Jean-Luc GALIZIA. Mai 2001
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Introduction
De la crise au conflit.
Le mot crise vient du grec krisis, décision. Le verbe grec krinein signifie
séparer, choisir, décider, juger. Le mot conflit a deux acceptations.
La première vient du latin conflictus qui signifie choc. C’est la lutte, le combat.
La deuxième acceptation signifie la rencontre de sentiments ou d’intérêts contraires
qui s’opposent.
Une période de crise signifie généralement une aggravation dans l’évolution
des évènements, des choses et des idées, parce que l’état antérieur n’est plus
adapté à la nouvelle situation. Ainsi, par définition, une crise appelle une série de
décisions, d’actions destinées à la résoudre. L’instant de la crise est un moment
d’incertitude. Personne n’est en mesure de savoir si elle va aboutir à un conflit, si elle
débouchera sur une régression, ou si un nouvel équilibre favorable résultera d’une
bonne décision.
La crise est un signal qui prévient qu’un déséquilibre commence à se produire.
La crise, si elle doit être considérée comme l’inverse d’un changement volontaire,
s’achèvera quoi qu’il en soit, par un changement.
En effet, la crise dépeint une situation en perte de sens, et menace de rupture toute
structure ou organisation.
Lorsque chaque partie ne peut décider d’une bonne solution pour réduire ou
supprimer les différends, le conflit ouvert menace.
Une crise débouche nécessairement sur une régression, sur une évolution ou sur un
conflit.
La régression signifie le retour à un état antérieur avec des pertes diverses :
perte de statut, perte de responsabilité, perte d’avantage…
L’évolution est accompagnée d’un accroissement de statut, de rémunération,
d’intérêt dans le travail, de reconnaissance, d’opportunité nouvelle…
Le conflit, lorsque les protagonistes choisissent de s’y engager, c’est qu’ils
estiment nécessaire de créer un nouveau rapport de force, ou du moins de
l’accentuer.
Quand les parties adverses ne peuvent plus s’entendre, qu’elles sont prêtes à
user de nouvelles méthodes pour se faire entendre ou comprendre ; quand les
individus ou les groupes qui étaient en crise ne sont plus disposés à faire des efforts
pour paraître complaisants ou courtois : le temps des politesses et des civilités est
révolu, et les masques tombent.
Le conflit est prêt à éclater.
Notre culture occidentale véhicule des représentations négatives du conflit,
nous y associons des concepts de violence, d’agressivité, de gâchis.
Les conflits font peurs, ils inquiètent, ils menacent un certain ordre et une certaine
routine.
On tente de les éviter, de les contourner, ou pour le moins de s’en tenir à distance.
Les conflits deviennent surtout régressifs lorsque les protagonistes perdent de vue
l’enjeu pour se crisper sur des questions de personnes, et sur des positions.