Séminaire BOURBAKI 17e année, 1964/65, n Mai 1965 LE

Séminaire BOURBAKI1
17e année, 1964/65, n290 Mai 19652
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LE GROUPE DE BRAUER.4
I. ALGÈBRES D’AZUMAYA ET INTERPRÉTATIONS DIVERSES5
ALEXANDER GROTHENDIECK6
Résumé. This file represents a L
A
T
EX transcription of Le groupe de Brauer : I. Algèbres
d’Azumaya et interprétations diverses .
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Introduction. This document is based on a L
A
T
E
X transcription of the original.7
On sait que le groupe de Brauer des classes d’algèbres centrales simples sur un corps k(cf. [10])8
joue un rôle de premier plan dans l’étude arithmétique du corps k. La notion a été étendue en9
1951 par AZUMAYA [3] au cas d’un anneau de base local, et reprise en 1960 par AUSLANDER-10
GOLDMAN [2] dans le cas d’un anneau de base quelconque. Les développements de AZUMAYA-11
AUSLANDER-GOLDMAN peuvent se généraliser d’ailleurs de façon essentiellement triviale au cas12
des préschémas de base généraux, ce qui est un des buts du présent expose.13
Cependant, l’interprétation cohomologique du groupe de Brauer, qui a joue un rôle important14
dans le cas classique, ne pouvait être développée dans [3] et [2], faute de disposer d’une théorie15
de la cohomologie étale, développée dans [1] et [11]. C’est elle qui donne tout son charme à la16
variante “globale” du groupe de Brauer. Par exemple, le groupe de Brauer global d’une variété17
algébrique complété non singulière apparaît comme un invariant birationnel global, intimement lie18
au classique ”nombre de Picard” B2ρdes ”classes de 2-cohomologie transcendantes” sur une19
variété algébrique, et lie également (comme l’a remarque ARTIN) à certains conjectures récentes20
et profondes de BIRCH-SWINNERTON-DYER et TATE sur les cycles algébriques sur X. D’autre21
part, les méthodes cohomologiques permettent de répondre, au moins partiellement, à certaines22
questions laissées en suspens dans [2]. Le conférencier compte exposer ces questions proprement23
cohomologiques dans deux exposes ultérieurs, et se bornera ici aux premières variations sur le thème24
azumayen.25
1. Groupe de Brauer d’un espace topologique *.26
1.1. Soit Xun espace topologique, qu’on munit du faisceau d’anneaux OXdes fonctions continues27
à valeurs complexes. Pour tout entier n1, considérons Pn(X)=l’ensemble des classes, à un28
isomorphisme près, de fibres en algèbres localement triviaux sur X, à fibres isomorphes à l’algèbre29
de matrices Mn(C). On peut l’interpréter aussi, par le dictionnaire bien connu, comme l’ensemble30
des31
*. Le lecteur est invite à rétablir dans ce texte les expressions ”à isomorphisme près” et ”à homotopie près”, qui
font partie du style personnel auquel tient l’auteur.
1
classes, à un isomorphisme près, de faisceaux d’algèbres, αsur X, qui sont localement isomorphes32
au faisceau Mn(OX)(ou, ce qui rêvent au même, qui sont localement libres en tant que faisceaux33
de modules, et tels que, pour tout xX, la ”fibre réduite” AXOX,xk(x)soit isomorphe à Mn(C),34
i.e. soit une algèbre simple centrale de rang n2sur C). Un autre dictionnaire connu nous fournit35
l’interprétation suivante. Désignons par GP (n)le ”groupe projectif à nvariables sur C”,36
GP (n)=G`(n,C)/C=Mn(C)/C,
qui s’identifie aussi au groupe des automorphismes (tous intérieurs par SKOLEM-NOETHER ([6],37
VIII, §10) de l’algèbre Mn(C). Alors, Pn(X)s’identifie à l’ensemble H1(X,GP (n)) des classes, à38
un isomorphisme près, de fibres principaux sous GP (n), de base X. Lorsque Xest par exemple un39
CW-complexe, alors le point de vue homotopique conduit à regarder Pn(X)comme l’ensemble des40
classes d’applications (à une homotopie près) de Xdans un espace classifiant BGP(n).41
1.2. Le ”groupe de Brauer” de Xs’obtient à partir de la collection des Pn(X), en regardant comme42
”triviaux” les fibres en algèbres qui sont de la forme End (E), où Eest un fibre vectoriel de rang43
nsur X. En termes de faisceaux, ce sont les faisceaux de la forme End (E),Eun OX-Module44
localement libre de rang n; en termes de fibres principaux, ce sont les éléments de H1(X,GP (n))
45
qui peuvent se remonter en des éléments de H1(X,GP (n)) ; en termes homotopiques, les classes46
d’applications XBGP(n)qui se factorisent à travers BG`(n)BGP(n). De façon précise, appelons47
Algèbre d’Azumaya une algèbre sur Xlocalement isomorphe à une Algèbre de la forme Mn(OX).48
Deux telles Algèbres α, α0sont dites équivalentes si on peut trouver deux faisceaux localement libres49
E,E0sur X, et un isomorphisme d’algèbres50
αEnd (ε)'α0End (ε0)
En vertu de l’isomorphisme d’Algèbres End (E)End (E0)'End (E ⊗ E 0), on voit qu’on a bien51
la une relation d’équivalence entre Algèbres d’Azumaya, d’ailleurs compatible avec l’opération .52
L’ensemble des classes d’Algèbres d’Azumaya devient ainsi un monoïde commutatif, et même un53
groupe, car l’algèbre opposée αOde αdéfinit une classe inverse, grâce à l’isomorphisme canonique54
bien connu55
αOα'EndOXMod (α).
Le groupe ainsi obtenu s’appelle groupe de Brauer de X, et se note Br (X).56
2
1.3. Soit O
Xou GmXle faisceau des unités du faisceau d’anneau OX(i.e. des applications continues57
de Xdans C). La suite exacte de groupes58
1GmG`(n)GP (n)1
définit une suite exacte de faisceaux sur X, en prenant les faisceaux d’applications continues dans59
les trois termes, d’où une suite exacte de cohomologie (cf., par exemple, [13] pour Xparacompact,60
[12] en général) :61
1H1(X,GmX)H1(X,G`(n)X)H1(X,GP (n)X)δ
H2(X,Gm),
où, pour ξH1(X,GP (n)) =Pn(X),δξ H2(X,GmX)est ”l’obstruction à relever ξen un élément62
de H1(X,G`(n)X). Un calcul facile montre que, pour deux Algèbres d’Azumaya, on a63
δ(αα0)=δ(α)·δ(α0),
ce qui implique de façon à peu près formelle les conditions 1oà3ode la proposition suivante.64
Proposition 1.4.65
1oSi αest une Algèbre d’Azumaya, δ(α)ne dépend que de la classe de αdans Br (X).66
2oL’application67
(?)δ:Br (X)H2(X,GmX),
obtenue de cette façon, est un homomorphisme de groupes.68
3oCet homomorphisme est injectif.69
4oL’image de Pn(X)=H1(X,GP (n)) dans Br (X)est annulée par n.70
Le 4opeut se prouver en considérant la suite exacte71
1µnXS`(n)XGP (n)X1
(où S`(n)est le groupe spécial linéaire, µnle groupe des racines n-iemes de l’unité, isomorphe au72
centre de S`(n), forme des matrices diagonales de S`(n)). On en déduit encore une application73
cobord74
δ0:H1(X,GP (n)X)=Pn(X)H2(X, µnX),
et on voit aussitôt que l’homomorphisme δest le compose75
3
Pn(X)δ0
H2(X, µnX)H2(X,GmX),
où la deuxième fléché provient de l’inclusion canonique (µn)X(Gm)X. Comme H2(X, µnX)est76
évidemment annulé par n, cela entraîne le 4o.77
Une autre façon de procéder (qui restera valable dans le contexte plus général du no2) consiste à78
noter que GP (n)=S`(n)/µnopéré de façon évidente surmO=EO. . .
| {z }
n
EO, où EOest le faisceau79
localement libre de rang ntrivial sur X, sur lequel S`(n)opéré de la façon naturelle (noter que80
S`(n)opéré sur mOavec opérations triviales de µn). On a alors, en posant αO=End (EO), un81
isomorphisme de faisceaux d’Algèbres, compatible avec les opérations de GP (n):82
αO. . .
| {z }
n
αO'End (mO).
On peut alors, à tout fibre principal Pde groupe GP (n), de base X, associer le faisceau localement83
libre ”tordu” mP
O=m, et si αest l’Algèbre d’Azumaya associée à P, on aura84
α. . .
| {z }
n
α'End (m),
ce qui prouve la proposition 1.4,4o.85
Corollaire 1.5. L’image de Br (X)dans H2(X,GmX)est formée d’éléments de torsion (du moins86
si Xn’a qu’un nombre fini de composantes connexes, ou est compact).87
On peut, dans le cas topologique envisage ici, donner une interprétation topologique de H2(X,GmX),88
en utilisant la suite exacte exponentielle bien connue,89
0ZCx exp(2iπx)
C1,
qui fournit la suite exacte de faisceaux90
0ZXOXGmX0,
d’où, si Xest paracompact (donc OX”fin”), les isomorphismes91
Hi(X,GmX)'Hi+1 (X,Z),i1,
4
en particulier H2(X,GmX)'H3(X,Z), et l’homomorphisme δde 1.1 peut être interprété comme92
un homomorphisme93
(??)c:Br (X)H3(X,Z),
dont l’image est contenue dans le sous-groupe de torsion. On a ici :94
Théorèm 1.6 (SERRE).Si Xest un CW-complexe fini, l’homomorphisme (?)de 1.1 induit un95
isomorphisme de Br (X)avec le sous-groupe de torsion de H2(X,GmX).96
En d’autres termes :97
Corollaire 1.7. L’homomorphisme (??)induit un isomorphisme de Br (X)avec le sous-groupe de98
torsion de H3(X,Z). En particulier, Br (X)est un groupe fini.99
Cela donne donc une détermination complété, en termes homologiques, de Br (X). La démons-100
tration de 1.6 se fait par de la technique homotopique standard : on calcule, grâce à BOTT [5], les101
groupes d’homotopie de la ”limite inductive” BGP()des BGP(n), s’envoyant les uns dans les autres102
par ”tensorisation” par des matrices unité ; on trouve 0 en dimension impaire, Q/Zen dimension 2,103
et Qen dimension 2i (i2), d’où une application XB, définissant le fibre cherche d’obstruction104
x.105
Remarque 1.8.On peut introduire également une relation d’équivalence moins grossière parmi les106
Algèbres d’Azumaya, en disant que αet α0(sur Xconnexe) sont stablement isomorphes si on107
peut trouver des entiers n,mtels que Mn(α)'Mm(α0). Si KP (X)désigne l’ensemble des classes108
d’équivalence stable, KP (X)est un monoïde commutatif, et on a un homomorphisme naturel,109
KP (X)H2(X,Q/Z),
(où Q/Zest considéré comme limite inductive des µn'Z/nZ). L’argument de SERRE montre que,110
si Xest un CW-complexe fini, cet homomorphisme est surjectif, et qu’on a même un isomorphisme111
de foncteurs en X,112
(1.1) KP (X)
H2(X,Q/Z)×Y
i2
H2i(X,Q).
De façon plus précise, associons à tout ξH1(X,GP (n)) ses deux classes caractéristiques (où113
µ=lim
µnest le groupe des racines de l’unité, isomorphe114
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