Revue Médicale Suisse
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5janvier 2008 00
Deux résultats a priori encourageants
en cancérologie
nommée HB-19. Cette molécule cible spé-
cifiquement la nucléoline de surface, une
protéine nécessaire à la croissance des
cellules tumorales mais également à l’an-
giogenèse. Ces résultats ont été publiés
le 18 juin 2008 sur le site de PLoS ONE.2
«La nucléoline est une protéine essen-
tiellement connue comme étant présente
dans les noyaux des cellules. Mais les
travaux réalisés au cours de ces dernières
années par l’équipe d’Ara Hovanessian
ont permis de démontrer qu’elle est éga-
lement exprimée à la surface cellulaire où
elle fonctionne comme un récepteur pour
des facteurs de crois-
sance, explique-t-on
auprès du Cnrs. L’ex-
pression de la nucléoli-
ne à la surface cellulaire
est particulièrement éle-
vée dans les cellules
activées en multiplica-
tion rapide, comme les cellules tumorales,
et dans les cellules endothéliales impli-
quées dans la formation d’un réseau de
capillaires sanguins entourant les tumeurs.
Ces données suggèrent que la nucléoline
exprimée à la surface cellulaireest une
cible importante et prometteuse pour la
thérapie anticancéreuse.
Ara Hovanessian et Jean-Paul Briand
avaient conçu et synthétisé chimiquement
la molécule HB-19 en 1998 comme inhi-
biteur de l’entrée du VIH dans les cellules
cibles. C’est la seule molécule connue à
ce jour pour intervenir directement sur la
nucléoline de surface avec laquelle elle
s’associe de façon spécifique, entraîne
l’internalisation du complexe et la dégra-
dation de cette protéine multifonctionnelle.
Les chercheurs du Cnrs ont aujourd’hui
mis en évidence qu’HB-19 bloque non
seulement la multiplication des cellules
issues de différentes tumeurs humaines
(comme le cancer de la prostate, du sein,
du côlon ou le mélanome), mais égale-
ment l’angiogenèse tumorale. Cette dua-
lité d’action vis-à-vis des cellules tumo-
rales et de l’angiogenèse fait d’HB-19 un
puissant agent anticancéreux.
Ces résultats ont été confirmés à l’ai-
de d’un modèle expérimental du cancer
du sein chez des souris greffées avec
des cellules tumorales d’origine humaine:
l’administration d’HB-19 par voie sous-
cutanée ou intrapéritonéale à 2-3 jours
d’intervalle pendant 30 jours a entraîné
une inhibition significative de la progres-
sion de tumeurs, voire même dans plu-
sieurs cas l’éradication de cellules tumo-
rales.
«En plus de l’efficacité de son action
antitumorale sur le développement de car-
cinome mammaire humain chez la souris,
HB-19 ne présente aucune toxicité tissu-
laire, contrairement à de nombreux autres
traitements couramment utilisés en clini-
que, ajoute-t-on auprès du Cnrs. Après
interaction avec la nucléoline de surface
etinternalisation dans les cellules, HB-
19 n’entrepas dans le noyau, ce qui per-
met d’expliquer l’absence d’effets secon-
daires indésirables comme ceux couram-
ment associés à la chimiothérapie et à la
radiothérapie. Autre avantage de cette
molécule :très soluble dans les milieux
physiologiques, sa synthèse est réalisable
àl’échelle industrielle par les techniques
conventionnelles de chimie peptidique.»
La société pharmaceutique ImmuPhar-
ma (société à la fois française, britannique
et suisse) qui a obtenu la licence d’ex-
ploitation exclusive a d’autre part d’ores et
déjà réalisé le développement d’une fa-
mille de composés de deuxième généra-
tion plus efficaces qu’HB-19. Elle a aussi
débuté les développements précliniques
réglementaires afin de pouvoir commen-
cer une étude clinique de phase I au dé-
but de l’année 2009.
Jean-Yves Nau
Sans doute n’est-il pas toujours sim-
ple de situer avec précision la por-
tée des recherches fondamentales
ou appliquées menées dans le champ
dela cancérologie. On ne saurait pour
autant passer sous silence certains des
résultats qui apparaissent marquer une
étape importante. Ainsi deux informations
récentes semblent aujourd’hui devoir être
rapportées.
La première est la publication, dans
les colonnes du New England Journal of
Medicine,daté du 19 juin, du résultat
obtenu chez un homme
de 52 ans atteint d’une
forme de mélanome
avec métastase pulmo-
naire.1Des spécialistes
du Fred Hutchinson
Cancer Research Cen-
ter et de l’Université de
Washington (Seattle) ainsi que du Ludwig
Institute for Cancer Research (New York
Branch) et du Memorial Sloan-Kettering
Cancer Center (New York) ont mis au point
une forme de thérapie cellulaireautolo-
gue à partir des lymphocytes T CD4+ du
malade ayant une spécificité pour anti-
gène NY-ESO-1 associé au mélanome.
Après identification et expansion in vitro
de ces lymphocytes, ils ont transfusé cinq
milliards de ces cellules chez le malade.
Certaines des cellules ont subsisté au
moins 80 jours dans l’organisme du ma-
lade et bien que seulement 50 à 75% des
cellules de la tumeur du patient réagis-
saient à l’antigène NY-ESO-1, la totalité
du cancer a régressé après l’injection.
Les auteurs de ce travail expliquent
avoir obtenu en deux mois une dispari-
tion des images tumorales, la rémission
étant aujourd’hui d’une durée de deux
ans. Selon eux, il s’agit du premier cas
démontrant dans cette indication à la fois
l’efficacité et l’innocuité d’une thérapie cel-
lulaire autologue. «Nous avons été surpris
par les effets anti-tumeur de ces cellules
TCD4 et de la durée de leur réponse
contre le cancer, a expliqué le Dr Cas-
sian Yee. Nous avons eu un succès avec
ce malade mais il faut encoreconfirmer
l’efficacité de cette thérapie dans une étu-
de plus étendue.»
Le second résultat, plus fondamental
aété obtenu par trois équipes du Centre
national français pour la recherche scien-
tifique (Cnrs) conduites par Ara Hovanes-
sian, Jean-Paul Briand et José Courty qui
ont démontré pour la premièrefois l’effi-
cacité anticancéreuse d’une molécule, dé-
«… il s’agit du premier
cas démontrant à la fois
l’efficacité et l’innocuité
d'une thérapie cellulaire
autologue …»
avancée thérapeutique
Bibliographie
1Hunder NN, Wallen Hl, Cao J, Yee C, et al.
Treatment of metastatic melanoma with autolo-
gous CD4+ T cells against NY-ESO-1. N Engl J
Med 2008;358:2698-703.
2Destouches D, El Khoury D,Hamma-Kourbali
Y, Hovanessian AG. Suppression of tumor growth
and angiogenesis by a specific antagonist of the
cell-surface expressed nucleolin. PLos ONE, 18
juin 2008.
1626 Revue Médicale Suisse
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