G2000 292 0075

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Quelle priorité pour la prévention du risque dans les
établissements de santé français du point de vue du
contrôle de gestion ?
Catherine Dos Santos, Morad Mousli
Dans Management & ProspectiveManagement & Prospective 2012/2 (Volume 29)2012/2 (Volume 29), pages 75 à 86
Éditions Association de Recherches et Publications en ManagementAssociation de Recherches et Publications en Management
ISSN 2265-3937
DOI 10.3917/g2000.292.0075
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Quelle priorité pour la
prévention du risque dans
les établissements de santé
français du point de vue du
contrôle de gestion ?
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L'accélération des crises sanitaires au début des années 80 a contribué à changer
un système souvent déconcerté devant l’ampleur et la sporadicité de ces dernières
(Holcman, 2006). En effet, le modèle de gestion qui guide les différentes réformes du
système de santé, y compris les hôpitaux, présente un fondement rationnel que sont la
définition et la segmentation des groupes de malades et qui a conduit notamment à
la tarification à l’activité (Bonnici, 2007 ; Clément, 2008). Ceci a eu pour principale
conséquence dorganiser la gestion du risque dans les hôpitaux de façon parcellaire
(tous les risques ne sont pas pris en compte en raison de leur nature et de leur coût sup-
posé) et confinée (plusieurs services traitent différents risques de façon séparée) (Podeur,
2002 ; Foucher, 2002 ; Girard, 2006). Il en ressort que la gestion du risque sanitaire
dans les hôpitaux est insuffisante, ne faisant, de fait, quaccroître le clivage entre per-
sonnels soignants et non-soignants et creuser les déficits budgétaires (Thiebaut, 2005 ;
Fière, 2007 ; Clément, 2007 ; Dos Santos et Mousli, 2010). Or, les besoins sanitaires
de plus en plus importants, d’une part, et la qualité de ces derniers, d’autre part, obli-
gent les établissements de santé à un changement organisationnel qui doit cependant
veiller également à une meilleure gestion des dépenses publiques tout en garantissant
la qualité des soins. Pourtant, vécue comme une contrainte à la fois réglementaire et
organisationnelle par les directeurs d’hôpitaux (ARHIF, 2004-2005 ; DHOS, 2005,
2009), la gestion du risque ne constitue que très rarement une priorité managériale et
stratégique (Podeur, 2002 ; Esper, 2005 ; Girard, 2006) tant elle est contraignante sur
le plan financier. Notre problématique de recherche sera la suivante : la gestion du
risque sanitaire dans les hôpitaux peut-elle être une priorité du point de vue du contrôle
de gestion ? Notre étude, fondée sur une analyse critique des approches réglementaires
Catherine Dos Santos
Groupe ESC Clermont
Morad Mousli
Groupe ESC Clermont - ISEOR
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Gestion 2000 mars - avril 2012
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et pratiques usuelles, sappuiera sur les résultats d’une étude de cas réalisée dans un
service d’hématologie. Dans une première partie, nous nous intéresserons à linfluence
de la gestion du risque sur le management stratégique des établissements de santé et à
lintérêt d’une approche socio-économique du contrôle de gestion. La deuxième partie
développera létude de cas avant de passer en revue, dans une troisième partie, les
résultats obtenus.
Quelle influence
du management
stratégique sur la
prévention des risques
dans les établissements
de santé sur un plan
budgétaire ?
Relation entre gestion du
risque et management
stratégique
La gestion des risques dans les éta-
blissements de santé fait l’objet de
nombreux débats depuis plusieurs
années maintenant sans pour autant
que les problématiques scientifiques
ne se bornent à ce champ (Ellenberg,
2003). Initié par la distinction entre
incertitude et risque de Franck Night
(1921) pour qui « les risques sont sou-
mis à des probabilités mathématiques
alors que les incertitudes n’en n’ont
aucune », le risque est communé-
ment défini comme un danger plus ou
moins probable auquel on est exposé.
Le risque est ainsi caractérisé par la
probabilité de la survenue d’un ou
plusieurs évènements et par l’ampleur
de ses conséquences. Il résulte de
cette définition toute la difficulté que
l’on rencontre lorsque l’on veut gérer
un risque par définition aléatoire sur
des plans à la fois managérial et stra-
tégique. Aussi, le management stra-
tégique va s’attacher à identifier les
risques qui pèsent sur l’organisation à
un moment donné (plus ou moins long
terme) afin, sinon de les supprimer,
tout du moins d’en réduire les consé-
quences néfastes (Poullain, 2002 ;
Fouassier, 2008). Quatre stratégies
sont connues :
La prévention : elle passe par la mise
en place de mesures visant à éviter
l’évènement en question. Elle consti-
tue l’approche la moins onéreuse
pour les décideurs ;
L’acceptation : elle résulte généra-
lement d’une étude approfondie
du risque et de ses conséquences.
L’évaluation de ces dernières est
alors comparée au coût de réduc-
tion ou de transfert à supporter le
cas échéant et plaide, bien entendu,
pour la moins chère des options.
Le transfert : dit également « exter-
nalisation » ou outsourcing, cette
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Quelle priorité pour la prévention du risque dans les établissements
de santé français du point de vue du contrôle de gestion ?
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méthode consiste à sous-traiter tout
ou partie de l’activité à risques afin
de ne plus avoir à la gérer. Elle
constitue de loin la plus coûteuse des
stratégies connues.
La réduction : elle repose sur un pro-
cessus qui va de la veille à la mise en
place d’actions préventives ou cor-
rectives. C’est la plus répandue dans
les entreprises publiques et privées.
Bien que ces quatre approches
fondent des processus de prévention
globale des risques, le « management
stratégique des risques » dans les éta-
blissements de santé est souvent par-
cellaire (Guimbaud, 1997 ; Podeur,
2002). En effet, tous les risques ne
sont pas pris en charge et, de fait, ne
font pas systématiquement l’objet d’un
« plan d’actions » pour des raisons
essentiellement liées au système de
mesure. D’une part, certains risques
sont naturellement exclus des plans
d’actions en raison de leur nature.
Ainsi, les risques organisationnels
(l’absentéisme, la rotation du person-
nel, le manque de médecins, etc.)
dont la survenue peut être de nature
à perturber la réalisation des objec-
tifs de l’organisation, sont jugés moins
conventionnels parce que plus diffici-
lement quantifiables en termes de fré-
quence ou de gravité. Ces derniers re-
vêtent pourtant un caractère important
au motif qu’ils pourraient constituer
un risque à part entière dont l’hôpital
devrait pouvoir se prémunir dans un
plan d’actions ad hoc (Krief, 2005).
Il ressort de ce premier point que la
hiérarchisation des risques tient, pour
l’essentiel, à la législation qui a impul-
sé la gestion du risque sanitaire dans
les hôpitaux sans pour autant pres-
crire de « méthode » afin d’y parve-
nir (Thiveaud, 2000 ; Savall, 1995 ;
Savall et Zardet, 1996). D’autre part,
les risques sont souvent regardés par
le prisme singulièrement rétréci de
l’analyse financière courtermiste dans
les établissements de santé selon les
textes en vigueur (Podeur, 2002) oc-
cultant par-là même toute une série
de risques, organisationnels ceux-là,
dont la survenue pourrait pourtant, là
encore, avoir des conséquences gra-
vissimes pour l’hôpital.
Ainsi, l’une des décisions qui s’im-
posent aux directions générales des
établissements de santé en charge de
l’organisation du management straté-
gique en général et de la gestion des
risques en particulier, est de mettre en
place un système de mesure suscep-
tible de s’attacher à l’ensemble des
risques et à leurs conséquences sur la
performance à la fois sociale et éco-
nomique, à court et long termes, de
l’hôpital. Or, nous pouvons relever
que la gestion des risques dans les
hôpitaux souffre d’une certaine
segmentation inhérente essentielle-
ment aux différents textes de lois en
vigueur dont l’application cloisonne,
de fait, les activités qui en découlent
(Schweyer, 2006). On distingue ainsi
essentiellement deux types de struc-
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tures spécialisées dans le traitement
de risques précis : celles en « sec-
teur » et celles en « tuyaux d’orgue ».
Qui plus est, les résultats produits sont
souvent jugés insuffisants en raison
notamment de l’évaluation « réduc-
trice » des outils utilisés, en particulier
dans le système budgétaire souvent
aux avant-postes quant à la mesure
de la performance financière immé-
diate et qui fonde, de fait, le choix de
s’attacher à tel ou tel risque en priorité
en raison de l’économie présumée. En
cela, le contrôle de gestion hospita-
lier a un rôle particulier à jouer dans
la prépondérance hypothétique mais
souhaitable d’une gestion des risques.
C’est la raison pour laquelle nous al-
lons à présent nous intéresser à une
approche singulière du contrôle de
gestion fondée sur une démarche de
type socio-économique susceptible de
dépasser les limites à la fois managé-
riales et financières rencontrées dans
les établissements de santé à l’heure
actuelle.
Intérêts d'une approche de
type socio-économique du
contrôle de gestion
La démarche socio-économique du
management et du contrôle (Savall,
1975 ; Savall, Zardet, 1992) est une
approche innovante fondée sur les tra-
vaux d’Anthony (1965) afin de propo-
ser une démarche globale et outillée
visant un développement de la per-
formance socio-économique. En effet,
l’hypothèse fondamentale sur laquelle
repose le management socio-écono-
mique (MSE) est que le contrôle doit re-
connaître et mesurer des performances
à la fois sociales et économiques à
court et long termes. C’est pourquoi le
contrôle de gestion socio-économique
(CGSE) vise à améliorer aussi bien les
résultats économiques immédiats que
la création de potentiel susceptible
d’asseoir un plus grand développe-
ment à terme. Nous retrouvons ainsi,
dans la configuration du contrôle de
gestion par le MSE (figure 1), les deux
clés de lecture de la performance éco-
nomique, à savoir les résultats immé-
diats assurés par la fonction de vigi-
lance économique (court terme) et la
création de potentiel visant à une pré-
vention des dysfonctionnements ainsi
qu’à la mise en œuvre de la stratégie
(long terme).
Aussi, dans les établissements de
santé, le CGSE, garanti par un mana-
gement stratégique ad hoc de type
socio-économique, est susceptible
d’améliorer aussi bien l’allocation des
ressources destinées à la prévention
des risques que la performance finan-
cière à court et long termes d’organi-
sations réduites à négliger tel ou tel
risque au regard du coût supposé des
actions à mettre en place pour leur
résorption. Par conséquent, le rôle du
contrôle de gestion devient primordial
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