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Les conventionnels ont perçu ce débat. Cependant, ils n'ont pas
spécialement mandaté LINDET pour explorer la question puisque,
comme nous l'avons dit, ils ont chargé le comité de législation présidé
par MAIHLE, dont Robert LINDET faisait certes partie, d'élaborer un
rapport préliminaire sur ce thème servant de base à une discussion en
Assemblée.
Certains d'entre eux comme SAINT JUST dans son discours du
13 novembre 1792 ont opté pour la thèse politique: " je dis que le Roi doit
être jugé en ennemi... Nous avons moins à le juger qu'à le combattre@. " On semble
chercher une loi qui permette de le tuer...Pour moi, je ne vois pas de milieu: cet
homme doit régner ou mourir" ou encore "Le procès doit être fait à un Roi, non
point pour les crimes de son administration, mais par celui d'avoir été Roi...On ne
peut régner innocemment". "Citoyens, le tribunal qui doit juger Louis n'est point un
tribunal judiciaire: c'est un conseil, c'est le peuple, c'est vous et les lois que nous
avons à suivre sont celles du droit des gens...Louis a combattu le peuple: il est
vaincu. C'est un barbare, c'est un étranger prisonnier de guerre."
On notera cependant que SAINT JUST ne rejette pas le principe
d'un procès: il veut en faire un procès politique et non un procès
judiciaire.
Poussant le raisonnement, ROBESPIERRE, qui s'exprime à la
Convention le 3 décembre, rejette en bloc toute idée de procès. Louis
doit être condamné à mort immédiatement, sans procès car les formes
n'importent pas, seul le résultat compte. "Il n'y a point de procès à faire, Louis
n'est pas un accusé. Vous n'êtes point des juges...Vous n'avez point une sentence à
rendre pour ou contre un homme, mais une mesure de salut public à prendre."
Les arguments qu'il développe sont les mêmes que ceux de
SAINT JUST. La pertinence de son réquisitoire est évidente au lecteur:
ROBESPIERRE, comme SAINT JUST, s'expriment politiquement et
réclament une solution politique au problème politique que pose Louis
XVI. Les hommes de la Révolution ont combattu la monarchie ils l'ont
vaincue. Point n'est besoin de sentence judiciaire pour entériner ce fait.
Louis doit disparaître parce qu'il incarne le régime ancien défait.
ROBESPIERRE poursuit: "Le procès du tyran c'est l'insurrection; son jugement,
c'est la chute de sa puissance; sa peine, celle qu'exige la liberté du peuple."
Les conventionnels, encore dominés pendant les débats
préliminaires par la Gironde, comme leurs prédécesseurs anglais un
siècle et demi plus tôt, ont cependant préféré le procès à l'exécution
sans jugement.