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Dossier pédagogique Le théâtre d’objets, une possible définition — Portail des Arts de la Marionnette

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Dossier pédagogique : Le théâtre d’objets, une possible
définition
Historique du théâtre d’objets
Pour comprendre le théâtre d’objets il est impératif de se tourner vers ceux qui sont à l’origine de ce théâtre, du terme et
de la pratique. Il s’agit de :
Christian Carrignon, Katy Deville et la Cie « Théâtre de cuisine »
Christian Carrignon et Katy Deville fondateurs du Théâtre de Cuisine, ne cachent pas que leur théâtre n’à rien avoir
avec le théâtre des marionnettistes. Il définissent le théâtre d’objets comme étant le résultat de la relation qui existe
entre les yeux, les mains, les choses et l’énergie personnelle qu’on y met .Journal de voyage, raconte des expériences
de la vie courante illustrées par des objets avec lesquels Carrignon s’amuse avec des jouets.
Jacques Templeraud et la Cie « Le théâtre Manarf »
Manarf bâtit sa renommée sur son spectacle Intime, intime qui n’est qu’une nouvelle interprétation du petit chaperon
rouge ». Le fondateur de la compagnie, Jacques Templereau joue le rôle du clown Giglo qui raconte cette histoire
classique dans un capharnaüm. Le petit chaperon rouge est représenté par une pomme verte, le loup par une vraie tête
de stockfish aux dents superbes et la mère par une pomme de terre à l’eau. Templereau utilise des objetspersonnages.
Charlot Lemoine et Tania Castaing, « Le vélo théâtre »
Charlot Lemoine et Tania Castaing qui créent la Cie « Le vélo théâtre » formulent ainsi les raisons qui les ont poussées
à choisir le théâtre d’objets : « Les objets montrés et manipulés, prennent une signification particulière et deviennent
une sorte de langage. Aussi bien pour le spectateur que pour l’acteur, se cache ici le chemin qui mène à l’imagination
des gens, comprise dans toute langue et dans toute culture. » Aux objets ordinaires qu’ils utilisent en fait rarement, ils
préfèrent des jouets ou des miniatures de la réalité.
Ces trois compagnies ont inventé ensemble le théâtre d’objets pour ce qui est de l’esthétique, le 2 mars 1980 pour ce qui
est de l’appellation. Pour de nombreux chercheurs et spécialistes qui ont travaillé sur l’objet au théâtre, cette naissance
s’est faite dans et contre l’invasion des objets de la consommation. Ella a lieu pour Christian Carrignon dans le contexte
d’une Europe envahie par les objets « made in China » « Le théâtre d’objets est de notre temps et de notre société.
C’est un théâtre né à la fin du 20e siècle dans l’Europe envahie par les objets made in China ».
Il s’agissait alors d’enchanter le monde avec « rien »ou du moins « grand-chose » comme l’explique Christian Carrignon.
En parallèle de l’excès, le théâtre d’objets combat l’obsolescence de plus en plus rapide des marchandises, très vite mise
au rebut. L’acte fondateur du théâtre d’objets naît d’un geste politique, c’est se placer du côté de ceux qui ont témoigné
d’une conscience critique de leur art et manifesté une prédilection pour les formes dites « mineures »perçues comme des
moyens de ressourcer l’art au contact du populaire, du kitsch, du bricolage et contre l’académisme de l’art majeur. Ils y ont
ajouté la conscience historique, l’attention aux traces, aux restes, aux formes oubliées parfois surannées (Brecht, déjà en
1936 conseillait d’aller récupérer les objets du théâtre sur « un chantier de démolition »).
Ainsi, quand l’objet envahit le monde des hommes, la nécessité s’impose pour l’artiste d’en servir quelques uns à autre
chose. Breton suggérait par exemple pour desserrer l’emprise aliénante, des objets oniriques.
Le théâtre d’objets développe cette fonction poétique que Breton assignait dans les années trente à l’objet
surréaliste : « perturber la loi » que la société impose aux objets notamment leur obsolescence.
Il entreprend de donner une seconde vie à ces objets manufacturés produits en masse et délaissés par les
consommateurs. Il les fait sortir de leur logique utilitaire pour les faire entrer dans une logique poétique où leur
pouvoir d’évocation se déploie.
Ainsi, un capuchon de stylo rouge récupéré put devenir une Petit Chaperon Rouge :
c’est autant la couleur que la proximité consonantique et sémantique entre capuchon et
chaperon qui déploie ici tout un champ d’évocation. Il ne s’agit pas de transcender
mais de détourner l’objet de fait le rapprochement avec les surréalistes est inévitable :
à savoir donner aux objets de nouvelles significations et des fonctions
symboliques. Cependant, il est important de nuancer, car lorsqu’André Breton et
Philippe Soupault mirent en scène en scène parapluie, robe de chambre et machine à
coudre dans un sketch de 1920 intitulé « Vous m’oublierez », tous les personnages
étaient joués par des comédiens. Ce n’était donc pas un vrai théâtre d’objets mais une
provocation pour choquer le public. Ceci dit, ils autorisent par ces détournements une
ouverture du champ de l‘imagination et une réflexion sur de nouveaux moyens
d’expression. Nous pouvons évoquer les ready-made de Marcel Duchamp qui par un
déplacement de sens, fait entrer l’objet dans le domaine de l’art.
Sleeping Beauty – Colette Carrigan –
Compagnie Akselere
Sur la trace des surréalistes, les marionnettistes et les artistes ont donc donné aux
objets de nouvelles significations. En expérimentant les objets de la société de consommation, les objets du quotidien, ils
les ont transformés en personnage car ils renferment des possibilités illimitées (la marionnette a d’ailleurs les mêmes
qualités).
Une nouvelle place de l’objet dans le théâtre : le marionnettiste qui utilise l’objet dans des buts dramatiques et
spectaculaires, doit oublier leur fonction utilitaire. Sur la scène, un sèche-cheveux au lieu de sécher une chevelure se mue
en dragon, en gobeur de mouches.
Dans le théâtre d’objets, les objets véhiculent les idées et
l’imagination de l’artiste
Le théâtre d’objets atteint son apogée dans les années 1980, les objets font leur première apparition en scène : ils
interprètent des personnages et prennent part à l’action. L’objet devient un terrain d’expérience pour les marionnettistes : il
y a autant de théâtre d’objets que de metteurs en scène, d’ailleurs Christian Carrignon emploie lui-même le possessif «
mon théâtre d’objets ».
Une possible définition
C’est quoi un objet pour le théâtre d’objets ?
Même s’il est central, qui dit objets ne signifie pas nécessairement théâtre d’objets. On peut aujourd’hui, faire du théâtre
d’objets sans objets, par exemple en manipulant la matière.
L’objet se définit comme vu par son lien avec une époque où la société comme elle continue de le faire morcelle le désir de
chaque individu. Il se caractérise aussi par sa petitesse, peut-être en réaction à la grandeur du théâtre classique. C’est un
théâtre fondé sur un matériau informe qui prend forme au cours du spectacle. Le comédien-manipulateur transpose son
rôle sur un objet matériel et prend ses distances par rapport à ce rôle. Tout comme l’objet, ces éléments de la réalité (de
l’aluminium ou de la cire) peuvent servir d’intermédiaire signifiants ou non pour décrire, appréhender et refléter le monde.
Et puis voilà ce qu’en dit Christian Carrignon:
« L’objet dans le théâtre d’objets est immédiatement identifiable. Il est fait pour une main, comme un outil. Il vient
la plupart du temps de la maison (le rêve se développe la plupart du temps dans l’intérieur des maisons). […] La
boîte de Cachou Lajaunie, le baromètre en forme d’ancre dans l’entrée, le tire-bouchon De Gaulle, lire Je me
souviens de Georges Perec et se souvenir de lui… » .
Il insiste très souvent sur un aspect essentiel de ce qu’est l’objet au théâtre d’objets : il n’est pas transformé sans quoi il
perdrait sa charge onirique. C’est donc souvent l’objet d’une culture cachée dans le temps et dans l’espace. Ils parlent de
nos vies en allant puiser dans nos origines, dans nos enfances.
Depuis l’aube de l’humanité, l’objet possède le statut de sujet. Les objets ont été de tout temps utilisés dans la
littérature allégorique où ils symbolisaient à la manière des animaux, les défauts et les passions humaines. Ils ont
par la suite envahis le conte, comme en témoignent les contes d’Andersen.
Pistes pédagogiques
Partage d’expériences
Aborder le théâtre de marionnette par celui de l’objet est une voie peu orthodoxe mais au combien déroutante pour l’élève
qui a bien trop souvent une vision limitée et poussiéreuse de la marionnette. Très vite l’élève saisit l’enjeu et les possibilités
formidables contenus dans l’objet.
L’objet ne nécessite aucune phase de création ou du moins de transformation (pas d’yeux sur une cafetière ! tout
anthropomorphisme annulerait toute démarche de jeu avec l’objet) et autorise à l’inverse une mise en jeu et en scène
immédiate de l’objet et de l’élève. Du point de vue de l’enseignant, l’absence de technicité (apparente) de ce théâtre facilite
d’autant plus l’engagement dans un projet marionnettes : l’objet étant un medium/ une matière inépuisable d’exploitation
littéraire mais également philosophique. On pense plus spécifiquement aux questions d’identité, de mémoire et de
l’expression de soi. En effet, en accompagnant l’élève dans sa « dématérialisation » de l’objet, il doit par lui-même lui faire
perdre sa nature utilitaire pour saisir sa dimension poétique.
C’est en effet une autre manière que d’aborder les histoires et l’Histoire, voici que des objets familiers se chargent de sens
nouveaux, d’émotions inattendues ; transformés, décontextualisés, ils deviennent prétextes à expression. Le quotidien
nous raconte une autre histoire… De décalage en décalage, le regard réapprend à voir, la connaissance chemine
au grès des métamorphoses.
Que peut nous raconter quand on sait l’écouter un objet ?
Comment rendre possible ce dialogue entre l’élève et l’objet ?
L’amener par le biais d’ateliers pratiques (voir annexe) à comprendre la charge émotionnelle et poétique de l’objet.
Il serait intéressant dans un premier temps d’exploiter des objets usuels, apportés par l’enseignant pour amener la classe à
appréhender et saisir cette dimension onirique et théâtrale de l’objet. Par la suite, l’élève sera prêt pour la quête d’un objet
« personnel », un objet qui proviendrait de « l’intérieur de la maison ».
Atelier 1
Pour voir autrement un objet
Oublier ce qu’on sait, à quoi il sert, puis se laisser guider par ses émotions :
Toucher « yeux fermés », sentir les formes, les dimensions, les textures, les matières, les consistances…
Sentir les odeurs agréables ou non…
Entendre les sonorités… les bruissements, les cliquetis…
Regarder les couleurs, les rythmes, les nuances, les signes, les motifs…
Chaque objet devient une « palette » tactile, olfactive, sonore, visuelle…
Consignes : Mettre « en mots » ce que l’on a éprouvé en découvrant la matière, la texture, le forme, l’odeur, le poids, la
couleur, les matériaux ou la taille d’un objet. Etablir la « carte d’identité » sensorielle de l’objet.
Atelier 2
Mettre en scène
Rechercher des éléments plastiques qui vont compléter, mettre en valeur ou donner une autre signification aux
premières réalisations.
Prendre en compte l’environnement même de la production :
choix de l’espae de présentation : boîte, socle, supports de différentes couleurs. Installation sur un mur, au sol, au
plafond…
choix de l’effet produit par l’utilisation de jeu de lumière ou d’accessoires comme des tissus, des cadres…
L’objet ainsi théâtralisé sollicite l’imagination, la mémoire, l’affectivité… « musée personnel » par lequel l’enfant
peut révéler sa sensibilité, se dévoiler…
Atelier 3
Transformer
Tous ces objets invitent aux jeux de l’analogie, proposent de multiples formes évocatrices, leurs ombres, leurs empreintes
sont des prétextes à des jeux graphiques…
Pour transformer un objet :
Se libérer des stéréotypes
Ressentir le plaisir de la découverte et de l’expérimentation
Faire un inventaire des actions possibles à expérimenter avec ou sans outils
Nourrir l’expression personnelle
Favoriser l’ouverture culturelle par l’apport de références artistiques en « écho » aux expériences de la classe :
montrer une diversité d’œuvres sur le thème de l’objet (différentes époques, différentes cultures… art moderne et
contemporain…)
Voir comment l’objet a été représenté, détourné, montré, transformé… pour inviter à réagir et agir…
Multiplier les mises en relation avec d’autres domaines dans une perspective transversale : l’objet du point de vue
littéraire, théâtral, technologique, scientifique… l’objet comme symbole.
Susciter la curiosité, la recherche, l’échange d’un élève à l’autre, d’une classe à l’autre…
Garantir l’authenticité des réalisations par l’accueil « bienveillant » des productions de chacun.
Prévoir des relances, de nouvelles mises en situation pour définir ensemble de nouvelles pistes de travail : jouer sur la
surprise, l’étonnement.
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Dossier d’accompagnement Classes Culturelles Numériques rédigé par Louisa Djenane,
Professeur responsable du service éducatif de l’Institut International de la Marionnette
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