Publié le 05 juillet 2016 à 05h00 | Mis à jour le 05 juillet 2016 à 05h00
Chronique
P.K. et l'Islande
STÉPHANE LAPORTE
La Presse
P.K. Subban était mon joueur du Canadien préféré. De loin.
Sur la glace, il était puissant, impliqué, spectaculaire. P.K. voulait la rondelle et il l'avait plus que
n'importe qui d'autre. Il faisait partie de ces rares surdoués qui peuvent à eux seuls changer l'allure d'un
match. Et sa façon de démontrer son enthousiasme galvanisait la foule. P.K. ! P.K ! P.K. ! Il y avait
deux raisons d'aller au Centre Bell : les arrêts du 31 et les présences du 76.
Dans la vie, il était flamboyant, drôle, charismatique. P.K. était une star. Comme Kanye West. Il avait
une tenue extravagante pour chaque occasion. Et des occasions, il en avait beaucoup. Il était partout.
Suivre P.K. sur les réseaux sociaux, c'était plus essoufflant que de le suivre sur la glace. Il s'appelait
P.K. Subban, mais il aurait pu s'appeler P.R. Subban. Public Relations. Un maître en la matière. Au
sourire sincère. Il a donné dix millions à l'Hôpital pour enfants. Pas un, pas deux, pas trois, dix !
Une grande gueule avec un grand coeur. Que peut-on désirer de mieux ? P.K. était le king de la ville.
J'en parle comme s'il était mort, parce que pour un fan du CH, c'est tout comme. Marc Bergevin l'a
échangé à Nashville. Bye bye, P.K. !
Pourquoi échanger le joueur le plus utilisé de l'équipe, gagnant du trophée Norris remis au meilleur
défenseur en 2013, idole de toute la population et qui a encore les plus belles années de sa carrière
devant lui ? Pourquoi échanger ton présent et ton avenir ? Pourquoi décevoir les gens quand le but de
ton entreprise, c'est de leur faire plaisir ?
Il y a sûrement une raison. Il faut qu'il y ait une raison. Ne cherchez pas dans les statistiques. Ne
présumez pas que c'est parce que Subban est trop jet set, non plus. La vraie raison ne fait pas partie
des choses que l'on sait. Elle fait partie des choses qu'on ne sait pas. Mais qu'on devine. Sa relation
avec son coach. Sa relation avec ses coéquipiers. Surtout sa relation avec ses coéquipiers. Parce
qu'un coach, ça se met facilement dehors. Tandis qu'une équipe, c'est plus difficile.
Sur la planète sportive mondiale, le plus gros événement de la semaine ne fut pas l'échange de P.K.
Subban. Ben non. Ce fut la victoire de l'Islande contre l'Angleterre, en huitième de finale de l'Euro 2016.
Un pays de 330 000 habitants a battu une nation de 53 millions d'habitants. Un pays qui n'avait jamais
participé à un tournoi majeur de soccer a battu la nation qui a inventé le soccer. Comment ? En équipe.
Parce que les joueurs de l'Islande ont compris qu'ils ne gagneraient jamais rien, s'ils n'étaient pas unis.
Aucune équipe n'est aussi soudée que la leur.
Individuellement, chaque joueur de l'Angleterre a beaucoup plus de talent que chacun des joueurs
islandais. Mais un match de soccer, ça ne se gagne pas individuellement, ça se gagne collectivement.