Th Memoire de premiere annee de Master Lind

Telechargé par Jean Marie MVUBU MADEKO
Aix-Marseille Université
UFR d'Arts, Lettres, Littérature et Sciences Humaines
Département de philosophie
Master de philosophie et histoire des sciences fondamentales :
mathématiques et physique
Alice van Helden
Mémoire de M1 : philosophie de la physique
L'indéterminisme en mécanique quantique : implications,
querelles et alternatives
Sous la direction de MM. Thierry Masson et Igor Ly
Mai 2016
Aix-Marseille Université
UFR d'Arts, Lettres, Littérature et Sciences Humaines
Département de philosophie
Master de philosophie et histoire des sciences fondamentales :
mathématiques et physique
Alice van Helden
Mémoire de M1 : philosophie de la physique
L'indéterminisme en mécanique quantique : implications,
querelles et alternatives
Sous la direction de MM. Thierry Masson et Igor Ly
Mai 2016
Abréviations
DET : Pomian, Krzysztof, dir. La Querelle du déterminisme. Philosophie de la science
d’aujourd’hui, Paris, Gallimard, 1990 (Le Débat. Histoire-Politique-Société).
MB : Bitbol, Michel. Mécanique quantique. Une introduction philosophique, Flammarion, 1996.
FL : Laloë, Franck. Comprenons-nous vraiment la mécanique quantique ?, EDP Sciences, 2011.
FS : Selleri, Franco. Le grand débat de la théorie quantique, Paris, Flammarion, 1986.
MQ : Deligeorges, Stéphane, dir. Le Monde quantique, Le Seuil, collection Point-Science n°46,
1984.
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Introduction
Selon le philosophe Cornélius Castoriadis, la science est véritablement en crise, et il est nécessaire
de reprendre l'interrogation théorique du savoir scientifique, c'est-à-dire celle sur sa nature (qui est
différente de celle du savoir philosophique), sur sa valeur (en tant que représentation de la réalité),
sur son orientation (son but, ce à quoi il doit être utilisé), sur son mode de production (la méthode
scientifique) et sur ses produits (et notamment les catastrophes entraînées par le nucléaire ou par
l'accélération de la production industrielle). Alors même que ces questions ne font pas l'objet de
remise en cause par le reste de la population qui, bien qu'elle ressente un profond désarroi (dans une
société divisée, inégale et cloisonnée dans la répartition du savoir, désillusionnée, sans but,
destructrice pour les humains et la nature), s'estime au moins certaine de son savoir. Personne ne
conteste la scientificité de la science, comme si elle était une évidence.
De façon plus spécifique, ce qui a succombé selon lui aux dernières avancées en physique, c'est
l'indépendance du savoir par rapport au sujet, son objectivité toute galiléenne. Ces avancées forcent
l'homme de science à l'interrogation philosophique, en mettant en cause à la fois la métaphysique
sous-jacente à sa science (l'interprétation du type d'être qu'elle décrit quand elle parle d'objets
physiques, mathématiques ou autres), sa logique (qui lie ces objets donc ne peut supporter de
contradiction entre eux), son modèle de savoir (qui a subi une perte de rationalisme par rapport à ce
qu'était le savoir de la physique classique), la limite qu'il pose entre la science et la philosophie
(puisque les questions ontologiques de la physique rejoignent la philosophie), et sa fonction dans la
société (en quoi s'y implique la science). Et cette mise en question de la science entraîne forcément
une mise en question de la philosophie puisqu'elle efface la limite qui la sépare de la science : on ne
peut plus défendre un positivisme qui croirait pouvoir les distinguer, ni une philosophie qui ne
penserait que dans son propre langage, sans évoquer celui de la science.
Précisons les difficultés qui se posent à propos des phénomènes physiques : ce n'est pas seulement
la possibilité de représentation intuitive des processus qui s'écroule, ce sont aussi les catégories de
la pensée physique, au sens ici des définitions selon lesquelles on structure les objets de la physique,
du fait de deux éléments de l'interprétation actuelle qui se rejoignent : la réfutation de l'idée que les
systèmes ont des propriétés physiques bien définies en l'absence d'observation de ces propriétés et
l'introduction de l'inséparabilité selon laquelle on ne peut concevoir de sous-systèmes ou de
systèmes partiels sans prendre en compte la totalité. Le premier élément remet également en cause
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l'opposition sujet/objet, par le fait que le sujet, à travers le processus de mesure, intervient dans la
détermination de l'objet ; qu'on ne peut décrire ce dernier sans prendre en compte le premier.
En effet, l'interprétation actuelle de la mécanique quantique considère certaines propriétés des
objets quantiques comme indéterminées, intermédiaires entre toutes leurs possibilités jusqu'à ce que
l'une de celles-ci soit pointée aléatoirement par une mesure. Cette vision des choses paraît étonnante
à un esprit rationnel, elle entraîne inévitablement la question de savoir si les physiciens se sont tant
enfermés dans leur monde théorique aux possibilités infinies qu'ils se sont détachés des contraintes
terre-à-terre du monde qu'ils essayaient depuis toujours de caractériser. Mais essayent-ils toujours
de caractériser ce monde ou considèrent-ils déjà que cette intention est illusoire ? J'évoquerai cette
question dans un second temps, car tout d'abord, il est nécessaire de revenir sur un panorama des
apparences dont s'habille le hasard en physique classique, le « petit frère » de l'indétermination qui
nous occupe, et sur la spécificité de cette dernière par rapport à ce hasard auquel nous nous étions
habitués avant l'intervention des dernières avancées en physique. On pourra y voir qu'il s'agit là d'un
véritable changement conceptuel, cause partielle (ou reflet ?) du changement de paradigme décrit
par Castoriadis.
Par la suite, je me pencherai sur ledit changement conceptuel et sur les possibilités d'adapter, plutôt
que d'abandonner, les concepts questionnés sous une forme suffisamment proche de celle que nous
leur connaissions. Enfin, on pourra trouver l'objet essentiel de ce travail : l'exposition des raisons
physiques qui ont amené le changement de paradigme et l'étude des possibilités d'adopter une autre
interprétation qui prenne en compte ces raisons. La question principale qu'il s'agit de traiter est la
suivante : est-il réellement nécessaire d'abandonner tout ce qu'il nous faudra abandonner et de
transformer tout ce qu'il nous faudra transformer dans notre vision du monde et de la science afin de
s'adapter aux bouleversements de la physique du XXème siècle, ou peut-on trouver une solution qui
autorise à conserver ce qu'il nous coûte d'abandonner, c'est-à-dire l'idée que les objets du monde ont
des propriétés propres et qu'il est possible de se les représenter, et en particuier que les choses
inertes exemptes de volonté évoluent de manière déterminée ?
Je tenterai de ne me constituer ni en tant que défenseure ni en tant que critique de l' interprétation
actuelle, car maintenir un avis dès le départ entraverait le questionnement philosophique. Par
ailleurs, je n'ai trouvé que peu de philosophes qui abordent la question de ce travail, sans doute
parce qu'elle requiert des connaissances approfondies dans le domaine de la physique ; il est plus
courant de la trouver dans les écrits de certains physiciens qui prennent de la distance par rapport à
leur propre domaine afin d'avoir sur lui un regard critique. Il est donc possible que ce travail
présente un aspect physique un peu disproportionné, ou se réfère souvent aux mêmes sources en
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