Histoire EsaBac – Classe Terminale Notes redigées par M. Massimo Albano La colonisation de l'Algérie et ses tentatives ratées d’émancipation Le conflit entre France et Algérie entre 1954-1962 Problématique - SPOILER : Pourquoi l’Algérie a-t-elle raté son émancipation ? Pourquoi analyser les étapes qui ont marqué la décolonisation de l’Algérie ? d’abord parce que les études sur la guerre d’Algérie sont assez récentes, elles remontent aux années 70. C’est depuis lors que l’on a le courage de l’appeler GUERRE alors que jusque-là on lui a attribué d’autres noms comme opération de maintien de l'ordre et de répression des mouvement indépendantistes, guerre civile, guerre d'indépendance, guerre coloniale. (D’abondants témoignages des vaincus) Deuxièmement parce que les enjeux actuels de l’Algérie et ses tentatives ratées d’émancipation représentent un modèle éclairant les rapports des états VdD* (en voie de développement) avec les pays développés comme la Chine qui est le premier investisseur en Afrique ou la France qui maintiennent encore aujourd’hui d’étroits liens économiques avec ces anciennes colonies. Les questions de départ sont donc les suivantes ? 1. Les économies de ces pays pourraient-t-elle être stables sans la présence des économies occidentales ? (Algérie – CFA – Corée du Sud) ? 2. La démocratie reste-t-elle un idéal ou bien elle peut s’harmoniser avec les luttes économiques qui semblent remporter la bataille sur la politique ? Reprenons depuis le début : A. La colonisation française 1830 – 1914 Bien avant l’expédition française la régence d’Alger répondait à tous les critères d’un état souverain au point que cette souveraineté est reconnue par tous les états européens et même par les Etats-Unis. Avant que la France décide de s’implanter à partir de 1827 les rapports entre l’Algérie et la France sont excellents au point que dans la révolution française là où tous les états européens ne reconnaissent la naissante république française, l’Algérie jure amitié à ce nouvel état moderne et elle lui offre de copieuses quantités de blé qui ne seront jamais payées par la France. Dès lors, comment appréhender la dégradation des rapports francoalgériens ? Le manque de rigueur de la part de la France qui n’arrive pas à honorer la dette en blé en faveur de l’Algérie. L’ouverture d’un marché dans la méditerranée qui aurait renforcé les débouchées économiques françaises, son prestige à l’égard des autres puissances et la monarchie à l’ancienne de Charles X ou l’empire de Napoléon III. Action militaire qui se concrétise dans le débarquement de 5000 navires sur le port d’Alger le 14 juin 1830 qui engendra un conflit armé et la participation de plus de 30.000 soldats algériens, turcs et berbères. Cette armée nombreuse mais mal organisée sera obligé de se rendre et le 5 juillet on signe la reddition d’Alger et les débuts de la colonisation française. → Napoléon III et le royaume arabe à partir de 1852 Le prince président Napoléon III se rend en personne à Amboise où l’ancien chef de la résistance, l’émir Abd el-Kader est retenu captif par la IIème république. Napoléon le fait libérer et songe le nommer vice-roi d’Algérie. Entre son premier et son deuxième voyage 1860 et 1865 en Algérie, Napoléon III refuse d’infliger aux colons les mêmes sorts des indigènes d’Amérique ; au contraire il veut faire prospérer cette race arabe, intelligente, fière, guerrière et agricole. Accueilli par 20.000 algériens le 3 mai 1865 Napoléon prononce un discours qui révèle bien son projet d’éteindre sa souveraineté à l’Algérie mais pas en tant qu’extension du territoire français mais plutôt en tant qu’empire arabe géré par un souverain français. Son but ? amener doucement l’Algérie vers la modernité à travers une coopération technique et une arabophile que chez Napoléon III restera inachevé, surtout après la défaite de 1870. L’histoire de l’Algérie à ce moment est largement celle d’une insurrection des tribus et des sociétés villageoises qui souhaitent protéger leurs terres s’opposant à l’expropriation de leurs terres ce qui donne vie à une politique d’assimilation dont la France n’a pas les moyens et les colons, prêts à tout pour protéger leurs terres qui ne savent pas comment y parvenir. Après la défaite napoléonienne, on entre dans le vif du sujet parce que c’est la III république qui revient au projet de départ. Faire de l’Algérie un prolongement de la France métropolitaine à travers l’expropriation des terres des colonisés et la promulgation, en 1881 d’un code de l’indigénat qui codifie les dispositions répressives parmi lesquelles l’impossibilités d’avoir accès à l’instruction et aux privilèges de la nationalité française. L’Algérie est rattachée administrativement au ministère de l’Intérieur français et les lois de 1898 et 1900 dotent le pays d’une personnalité civile, d’une assemblée coloniale ELUE et d’un budget spécial, en faveur du million de français qui coexistent de manière forcée ave 8 millions de arabes algériens. → Pourquoi l’Algérie est un régime colonial différent de celui tunisien et marocain ? Parce qu’au Maroc, où le protectorat débute en 1912, et en Tunisie 1881 la France rivalise avec l’ambition de l’Allemagne et de l’Angleterre, des puissances prêtes à protéger les indigènes au cas où la France s’y installerait avec la violence. Si d’une part l’Algérie deviendra industrielle moins tardivement que le Maroc et la Tunisie qui ne vivront l’émigration étrangère ni celle interne des campagnes aux villes qui vivra l’Algérie. La France décide alors d’agir de manière stratégique à travers l’implantation d’un fonctionnaire lié au ministère des affaires étrangères sans l’intermédiation ni l’appui d’aucune présence militaire. Pendant les deux guerres l’Algérie fournit ò la France une abondante participation militaire en termes d’hommes. → Les bouleversements sociaux des deux guerres A. Pour simpliste qu’il puisse paraitre la participation à la guerre suscite chez certains un sens d’appartenance à une cause supérieure qui pourra lui apporter des bénéfices. Le recrutement indigène fournit 173.000 militaires dont 25.000 musulmans et 22.000 pieds-noirs périssent dans cette guerre. On estime qu’après la guerre 100.000 soldats survécus à la guerre s’installent en France. On peut estimer due dès 1915 la France a commencé à absorber une croissante immigration algérienne à placer dans l’armée et dans les usines B. La guerre produit un véritable remplacement dans les métropoles qui fait devenir ces paysans des prolétaires ; des paysans prolétarisés, notamment à Alger. Les algériens musulmans sont recrutés pour remplacer la main d’œuvre française envoyé au front. C’est alors, que la découverte du milieu industriel des droits des ouvriers français, de l’existance des CGT plonge ces arabes musulmans jusqu’alors spectateurs et victimes, si vous voulez, de la colonisation française dans une conscience de classe européenne pour eux, jusqu’alors inconnue. Les bruits du 22 janvier 1917 de Wilson sur les droits des peuples à disposer d’euxmêmes, la révolution d’Octobre en Russie si d’une part accroit la conscience de l’appartenance à la classe ouvrière en suscitant un sentiment de révolte… C. … d’autre part la désagrégation de l’empire ottoman à la fin de la 1ère guerre mondiale provoque la faillite d’un imaginaire collectif de nation arabe. Cela provoque la naissance d’une conscience indépendantiste et une solidarité entre arabes contre un ennemi commun, « les puissances étrangères qui les dominent » D. Les mouvements migratoires : entre les débuts du siècle et 1954, aux portes de la guerre, la population en Algérie a doublé. Une masse croissante venant des campagnes tente de s’installer dans une ville qui l’effet de la colonisation avait rendu à plein titre industrielle sans pourtant parvenir à l’absorber. → L’éveil du nationalisme algérien : Dès la période de l’entre-deux-guerres, les aspirations nationales algériennes s’expriment en des organisations multiples et souvent antagonistes dessinant 4 orientations : Oulémas (1931) Mouvement Jeune Algérien Des théologiens réformistes qui souhaitent préserver l’identité culturelle arabe au cri : L’Algérie est mon pays, l’Islam est ma religion. Ils prêchent l’intégration pure et simple de la collectivité musulmane dans la grande famille française. L’échec de ce projet pousseront à une radicalisation des oulémas dans un sens indépendantiste. Les premiers intellectuels algériens et des éléments de la bourgeoisie libérale en voie de constitution se trouvent représentés par Ferhat Abbas qui prône l’égalité des droits entre les européens en Algérie et l’indigène privé de droits. La faute est à la colonisation. Pour eux il existe deux « France ». Celle de 1789 qui a apporté la civilisation, le droit et le prestige moral et l’autre colonisatrice et source d’oppression. Le parti communiste algérien PCA 1920 et 1936 Bien implanté en Oranie parmi les travailleurs des transports ce sera le seul parti composé d’européens et qui fatiguera à « s’algérianiser ». Il contrôle le journal « l’Alger républicain » et il prêche une Algérie rattachée à la France et c’est pour cela qu’il se heurte au mouvement radical. La plupart d’entre eux s’inscriront au FLN (Front de Libération Nationale) en 1956. Mouvement radical né à Paris en 1926 ENA L’ENA est le seul parti à réclamer ouvertement l’indépendance de l’Algérie depuis juin 1926. Soutenu par le PCF et guidé par Messali Hadj il proclame l’indépendance des 3 pays : Tunisie, Maroc et Algérie et l’unité de l’Afrique du nord « Le peuple algérien qui est sous domination française depuis 1 siècle n’a plus rien à attendre de la bonne volonté française ». Accusée de propagande subversive l’ENA est dissoute en 1929 pour réapparaitre en 1933 redoublant son activité de propagande et suscitant un sens d’appartenance à une cause qui éclatera en 1936 suite à la victoire du FP (parti communiste français) « La stupidità deriva dall’avere una risposta per ogni cosa. La saggezza deriva dall’avere, per ogni cosa, un BUONA domanda” (Milan Kundera)