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Réanimation du nouveau-né en salle de naissance

Chapitre
32
Réanimation du nouveau-né
en salle de naissance
E. Saliba, C. Lionnet, F. Gold
PLAN DU CHAPITRE
Principes de la réanimation néonatale . . . . . .
Techniques de réanimation néonatale . . . . . .
411
412
OBJECTIFS
L'interne ou la sage-femme doivent être capables :
• de reconnaître les situations à haut risque ;
• de connaître les procédures d'appel en salle de naissance ;
• de décrire les mesures de maintenance du matériel
nécessaire à la réanimation néonatale ;
• d'analyser un état de détresse néonatale immédiate ;
• de discuter les méthodes de réanimation respiratoire,
hémodynamique et métabolique, leurs indications, leurs
impératifs techniques ;
• de réaliser la réanimation d'un nouveau-né en salle
de naissance comprenant : une désobstruction des
voies aériennes, une ventilation au masque ou après
intubation, un massage cardiaque externe, la mise en
place d'un cathéter veineux ombilical.
Trois à 6 % des nouveau-nés ont un état initial médiocre ou
mauvais, qui justifie des manœuvres immédiates de secourisme. Huit à neuf fois sur dix, ces difficultés étaient prévues ;
parfois, cependant, elles surviennent de façon inopinée.
C'est la raison pour laquelle, dans tout établissement où
naissent des enfants, une procédure écrite doit par avance
préciser :
■ qui est responsable de l'entretien du matériel et de l'instruction du personnel de la salle de travail en ce qui
concerne les soins au nouveau-né ;
■ qui est chargé de pratiquer la réanimation en salle de
naissance, tant dans les conditions programmées (liste
des circonstances dans lesquelles un opérateur entraîné
doit être appelé à l'avance) que dans les cas imprévus
(c'est alors la personne présente la plus entraînée qui doit
effectuer les premiers gestes) ;
■ quel protocole de soins doit être adopté : ce sont actuellement les recommandations du Comité international de
liaison sur la réanimation (ILCOR) [2] qui sont le plus
souvent appliquées (version 2015).
Pratique de l'accouchement
© 2017, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Conduite à tenir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
419
Principes de la réanimation
néonatale
La réanimation de l'enfant à la naissance comporte schémat­
iquement un objectif prioritaire, deux objectifs complémentaires, et trois impératifs à respecter [2, 8].
Objectif prioritaire : assurer
une ventilation alvéolaire efficace
Un nouveau-né en difficulté dans les premières minutes
est toujours un enfant dont l'adaptation respiratoire à la vie
extra-utérine (voir Chapitre 1, « Adaptation du nouveau-né
à la vie extra-utérine ») est perturbée :
■ souvent à la suite d'une anoxo-ischémie ante- ou pernatale (nouveau-né asphyxié) ;
■ parfois par intoxication médicamenteuse d'origine
maternelle (nouveau-né déprimé ou endormi) ;
■ exceptionnellement, du fait de la révélation immédiate
d'une malformation congénitale intéressant l'appareil respiratoire (notamment hernie diaphragmatique congénitale).
Dans tous les cas, le nouveau-né a besoin qu'on assume pour
lui cette adaptation respiratoire des premières minutes. Cet
objectif primordial est toujours indispensable et souvent suffisant. Deux méthodes doivent être conjuguées pour l'atteindre :
■ la désobstruction des voies aériennes supérieures, et éventuellement inférieures, toujours indiquée en premier lieu ;
■ la ventilation en pression positive (VPP) avec un ballon autogonflable à valve unidirectionnelle ou à l'aide d'un insufflateur manuel à pression contrôlée avec pièce en T appliquée
par masque facial ou après intubation trachéale selon les cas.
Un objectif complémentaire
Maintenir un minimum vital circulatoire
Dans les premières minutes de vie, l'évaluation de l'état circulatoire de l'enfant se résume à l'appréciation de sa seule
fréquence cardiaque.
411
412 Partie V. Techniques obstétricales
Il s'agit heureusement d'un bon critère d'évaluation
puisque le cœur du fœtus et du nouveau-né étant pratiquement incapable de modifier son volume d'éjection systolique (car il est déjà maximal), il existe un parallélisme étroit
entre la fréquence cardiaque et le débit cardiaque.
Il est donc nécessaire de pratiquer un massage cardiaque
externe lorsque le débit cardiaque spontané de l'enfant est
probablement devenu inférieur à l'effet attendu du massage,
c'est-à-dire en pratique quand la fréquence cardiaque reste inférieure à 60 par minute après 30 secondes de ventilation alvéolaire efficace. Le massage cardiaque se fera en alternance avec
la poursuite de la ventilation et nécessite la présence de deux
opérateurs. Il faut, de plus, envisager à ce stade une intubation
trachéale et une adaptation de la FiO2. Quand l'insuffisance
circulatoire se prolonge au-delà de 60 secondes, il est recommandé d'administrer à l'enfant une catécholamine : c'est l'adrénaline qui est le plus souvent utilisée, susceptible de faciliter un
redémarrage ou une accélération des battements cardiaques ;
cette administration doit être particulièrement précoce lorsque
le cœur est arrêté (en pratique, dès l'intubation trachéale).
Même en cas d'arrêt cardiaque néonatal, il est capital de se
souvenir que, contrairement à l'arrêt cardiaque adulte (qui est
en règle d'origine cardiaque), c'est l'existence d'une défaillance
respiratoire qui est a priori responsable de l'arrêt cardiaque : les
manœuvres respiratoires restent donc toujours prioritaires [3].
Trois impératifs à respecter
La rapidité
Les gestes de réanimation doivent être rapidement efficaces, car une période d'anoxie excédant 6 minutes environ
entraîne des séquelles neurologiques, d'où l'importance de
chronométrer les gestes de réanimation néonatale.
La normothermie
On doit, parallèlement aux gestes de réanimation, lutter
contre le refroidissement, qui est d'autant plus rapide que
l'enfant est de plus petit poids et plus en difficulté. La température centrale d'un nouveau-né, laissé sans précaution à
22-24 °C, peut s'abaisser de 37 à 33 °C en 15 minutes.
Pour éviter tout refroidissement excessif, il faut :
■ pratiquer les premiers gestes sur une table de réanimation néonatale disposant d'un chauffage efficace ;
■ sécher et couvrir l'enfant dès les premières secondes (voir
Chapitre 5, « Gestes systématiques des premières minutes
de vie ») ;
■ les nouveau-nés d'âge gestationnel inférieur à 28 SA et de poids
de naissance inférieur à 1 500 g doivent être enveloppés immédiatement, sans être essuyés, dans un sac de polyéthylène ;
■ dès que l'état du nouveau-né l'autorise, placer celui-ci dans
un incubateur de recueil préalablement chauffé à 35 °C ou
le laisser se réchauffer contre le corps de sa mère.
On veillera toutefois à éviter toute hyperthermie (attention notamment au nouveau-né de mère fébrile : la température initiale de l'enfant est en moyenne supérieure à celle de
sa mère de 0,3 à 0,8 °C) ou en cas d'asphyxie périnatale qui
est susceptible de majorer les lésions cérébrales.
L'asepsie
Tous les gestes doivent être pratiqués avec l'asepsie la plus
stricte pour éviter toute contamination microbienne mas-
sive du nouveau-né, éventuellement responsable d'une
infection iatrogène ultérieure.
Pour respecter cet impératif bactériologique, et sans
­s'illusionner sur le caractère « chirurgical » des conditions de
travail en salle de naissance, il faut :
■ accueillir le nouveau-né au moins dans les conditions de
tout examen néonatal (mains soigneusement lavées ou
désinfectées avec les solutions hydroalcooliques, blouse
propre, visage et cheveux protégés) ;
■ veiller au nettoyage du gros matériel entre chaque enfant (table
de réanimation, appareil manuel de ventilation, stéthoscope) ;
■ changer le petit matériel avant chaque réanimation
(sondes d'aspiration, liquide de rinçage, literie).
Techniques de réanimation néonatale
La réanimation du nouveau-né fait appel à cinq techniques
principales.
Désobstruction des voies aériennes
Voies aériennes supérieures
La désobstruction consiste à aspirer à l'aide d'une sonde de
calibre approprié (n° 8 ou 10). Ne pas aspirer lors de la mise en
place de la sonde, mais toujours lors de son retrait. Il faut aspirer
les deux tiers antérieurs de la bouche (introduction de la sonde
de 3 à 5 cm selon la corpulence de l'enfant ; puis, si besoin, chaque
narine en introduisant uniquement l'extrémité de la sonde (0,5
à 1 cm) sans chercher systématiquement à passer les choanes.
Cette aspiration, tout en étant efficace (c'est-à-dire productive), doit être brève (risque d'apnée réflexe), prudente (risque
traumatique pour les muqueuses) et aseptique (porte d'entrée
infectieuse potentielle). La source de vide doit être réglée de telle
sorte que lorsque le système d'aspiration est occlus, la pression
négative doit être réglée entre –100 et –150 cmH2O.
En cas de liquide méconial et si le nouveau-né n'est pas
vigoureux, les données publiées dans la littérature ne permettent
pas de recommander une intubation et une aspiration trachéale
en routine chez les nouveau-nés non vigoureux nés dans un
contexte de liquide amniotique méconial. Une intervention
appropriée pour assurer une ventilation et une oxygénation efficaces doit être initiée comme pour chaque enfant (c'est-à-dire
une ventilation au masque dans les premières minutes de vie).
Elle peut inclure une intubation et une aspiration trachéale si les
voies aériennes sont obstruées rendant ainsi la ventilation inefficace. Trois techniques peuvent être utilisées.
L'intubation oro- ou nasotrachéale suivie d'aspiration à travers le tube trachéal à l'aide d'une sonde de De Lee de calibre
approprié (n° 6 pour une sonde trachéale n° 3). Cette dernière
a l'avantage de permettre immédiatement la ventilation artificielle sur tube, mais a l'inconvénient d'être peu efficace (voire
dangereuse par obstruction) sur les bouchons de méconium.
L'intubation orotrachéale suivie d'aspiration directe par la
sonde trachéale elle-même qu'on relie à la source de vide :
elle est beaucoup plus efficace sur les bouchons de méconium, mais a l'inconvénient de nécessiter impérativement le
changement de sonde avant toute ventilation sur tube.
L'utilisation de la sonde d'aspiration buccopharyngée, qui
est introduite dans la glotte et enfoncée de 2 à 3 cm, l'aspiration étant pratiquée en retirant progressivement cette sonde,
Chapitre 32. Réanimation du nouveau-né en salle de naissance 413
et le geste répété tant qu'elle est productive : pratiquée avec
une sonde n° 8 ou 10, cette technique est régulièrement efficace, mais elle nécessite éventuellement ensuite une intubation trachéale pour ventilation artificielle sur tube.
Ventilation manuelle en pression positive
Elle s'effectue à l'aide d'un petit ballon autogonflable à valve
unidirectionnelle (exemple BAVU de 250 ml) ou d'un insufflateur manuel à pression contrôlée avec pièce en T à préférer et qui s'adapte à un masque facial pour nouveau-né, ou
qui est relié à une sonde trachéale d'intubation.
Les modèles de ballon actuellement sur le marché
(Ambu®, Laerdal®), alimentés avec six litres d'oxygène par
minute et munis de leur réservoir arrière d'oxygène, assurent
en théorie les paramètres de ventilation suivants :
■ FiO2 = 60–70 % (sans réservoir arrière d'oxygène = 40 %) ;
■ pression d'insufflation maximale = 40 cmH2O (pouvant
monter jusqu'à 50–55 cm, malgré la valve de sécurité, en
cas d'utilisation « forcée »).
En pratique, sur ces modèles, la FiO2 délivrée à l'enfant
augmente avec le débit d'oxygène utilisé (elle n'est supérieure ou égale à 75 %, quel que soit l'opérateur, que pour
un débit supérieur ou égal à 10/min) et diminue quand les
pressions ou la fréquence augmentent.
Il est actuellment recommandé pour un nouveau-né à
terme de débuter la ventilation avec une FiO2 à 21 % et de
l'adapter en fonction de la SpO2 posée sur la main droite. Pour
un nouveau-né prématuré, on peut débuter la ventilation avec
une FiO2 à 30 % et on l'adaptera aussi en fonction de la SPO2.
La pression d'insufflation réellement délivrée par un ballon ne peut être que grossièrement estimée, d'où l'intérêt
d'adapter un manomètre de pression qui indique la pression
exercée sur le ballon. Un autre système consiste à relier l'appareil de ventilation manuelle à un manomètre affichant les
pressions obtenues. Le ballon peu aussi être relié à une valve
de PEP qui sera réglée à 3–4 cmH2O, pouvant être augmentée
jusqu'à 6 cmH2O chez un nouveau-né prématuré mais pas
au-delà. Les insufflateurs manuels à pression contrôlée sont à
privilégier. (Neopuff Infant Resuscitator Fisher-Paykel®, Tom
Pouce Médipréma®). Ils représentent de ce point de vue un
réel progrès, permettant l'administration d'une pression positive d'insufflation (PPI) et d'une pression expiratoire positive
(PEP) parfaitement contrôlées. On réglera les niveaux de la
PPI (pression positive d'insufflation à 20–25 cmH2O pour un
nouveau-né à terme et à 15–20 cmH2O pour un nouveauné prématuré. Les niveaux de PEP ne seront identiques que
pour une ventilation au ballon (4 à 6 cmH2O).
Quelle que soit la technique utilisée, la position de l'enfant doit être bien contrôlée (figure 32.1) : tête de l'enfant
défléchie, application étanche du masque sur la bouche et le
nez de l'enfant par la main gauche de l'opérateur (qui luxe en
même temps le menton en avant), pressions sur le ballon (ou
obturation intermittente de la partie en T du circuit Neopuff®)
effectuées par la main droite avec une force ou une durée
adaptée. En cas de ventilation au masque prolongée, une
vidange gazeuse gastrique doit être pratiquée toutes les trois
à cinq minutes (par mise en place d'une sonde orogastrique).
Chez le nouveau-né en état de mort apparente, le volume
gazeux ainsi réellement administré à chaque insufflation ne
dépasse pas le tiers du volume obtenu par la ventilation sur
sonde trachéale. L'efficacité pourtant quotidiennement vérifiée
de la ventilation au masque paraît donc être principalement
liée à la stimulation des réflexes respiratoires du nouveau-né
(par distension des récepteurs bronchiques) et au déclenchement de ses mouvements respiratoires propres. C'est la raison
pour laquelle l'intubation trachéale est recommandée après 60
secondes de ventilation au masque, en cas d'arrêt cardiaque ou
de bradycardie persistante, chez un enfant qui reste en apnée.
L'intubation doit être pratiquée de façon réglée (planche 32.1)
avec une sonde de calibre approprié (tableau 32.1).
Chez le nouveau-né à terme, la fréquence des insufflations
doit être de 40/min, et leur durée de trois quarts de seconde
à 1 seconde environ ; les pressions recommandées sont de 15
à 20 cmH2O. Lors des premières insufflations délivrées à un
nouveau-né apnéique, pour obtenir une première ouverture
alvéolaire pulmonaire satisfaisante, on peut augmenter la durée
d'insufflation jusqu'à deux ou trois secondes pendant quelques
cycles. Les critères d'efficacité de la ventilation sont les suivants :
■ expansion régulière et symétrique des deux hémithorax
(l'insufflation est audible au stéthoscope dans les deux
champs pulmonaires) ;
■ et surtout accélération des battements cardiaques parallèlement à la ventilation.
En cas de massage cardiaque associé, il est recommandé
d'alterner les insufflations et les compressions thoraciques,
sous forme d'une insufflation suivie de trois pressions
­(« j'insuffle-2-3-j'insuffle-2-3, etc. ») sternales, chaque cycle
de quatre gestes durant au total deux secondes.
Massage cardiaque externe
Il consiste à comprimer le thorax entre sternum et rachis,
sans que l'on sache exactement si c'est la compression
directe du cœur ou l'élévation de la pression intrathoracique
qui produit une éjection sanguine.
Même correctement mis en œuvre, il n'assure que 20 à
25 % du débit cardiaque normal. Une ventilation artificielle
associée est indispensable.
Placé à droite du patient, l'opérateur empoigne le thorax de
l'enfant dans ses deux mains, en plaçant ses doigts sur le rachis
en arrière (pour réaliser un plan rigide) et ses pouces accolés
ou croisés sur le tiers inférieur du sternum en avant, sur la ligne
médiane, à hauteur des mamelons (figure 32.2). Il exerce avec
les pouces, 90 fois/min, une dépression de 1,5 à 2 cm environ.
Les critères d'efficacité du massage cardiaque externe
sont les suivants :
■ pouls proximaux palpables, les plus accessibles en pratique étant les pouls huméraux ;
■ temps de recoloration capillaire au front n'excédant pas
5 secondes ;
■ pulsations perceptibles à la base du cordon ombilical.
Injection de solutés (figures 32.3 et 32.4)
Deux solutés sont employés pour la réanimation néonatale (tableau 32.2), surtout le sérum physiologique (ClNa à
9 g/l) comme soluté de remplissage vasculaire ; indications :
contexte de perte hémorragique ; pâleur ; état de choc et non
réaction à la réanimation bien menée :
■ soluté isotonique NaCl 0,9 % (sérum physiologique).
Posologie : 10–15 ml/kg en intraveineux en cinq à dix minutes ;
414 Partie V. Techniques obstétricales
a
c
b
1
2
3
4
Fig. 32.1. Ventilation au masque. Le masque est appliqué fermement sur la face avec le pouce et l'index et une contre-pression est exercée :
a. avec le majeur sur la symphyse du menton ; b. avec l'annulaire et l'auriculaire derrière l'angle de la mandibule (d'après [6]) ; c. application du
masque facial (d'après le support pédagogique de la Société Française de Néonatologie). La taille doit être adaptée à la morphologie du nouveauné et avec une position correcte doit assurer l'étanchéité. 1. masque de taille adaptée en bonne position ; 2. masque de taille adaptée en mauvaise
position ; 3. masque trop grand ; 4. masque trop petit.
■ culot globulaire O Rh (–). Connaître la procédure (protocole) pour en obtenir en urgence ;
■ posologie : 15 ml/kg ;
■ le sérum glucosé en solution hypertonique à 10 %,
comme apport énergétique cardiaque et cérébral en cas
d'hypoglycémie ;
• deux abords vasculaires peuvent être utilisés pour injecter ces solutés.
Le cathéter veineux ombilical (KTVO),
la méthode de choix en urgence
Les préparatifs sont les suivants :
■ désinfection de la région ombilicale et du cordon (placé latéralement sur la paroi abdominale, quand il est encore long) ;
■ après mise de gants stériles par l'opérateur, pose d'un
champ troué, limitant la zone opératoire au point d'implantation du cordon et à ses trois premiers centimètres
(pince de Barr sous le champ) ;
■ section du cordon à 1,5–2 cm de son implantation
cutanée ;
■ repérage des vaisseaux ombilicaux : veine large, flasque
et béante, souvent à midi ; artères spasmées et érectiles,
blanchâtres, souvent à 4 et 8 heures ;
■ préparation du cathéter (calibre n° 3,5 si < 1 000 g, n° 4 si >
1 000 g) : adaptation à son extrémité d'un robinet à trois
voies, et rinçage avec une solution de sérum physiologique.
Le cathéter est en règle générale facilement introduit
dans la lumière de la veine ombilicale, maintenue ouverte
à l'aide d'une pince sans griffe. On le fait progresser vers le
haut, en visant l'aire hépatique, et deux cas sont possibles
(figures 32.3 et 32.4) :
■ il s'enfonce sans difficulté au-delà du deuxième repère
(10 cm) : son extrémité est dans l'oreillette droite, et on le
laisse dans cette position ;
■ il bute, à plusieurs reprises, entre le premier (5 cm) et le
deuxième repère : il est engagé dans une branche hépatique, et on doit le retirer jusqu'au premier repère au
moins avant toute injection. L'injection de solutés (ou de
drogues) ne doit en effet s'effectuer qu'en aval (chaque
fois que possible) ou à défaut en amont du foie, mais en
aucune manière directement dans la masse hépatique
(risque ultérieur de cavernome portal) ; de toute façon,
elle ne doit être pratiquée que dans une position où le
reflux de sang dans le cathéter est franc. Il est ensuite
possible de clamper en masse cordon et cathéter, qu'on
recouvre d'une compresse stérile, afin de se ménager la
possibilité de renouveler ultérieurement l'injection.
La survenue d'un état de choc lors de la mise en place du
cathéter (choc « à la sonde ») nécessite son retrait immédiat
et des manœuvres cardiorespiratoires de réanimation.
Ponction veineuse périphérique par cathéter court
C'est la méthode la plus anodine et la moins dangereuse,
mais elle n'est pas toujours aisée ni possible dans les premières minutes de vie. Le site utilisé peut être un membre
supérieur (dos de la main, pli du coude) ou le dos du pied.
Cette voie est en fait surtout utilisée au décours des premiers
gestes de réanimation pour poser à l'enfant une perfusion continue.
Chapitre 32. Réanimation du nouveau-né en salle de naissance 415
Planche 32.1. Technique de l'intubation trachéale en salle de naissance
Voie orale : deux étapes successives
Exposition de la glotte
1. Les trois temps de l’exposition de la glotte.
D’après J. Laugier, F. Gold. Abrégé de néonatologie . Paris : Masson ; 1991.
2. Premier temps : introduire la lame du laryngoscope,
manche tenu par la main droite (opérateur droitier),
en biais (pointe à gauche) dans la partie droite de la
bouche, en refoulant la langue sur la gauche, jusqu'à
bien voir la luette.
3. Deuxième temps : ramener
le laryngoscope en position
médiane, puis pousser la lame
en profondeur jusqu'à bien voir
l'épiglotte.
416 Partie V. Techniques obstétricales
Planche 32.1. Suite
4. Troisième temps : tirer le manche du laryngoscope en haut et en avant ; quand la pointe de la lame est bien placée dans le sillon
glosso-épiglottique, cette manœuvre découvre parfaitement l'orifice glottique (il est inutile de « charger » l'épiglotte) (a, b, c).
5. Sans modifier sa position, passer le manche du laryngoscope de la main droite à la main gauche.
Mise en place de la sonde
 Enfoncer la sonde trachéale, tenue par
la main droite, entre les cordes vocales,
d'une distance de 2 cm (longueur de
l'extrémité noire de la sonde).
D’après R. Benson. Handbook of obstetrics
and gynecology, 4 th edition. Los Altos : Lange
Medical Publications ; 1971.
 Retirer le laryngoscope, tenu par la
main gauche, tout en immobilisant
la sonde au ras de la bouche entre
pouce et index droits.
 Fixer la sonde trachéale par une
« moustache » de sparadrap (X à
branches asymétriques) arrimée sur
le maxillaire supérieur, après avoir
vérifié le repère situé au ras de la
commissure buccale (tableau 32.1).
 Raccorder l'extrémité de la sonde au
ballon et commencer la ventilation
manuelle, en auscultant les deux champs
pulmonaires pour contrôler la symétrie
du murmure vésiculaire obtenu.
Chapitre 32. Réanimation du nouveau-né en salle de naissance 417
Voie nasale : deux manœuvres complémentaires
1. L'exposition de la glotte est précédée par l'introduction de la sonde
trachéale dans une des fosses nasales avec la pince de Magill, en l'enfonçant
initialement de 5 à 6 cm.
2. L'introduction de la sonde trachéale entre les cordes vocales est précédée
de l'introduction dans le pharynx de l'extrémité de la pince de Magill, qui
est utilisée pour pousser la sonde dans l'orifice glottique).
D’après G. Huault, M. Dehan, J.A. Lejeune. La réanimation de l’enfant à la naissance.
Collection « Cahiers Sandoz » (24). Paris : Sandoz ; 1973.
Bien veiller à la position
Position correcte
Position de la tête
Liberté des voies aériennes supérieures. Tête dans
l'axe du corps en position neutre (sans hyperextension
excessive). Possibilité de surélever les épaules avec un
linge pour aider à obtenir la bonne position de la tête.
D'après Réanimation du nouveau-né en salle de naissance.
Groupe de travail de la Société Française de Néonatologie. 2016.
Trop en hyperextension
Trop fléchie
De la lame du laryngoscope
Strictement médiane et progressivement
enfoncée (trop poussée d'emblée = dans
la bouche œsophagienne, sans plus aucun
repère visible).
D’après G. Huault, M. Dehan, J.A. Lejeune. La
réanimation de l’enfant à la naissance. Collection
« Cahiers Sandoz » (24). Paris : Sandoz ; 1973.
De la main sur le manche du laryngoscope
À la partie moyenne, tirant le maxillaire inférieur en haut et en avant
comme avec un manche, et non à la partie basse, basculant le laryngoscope
comme un levier sur le maxillaire supérieur (moindre efficacité sur la base
de la langue, et risque traumatique sur la gencive supérieure).
418 Partie V. Techniques obstétricales
Tableau 32.1. Recommandations pour l'intubation
trachéale en salle de naissance.
Poids estimé
Calibre de
de l'enfant (g) la sonde
trachéale (n°)
Repère (cm)
au ras de la
commissure
labiale (voie
orale)
Repère (cm)
au ras de la
narine (voie
nasale)
1 000
2,5*
7
8,5
2 000
2,5
8
9,5
3 000
3
9
10,5
4 500
3,5
10,5
12
* Au-dessous de 1 000 g, on peut être contraint de recourir à une sonde de
calibre n° 2.l.
Fig. 32.2. Technique du massage cardiaque externe chez le
­nouveau-né (d'après [7]).
Fig. 32.3. Mise en place d'un cathéter veineux ombilical.
Fig. 32.4. Principaux repères du cathétérisme ombilical veineux.
1. Le cathéter a gagné l'oreillette droite par le canal d'Arantius et la
veine cave inférieure. 2. « Fausse route » dans une branche de la veine
hépatique (d'après [7]).
Administration de drogues
Elle n'est que rarement nécessaire, les médicaments utilisés sont
en nombre restreint (tableau 32.2), et l'adrénaline est le seul
produit de pratique courante. L'adrénaline doit toujours être
diluée : une ampoule = 1 ml = 1 mg (1 000 μg) diluée avec 9 ml
de sérum physiologique (10 ml = 1 000 μg ; 1 ml = 100 μg).
Les posologies recommandées par voie intraveineuse
sont : 10 à 30 μg/kg soit 0,1 à 0,3 ml/kg de la dilution suivie d'un rinçage avec sérum physiologique de 0,5 à 1 ml sur
KTVO ou en intratrachéale (IT) en attendant la voie intraveinseuse : > 50 à100 μg/kg, soit: > 0,5 ml/kg à 1 ml/kg de la
dilution, sans dépasser 3 ml, par le canal latéral ou dans le
tube , et reprise en ventilation à pression positive.
L'administration est habituellement effectuée par injection intraveineuse. Cependant, en cas d'arrêt cardiaque ou de
bradycardie prolongée, et en l'absence de toute voie d'abord
vasculaire, l'adrénaline peut efficacement être administrée
par voie intratrachéale : l'injection peut être faite directement dans la sonde trachéale ou par l'intermédiaire d'une
sonde d'aspiration introduite à travers celle-ci ; elle doit être
immédiatement suivie d'une VPP pour faire progresser le
produit jusqu'à l'arbre bronchique profond.
En pratique, face à un arrêt cardiaque néonatal, il est
possible :
■ de faire une administration intratrachéale d'adrénaline
dès la mise en place de la sonde d'intubation ;
■ si nécessaire, de renouveler l'injection par voie intraveineuse dès la mise en place d'une voie d'abord
vasculaire.
Chapitre 32. Réanimation du nouveau-né en salle de naissance 419
Tableau 32.2. Médicaments et solutés employés au cours de la réanimation en salle de naissance
(d'après Réanimation du nouveau-né en salle de naissance, Groupe de travail de la Société Française de
Néonatologie, 2016).
Médication
Adrénaline
Concentration
Préparation
1 : 1000
Dilution avec +9ml de
1ml = 1 mg = 1000 sérum physiologique.
μg
Produit final :
10 ml = 1000 μg
(1ml = 100 μg)
Posologie/voie
Dose totale
Précautions
– IV directe (CVO)
Renouvelable si FC
(recommandée) : 10
< 60/mn : toutes les
à 30 µg /kg soit 0,1
3 à 5 minutes
ml à 0,3 ml /kg de la
dilution ;
– IT (si l'enfant est
intubé en attendant
la voie IV ou si voie IV
impossible) : 50 à
100 µg /kg soit
0,5 ml /kg à 1ml /kg
de la dilution
IV : Injection rapide.
Rinçage avec du sérum
physiologique
IT : maximum 3 ml.
Faire suivre de 5
insufflations
Sérum physiologique Soluté isotonique
(remplissage)
NaCl 0,9 %
Poches 50 ml
10 ml/kg
IV
À renouveler si
nécessaire
Administration : 5 à
10 minutes
Culot globulaire
O Rh (-)
Poches selon centres
10–15 ml/kg IV
À renouveler si
nécessaire
Administration : 10–15
minutes. Connaître la
procédure (protocole)
pour en obtenir
et l'administrer en
urgence
(le protocole doit être
affiché)
Sérum glucosé
Solution 10 %
Ampoules de 10 ml
1–3 ml/kg
IV
En fonction de la
glycémie
IV directe
IM : intramusculaire ; IT : intratrachéal ; IV : intraveineux ; SC : sous-cutané.
Conduite à tenir
Préalables à la réanimation néonatale
Préparation matérielle
Pour un accueil réglé du nouveau-né, une équipe médicale
d'au moins deux personnes, dont une bien entraînée à ce
genre de secourisme, est nécessaire. Il faut qu'elle se trouve
sur place dix à 15 minutes avant l'accouchement afin de procéder aux divers préparatifs techniques (tableau 32.3).
Information médicale
L'équipe de réanimation doit être parfaitement informée
des données concernant le haut risque en salle de naissance,
c'est-à-dire qu'en pratique cinq renseignements fondamentaux doivent lui être communiqués :
■ l'existence probable d'une asphyxie périnatale (risque de
naissance en état de mort apparente) ;
■ le caractère clair ou teinté du liquide amniotique (risque
d'inhalation méconiale) ;
■ l'administration de drogues dépressives à la mère (risque
de dépression respiratoire initiale ou surtout secondaire
de l'enfant entre la 2e et la 5e minute de vie). Il faut tenir
compte de toute administration de drogue par voie
parentérale dans un délai de 12 heures avant la naissance ;
■ la notion d'accouchement hémorragique, notamment par
saignement d'un placenta praevia (risque d'état de choc
hypovolémique du nouveau-né, rendant relativement
inefficaces les mesures habituelles de réanimation jusqu'à
un remplissage vasculaire salvateur : 10 ml/kg de concen-
tré érythrocytaire Rhésus O– CMV-négatif, ou de sérum
physiologique, en 5 à 10 min) ;
■ la notion d'accouchement à risque (fœtal) élevé, et en
particulier : mère diabétique insulinodépendante (risque
d'hypoglycémie précoce), incompatibilité sanguine fœtomaternelle, en particulier Rhésus (risque d'anémie initiale),
accouchement prématuré (plus grande fréquence des difficultés respiratoires de l'enfant et des difficultés techniques
à les surmonter), accouchement gémellaire (risque plus
important de dépression initiale chez le deuxième jumeau),
fièvre maternelle supérieure à 38 °C (risque de choc infectieux précoce par contamination maternofœtale).
Conduite pratique
Cas habituels
L'algorithme général de la réanimation en salle de naissance
est présenté à la figure 32.5. Les nouveau-nés qui remplissent
correctement les quatre conditions initiales (à terme, liquide
amniotique clair, bonne adaptation respiratoire, bon tonus
musculaire) ne justifient aucune réanimation et font seulement l'objet de soins de routine.
Les étapes initiales doivent être mises en œuvre pour tout
nouveau-né qui ne remplit pas totalement ces conditions.
Ces premières manœuvres, dont la durée totale est de 20–30
secondes (séquence A), consistent à :
■ prévenir le refroidissement par l'installation de l'enfant
sur une table de réanimation chauffante et un séchage
immédiat ;
420 Partie V. Techniques obstétricales
Tableau 32.3. Préparation matérielle
à la réanimation néonatale.
Allumage de la table de réanimation
Commande centrale, lumière, chauffage
Vérification du matériel d'aspiration
Source de vide (100 à 200 cmH2O ou mmHg ou mbar), sondes
d'aspiration, flacon de rinçage (à changer pour chaque patient),
vidange du bocal de recueil
Vérification du matériel de ventilation manuelle
Source d'O2 (4 à 6 l/min), humidification (éventuelle) du circuit,
ballon, masque ; éventuellement préparation de l'insufflateur
pneumatique (Neopuff®, Tom Pouce ®)
Vérification du matériel d'intubation
Sondes trachéales avec raccord de branchement au ballon,
laryngoscope, pince de Magill, moustache de fixation en
sparadrap, sondes d'aspiration trachéale de De Lee
Vérification du matériel de cathétérisme veineux ombilical
Cathéters, gants, boîte d'instruments, robinets à 3 voies, champ
troué de protection, compresses, désinfectant et matériel de
perfusion veineuse périphérique
Préparation des solutés et des « drogues »
Sérum glucosé à 10 %, adrénaline, sérum physiologique,
aiguilles, seringues
Incubateur de recueil chaud (35 °C) et reliéà une source d'O2
Lavage des mains
Habillage du personnel : casaque propre, calot, bavette
Stéthoscope autour du cou de l'opérateur, bonnet et langes
propres à faire chauffer sur la table de réanimation
Branchement de l'oxymètre de pouls, scope ECG
Étalonnage du pèse-bébé électronique
■ assurer la liberté des voies aériennes par mise en position
correcte de l'enfant (en décubitus dorsal, la tête légèrement déclive, avec le cou dans une position d'extension
modérée sur le tronc) et la désobstruction des voies
aériennes supérieures et éventuellement inférieures ;
■ exercer des stimulations tactiles destinées à déclencher
ou renforcer les premiers mouvements respiratoires : sur
le pied (petites claques sur la plante du pied, ou pichenettes sur le talon) ou dans le dos (frictions rapides et
fermes du dos). Elles sont contre-indiquées en cas de
liquide méconial.
L'évaluation du nouveau-né repose ensuite sur trois éléments principaux : les mouvements respiratoires spontanés,
le niveau de la fréquence cardiaque comptée sur six secondes
et la coloration périphérique de l'enfant. Ces trois éléments
permettent de juger de la conduite à tenir ultérieurement
(séquences B, C, D).
En cours de réanimation, il est souhaitable de coter le
score d'Apgar à la première, à la cinquième et à la dixième
minute de vie, pour documenter ultérieurement l'évolution
de l'état du nouveau-né (selon la cotation d'Apgar : état de
mort apparente = score < 3 à 1 minute de vie).
Cas particuliers
Cas du nouveau-né endormi par l'anesthésie
de sa mère
Les enfants qui naissent par césarienne, ou plus généralement après toute anesthésie maternelle, présentent parfois
une dépression respiratoire secondaire au bout d'une à deux
minutes de vie.
Celle-ci est plus fréquente après une anesthésie générale
maternelle, mais peut également se rencontrer après une
analgésie péridurale. Dans ce cas particulier du nouveauné « endormi » par des drogues dépressives administrées à
la mère, l'état cardiorespiratoire de l'enfant est bon tant que
l'on assure une ventilation au masque efficace, mais il se
détériore rapidement (cyanose, bradycardie) dès qu'on l'interrompt : cette donnée évolutive permet en règle générale
de distinguer facilement cette circonstance d'une asphyxie
néonatale.
Il est donc nécessaire de poursuivre la ventilation assistée
(parfois plusieurs minutes) jusqu'à l'instauration d'une respiration autonome efficace de l'enfant : aucun geste supplémentaire n'est en règle générale indiqué.
Cependant, quand on a la certitude que la dépression
est d'origine morphinique, elle peut être abrégée par
l'injection (intramusculaire) de 0,1 mg/kg de naloxone
(Narcan®) : l'effet de cet antidote est parfois transitoire, et
son administration ne dispense en aucune manière d'une
assistance et d'une surveillance respiratoires prolongées ;
son administration est contre-indiquée chez le nouveauné de mère toxicomane (risque d'état de mal convulsif par
sevrage brutal).
Cas du prématuré de très faible poids de naissance
Chez les grands prématurés et les nouveau-nés de très faible
poids de naissance (moins de 33 semaines d'âge gestationnel
et/ou moins de 1 500 g), les difficultés cardiorespiratoires
initiales sont fréquentes et de causes multiples (asphyxie,
médicaments, etc.). Les manœuvres de réanimation respiratoire obéissent donc à des règles particulières :
■ il est souhaitable de recourir d'emblée à l'utilisation d'une
pression expiratoire positive de + 3–4 cmH2O, d'où l'intérêt chez eux des insufflateurs pneumatiques ;
■ il ne faut pas tarder à recourir à l'intubation trachéale en
cas de difficultés respiratoires persistantes, notamment
chez les nouveau-nés de moins de 28 SA et/ou de 1 000 g ;
■ l'administration précoce (le plus précocement possible
avant M60) de surfactant exogène (Curosurf®, 200 mg/kg)
a fait la preuve de son intérêt chez les prématurés de
moins de 28 SA à haut risque de détresse respiratoire par
déficit en surfactant pulmonaire.
Conduite à tenir devant un liquide amniotique teinté
Le fœtus émet son méconium dans le liquide amniotique
dans 13 % des naissances en moyenne, avec une concentration variable : liquide amniotique simplement teinté mais
fluide dans trois quarts des cas ; liquide amniotique épais,
visqueux, particulaire, de type purée de pois (liquide amniotique méconial) dans un quart des cas.
Chapitre 32. Réanimation du nouveau-né en salle de naissance 421
Naissance
3 questions à se poser :
1. À terme ?
2. Respire et/ou crie ?
3. Bon tonus musculaire
Bonne adaptation extra-utérine
Clampage retardé du cordon
Pas de nécessité de réanimation
Soins habituels, chaleur, séchage
Désobstruction si nécessaire
Privilégier la relation mère-enfant
Soins éventuels en rapport avec l’anamèse
(ex : prélèvements bactériologiques)
Poursuivre la surveillance clinique de la
respiration, l’activité, la coloration
Oui, à toutes les questions
Non, à une ou plusieurs questions
a
PHASE A
Chronomètre
Liberté des VA
Normothermie
Stimulations (si absence de
respiration
Phase A
CHRONO
Soins de routine
Surveillance
NON
Respiration efficace
ou FC > 100/mn ?
N
O
R
M
O
T
H
E
R
M
I
E
NON
En l’absence
de
respiration
efficace, la
ventilation
doit être
débutée
avant la fin
de la 1ère mn
de vie
OUI
SpO2
VS PEP ?
Apnées/gasps
FC < 100/mn
Soins de post-réa
1 mn
b
PHASE B
VPP (masque)
Scope ECG
SpO2
Efficacité VPP = soulèvement du thorax
Si absence : positionner, désobstruction ;
envisager l’intubation
Phase A
CHRONO
N
O
R
M
O
T
H
E
R
M
I
E
Phase B
Phase C
OUI
FC > 60/mn ?
Évaluation 30 à
45 s après début
CT + VPP
c
OUI
Difficultés respiratoires
ou cyanose
persistante ?
Arrêts CT
Poursuite VPP
Intubation ?
Stabilisation
Soins de post-réa
NON
PHASE D
VPP sur SIT + CT
Pose CVO
Adrénaline IV
Expansion volémique ?
Gestes techniquement corrects ?
Efficacité ventilation sur tube ?
Hypovolémie ?
Malformations congénitales ?
HD, cardiopathies ?
Fig. 32.5. Trois phases de l'algorithme de la réanimation en salle de naissance [4] : a. phase A ; b. phase B ; c. phase C qui peut aboutir à
la phase D (drugs : médicament adrénaline). VA : Voies Aériennes ; VPP : Ventilation Pression Positive ; VS PEP : Ventilation Spontanée en Pression
Expiratoire Positive ; CT : Compressions Thoraciques ; CVO : Cathéter Veineux Ombilical ; SIT : Sonde Intubation ; HD : Hernie Diaphragmatique.
422 Partie V. Techniques obstétricales
Quand du méconium a été émis dans le liquide amniotique, il y a un risque de présence de ce méconium au-dessous
du plan des cordes vocales (inhalation méconiale, 20–45 % des
cas de liquide amniotique teinté) et donc un risque potentiel
d'apparition d'une détresse respiratoire néonatale secondaire à
cette inhalation (syndrome d'inhalation méconiale, 2–9 % des
cas de liquide amniotique teinté, soit 1–3 % des naissances).
Pour la prévention du syndrome d'inhalation méconiale,
deux situations doivent être distinguées :
■ le nouveau-né est vigoureux : mouvements respiratoires efficaces, bon tonus musculaire, fréquence cardiaque rapide ;
une désobstruction buccopharyngée soigneuse est suffisante et aucune manœuvre supplémentaire n'est indiquée ;
■ le nouveau-né est déprimé : mouvements respiratoires
faibles ou absents, tonus diminué ou aboli, cœur ralenti ;
il convient alors, dès que le nouveau-né est déposé sur
la table de réanimation, et avant toute autre manœuvre,
d'aspirer le liquide présent dans la bouche et le pharynx
en s'aidant de la vision directe procurée par le laryngoscope, puis de procéder à l'aspiration trachéobronchique.
Une aspiration trachéobronchique peut s'imposer secondairement chez un enfant initialement vigoureux, notamment devant la constatation d'une cyanose persistante ou de
râles bronchiques à l'auscultation pulmonaire ; dans tous les
cas, il est indispensable d'aspirer la trachée et les bronches
avant toute insufflation en pression positive.
La postréanimation
Les gestes de réanimation appliqués au nouveau-né comportent des complications propres qui peuvent prolonger
ses difficultés :
■ pneumothorax par insufflation sous pression excessive,
souvent du côté droit ;
■ dyspnée obstructive de type laryngé, secondaire à une
désobstruction buccopharyngée traumatisante ;
■ fracture de côtes, due à un massage cardiaque externe
violent et mal appliqué.
Même dans les cas les plus favorables (récupération
rapide et complète), un nombre minimal de gestes doit être
effectué :
■ premier examen clinique complet de l'enfant, comportant notamment la vérification de la perméabilité œsophagienne (voir chapitre 5 p. 81) ;
■ administration de vitamine K1 (2 mg) et désinfection
oculaire ;
■ surveillance régulière dans les heures suivantes, portant
notamment sur : la fréquence respiratoire, la coloration,
l'éveil et la réactivité de l'enfant.
Les nouveau-nés qui ont bénéficié d'une réanimation
« lourde » en salle de naissance (naissance en état de mort apparente ou inhalation méconiale documentée par la présence de
méconium sous les cordes vocales) et ceux dont la récupération n'est pas complète après une réanimation plus légère (persistance de difficultés respiratoires, d'une altération du teint,
d'une hypotonie) doivent être systématiquement confiés à une
unité de néonatologie, pour évaluation précoce et surveillance.
Il faut en particulier toujours rechercher la cause des difficultés initiales de l'enfant ; une infection maternofœtale doit être
systématiquement évoquée chaque fois que cette cause n'apparaît pas évidente, et des prélèvements bactériologiques doivent
alors être pratiqués chez la mère et chez l'enfant.
Un nouveau-né qui a été intubé dans la première minute
de vie, et chez lequel est ensuite obtenue une récupération
rapide et complète, peut être extubé en salle de naissance
lorsque l'évaluation de son état au décours de la réanimation est satisfaisante : mouvements respiratoires spontanés
efficaces, fréquence cardiaque stable supérieure à 100 par
minute, coloration normale après arrêt de toute oxygénothérapie. L'extubation est pratiquée sous aspiration, par
l'intermédiaire d'une sonde de De Lee de calibre approprié
introduite dans la sonde trachéale et remontée simultanément à la sonde d'intubation.
Dans les situations exceptionnelles où aucune fonction cardiaque n'a pu être durablement obtenue après 15 à 20 minutes
d'une réanimation immédiatement et correctement mise
en œuvre, l'arrêt de réanimation peut raisonnablement être
décidé, l'enfant étant alors accompagné au décès. Cependant,
dans les situations intermédiaires de récupération très incomplète et/ou instable, le principe de la réanimation d'attente doit
être adopté : sans aucune discontinuité des soins qu'il reçoit,
l'enfant doit être transféré dans une unité de réanimation néonatale où, après évaluation clinique et paraclinique complète,
une décision documentée et personnalisée pourra être prise
quant à l'opportunité de poursuivre les soins intensifs ou au
contraire de limiter ou d'arrêter les traitements selon les prescriptions de l'article R. 4127-37 du code de la santé publique.
Références
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Lange Medical Publications ; 1971.
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2015 International Consensus on Cardiopulmonary Resuscitation
and Emergency Cardiovascular Care Science With Treatment
Recommendations. Circulation 2015 ; 132(suppl 1) : S204–41.
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nouveau-né en salle de naissance. Support pédagogique. Sauramps
médical Montpellier ; 2012.
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Réanimation en salle de naissance. 3e éd. Issy-les-Moulineaux :
Elsevier-Masson ; 2009.
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[8] Perlman JM, Wyllie J, Kattwinkel J, et al. Neonatal resuscitation :
2010 International Consensus on Cardiopulmonary Resuscitation
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Recommendations. Circulation 2010 ; 122(16Suppl2) : S516–38.