Chapitre 15
Imagerie musculosquelettique – Pathologies locorégionales, 2e édition
© 2017, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 337
Chapitre 15
PLAN DU CHAPITRE
Arthrose atlanto-axoïdienne (C1-C2) ........ 337
Arthrose cervicale moyenne ou inférieure .... 338
Névralgie cervicobrachiale ................. 339
Myélopathie cervicarthrosique ............. 343
Maladie d'Hirayama ...................... 347
Hyperostose vertébrale ................... 348
Ossification du ligament longitudinal
postérieur .............................. 352
Spondylolyse ............................ 353
L'arthrose est fréquente au rachis cervical. Dans les facteurs
favorisants, on citera l'âge, le sexe féminin, le surpoids, les
traumatismes et microtraumatismes et certaines prédis-
positions génétiques [52, 129, 176, 202]. La cervicarthrose
n'est que rarement associée à une symptomatologie clinique
significative, ce qui doit inciter à la prudence lors de l'inter-
prétation des examens radiologiques [149]. Elle représente
néanmoins la principale étiologie de cervicalgie et d'impo-
tence fonctionnelle.
Arthrose atlanto-axoïdienne
(C1-C2)
Elle est fréquente en raison notamment de la très grande
mobilité de ce segment rachidien (40 à 70 % de la rotation
cervicale totale) [11]. Elle peut être latérale, diane ou
mixte [58].
Arthrose atlanto-axoïdienne latérale
Elle peut affecter des sujets jeunes en cas de microtraumatismes
répétés [39] mais le plus souvent, il s'agit de femmes âgées (trois
quarts des cas), notamment polyarthrosiques (incidence de
5,4% vers 60ans, pouvant atteindre 18,2 % à 90ans) [206].
Les patients sont asymptomatiques ou présentent des
cervicalgies, et notamment une névralgie d'Arnold (dou-
leurs intenses à type de brûlures ou de décharges électriques
unilatérales de la région rétromastoïdienne, sous-occipitale
et cervicale supérieure). Ces douleurs, qui irradient parfois
au vertex ou à l'œil, peuvent être spontanées ou déclenchées
par les mouvements d'extension et de rotation homolatérale
de la tête, ou par une pression locale. Elles témoignent de
l'atteinte du nerf grand occipital (nerf d'Arnold), nerf mixte
correspondant au rameau dorsal de C2. Ce nerf contourne
l'articulation C1-C2 latérale et se dirige vers l'arrière autour
de la partie basse du muscle oblique inférieur de la tête
(fig.15.1) [21, 31, 37]. Les patients peuvent également p-
senter une limitation de la rotation de la tête, une sensation
vertigineuse, voire une surdité unilatérale (compression de
la trompe auditive par un ostéophyte).
Le retard diagnostique est fquent. Sur le clic de
face, bouche ouverte et au scanner, on recherche un pin-
cement de l'interligne C1-C2 latéral (fig.15.2) avec ostéo-
condensation sous-chondrale, ostéophytose et parfois
subluxation latérale ou rotatoire, voire antérieure dans les
lésions évoluées s'accompagnant d'une rupture du ligament
transverse. Un œme sous-chondral peut être obser
en IRM. L'arthrose prédomine souvent sur l'une des deux
articulations, en association ou non à une arthrose atlanto-
axoïdienne médiane.
Discopathies dégénératives
cervicales
L. Scarciolla, S. Henry, P. Chastanet, A. Cotten
Fig.15.1 Schéma du nerf grand occipital (d'Arnold). C2: rameau
dorsal de C2 ; muscles petit droit postérieur de la tête (PD), grand droit
postérieur de la tête (GD), oblique supérieur de la tête (OS), oblique
inférieur de la tête (OI), splénius de la tête (S), semi-épineux de la tête
(SE) et trapèze (T).
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338 Partie II. Colonne vertébrale
Les douleurs, lorsqu'elles sont rebelles aux thérapeu-
tiques classiques (minerve, anti-inflammatoires non sté-
roïdiens, kinésithérapie) [159], peuvent ficier d'une
ou de plusieurs infiltrations de corticoïdes, ce qui permet
en outre de confirmer l'origine des douleurs. L'infiltration
atlanto-axoïdienne latérale peut être alisée en scanner
(technique la plus curisée) sur un patient en procubitus,
en délordose maximale, la tête tournée du côté à infiltrer.
Elle est plus délicate à aliser sous contrôle scopique,
sur un patient assis, la bouche ouverte, en cattérisant
l'interligne préalablement gagé. Une aiguille (type PL)
est introduite par voie postérieure parasagittale avec un
point d'entrée cutané en regard de C3 ou C3-C4, un trajet
ascendant et une aiguille qui ne doit jamais monter plus
haut que l'interligne C1-C2 latéral afin de pas léser l'artère
vertébrale, principal risque de la technique (fig.15.3) [199].
L'injection de produit de contraste in situ est indispensable
avant l'infiltration. Un scanner ou une IRM est conseillé(e)
avant ce geste afin de détecter d'éventuelles variations de
position de l'artère vertébrale.
Dans la névralgie d'Arnold favorisée par l'arthrose
atlanto-axoïdienne latérale, l'infiltration du nerf grand
occipital peut être réalisée sous contrôle TDM ou écho-
graphique lors de son passage entre les muscles oblique
inférieur et semi-épineux de la tête (fig.15.4) [31, 56, 80,
118]. L'injection de toxine botulinique a également été
propoe dans cette indication [118]. En cas d'efficacité
insuffisante, une arthrodèse C1-C2 peut être indiquée
[39].
Arthrose atlanto-axoïdienne médiane
Elle est fréquente (1,4 % des cas chez l'adulte jeune, 50 % des
sujets de la soixantaine, plus de 90 % des cas après 88ans)
[11, 100, 205]. Elle est le plus souvent asymptomatique mais
elle peut être responsable de cervicalgies occipitales [53, 144].
En radiographie (profil) et surtout en scanner (fig.15.5), on
peut objectiver un pincement de l'interligne odonto- atloïdien,
des ostéophytes, des géodes odontoïdiennes et/ou de l'atlas
qui peuvent fragiliser l'os (risque de fracture du processus
odontoïde) [11, 15, 126], et parfois un phénomène du vide intra-
articulaire et/ou des calcifications du ligament transverse [100].
En l'absence d'efficacité des traitements anti-inflamma-
toires classiques, on peut réaliser une infiltration des articu-
lations atlanto-axoïdiennes latérales (cf. supra) puisqu'elles
communiquent souvent avec l'articulation atlanto-axoïdienne
médiane (infiltration bilatérale en l'absence de communi-
cation). L'injection directe de l'interligne atlanto-axoïdien
médian est rarement réalisée sous contrôle scopique ou TDM.
Arthrose cervicale moyenne
ouinférieure
Les phénomènes dégénératifs susceptibles de rétrécir le canal
vertébral et les foramens intervertébraux sont fréquents chez
les sujets asymptomatiques [9, 139, 176]. Ils commencent
à être détectés vers l'âge de 25–30ans et affectent 50 % des
sujets de plus de 50ans et 75 % de ceux de plus de 65ans [147,
191, 196]. Seul un faible pourcentage de ces sujets développe
une symptomatologie clinique significative (très mauvaise
corrélation clinicoradiologique). Les symptômes peuvent
consister en une cervicalgie postérieure chronique ou inter-
mittente dont l'origine est probablement multifactorielle:
douleur discogénique et/ou secondaire à l'arthrose zygapo-
physaire, à l'altération de l'os sous-chondral des plateaux ver-
braux et au dysfonctionnement ligamentaire ou des muscles
paravertébraux [145]. Ces douleurs peuvent s'accompagner
d'une sensation de craquements lors de la mobilisation du
rachis. Des complications sont possibles: troubles neurolo-
giques secondaires à la compression de l'artère vertébrale par
Fig.15.2 Arthrose atlanto-axoïdienne latérale droite évoluée
avec ostéocondensation sous-chondrale.
Fig.15.3 Infiltration sous scopie de l'interligne atlanto-axoïdien
latéral droit.
Fig.15.4 Siège de l'infiltration sous scanner du nerf grand occi-
pital lors de son passage entre les muscles oblique inférieur de
la tête (OI) et semi-épineux de la tête (SE).
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Chapitre 15. Discopathies dégénératives cervicales 339
l'uncarthrose, dysphagie ou paralysie des cordes vocales en
cas d'ostéophytose exubérante [42, 48, 187], névralgie cervi-
cobrachiale et myélopathie cervicarthrosique [191].
En imagerie, on recherche des signes (fig.15.6):
de discarthrose: pincements discaux, osophytes mar-
ginaux antérieurs et postérieurs des plateaux vertébraux,
perte de la lordose physiologique avec aspect rectiligne
ou cyphotique du rachis cervical. Ces signes prédo-
minent aux étages C5-C6 et C6-C7 ;
d'uncarthrose: ostéophytes des uncus qui s'hypertro-
phient et s'éversent, rétrécissant ainsi les foramens interver-
braux. Ces signes sont associés à ceux de la discarthrose ;
d'arthrose zygapophysaire: sclérose sous chondrale,
ostéophytose, possible spondylolisthésis (habituellement
antérieur, se majorant parfois en flexion cervicale) et/ou
kyste zygapophysaire. Cette arthrose s'observe plutôt de
C3-C4 à C5-C6, souvent au-dessus d'une discarthrose
entraînant un bloc fonctionnel [151].
Ces différents éléments peuvent être objectivés en radio-
graphie (face profil, trois quarts) et précisés si nécessaire en
scanner et en IRM (cf. ci-après).
En cas de cervicalgies isolées, le traitement consiste
le plus souvent en une prise en charge dicamenteuse
symptomatique, une rééducation avec kinésithérapie et un
apprentissage des gestes d'hygiène du cou à titre préventif.
Une immobilisation par collier peut être prescrite en cas de
crise aiguë. Les infiltrations zygapophysaires sont indiquées
en cas de douleurs localisées. Elles peuvent être alisées
par voie postérolatérale sous contrôle scopique (qui permet
de bien enfiler l'interligne) ou TDM. L'étage douloureux à
infiltrer doit être bien précisé par le clinicien car ce n'est pas
forcément le plus arthrosique. Des manipulations peuvent
également être réalisées par des professionnels expérimen-
tés en l'absence de signes radiographiques majeurs.
Névralgie cervicobrachiale
Épidémiologie et étiologie
La vralgie cervicobrachiale (NCB) est fréquente (inci-
dence annuelle d'environ 1 à 2‰), avec une légère prédomi-
nance masculine [184]. Il s'agit essentiellement d'adultes en
période d'activité professionnelle [105], avec par conséquent
des répercussions socio-économiques importantes. Les fac-
teurs de risque sont représentés par l'origine caucasienne, le
tabagisme et un antécédent de radiculopathie lombaire [70,
83, 197, 198]. Parmi les autres facteurs proposés, on citera
le port d'objet lourd, les plongeons, les vibrations pendant
la conduite et le golf [70, 83]. L'incidence d'un traumatisme
déclenchant est faible [70].
L'origine de la radiculalgie est [70, 88]:
rarement purement discale ; il s'ensuit une action méca-
nique (compression avec ischémie locale du nerf) et
chimique (cascade pro-inflammatoire clenchée par le
noyau pulpeux sur le nerf faisant notamment interve-
nir le facteur de nécrose tumorale alpha (TNF-α), l'in-
terleukine6 (IL-6) et les métalloprotéinases matricielles
(MMP) [75, 135, 183]. On rappellera que les fibres col-
lagènes de l'anneau fibreux cervical ne sont pas agencées
en lamelles concentriques comme au rachis lombaire
[6]. Elles forment en avant une masse fibreuse épaisse en
forme de croissant tandis qu'en arrière, l'anneau fibreux
ne possède qu'une fine couche de fibres verticales, parti-
culièrement déficiente à sa partie postérolatérale ;
beaucoup plus souvent disco-ostéophytique (uncodis-
carthrose), le aux remaniements génératifs qui se
développent avec l'âge [29]. La fragmentation des protéo-
glycanes et la déshydratation progressive des disques inter-
vertébraux aboutissent à une diminution de la hauteur
discale. Celle-ci entraîne une diminution de la hauteur des
foramens intervertébraux et une majoration des sollicita-
tions mécaniques sur les corps vertébraux et les articula-
tions uncovertébrales qui s'hypertrophient, rétrécissant
ainsi davantage les foramens intervertébraux [19, 70]. Une
prédisposition génétique à cette dégénérescence discale a
parfois été évoquée dans la litrature [117].
a
b
c
Fig.15.5 Arthrose atlanto-axoidienne médiane (odonto-atloï-
dienne) en radiographie (a), et scanner (b, c) (patients différents).
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340 Partie II. Colonne vertébrale
Clinique
L'examen neurologique sensitif, moteur et réflexe est essen-
tiel pour identifier l'origine rachidienne de la NCB et la
ou les racine(s) comprimée(s) (tableau15.1). La NCB est
habituellement unilatérale. Elle se traduit par une douleur
cervicale qui peut être associée de façon caractéristique à
un trajet douloureux de topographie radiculaire intéres-
sant le membre supérieur (fig.15.7). Ce dernier élément
peut cependant manquer. La douleur est très évocatrice
lorsqu'elle se prolonge jusqu'aux doigts. Elle est habituelle-
ment progressive, lancinante, accentuée par la mobilisation
du rachis cervical (notamment en extension) ou du membre
supérieur [66]. Elle est souvent nocturne et insomniante,
notamment en cas de compression du ganglion spinal [188].
Les paresthésies distales sont fréquentes et auraient une
meilleure valeur topographique que la douleur. L'abolition
d'un réflexe ostéotendineux reste le signe clinique le mieux
corrélé aux constatations chirurgicales [203]. Les troubles
vasomoteurs sont exceptionnels et doivent orienter vers
d'autres étiologies.
Lors de l'examen physique, certains tests peuvent repro-
duire les symptômes et confirmer le diagnostic:
le test de Spurling: l'examinateur comprime le vertex
du patient de haut en bas et tourne la tête du patient du
côté du conflit discoradiculaire. Ce test est très spécifique
mais peu sensible [148, 178] ;
le test d'abduction de l'épaule, qui doit diminuer la dou-
leur en diminuant la tension sur le nerf ;
la manœuvre de Valsalva, qui augmente la douleur ;
et divers tests visant à augmenter la traction du nerf.
L'examen clinique peut permettre d'éliminer une arthro-
pathie zygapophysaire (rotation limitée du rachis cervical)
[184]. Il permet également:
ab
cd
Fig.15.6 Arthrose cervicale inférieure (patients différents). a.Discarthrose pluriétagée avec pincement discal et ostéophytose marginale ;
notez l'ostéophyte postérieur associé (flèche). b.Discarthrose et arthrose zygapophysaire pluriétagée avec antélisthésis de C4 et à un moindre
degré des vertèbres adjacentes. c.Uncarthrose pluriétagée de face (flèches). d.Uncodiscarthrose (flèches blanches) rétrécissant le foramen C6-C7
droit ; notez la diminution de hauteur du foramen (pincement discal associé) et l'ostéophytose zygapophysaire supérieure (flèche noire).
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Chapitre 15. Discopathies dégénératives cervicales 341
de détecter une souffrance médullaire ou de l'artère
vertébrale (cf. infra) [153, 182] ;
d'éliminer une compression nerveuse périphérique,
notamment du nerf médian ou ulnaire. Celle-ci peut cepen-
dant coexister, c'est le phénomène de la compression étagée
ou « double crush syndrome », une compression proximale
sensibilisant le nerf à une compression plus distale ;
d'éliminer une pathologie de l'épaule (une infiltration
bursale ou intra-articulaire peut être utile en cas de doute) ;
d'éliminer d'autres diagnostics différentiels: douleurs
d'origine cardiaque, zona, syndrome de Parsonage-Turner,
syndrome de la traversée cervicothoracobrachiale, etc.
Particularités selon l'étiologie
Hernie discale
Elle est rare et affecte surtout les patients jeunes [181]. Il
s'agit habituellement d'une protrusion discale postérieure
médiane ou postérolatérale (fig.15.8). Elle sge le plus
C7
C8
T1
C5
C3 C3
C5
T2
T1
C6
T6
T8
T9
C6
C8
C7
T7
T6
T5
T5
C4 C4
T4 T4
T2
T3 T3
Fig.15.7 Schéma de l'innervation radiculaire sensitive
du membre supérieur.
ab
Fig.15.8 Hernie discale postérolatérale droite C6-C7 responsable d'une névralgie cervicobrachiale C7 droite: coupes sagittale (a) et
axiale (b) pondérées en T2.
Tableau15.1 Systématisation de l'atteinte motrice, sensitive et réflexe.
Racine Déficit moteur typique Déficit sensitif/Douleurs Réflexe ostéotendineux
C5 Deltoïde Face latérale du bras Bicipital
C6 Biceps, extension du poignet Face latérale de l'avant-bras, pouce et index Styloradial
C7 Triceps brachial, flexion du poignet Majeur Tricipital
C8 Flexion des doigts Annulaire et auriculaire Ulnopronateur
T1 Intrinsèques de la main Face médiale de l'avant-bras
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