situation en cause. Selon Eîlis, les principales erreurs logiques susceptibles d’être respon
sables de « distorsions cognitives » importantes sont les suivantes : la catégorisation excessive
et sans nuance (c’est noir ou blanc), la propension à généraliser à outrance, la croyance en
la possibilité de lire dans les pensées d’autrui ou d’être victime de prédictions maléfiques
(la bonne aventure), la personnalisation et l’inclination pour le raisonnement émotif. Le
thérapeute enseigne au patient à reconnaître ces « distorsions cognitives » et à les remettre
en question.
Le deuxième niveau est l'évaluation, soit la signification que l’individu attribue à l’évé
nement ou à la réponse à la question suivante : « Si mon interprétation est correcte, comment
puis-je évaluer la situation ?» Il existe, selon Ellis, quatre façons particulièrement nuisibles
d’évaluer une situation, ce qu’il nomme des « attitudes dysfonctionnelles de base » : les
exigences (je dois/je devrais), la dramatisation, la non-acceptation (l’intolérance à la frus
tration) et les jugements sur la valeur personnelle. Ainsi, dans l’exemple précédent,
l’individu inquiet de ne pas avoir été salué peut se dire : « Si mon ami est fâché contre moi,
c’est terrible et je ne peux le supporter. »
Le troisième niveau est celui des croyances sous-jacentes, dans lesquelles on trouve
des règles influençant la réaction aux événements. Ellis décrit un certain nombre de ces
croyances, qu’il nomme «croyances irréalistes majeures». Celles-ci composent le noyau
des valeurs centrales de l’individu. Elles peuvent rendre ce dernier malheureux si elles
comportent des règles rigides et absolues.
On constate donc que le modèle émotivo-rationnel d’Eliis ressemble jusqu’à un certain
point à celui de Beck : dans les deux modèles, le clinicien s’intéresse d’abord aux émotions
et aux pensées conscientes, puis aux croyances sous-jacentes. La principale différence entre
les deux approches réside dans le fait qu’Ellis passe beaucoup plus rapidement aux croy
ances dysfonctionnelles, qu’il aborde avec vigueur, alors que Beck s’attarde davantage sur
les émotions et les pensées conscientes ou semi-conscientes. Ce n’est que lorsque son
patient a bien maîtrisé cette étape que Beck passe aux croyances intermédiaires et fonda
mentales. Sa démarche est donc plus lente, mais aussi plus méthodique et, à notre avis, plus
efficace. C’est sans doute la raison pour laquelle elle a été adoptée par une majorité de cli
niciens au cours des dernières années.
Nous avons conservé ici deux aspects du modèle émotivo-rationnel d’Elïis, parce que
leur utilisation nous semble particulièrement pertinente en psychothérapie et parce qu’ils
comportent, à notre avis, des notions complémentaires à celles du modèle de Beck. Ce sont
les attitudes dysfonctionnelles de base et les croyances irréalistes majeures.
Les attitudes dysfonctionnelles de base
Une attitude est une façon plus ou moins rigide ou stéréotypée d’envisager certaines
situations ou événements de la vie courante ou d’y réagir. Une attitude devient dysfonc
tionnelle si elle est inappropriée et si elle dessert l’individu. Pour Ellis (1962), les quatre
attitudes les plus fréquentes et les plus nuisibles dans la société contemporaine sont les exi
gences rigides, la non-acceptation, la dramatisation et les jugements sur la valeur personnelle.
C’est pourquoi il les nomme «attitudes dysfonctionnelles de base». En réalité, ces quatre
façons de penser ou d’agir au quotidien ne sont pas toujours des attitudes; c’est leur