Table des matières I - Introduction 3 II - La notion de contrat 6 A. Le contrat et l'acte juridique unilatéral.................................................8 B. Le contrat et les conventions non-obligatoires.....................................11 C. Le contrat et les actes collectifs.........................................................12 III - La classification des contrats 15 A. La classification des contrats selon leur réglementation........................15 B. La classification des contrats selon leur formation...............................16 C. La classification des contrats selon leurs effets....................................17 D. La classification des contrats selon leur élaboration.............................20 2 Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 I- Introduction I Selon l'expression de Jausserand, un auteur ayant vécu entre la seconde moitié XIXe et la première moitié du XXe siècle, célèbre chez les juristes : « nous vivons de plus en plus contractuellement ». Bien que déjà anciens, ces propos sont d'autant plus d'actualité dans une société où les rapports, notamment économiques, sont extrêmement fréquents. Exemple Prendre le bus, commander un produit sur internet, aller chez le médecin, se faire embaucher dans une entreprise, confier la veille commode héritée de ses grands-parents à un garde-meubles le temps de trouver un appartement pour s’y installer, trouver un appartement pour s'y installer, confier au cordonnier une paire de chaussures à réparer s'appuie sur autant de contrats. Ces évènements que nous connaissons tous relèvent, aux yeux du droit, d'opérations contractuelles. Dans l'ordre des exemples évoqués : un contrat de vente (plus particulièrement une « vente à distance »), un contrat d'entreprise, un contrat de travail, , un contrat de dépôt, un contrat de bail d'habitation, un contrat d'entreprise à nouveau. Même pour celui qui n'est pas juriste, le constat est assez facile à dresser : les contrats sont nombreux mais aussi très divers. L'importance du nombre de contrats conclus quotidiennement s'explique par le fait que, dans les relations entre personnes privées, le contrat est un instrument juridique essentiel. Pour la Loi, les individus étant placé dans un rapport d'égalité (celui-ci est le principe mais il connaît quelques exceptions comme par exemple en vertu de l’autorité parentale), un changement dans leurs rapports doit en principe résulter d'une décision commune : un accord. C'est cet accord que, sous certaines conditions, la loi qualifie de contrat. La grande diversité de contrats provient du fait que les rapports entre individus peuvent avoir des contenus extrêmement différents. On peut toutefois les ranger par variétés selon la fonction qu'ils remplissent. S'il s'agit de céder un bien qui va donc changer de propriétaire, on parlera de contrat de vente. S'il s'agit de réaliser une prestation de service (comme les soins prodigués par le médecin, la réparation effectuée par le cordonnier), on sera en présence d'un contrat d'entreprise. S'il s'agit de mettre ses capacités physiques et/ou intellectuelles à la disposition d'un employeur, un contrat de travail sera conclu. S’il agit d’assurer la conservation d’une chose qui nous est confiée, ce sera un contrat de dépôt. S'il s'agit d'obtenir la possibilité d'occuper un appartement pour y vivre, ce sera un contrat de bail d'habitation. Attention Le terme « contrat d'entreprise » est un faux-ami. Il ne désigne pas le contrat par lequel on Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 3 Introduction créerait une entreprise où même celui qui consisterait à solliciter une entreprise. C'est le contrat par lequel l'une des parties s'engage envers l'autre à lui fournir une prestation de service. Dans le Code civil, ce contrat est désigné par « louage d'ouvrage ». Cette terminologie devenue désuète a été remplacée, dans le vocabulaire juridique actuel, par « contrat d'entreprise ». Complément Le bail est un contrat conclu entre un bailleur et un preneur (à bail) en vertu duquel le premier consent au second le droit de se servir de sa chose moyennant, en contrepartie, le paiement d'un loyer. Selon le type d'utilisation du bien, le bail se déclinera en différentes variétés : un bail d'habitation si le bien est destiné à servir de logement principal, un bail commercial si le bien est destiné à accueillir un commerce, un bail rural s'il s'agit de terres agricoles que le preneur va exploiter. L'objet de ce cours ne portera pas sur l'un ou l'autre de ces contrats en particulier mais sur le contrat en général. Parce que c'est par lui qu'il faut commencer. Nous étudierons ce que l'on appelle le droit commun des contrats. C'est-à-dire, ce qui forme la base à partir de laquelle peuvent ensuite être élaborées diverses variétés de contrats ayant des fonctions plus ou moins spécifiques. Avant d'entamer l'étude du droit des contrats, il faut apporter deux précisions. Tout d'abord, il faut définir ce qu'est très exactement un contrat. C'est-à-dire : préciser la notion de contrat (II). Ensuite, il faut identifier les différentes catégories au sein desquelles on peut ranger les contrats. C'est-à-dire : proposer une classification des contrats selon différents critères (III). 4 Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 La notion de contrat II - II Texte légal : Selon l'art. 1101 du Code civil : « Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations ». Cette définition légale comporte deux éléments : l'événement à l'origine du contrat et les conséquences de celui-ci. L'origine, tout d'abord, réside dans l'accord de volonté entre deux ou plusieurs personnes. Cela signifie que le contrat ne peut être que l'œuvre de la volonté d'au moins deux personnes. Réciproquement, on peut donc opposer le contrat aux manifestations de volonté d'une seule personne. Ce que l'on appelle un acte juridique unilatéral (A). Les conséquences, ensuite, se manifestent dans les effets juridiques : créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. C'est sur des obligations que le contrat agit. Etant entendu que les obligations définissent justement le contenu du rapport juridique pouvant exister entre deux ou plusieurs personnes. En raison de leur nature juridique, la Loi impose que ces obligations soient respectées. En un mot : le contrat produit non pas de simples recommandations mais des engagements obligatoires. Cela permet de comprendre que le contrat se distingue des accords dont le respect n'est pas juridiquement obligatoire. On parle à leur sujet de conventions non obligatoires (B). Mais si le contrat produit des conséquences obligatoires, elles ne concernent logiquement que les personnes qui y ont consenti. Celles que l'on appelle les parties au contrat. Il convient toutefois de noter qu’il en va différemment des actes collectifs, tels par exemples les accords collectifs du travail, parce qu’ils créent des obligations à la charge de tiers (C). A. Le contrat et l'acte juridique unilatéral Le contrat se distingue très nettement de l'acte juridique unilatéral parce qu'il est le fruit de la volonté de plusieurs personnes. La plupart du temps, les parties sont au nombre de deux. Raison pour laquelle on a coutume de Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 5 La notion de contrat considérer le contrat comme étant un acte juridique bilatéral. Mais il peut également être multilatéral comme c'est le cas en présence de certains contrats d'entreprise où interviennent un nombre relativement important de parties qui prennent des engagements croisés entre-elles. C'est aussi le cas d'un contrat de société conclu entre plus de deux personnes. Complément Le contrat de société est un contrat original parce que s'il lie les parties, comme pour tout contrat, il a également pour conséquence de créer une personne juridique nouvelle : une personne morale dont les parties sont les associés. Cette qualité leur offre vocation à participer à la vie juridique de celle-ci ainsi qu'à profiter de ses bons résultats ou à en assumer les mauvais. Préciser que le contrat se distingue de l'acte juridique unilatéral, ce n'est pas dire que durant la vie du contrat il lui soit nécessairement étranger. En effet, dans certains cas, il peut être mis fin au contrat au moyen d'un acte juridique unilatéral. C'est ainsi le cas en présence d'un contrat pour lequel les parties n'avaient pas prévu de terme. Exemple On peut, par sa seule décision, résilier un abonnement prévu sans limite de durée. On peut en revanche se demander s'il ne serait pas possible à une personne de décider de sa propre initiative de s'engager au profit d'une autre. Ce que l'on appelle un engagement unilatéral de volonté. Le droit français se montre hostile à ce procédé qu'il juge inutile (le contrat est là pour ça) et dangereux (pour le débiteur qui ne mesurera pas nécessairement la portée de son engagement). En revanche, le Code civil accueille cette faculté de s'engager unilatéralement lorsqu'elle porte sur un devoir de conscience qui lui préexistait. Mais il n'est plus alors question de contrat mais d'une obligation qui nait par volonté unilatérale parce que la loi l'admet expressément à l'art. 1100 al. 2 du Code civil. A ce titre, ce texte envisage l’existence d’un « devoir de conscience avec autrui » dont il fait le soubassement sur lequel une volonté individuelle peut exceptionnellement créer un engagement unilatéral. Exemple Alors que le débiteur est libéré de son engagement par l'effet de l'écoulement du temps (on parle de prescription extinctive), il indique au créancier qu'il entend malgré tout s'en acquitter. Une personne décide de venir en aide à l'un de ses proches qui lui a toujours été fidèle et qui se trouve aujourd'hui dans le besoin. B. Le contrat et les conventions non-obligatoires L'idée même de convention non-obligatoire peut surprendre. Comment un accord de volonté peut-il ne pas engager ceux qui y ont consenti ? C'est qu'il faut préciser s'il s'agit d'un engagement juridique ou non. 6 Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 La notion de contrat Il peut arriver en effet que les auteurs d'un accord aient entendu se situer en dehors de toute référence à la Loi pour se placer sur un plan strictement moral. C'est d'ailleurs ce que désigne l'expression « contrat moral » lorsque deux personnes entendent s'engager sans référence à une quelconque autorité extérieure. De la même façon, certains engagements peuvent être dépourvus de force juridique parce qu'ils relèvent de relations amicales ou de l'activité politique. Exemple Pour les relations amicales, c'est l'aide bénévole qui sera apportée à un proche lors d'un déménagement. Pour l'activité politique, ce sont les promesses de campagne dont on sait, même si on doit le regretter, qu'elles n'engagent que ceux des électeurs qui y croient... Même si la jurisprudence admet l'existence de tels accords extra-juridiques et donc nonobligatoires, elle le fait avec beaucoup de réticence. La plupart du temps, elle considère que l'accord a bien fait naître un contrat même si son caractère bénévole justifie de faire preuve d'une bien moindre exigence à l'égard du débiteur. De la même façon, elle a pu décider que l'engagement sur l'honneur, souscrit par un débiteur en faillite, de payer ses dettes en cas de « retour à meilleur fortune » était juridiquement contraignant. On peut en conclure que si les accords non-obligatoires existent théoriquement, en pratique ils ne se rencontrent que très rarement. Du moins les tribunaux n'en sont pas saisis pour trancher la question. Ce qui en occulte sans doute une part essentielle. C. Le contrat et les actes collectifs Le contrat se distingue de l'acte collectif en ce que ce dernier produit des effets juridiques à l'égard de personnes qui n'y ont pas consenti. En d'autres termes, l'acte collectif modifie la situation juridique de personnes qui n'ont pourtant pas donné leur accord pour cela. Cette hypothèse se présente tout d'abord à l'occasion d'une décision prise par une assemblée délibérante, telle qu'une assemblée générale de copropriétaires ou d'actionnaires. L'acte juridique collectif qui en résulte va ainsi décider du budget pour l'exercice suivant ou du sort des bénéfices réalisés. Exemple L'AG des copropriétaires décide de réaliser certains travaux qui imposeront une augmentation des charges. Même le ou les copropriétaires qui n'ont pas voté en ce sens devront s'en acquitter. L'AG des actionnaires décide de ne pas distribuer de dividendes. Même les associés ayant voté contre cette résolution en seront privés. Elle se manifeste ensuite en présence d'un accord collectif dont l'illustration la plus évidente est celle que l'on trouve en droit du travail. L'accord collectif ou convention collective va ainsi s'imposer à des salariés qui n'auront pas Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 7 La notion de contrat donné mandat lors des négociations ou dont les représentants auront refusé leur approbation. Exemple L'art. L. 2261-19 du Code du travail permet au Gouvernement d'étendre le champ d'application d'un accord collectif au-delà des entreprises adhérentes aux organisations patronales signataires. Malgré le nom qui lui est donné la convention collective ne relève pas du domaine contractuel. Complément Despax, un auteur toulousain, disait à propos de la convention collective qu'« elle a l'âme d'un règlement dans le corps d'un contrat ». 8 Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 La classification des contrats III - III Comme nous l'avons déjà évoqué, les opérations contractuelles sont extrêmement variées. Il est cependant possible et surtout très utile d'organiser cette diversité au travers de catégories juridiques. En effet, l'appartenance à une catégorie juridique commandera l'application d'un ensemble de règles spécifiques. Ce que l'on appelle un régime juridique. On peut identifier quatre grandes variétés de classifications, selon qu'il s'agit de la réglementation applicable (A), des conditions de formation du contrat (B), de la nature de ses effets (C) ou des conditions d'élaboration de son contenu (D). A. La classification des contrats selon leur réglementation Au titre cette classification, il faut opposer les contrats nommés aux contrats innommés. Fondamental Les premiers sont appelés ainsi parce qu'ils désignent des contrats connus et organisés par la loi ou l'usage qui leur a donné un nom. Ces contrats qui sont de très loin les plus fréquents sont également ceux dont le maniement est le plus aisé. En effet, leur régime juridique étant prédéfini, il suffit de leur appliquer. Ces contrats sont ainsi autant d'outils mis à la disposition de ceux qui souhaitent réaliser une opération juridique connue. Il leur suffit simplement de s'y référer en désignant correctement leur accord pour que les règles correspondantes s'appliquent automatiquement. Exemple Parmi les contrats nommés, on peut citer la vente, le bail, le dépôt, le mandat, le contrat d'entreprise, le contrat de société, le contrat de concession, la location-gérance, le crédit-bail, etc. Fondamental Les contrats innomés sont tout l'inverse. On les appelle également contrats sui generis. Expression latine signifiant « sur mesure ». Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 9 La classification des contrats L'expression pourrait être trompeuse parce qu'elle pourrait laisser croire que les contrats nommés s'opposent à toute forme d'ajustement par les parties. Or, il n'en est rien. Dans la vente, par exemple, ce sont bien les parties qui décident directement de la chose cédée et de la fixation du prix à payer. Mais en revanche la Loi pourvoit à tout le reste, en ce sens qu’elle organise par défaut (c’est-à-dire sans qu’il soit besoin de le préciser lors de la conclusion du contrat) le régime juridique applicable à cet accord : le lieu et le délai de livraison, la charge des frais du transport de la chose, les garanties applicables s’il apparaît ultérieurement qu’elle est affectée d’un défaut, etc. Le caractère original des contrats innommés provient du fait qu'ils ne s'inscrivent pas dans une opération juridique déjà connue. Le recours à ce procédé impose donc aux parties de convenir très précisément de l'intégralité des modalités applicables à leur accord. En pratique, les contrats sui generis sont rares. Cela pour deux raisons. Tout d'abord, parce que la loi interdisant de déroger à l'ordre public, le juge n'hésite pas à requalifier les contrats qui, sous prétexte d'être innommés, avaient en réalité pour but d'éluder une dispositions légale impérative. Exemple Sauf exception, les conventions dites « d'occupation précaire » renvoient en réalité à un contrat de bail et relèvent en conséquence de la réglementation correspondante. Ce qui implique fréquemment une durée minimale et un droit au renouvellement. Ensuite, lorsqu'un besoin effectif de recourir fréquemment à une nouvelle forme d'opération juridique se présente, le législateur ne tarde pas à s'en emparer pour la règlementer. En d'autres termes, la bonne fortune d'un contrat sui generis conduit à sa consécration légale. Ce qui lui retire alors cette qualification. Exemple Le procédé consistant à combiner location et acquisition à terme, à l'origine imaginé par la pratique anglo-saxonne sous le terme de leasing, a été consacré par le législateur français sous la qualification de crédit-bail. B. La classification des contrats selon leur formation Cette classification est prévue par l'art. 1109 du Code civil qui distingue trois variétés. Fondamental Les contrats consensuels qui se forment par le seul échange des consentements quel qu'en soit le mode d'expression. Autrement dit, le procédé importe peu. Seul est déterminant que les consentements des parties aient été échangés. 10 Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 La classification des contrats Exemple Pour la vente qui est un contrat consensuel, le simple accord verbal est suffisant à engager les parties. Fondamental Les contrats solennels sont ceux dont sa validité est subordonnée à des formes déterminées par la loi. Ce sont des contrats dont la conclusion requiert des formes particulières qui peuvent résider dans le recours à l'écrit et/ou à l'intervention d'un tiers investi d'une autorité particulière qui lui est conférée par la loi. Exemple Le contrat de mariage est un contrat solennel qui doit être établi en la forme notariée. C'est-àdire, rédigé par un notaire ayant recueilli le consentement des époux. Il en va de même de la donation. Le contrat est réel lorsque sa formation est subordonnée à la remise d'une chose. Autrement dit, il ne suffit pas aux parties de s'être entendues sur la chose objet du contrat, il faut encore que cette volonté se concrétise dans la remise de ladite chose. Exemple Le dépôt est un contrat réel qui n'est formé qu'à partir du moment où le dépositaire reçoit la chose qui devait lui être confiée. Avant cela, le seul accord est insuffisant à conclure un contrat de dépôt. C. La classification des contrats selon leurs effets En fonction de la nature des effets produits on peut identifier quatre grandes distinctions. La première distinction, prévue par l'art. 1106 du Code civil, est celle qui oppose les contrats synallagmatiques aux contrats unilatéraux. Fondamental Les contrats synallagmatiques sont ceux dans lesquels les parties s'obligent réciproquement les unes envers les autres. Exemple La vente est un contrat synallagmatique parce que le vendeur doit fournir la chose tandis que l'acquéreur doit, en retour, lui payer le prix. Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 11 La classification des contrats Fondamental Le contrat est unilatéral lorsqu'une ou plusieurs personnes s'obligent envers une ou plusieurs autres sans qu'il y ait d'engagement réciproque de celles-ci. Exemple La donation est un contrat unilatéral parce que le donateur se dépouille au profit du donataire sans que ce dernier ne lui offre rien en retour. Complément La donation est un contrat parce qu'elle requiert le consentement du donataire même si ce dernier n'est engagé à rien. La loi sanctionne toutefois son éventuelle ingratitude ultérieure (s'il ne vient pas au secours du donateur dans le besoin) par la possibilité de remettre en cause la donation. La donation doit être distinguée du legs. Si la finalité est la même (il s'agit de gratifier), le procédé diffère parce le legs résulte d'un acte juridique unilatéral exprimé au moyen d'un testament. Le légataire ne peut toutefois être gratifié contre son gré et peut donc décliner le testament en sa faveur. L'intérêt de cette distinction est double. En matière de preuve, le contrat synallagmatique requiert de respecter la « formalité du double » prévue par l'art. 1375 du Code civil En matière d'exécution, le contrat synallagmatique offre la possibilité à la partie confrontée à la défaillance de son contractant de suspendre elle aussi l'exécution de ses propres obligations. La deuxième distinction, prévue par l'art. 1107 du Code civil, sépare contrat à titre onéreux et contrat à titre gratuit. Fondamental Le contrat est à titre onéreux lorsque chacune des parties reçoit de l'autre un avantage en contrepartie de celui qu'elle procure. Exemple Le bail est un contrat onéreux parce que le preneur doit en contrepartie de la jouissance de la chose payer un loyer au bailleur. Fondamental Le contrat est à titre gratuit lorsque l'une des parties procure à l'autre un avantage sans attendre ni recevoir de contrepartie. Exemple Le prêt à usage (également appelé commodat) est un contrat à titre gratuit parce que le prêteur permet à l'emprunteur de se servir de sa chose sans obtenir de contrepartie. Plus précisément, c'est un contrat de bienfaisance parce le prêteur entend quand même conserver la propriété de sa chose qui devra donc lui être rendue. La donation est un contrat à titre gratuit qui constitue par ailleurs ce que l’on appelle une libéralité. 12 Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 La classification des contrats Complément Tous les contrats à titre gratuits ne sont pas unilatéraux. Ainsi, par exemple du prêt à usage parce que l'emprunteur prend l'engagement de restituer la chose au terme du contrat. Le principal intérêt de la distinction tient au régime propre au contrat à titre gratuit. En effet, de façon générale, le droit civil se montre bienveillant à l'égard de celui qui fait preuve de générosité. Ainsi, sa responsabilité sera plus difficile à engager. A l'inverse, le droit fiscal prévoit la plupart du temps des droits de mutation plus élevés pour les transferts de propriété à titre gratuit. La troisième distinction, prévue par l'art. 1108 du Code civil, vise les contrats commutatifs et les contrats aléatoires. Fondamental Le contrat est commutatif lorsque chacune des parties s'engage à procurer à l'autre un avantage qui est regardé comme l'équivalent de celui qu'elle reçoit. Exemple La vente est un contrat commutatif parce que le prix fixé par l'accord des parties est réputé être la juste valeur de la chose et réciproquement. Fondamental Le contrat est aléatoire lorsque les parties acceptent de faire dépendre les effets du contrat, quant aux avantages et aux pertes qui en résulteront, d'un événement incertain. Exemple Le contrat d'assurance est un contrat aléatoire parce que l'assuré verse régulièrement des sommes d'argent (appelées « primes ») en contrepartie d'une prise en charge qui n'est qu'éventuelle. Si aucun sinistre ne survient durant le contrat d'assurance il aura payé « pour rien ». Inversement, si un sinistre important survient rapidement, l'assureur devra exposer des frais conséquents alors qu'il n'aura encaissé que de maigres sommes d'argent. L'intérêt essentiel de la distinction se présente en cas de déséquilibre économique entre les prestations réciproques. Ce que l'on appelle la lésion. Dans le contrat aléatoire, la lésion ne permet pas de le remettre en cause. C'est ce qu'exprime l'adage « l'aléa chasse la lésion » parce qu'un contrat aléatoire résulte toujours d'une forme de pari. Dans le contrat commutatif, la loi prévoit parfois, quoique de façon rare, que la lésion puisse justifier la remise en cause du contrat. Exemple Dans la vente d'immeuble, si le déséquilibre contractuel est très important (le prix convenu est inférieur à 5/12 de la valeur vénale du bien tandis qu'il n'y a aucune intention libérale chez le vendeur) le contrat peut être annulé. La sanction applicable est appelée rescision pour cause de Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 13 La classification des contrats lésion. La quatrième et dernière distinction, prévue par l'art. 1111-1 du Code civil, oppose les contrats à exécution instantanée aux contrats à exécutions successives. Fondamental Le contrat à exécution instantanée est celui dont les obligations peuvent s'exécuter en une prestation unique. Exemple La vente est un contrat à exécution instantanée. Pour le vendeur : fournir la chose. Pour l'acquéreur : payé le prix. Fondamental Le contrat à exécution successive est celui dont les obligations d'au moins une partie s'exécutent en plusieurs prestations échelonnées dans le temps. Exemple Le bail est un contrat à exécutions successives. Pour le preneur en raison de la répétition des échéances auxquelles il doit régler le loyer. Pour le bailleur en raison du fait qu'il est tenu d'assurer au preneur une jouissance paisible. Ce qui passe notamment par l'entretien de la chose si besoin en est, où l'interdiction permanente qui lui est faite de prétendre profiter également de la chose. La distinction présente un intérêt en ce qui concerne les conséquences de la remise en cause du contrat. S'il est à exécution instantanée, la remise en cause du contrat opère en bloc. De telle façon que l'ensemble de ses effets sont rétroactivement supprimés. Si le contrat est à exécutions successives, sa remise en cause ne se produira que pour l'avenir. Ainsi parlera-t-on de résolution d'une vente mais de résiliation d'un bail. D. La classification des contrats selon leur élaboration Cette classification relativement ancienne en doctrine est apparue très récemment dans les textes. Elle a été introduite dans le code civil à l'occasion de la réforme réalisée par l'ordonnance du 10 février 2016. En vertu de l'art. 1110, il convient de distinguer les contrats de gré-à-gré des contrats d'adhésion. Fondamental Le contrat de gré à gré est celui dont les stipulations sont négociables entre les parties. 14 Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 La classification des contrats Exemple Le contrat de vente d'un véhicule automobile négocié entre deux « particuliers » à la suite d'une petite annonce. Fondamental Le contrat d'adhésion est celui qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l'avance par l'une des parties. Exemple Le contrat d'assurance « multirisques habitation » souscrit à l'occasion de l'emménagement dans sa nouvelle résidence. Pendant longtemps, la catégorie des contrats d'adhésion semblait être réservée aux hypothèses mettant en présence un professionnel et un consommateur. Le droit de la consommation était donc le domaine naturel du contrat d'adhésion. Ce qui avait conduit le législateur à en règlementer le contenu par l'interdiction des clauses abusives. Cellesci étant réputées « non écrites », c'est-à-dire frappées de nullité. Puis, progressivement, le droit de la concurrence a tenu compte de la disparité de puissance pouvant exister entre professionnels. Le Code de commerce décidant alors de sanctionner « l'abus de position dominante » par l'attribution de dommages et intérêts au profit de la partie victime. Désormais, le Code civil (dont les dispositions constituent le droit commun, lequel est donc applicable en l'absence de disposition spéciale contraire) décide à son art. 1171 que dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. Toutefois, son second alinéa prend le soin de préciser que l'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation. Ce mécanisme correctif illustre en creux l'exigence de bonne foi contractuelle. Laquelle, selon les dispositions de l'art. 1104 du Code civil, préside aussi bien à la formation qu'aux effets du contrat. La loi y ajoute différents remèdes au profit du contractant victime du manquement de l'autre partie. Cours protégé par le droit d'auteur - Laurent Izac - Maître de Conférence - Avril 2022 15