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1. Le cadre conceptuel de l’audit environnemental : présentation des
concepts, théories et grille d’analyse
Après avoir défini l’audit environnemental dans son contexte historique et contemporain
(1.1), nous mobiliserons les théories néo-institutionnelle et des parties prenantes pour tenter
de comprendre le rôle de l’audit environnemental dans la gouvernance des entreprises (1.2).
Ensuite, nous proposerons une grille d’analyse issue de cette revue de la littérature pour
explorer les formes actuelles d’audit environnemental (1.3).
1.1. Essai de définition de l’audit environnemental
Si la pratique de l’audit environnemental1 est d’apparition récente en France, ses prémices
remontent au début des années 1970 aux Etats-Unis. Selon la littérature (Giroux, 1997,
Halley, 1999), c’est dans un contexte législatif contraignant que les entreprises américaines
ont eu volontairement recours à l’audit environnemental pour gérer, de façon plus appropriée,
leurs activités polluantes et éviter des contraventions. La nécessité pour ces dernières
d'identifier et de maîtriser les risques environnementaux inhérents à leurs activités relevait
essentiellement d’impératifs d'ordre économique, financier et commercial. Par la suite, l’audit
environnemental fut introduit au Canada vers la fin des années 1970 et au début des années 80
par l'entremise des filiales de compagnies américaines. Il fut popularisé dans le reste du
monde au cours des années 1990 grâce à la diffusion des normes internationales ISO 14000
(élaborées par une institution privée et considérées comme les plus reconnues dans le monde)
et du règlement européen EMAS (système de management environnemental et d’audit), qui
est le seul dispositif réglementaire dans ce domaine et dont l’application reste volontaire.
Que signifie l’audit environnemental ? Il est difficile de définir cette notion sans préciser le
sens donné au mot audit. L’audit peut être défini comme « un processus d’évaluation, au
terme duquel une opinion est émise, ainsi que d’éventuelles recommandations destinées à
améliorer les activités auditées » (Thiery-Dubuisson, 2009, p.2). D’origine comptable et
financière, l’audit s’est étendu à l’ensemble des opérations de l’entreprise : informatique,
achats, production, marketing, social… En effet, jugées efficaces par les dirigeants des grands
groupes, les méthodes de travail élaborées par les auditeurs financiers et commissaires aux
comptes furent transposées aux domaines non financiers dans la seconde moitié du vingtième
siècle. Chaque chaîne d’opérations, chaque fonction, voire, dans certains cas, chaque
situation, est alors devenue potentiellement auditable (Combemale et Igalens, 2005, p.8). Le
domaine environnemental n’échappe pas à cette démarche expansionniste de l’audit. L’audit
environnemental apparaît donc comme une nouvelle déclinaison de l’audit opérationnel.
Plusieurs propositions sont avancées dans la littérature pour définir cette nouvelle pratique.
« Bien qu’on insiste souvent sur la confusion entourant [ces] définitions, il s’agit en fait d’un
faux débat, car toutes les définitions renvoient à une évaluation systématique et documentée,
seuls les objectifs et l’objet de la vérification changent » (Gendron, 2004, p.185). C’est
pourquoi, nous retenons dans cette recherche la définition officielle selon laquelle l’audit
environnemental est « une évaluation systématique, documentée, périodique et objective des
performances environnementales d’une organisation, du système de management et des
procédés destinés à assurer la protection de l’environnement. (…) Le programme d’audit vise
en particulier à évaluer les systèmes de management en place et à déterminer la conformité à
la politique et au programme de l’organisation, lesquels prévoient notamment le respect des
1 Dans la suite de l’article, nous utiliserons les expressions « audit » et « vérification » de manière
interchangeable malgré le débat portant sur l’usage du terme audit dans le domaine environnemental.