérer stabiliser et contrôler leur extension.
Une intervention rapide permet de restreindre les moyens mis en place pour contrôler cette espèce : plus un foyer
de colonisation est traité rapidement, moins il faudra mobiliser de ressources pour le gérer.
Méthodes de gestion
Dans les stades initiaux de colonisation ou dans les endroits difficiles d’accès (le long de berges abruptes par exemple),
il est parfois possible de recourir à l’arrachage manuel de pieds isolés à l’aide d’une bêche.
Sur les peuplements denses, le décapage du sol sur plusieurs centimètres de profondeur semble un moyen de lutte
efficace. Cette profondeur peut varier de 15 à 40 centimètres suivant l’efficacité d’exploration verticale du sol par les
racines et les rhizomes de la plante, et le type de substrat du site colonisé. Il s’agit là d’une méthode certes radicale,
mais qui semble la seule réellement efficace connue à ce jour (photo de droite : travaux engagés en moyenne vallée
de l’Oise par le Conservatoire d’Espaces Naturels de Picardie).
Suivi des travaux de gestion
Un réensemencement après décapage permettrait de limiter le retour de l’Euphorbe fausse-baguette. L’idéal est de
semer des espèces se complétant au niveau de leur cycle et de leur type racinaire (en profondeur ou en surface),
afin qu’il y en ait toujours une qui soit en compétition avec l’Euphorbe fausse-baguette. Des expérimentations sont
actuellement en cours en vallée de l’Oise sur ce type de gestion. Une méthode plus simple et moins couteuse consiste
à semer une espèce non indigène à croissance rapide mais dont on sait pertinemment qu’elle sera remplacée par les
espèces prairiales naturellement présentes sur le site. Le cas du Ray-grass d’Italie (Lolium multiflorum) ou du Raygrass hybride (Lolium x boucheanum) est tout à fait indiqué pour ce type d’opération.
Maintenir une veille sur les secteurs gérés de manière à prévenir d’éventuelles repousses.
Ce qu’il est déconseillé de faire
L’arrêté du 12/09/2006 interdit tout traitement chimique à moins de 5 mètres minimum de tout point d’eau, cours
d’eau, étang, plan d’eau, figurant sur les cartes au 1/25000ème de l’Institut Géographique National. Par ailleurs,
il est important de rappeler les nuisances que de telles substances peuvent générer sur la santé humaine et sur
l’environnement.
Lors des opérations de décapage, ne pas transporter ni réemployer la terre en dehors du site. Elle est en effet
susceptible de contenir des fragments de racines et contaminer d’autres zones non concernées par la présence de
l’Euphorbe fausse-baguette.
© V. LEVY, CBNBL
L’Euphorbe fausse-baguette
Plan d’action
L’Euphorbe fausse-baguette
© V. LEVY, CBNBL
CENTRE RÉGIONAL DE PHYTOSOCIOLOGIE
AGRÉÉ CONSERVATOIRE BOTANIQUE NATIONAL DE BAILLEUL
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