Du MYTHE ANCIEN AU MYTHE MODERNE
musique. Si bien que la distance temporelle est annulée, les passions
originelles colportées et le processus tautologique, quant au récepteur,
accompli.
Le mythe de portée universelle connaît une brillante réactivation
dans la création littéraire et artistique du XXe siècle.
Dans ce contexte, le rôle du Groupe des Six est déterminant durant
la première moitié du XXe siècle. Darius Milhaud compose les opéras
Les Euménides, Médée, les opéras-minutes L'Enlèvement d'Europe,
L'Abandon d'Ariane, La Délivrance de Thésée et les musiques de scène
L'Orestie d'Eschyle, Agamemnon, Les Choéphores, Protée. Eric Satie
s'inspire des textes de Platon, traduits par Victor Cousin, pour son
Socrate. Germaine Taillefer crée La Cantate du Narcisse d'après Paul
Valéry, Arthur Honegger Phèdre et Antigone, enfin, Georges Auric Phè-
dre.
Mais aussi comment ne pas citer le ballet et la suite pour orchestre
Daphnis et Chloé de Maurice Ravel comme l'oratorio Oedipus Rex
d'Igor Stravinsky, son mélodrame Persephone (sur un texte d'André
Gide) et son ballet Orpheus.
Au théâtre, Jean Giraudoux dans La guerre de Troie n'aura pas lieu,
met en scène la vie politique internationale des années '30 : en 1933,
Hitler devient chancelier du Reich et, en 1935 —lorsque Jouvet monte la
pièce— l'Italie mussolinienne entre en guerre avec l'Ethiopie. La Ile
guerre mondiale se profile à l'horizon.
Ainsi, le mythe d'Antigone, d'après la pièce de Sophocle, revient sur
scène grâce à Cocteau, Brecht et Anouilh (en passant par les versions de
Rotrou de 1638 et d'Alfieri en 1776). Plus particulièrement, en 1944,
l'Antigone d'Anouilh devient une figure emblématique de la Résistance,
tandis que Créon représente l'Etat vichyste et le compromis. Nous pou-
vons ainsi apprécier et évaluer la manière dont un symbole grec, par
exemple, fonctionne dans un contexte national et idéologique différent.
Dans son Electre, Jean Giraudoux —après Crébillon (en 1708), Perez
Galdós (en 1901), Hugo von Hofmannsthal (en 1905), Eugene O'Neill (en
1932)-
donne une nouvelle version du mythe que nous ont laissé Homère,
Eschyle, Sophocle et Euripide. En 1943, Jean-Paul Sartre renouvelle ce
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