Document réalisé par l’Institut océanographique – www.institut-ocean.org
Les requins subissent par ailleurs les dommages infligés à leurs écosystèmes : dégradation des habitats
côtiers, raréfaction de leurs proies du fait de la surpêche, pollution se concentrant à chaque étage de la
pyramide alimentaire, etc.
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Pendant longtemps, les requins ont échappé à l’intérêt des scientifiques. Pourquoi s’intéresser à des
gêneurs, à des concurrents, si ce n’est pour s’en prémunir lorsqu’ils se font un peu trop présents ? Ces
dernières décennies, les progrès de la recherche marine ont finalement mis en lumière le rôle essentiel de
ces prédateurs dans le fonctionnement des écosystèmes marins.
Du haut de la pyramide alimentaire, les requins contrôlent les populations de poissons qui constituent leurs
proies, assurant ainsi l’équilibre global de l’écosystème. Qu’ils viennent à disparaître, comme sur la côte Est
des Etats-Unis, et d’autres espèces prolifèrent – en l’occurrence des raies, qui à leur tour se délectent des
coquilles Saint-Jacques, mettant un terme à une industrie prospère depuis plus d’un siècle.
Les sens très développés et complémentaires des requins leur permettent par ailleurs une grande
sélectivité. Loin de se jeter sur la première proie venue, ils contribuent au nettoyage des océans et à la
santé des écosystèmes en préférant les poissons affaiblis.
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Le film « Jaws », que vous évoquiez tout à l’heure, est loin d’en être à l’origine, mais le scénario, basé sur
les maigres connaissances scientifiques de l’époque et sur un condensé des mythes existants, a conduit à la
libération de nos peurs et à la première médiatisation globale d’un « danger requins ». La défiance s’est
alors cristallisée dans les esprits d’un large public, même très éloigné de la mer.
A l’instar des loups à terre, les requins font figure de bêtes féroces et de gêneurs, désignés tantôt
concurrents des pêcheurs pour la consommation de poissons, tantôt concurrents des baigneurs et des
surfeurs pour la jouissance des côtes tropicales. Après la Seconde Guerre mondiale, des études furent
même menées pour mettre au point un répulsif anti-requin capable d’éloigner enfin ceux que l’on accusait
de dévorer les naufragés de bateaux ou d’avions en perdition.
Même si les études prouvent à ce jour que l’homme n’est pas une proie recherchée, les requins
s’apparentent d’une façon primitive à des monstres des profondeurs surgissant par surprise pour nous
croquer, et nous rabaissent par là au rang de gibier. Symboliquement, ils semblent marquer la frontière
entre le monde civilisé -maîtrisé et exploité par l’homme- et la nature hostile. Leur mauvaise réputation
s’est forgée à un moment où ils dominaient véritablement les océans, remportant leur rapport de force
avec l’homme.
Malgré tout l’engagement de la communauté scientifique, d’associations locales ou mondiales, de
médiateurs comme l’Institut océanographique, il est aujourd’hui difficile de revenir sur une peur aussi
ancrée. Notons tout de même qu’en opposition à nos cultures occidentales, la plupart des cultures
insulaires n’attribuent aucune méchanceté aux requins. Elles le considèrent tantôt comme un simple
animal sauvage à respecter, tantôt comme un dieu chargé de sonder les âmes…
1 La Monaco Blue Initiative est une plateforme de partage et de propositions qui associe experts scientifiques,
économiques et juridiques des océans, représentants de la société civile, acteurs économiques et décideurs
politiques pour concevoir une gestion durable des océans conciliant développement et préservation des
écosystèmes marins.