644-650 Magnitude et stratégies de prise en charge de lacataracte dans le monde (Lawani)

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Médecine Tropicale • 2007 • 67 • 6
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Revue générale
MAGNITUDE ET STRATEGIES DE PRISE EN CHARGE DE LA CATARACTE
DANS LE MONDE
R. LAWANI, S. POMMIER, L. ROUX, E. CHAZALON, F. MEYER
La cataracte constitue la principale cause de cécité dans
le monde. Elle présente aussi la caractéristique d’être
curable par une chirurgie simple et aux résultats spectacu-
laires. Mais les caractéristiques épidémiologiques et l’accès
à la chirurgie, mode de traitement univoque de cette affec-
tion, ne sont pas uniformes dans le monde. De ce fait, ses
conséquences individuelles et globales (sociales et écono-
miques) ne sont pas les mêmes du nord au sud de la planète.
Le présent article vise à présenter les différents fac-
teurs qui influent sur ces disparités et à tracer les perspectives
de leur évolution future.
LA CATARACTE
Définition
Dérivée du grec Kataractes et du latin Cataracta
signifiant chute d’eau, la cataracte est une opacification totale
ou partielle du cristallin, lentille biconvexe appendue dans un
plan frontal en arrière de l’iris. Cette opacification, généra-
lement bilatérale est responsable d’un déficit visuel plus ou
moins important.
Origine embryologique du cristallin
Il dérive à la 4esemaine de vie embryonnaire d’un
épaississement de l’Ectoderme d’où s’isolera la vésicule cris-
tallinienne. Ensuite, les phases de fibrillogenèse primaire puis
secondaire initieront une croissance qui se poursuivra toute
la vie, permettant par ailleurs une véritable datation chro-
nologique des opacités cristalliniennes congénitales.
SUMÉ • Si la cataracte représente 47% des causes de cécité dans le monde, son poids épidémiologique est notoirement variable
en fonction du statut économique des pays, divisant la planète en deux zones : les pays avancés où la cataracte apparaît maî-
trisée et responsable de 5% des cécités, et les pays moins avancés (PMA) où la cataracte reste la cause de la moitié des cécités.
Après un rappel historique, clinique, et thérapeutique, les auteurs étudient les caractéristiques épidémiologiques de la cata-
racte dans le monde. Puis ils proposent une analyse des différents déterminants politiques, socio-économiques et culturels qui
influent sur l’offre de soins dans les PMA, faisant de la cataracte un problème de santé publique et par delà un véritable pro-
blème de développement. Quelques propositions fondées sur l’expérience des nombreux programmes nationaux de lutte contre
la cécité (PNLC) mis en œuvre viennent clore cette analyse, en vue de la réduction du backlog de la cataracte dans le monde
et de la consolidation des acquis des deux dernières décennies.
MOTS-CLÉS • Cataracte - Cécité - Pays moins avancés - Santé publique.
MAGNITUDE AND STRATEGIES OF CATARACT MANAGEMENT IN THE WORLD
ABSTRACT • Although cataracts cause 47% of global blindness, their epidemiologic impact in different countries is notoriously
uneven and the world can be divided into two zones according to economic conditions. In advanced countries where care is
good, cataracts account for only 5% of blindness while cataracts still account for 50% of blindness in developing countries.
After a brief overview of historical, clinical and therapeutic aspects, this article updates epidemiological data on cataracts in
the world. It also provides insight into political, socio-economic, and cultural factors adversely affecting care availability in
developing countries thus making cataracts a major public health problem and an obstacle for development. Finally this article
offers a few recommendations for reducing the backlog of cataracts in the world and for consolidating advances made over
the last two decades thanks to experience gained in various National Blindness Prevention Programs (NBPP).
KEY WORDS • Cataract - Blindness – Developing countries – Public health.
Travail du Service d’ophtalmologie (R.L., F.M., Professeurs agrégés; S.P.,
L.R., E.C., Docteurs en médecine) Hôpital d’Instruction des Armées
Laveran, Marseille.
Correspondance : R. LAWANI, Service d’ophtalmologie, HIA Laveran, BP
50, 13998 Marseille Armées.
• Courriel : [email protected]
Med Trop 2007 ; 67 : 644-650
Magnitude et strategies de prise en charge de la cataracte dans le monde
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Physiopathologie
La transparence du cristallin, sa propriété essentielle,
est liée à son anatomie histologique et à sa physiologie. Cette
lentille est majoritairement constituée d’eau (65 %) et pré-
sente une forte concentration en protéines ‘les cristallines’
(35 %), très immunogènes et totalement isolées par la cap-
sule ou cristalloïde. L’absence de vaisseaux et de nerfs, la
densité et la régularité ultrastructurales de ces protéines,
alliées à l’agencement homogène des fibres cristalliniennes
ries des cellules de l’épithélium germinatif de la capsule,
sont la base morphologique de cette transparence.
L’apport en nutriments essentiels (dont le glycogène
indispensable à la production énergétique) à partir de l’hu-
meur aqueuse et du vitré est nécessaire à la synthèse conti-
nue des protéines cristallines concrétisant ainsi la dépendance
métabolique du cristallin vis-à-vis des structures environ-
nantes.
Ainsi, toute perturbation du métabolisme iono-éner-
gétique ou de l’homogénéité des fibres cristalliniennes sera
à l’origine d’une opacification du cristallin, mode de réponse
univoque à toute agression.
Etiologies
Le plus souvent liée à l’âge, la cataracte constitue une
pathologie de la sénescence touchant les sujets à partir de 70
ans dans le cadre des cataractes dites séniles ; elle est plus
précoce (avant 60 ans) dans les cataractes préséniles.
Elle peut aussi être liée à une cause extrinsèque dans
de nombreux cas.
• Secondaire à une maladie générale, elle est qualifiée
de cataracte pathologique (diabète, hypoparathyroïdie,
maladie de Steinert, toxique, notamment corticothérapie par
voie générale au long cours).
• Secondaire à une cause locale dite cataracte com-
pliquée : traumatisme, myopie forte, uvéite, toxicité locale
(corticoïdes locaux), exposition à des agents physiques (infra
rouges dans les cataractes des verriers, radiations ioni-
santes...).
• Elle est aussi parfois congénitale, généralement de
cause infectieuse anténatale, ou en rapport avec une maladie
héréditaire ou un syndrome polymalformatif. Elle peut alors
être isolée ou associée à d’autres anomalies oculaires et/ou
générales. Elle pose dans ce contexte un problème de prise
en charge précoce en vue de prévenir l’amblyopie chez l’en-
fant.
Conséquences évolutives
L’évolution de la cataracte expose à différents
écueils.
• Un risque fonctionnel de baisse d’acuité visuelle en
raison de l’opacification du cristallin qui joue le rôle d’un
écran de plus en plus dense, et qui à terme est responsable
de cécité.
Au plan anatomique, une cataracte de plus en plus
mature qui conduit aux complications phacomorphiques, pha-
colytiques, phacoantigéniques et/ou phacotopiques, avec pos-
sible perte anatomique du globe oculaire.
Au plan individuel, la cécité entraîne une perte de
revenus et un isolement du patient. On estime qu’elle entraîne
la perte d’un an de vie par année de cécité sur l’espérance de
vie globale.
Au plan socio-économique, c’est une source de han-
dicap important dans les pays les moins avancés (PMA) par
son caractère présénile marqué, aboutissant à une réduction
de la valeur productive d’un patient encore jeune ; mais aussi
par la nécessité d’immobiliser un sujet (généralement un
enfant) pour l’assistance au patient handicapé par l’am-
blyopie.
Traitement
Il se fonde sur la chirurgie, connue en Inde depuis
l’antiquité. Celsius rapporte au Ier siècle une description
détaillée de la technique d’abaissement du cristallin,
méthode ancienne d’origine probablement mésopotamienne,
déjà pratiquée dans l’Egypte pharaonienne. Cette méthode
mise en œuvre par les barbiers jusqu’au XVIIesiècle, a été
introduite dans le giron médical officiel sous Louis XIV. Elle
est restée dans les faits majoritairement pratiquée jusqu’au
XIXesiècle. Aujourd’hui, elle est encore mise en oeuvre par
des « marabouts» plus ou moins itinérants en Afrique sub-
sahélienne. Elle est retrouvée sous de nombreuses latitudes.
Certains responsables politiques en auraient ‘bénéficié’ au
milieu du siècle dernier. Elle consiste à basculer le cristal-
lin dans le vitré grâce à un instrument pointu introduit dans
l’oeil (dans des conditions d’asepsie souvent aatoires et sans
anesthésie). Elle expose à des complications anatomo-fonc-
tionnelles majeures, après une passagère amélioration de
l’acuité visuelle. L’évolution expose la quasi-totalité des
patients qui l’ont subie à une cécité dans les deux ans qui sui-
vent l’acte.
Lextraction intra capsulaire succède à labaisse-
ment du cristallin en tant que méthode de traitement au
XVIIIesiècle, quand en 1752, Jacques Daviel, chirurgien
marseillais des galères opère à ltel-Dieu de Marseille
l’ermite dEygille. Divers auteurs (Jaegger, Mooren, Von
Graefe, Beer, Williams) apporteront des améliorations
successives à la 1edescription de Daviel. Cette technique
d’extraction du cristallin in toto par une large kératoto-
mie, lancée par lécole fraaise, sera en rivalité avec les
tenants de l’abaissement du cristallin sous la houlette des
écoles anglo-saxonne et italienne (notamment linfluent
Scarpa). Cette compétition durera jusqu’au XIXesiècle où
elle finira par simposer. L’avènement de lanesthésie
trobulbaire (Elsnig), les progrès de la micro chirurgie
aps la 2eguerre mondiale (par les fres Barraquer dans
les années 50) et l’utilisation de la cryogénie en 1961 don-
nent à cette technique un essor considérable au XXe
siècle.
Médecine Tropicale • 2007 • 67 • 6
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R. Lawani et Collaborateurs
L’extraction extra-capsulaire moderne lancée par
Kelman dans les années 60 consiste en une technique plus
sûre, plus physiologique et permettant une implantation en
respectant le compartimentage oculaire. On lui décrit deux
modalités, manuelle et par émulsification ultra sonique. Elle
consiste après une capsulotomie (timbre poste, enveloppe ou
Capsulotomie Curviligne Continue clef de la phacoémulsi-
fication) à extraire le noyau (par pression-contre pression ou
par émulsification par des ultrasons) puis à aspirer les masses
corticales.
La correction de l’aphakie et la restitution de la vision
binoculaire se feront par :
- verres d’aphake convexes épais, source d’aberration;
- lentilles de contact p-cornéennes sujettes à des pro-
blèmes de manipulation et de tolérance ;
- mieux par implantation intra-oculaire décrite par
Ridley en 1949 et améliorée par les travaux de Binkhorst. Ces
implants intra oculaires, véritable biomatériaux ont bénéfi-
cié d’importants progrès depuis lors, avec nombre d’inno-
vations sur le plan de leur tolérance, leur géométrie et leurs
propriétés optiques. L’implantation se fera idéalement dans
le sac capsulaire, en sulcus ou en chambre antérieure en cas
de complications.
L’amélioration de l’environnement chirurgical a
permis une véritable révolution dans la prise en charge de la
cataracte. Ainsi les progrès de la miniaturisation des instru-
ments, des technologies et des équipements, de même que les
avancées de l’informatique ont transformé le bloc opératoire
d’ophtalmologie en un poste de pilotage où intégration du
matériel, contrôle et sécurité sont les maîtres mots, corrélés
à des coûts d’investissement et de maintenance assez élevés.
Enfin, les grandes études épidémiologiques par suivi
de vastes cohortes ont permis d’aboutir à une standardisation
des protocoles pré, per et post opératoires dans le cadre de
la sécurité chirurgicale, et permis d’aboutir à une meilleure
réhabilitation fonctionnelle des patients.
MAGNITUDE ET AMPLEUR DU PROBLÈME
On décrit trois grandes étapes récentes dans l’éva-
luation épidémiologique de la cécité. Thylefors et Negrel (3)
en se fondant sur l’application à l’évolution démographique
mondiale des données de malvoyance existantes à l’époque,
estimait en 1995 à 38 millions le nombre de personnes souf-
frant de cécité (Acuité Visuelle (AV) du meilleur œil infé-
rieure à 1/20) et à 110 millions le nombre de malvoyants
(meilleur œil entre 3/10 et 1/20). Cette étude a en outre révélé
que 80 % de ces cécités étaient évitables ou curables et per-
mit le lancement de l’initiative « Vision 2020 : le droit à la
vue pour tous » au début de l’année 1999.
Cette même année 1999, les mêmes auteurs publient
une nouvelle estimation qui évalue à 45 millions les cécités
et à 135 millions le nombre des malvoyants, éclairant d’un
jour encore plus intense la gravité de la situation et la néces-
sité de stratégies de prévention contre la cécité évi-
table/curable (1).
En 2004 l’importance des données disponibles pour
l’année 2002 dans des zones géographiques dont la préva-
lence avait naguère été estimée en fonction des pays voisins,
amène l’OMS à réévaluer les estimations : 165 millions de
malvoyants et 35 millions d’aveugles (2). Cette étude affine
la répartition géographique avec le pic de malvoyance en
Afrique sub-sahélienne dont 1,2% de la population est affec-
tée d’un déficit visuel, ce qui correspond à 5 fois la propor-
tion estimée dans les pays du Nord.
Mais, comme pouvait le laisser prévoir la part de la
population mondiale vivant sur ce continent, c’est l’Asie qui
recèle en valeur absolue le plus grand nombre de cécités (53
% des cas mondiaux, avec une prévalence de 0,6% en
moyenne).
La répartition des causes de cécité en 2002 (Fig. 1)
montre que la cataracte est au premier rang mondial avec 47
% des cas de handicap visuel, suivie par le glaucome à 12%
et la dégénérescence maculaire liée à l’Age (DMLA) à 9 %.
En analysant le problème par régions, cette réparti-
tion des causes se révèle très différente et met en évidence
une inégalité de la répartition des causes de cécité en fonc-
tion des conditions socio-économiques (Fig. 2). On peut alors
noter une totale inversion des répartitions des causes prin-
cipales selon le niveau socio-économique des pays.
Dans les pays développés, la cataracte ne représente
que 5 % des causes de cécités, derrière la DMLA (50 %), le
glaucome (18 %) et la rétinopathie diabétique (RD) (17 %).
On note donc que la cataracte est une cause très faible de han-
dicap visuel/cécité dans les pays développés, bien que la pro-
portion de sujet âgés dans la population y soit plus élevée
qu’ailleurs. En effet l’accès aux soins est plus facile et la chi-
rurgie de la cataracte très répandue.
Par contre, dans les pays en développement la cata-
racte représente un problème majeur de santé publique. Elle
y est responsable de 50% des cécités, suivies par le glaucome
(12 %), la DMLA (6 %), les opacités cornéennes (5 %) et la
RD (4 %). La cataracte dans ces pays est marquée par son
Figure 1 - Causes de cécité dans le monde en 2002.
Autres
13 %
DMLA
9 %
Cécité infantile
4 %
Diabète
5 %
Cornée
5 %
Oncho
0,7 %
Glaucome
12 % Trachome
4 %
Cataracte
47 %
Magnitude et strategies de prise en charge de la cataracte dans le monde
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caractère précoce (cataracte présénile), survenant chez un
sujet encore actif, aggravant les conséquences économiques
et sociales de cette affection. On estime qu’un patient por-
teur de cataracte sur quatre a moins de 50 ans, et que 2/3
d’entre eux ont moins de 60 ans, alors que l’âge moyen de
survenue de la cataracte est supérieur à 70 ans dans les pays
développés.
Sa prise en charge chirurgicale est insuffisante. Le
ratio du nombre de cataractes opérées par million d’habi-
tants est un indice fiable pour comparer le niveau de per-
formance de différents systèmes de soins ophtalmologiques.
Il est de 3 000 en Europe et 200 en Afrique. La chirurgie
concernait 7 millions de cataractes opérées dans le monde
en 1996 alors qu’il en aurait fallu opérer 12 millions. Cela
représentait un déficit (backlog des anglo-saxons) de prise
en charge de 5 millions de cataractes. Ce backlog est actuel-
lement de 17 millions, sera de 20 millions en 2010 et 32
millions en 2020 selon les prévisions des experts.
L’évolution dans les prochaines années de ces chiffres sera
modulée par :
- l’augmentation de la population mondiale qui a déjà
progressé de 8 % en 10 ans ;
- l’allongement de l’espérance de vie dans tous les
pays (les plus de 60 ans vont passer de 1 milliard en 1996 à
2 milliard en 2020, ce qui va encore accentuer le backlog
actuel.
Quels sont donc les déterminants qui expliquent cette
différence de magnitude entre les pays développés et les
moins développés? Pour cela définissons ce qu’est un pays
moins avancé.
LES PMA ET LA PROBLÉMATIQUE DE LA CATARACTE
Définitions et réalités socio-économiques
L’ONU propose le classement des pays en fonction
d’un indice composite appelé indice de développement
humain (IDH), intégrant le PNB, l’espérance de vie, le taux
d’alphabétisation, l’accès à l’eau, le statut de la femme, le
ratio PNB/budget consacré à la défense, etc... Cet indice per-
met de distinguer :
- les pays développés ou industrialisés : USA, Canada,
Union Européenne, Japon ;
- les pays émergents ou intermédiaires : Chine, Brésil,
Afrique du Sud. On note dans ces pays, la coexistence de
poches urbaines dévelopes à coté de zones rurales très défa-
vorisées ;
- les pays les moins avancés, autrefois qualifiés de
sous développés, qui concentrent 70% de la population mon-
diale actuellement estimée à 6,2 milliards. Une part impor-
tante de la population vivant dans ces PMA vit dans l’extrême
pauvreté avec moins d’un dollar US de revenu par individu
et par jour. Leur proportion est estimé à 20% de la popula-
tion mondiale, soit un homme sur cinq (un peu plus d’un mil-
liard d’individus).
Ces PMA concentrent différents handicaps qui
constituent un obstacle à leur développement et sont énu-
mérés ci-après.
• Poussée démographique très importante avec une
forte natalité, et une diminution de la mortalité du fait des
campagnes de vaccination, entraînant une augmentation de
l’espérance de vie. Ceci a comme corollaire un vieillissement
programmé de la population dans les prochaines décennies.
Les experts prévoient que d’ici à 2020 la situation démo-
graphique de ces pays sera comparable à celle des pays déve-
loppés de 1980.
• Pyramide des âges : la moitié de la population
actuelle a moins de 15 ans, alors que les plus de 65 ans y
représentent 3%. Ce qui présage d’une forme de ‘papy boom’
à venir dans ces PMA.
• Urbanisation mal contrôlée sous l’effet d’un exode
rural, conduisant à une prolifération des bidonvilles à l’im-
pact néfaste sur les situations sanitaires.
• Secteur économique faible : même si la situation
économique s’est améliorée dans de nombreux pays, le PNB
de ces pays ne participe qu’à 13 % à la production des
richesses du monde. Cet indicateur est souvent lié à la misère
économique et sociale, la malnutrition, la sous scolarisation,
l’incapacité à mener dans le long terme les réformes struc-
Figure 2 - Causes de cécité dans le monde en fonction du développement économique.
Autres
14 %
DMLA
6 %
Cécité infantile
4%
Diabète
4 %
Cornée
5%
Oncho
0,8 %
Glaucome
12 % Trachome
4 %
Cataracte
50 %
Autres
4 %
DMLA
50 %
Cécité infantile
4 %
Diabète
17 %
Cornée
3 %
Oncho
0,8 %
Glaucome
18 %
Cataracte
5 %
AB
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R. Lawani et Collaborateurs
turelles (notamment sanitaires) qui impulsent le développe-
ment.
Catastrophes naturelles : sécheresses, désertification,
inondations tempêtes... Elles générent famines, disettes,
exodes, épidémies...
• Catastrophes sociales : guerres, instabilités poli-
tiques, conflits inter ethniques...
Grands problèmes de santé : en particulier le palu-
disme endémique, associé au couple tuberculose/Sida, qui
posent au-delà de la prise en charge sanitaire un réel problème
d’obstacle au développement. Ces fléaux sanitaires risquent
en effet de saper tous les efforts menés à ce jour dans le cadre
des politiques de développement. En s’abattant sur ces pays,
ils alourdissent encore le déficit en ressources humaines et
économiques disponibles, confinant les problèmes de cécité
dans un statut d’urgence secondaire.
Grasland et Madelin en 2001 ont réalisé une étude sur
l’inégale répartition de la population et de la richesse mon-
diales (4). Ils y démontrent une intéressante corrélation entre
la population, paramétrée par sa taille et sa localisation, et
l’accès à la richesse mondiale produite. Ils montrent ainsi que
5 pays (Chine, Inde, Etats-Unis, Indonésie, Brésil) abritent
la moitié de la population mondiale. De même, 5 pays (Etats-
Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni) totalisent à
eux seuls 60% des richesses de ce monde. Ils définissent ainsi
des foyers de concentration de la population et de la richesse
qui recoupent « l’ancien et le Nouveau monde ». Mais c’est
leur cartographie de l’accessibilité de la population à la
richesse (Fig. 3) qui montre que les PMA ont l’accès le plus
limité à la richesse mondiale.
Prise en charge de la cataracte dans les PMA
Comparativement aux pays industrialisés (5, 6), le
taux de chirurgie de la cataracte est très faible (3000 inter-
ventions par million d’habitants en Europe, contre 200 en
Afrique et 300 en Asie). L’augmentation de l’espérance de
vie, l’accroissement de la population et la précocité de sur-
venue de la cataracte caractérisant les PMA (50% des patients
ont moins de 50 ans, et les 2/3 moins de 60 ans) vont encore
accroître le backlog déjà considérable.
La qualité de l’offre est aussi un grand déterminant
de la prise en charge de la cataracte.
D’abord le nombre de personnels disponibles : quand
on compte un ophtalmologiste pour 10 à 20 000 habitants
dans les pays industrialisés, en Afrique on en compte 1 pour
500 000, et 1 pour 200 000 en Asie. Pour le personnel para-
médical, on compte un infirmier spécialisé pour 200 000
habitants en Asie, et 1 pour 400 000 en Afrique. Cette limi-
tation numérique est un facteur majeur qui réduit l’accessi-
bilité aux soins ophtalmologiques de la population. Ce phé-
nomène est aggravé par l’installation préférentielle des
professionnels dans les grandes villes, créant un vide oph-
talmologique dans les régions rurales. Ce nombre réduit de
personnels spécialisés a comme corollaire la rareté des
centres ophtalmologiques dans ces pays. En effet les struc-
tures de soins oculaires sont peu nombreuses, et quand elles
existent elles sont généralement concentrées dans les
grandes villes au détriment du milieu rural. Les Programmes
Nationaux de Lutte contre la Cécité (PNLC) ont tenté de
réduire l’impact de cette absence par la création des Centres
de soins oculaires situés au niveau primaire ou secondaire,
tenus par un infirmier spécialisé en ophtalmologie, palliant
autant que possible la carence de soins spécialisés à cet éche-
lon de la pyramide sanitaire. Ces centres sont les pivots des
campagnes de dépistage de la cataracte, de la chirurgie en
stratégie avancée et du suivi post-opératoire des opérés.
Du point de vue technique, la procédure intra capsu-
laire naguère pratiquée est de plus en plus remplacée par
l’EEC manuelle avec mise en place d’un implant cristallinien.
Mais elle demeure encore assez peu répandue, grevée de fré-
quentes complications, avec des résultats fonctionnels non
optimaux. Des îlots d’avancée techniques existent cependant,
où se pratiquent les techniques opératoires les plus modernes
avec des équipements récents.
Ensuite, l’accessibilité économique et financière est
largement réduite par :
Les coûts d’équipements et de maintenance élevés
amenant généralement les autorités sanitaires à se concen-
Figure 3 - Accessibilité démographique et accessibilité économique
mondiales.
A : Distance moyenne à l’ensemble
de la population vers 1990
B : Distance moyenne à l’ensemble
de la richelle mondiale (PNB) vers 1995
Source : UNEP-GRID, Banque Mondiale
© Claude Grasland, Malika Madelin, Projet Hypercarte, 2000
En km :
14 000
12 000
10 000
8 000
6 000
5 000
1 / 7 100%

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