Des larmes pour la vie
Dans l’Afrique du Sud des années soixante, trois belles dames tombent amoureux d’un seul et même
homme condamné à mort. Et Jean Pierre Békolo trouva de quoi défendre la vie et le droit d’être, tout
court.
Andréa Larsdotter, qui depuis 2009 tient l’affiche dans des films célèbres tels que Bjudlocket, Hälsoresan et 7333
Sekunder, revient dans Miraculous weapons pour accompagner Xolile Tshabalala et Maryne Bertieaux dans
des larmes fortes qui poussent l’immortel Djamal Okoroko (Emile Abossolo M’bo) vers une fin certaine. Un film
écrit et réalisé par Jean Pierre Békolo.
Depuis Quartier Mozart et les saignantes, Jean Pierre Békolo a porté une vision coercitive de ses engagements et
se plait à y aller, pas à pas. Miraculous weapons vient confirmer qu’il tient à aborder divers sujets et se donne le
droit de les traiter en profondeur. Que diable avons-nous fait d’un condamné à mort qui ne s’en sortira point ; un
polygame heureux ? Que n’a-t-on pas fait de subir les efforts d’une femme belle pour se maintenir en vie et porter
pour deux, l’espoir d’un demain nouveau. Et il aura fallu Jean Pierre Békolo pour lui en rajouter deux, des plus
sublimes de par leur forte tête et leur élan humaniste. Et quand le héros principal finit par nous dire face à une
mort assurée, après une foucade de rire sarcastique qui dénote et aggrave la fatalité de l’instant, qu’il est
immortel, toute la mesure de l’appel à la vie s’imprime dans l’échos même de ces pas qui conduisent au supplice.
La langue française rappelle la poésie et offre un Jean Paul Sartre comme
l’alibi pour s’accrocher à l’espoir d’un appel en cassation qui sera rejeté. Les
années soixante sont bien présentées avec les stéréotypes de soldats blancs
et la beauté des scènes extérieures qui vous rappellent l’Afrique d’antan.
Belle musique qui rythme l’évidence et chante l’inéluctable. Des plans taillés
sur mesure, des compositions symétriques qui rendent des décors confinés
et explorent l’espace par une triple présence de femmes ; trois futures
veuves qui se cherchent dans une cuisine où leur présence trouble
l’obsolescence même du rôle premier de l’épouse. Elle se donnent le courage
de ne désespérer quand tout les unit ; pour devant le pire, ne penser qu’au
meilleur.
Jean Pierre invite à la vie, avec des larmes. Et si la plus faible des armes qui force bien souvent des destins, dans
ce cas-ci s’avère impuissante, celles de Jean Pierre, chantent tout au moins, un hymne à la vie.
FESPACO, Ouagadougou, Février 2019