étude guidée Marie, Apollinaire

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ANALYSE LINÉAIRE
Marie
Marie, sans doute Marie Laurencin, artiste peintre (1907-1912 )
ou bien Maria Dubois, amour de jeunesse (1899)
ou bien les deux ? Marie, c’est LA femme, toutes les femmes
(Vierge Marie et anagramme d’AIMER (Ronsard))
poème à la tonalité pas toujours facile à cerner
> Apollinaire renouvelle les thèmes lyriques avec une tonalité
qui lui est propre
>> utilise pour cela la forme qu'il préfère!: le quintil (5 ici)
>>> composé de 5 strophes (enchaînement pas toujours logique)
En quoi Apollinaire renouvelle-t-il le genre traditionnel
de la plainte amoureuse en poésie ?
mouvements du texte - l. 1- 10 douce rêverie incertaine
- l. 11-20 confuse angoisse
- l. 21-25 l’espoir du dépassement
I) Douce rêverie incertaine, lyrique amour
- Marie
= presque la seule information que l’on a sur cette femme
> inspiratrice, oui ; mais aussi destinataire
>> premier mot du premier vers : ‘Vous’ (il s’adresse à elle)
- l’interpelle même
= ‘Y danserez-vous mère-grand’ (v.2)
- semble bien la connaître, évoquant son passé (v.1)
= souvenirs communs & heureux d’une danse (v.3)
ainsi 3 premiers vers plutôt gais (rythme ternaire de la maclotte)
termes légers ‘petite fille’ I ‘mère-grand’ I ‘sautille’ I ‘danser’
(connotation heureuse, presque comme un conte de fées)
mais question du vers 2 annonce déjà une projection difficile
> premier quintil traduit l'incertitude d'une rêverie oscillant du
souvenir émerveillé à l'espérance, coloré d'impatience ou
d'inquiétude
ANALYSE LINÉAIRE
Marie
- temps des 3 premiers vers très intéressants à analyser
= passé d’abord (souvenir), futur ensuite (projection)
> présent (‘C’est’/‘sautille’)
= traduisant son désir d’unir les deux, le passé et l’avenir
- futur reprend au vers 4 assonance en -o-
= perspective triomphante ‘Toutes les cloches sonneront’
= pour..? le mystère plane, mais laisse présager le meilleur
v.5 futur interrogatif, l’incertain arrive sans prévenir
= anacoluthe (rupture dans la construction de la phrase)
> toute la légèreté passée est rompue
>> la femme aimée n’est plus là, et l’amoureux s’impatiente
>>> inquiet, il apostrophe la femme par son prénom (‘Marie’)
- retour au présent pour le 2e quintil (confusion garantie)
= traduit la distance et l’isolement du poète
- se posait des questions en première strophe (sans ‘?’)
> n’a pas les réponses en 2e strophe
(des ‘masques silencieux’, ‘une musique si lointaine’)
( sons vifs ‘clo’ du 1er) adverbe d’intensité
ici la ‘musique’ et les ‘masques’ sont ceux d’un bal masqué
> référence à l’amour naissant entre les deux êtres
>> s’ils ont pu être animés, c’est bien du passé, que le poète
se remémore, encore empli de nostalgie
ainsi fameux mélange de bonheur et de souffrance (nostalgie)
> poète regarde fuir l’amour, déjà lointain, qui ne sera plus
v.6-8 léger chuchotement de l’allitération en -s- & assonance en -i-
(bruit et la réalité de cette fête se perdent..)
- douce nostalgie renforcée par les diérèses rimantes
= ‘silencieux’ & ‘délicieux’ en début et fin de quintil (v.6&10)
- paroxysme du lyrisme au vers 9
= déclaration d’amour dans le seul alexandrin du poème
introduite par l’adverbe ‘Oui’ (mise en valeur du contenu)
ANALYSE LINÉAIRE
Marie
ici ‘à peine’ au double-sens confus mais volontaire
- amour effleuré, peu de sentiments (dans la logique du ‘mais’)
- se rapproche plutôt du sens ‘avec peine’ (archaïsme)
(en écho direct avec le ‘mal délicieux’ du vers suivant)
- dernier vers du mouvement résume tout à lui seul
= antithèse du ‘mal délicieux’ pour un amour(eux) souffrant
> un plaisir trouvé dans la douleur (prolongé par la diérèse)
une nostalgie dont il semble ne pas parvenir à se défaire
Ce premier mouvement reprend mais renouvelle le genre lyrique. Le
temps est on ne peut plus confus, les allers et retours, incessants, parce
que c’est l’incertitude inquiète qui domine. Le poète attend et se
tourmente, il veut comprendre mais ne trouve pas réponses à ses
questions. Il est perdu mais sait une chose : il souffre, et il affirme sa
souffrance, à la manière des romantiques. Lyrisme amoureux et lyrisme
mélancolique se mêlent, l’évocation heureuse du passé n’était rien
d’autre que de la nostalgie. Ce sentiment à la fois si mélancolique et si
beau, dans lequel se perd le poète, dans un ‘mal délicieux’.
La musique des premiers vers se dissipe au 2e quintil et la souffrance
prend le dessus, dans une danse lente et mélancolique tandis que le
poème prend une tournure élégiaque.
II) Confuse angoisse d’un amour(eux) perdu
- 2e mouvement tjrs aussi lyrique
= inquiétude du début est alors justifiée
> tout passe, tout change
- poète ne s’adresse plus à Marie, qui s’éloigne, dans le 3e qtil
= cependant métaphoriquement représentée par des images
cf. verbes de mouvement (’s’en vont’, ‘passent’, ‘changeant’)
images de brebis et de soldats (parallélisme vers 11 & 13)
> spécificités d’Apollinaire!
ainsi dans un paysage de neige lié au regret, à la perte, à l’absce
> "brebis" & "soldats" signifient le passage (// impressionnisme)
Apollinaire exprime la douleur de l’amour perdu par une série
d’images fragmentées, qui illustrent la désunion amoureuse, les
déchirements intimes, et renforcent la dimension élégiaque du poème.
ANALYSE LINÉAIRE
Marie
- poète va encore plus loin en filant 2 métaphores
= ‘flocons de laine’
> la laine devient neige et les brebis deviennent flocons
La nature, thème lyrique à part entière ne manque pas à l’appel.
- rimes riches & équivoquées des vers 11-13
= Apollinaire poursuit ses jeux poétiques
& se questionne encore un peu plus
> impression de rapidité // changements des sentiments
- vertige du rythme final du quintil (v.13-15)
= ‘Que n’ai-je… que sais-je’ (2 répétitions & 2 questions écho)
> poète envahi par le désarroi
- désarroi se prolonge dans le 4e quintil
= questionnement n’en finit pas (‘Sais-je’ v.16)
> répétition intégrale du v.16 au v.18 le renforce encore plus
>> comme un refrain appuyé, celui d’une chanson
- le poète ne connaîtra pas le futur de Marie (v.16)
= spectacle désolant de la désagrégation d'un être aimé
> être dépouillé comme un paysage d’automne par le temps
ici seule précision sur Marie de tout le poème (v.17)
= comparaison de ses cheveux avec la mer
cf. La Chevelure, de Baudelaire (‘toison moutonnante’)
+ simple évocation des mains, sans en dessiner la forme (v.19)
= assimilées aux feuilles de l’automne (// métaphore Signe)
ainsi femme associée à l’automne, saison de la mort
> mort de l’amour (‘aveux’ v.20)
ccl° depuis le 3e quintil, toute vie s’évanouit
> mort de la nature, mort des hommes (soldats)
mort de l'amour, mort de l'identité du poète (‘que sais-je’)
Marie n’est déjà plus là, elle s’exprime à travers la nature (saisons et
paysages), dans un profond lyrisme, mais à sa façon, plus que
moderne (musicale et volontairement confuse).
ANALYSE LINÉAIRE
Marie
Le poète est perdu, et chaque vers retranscrit cette extrême
confusion. Le temps ne laisse dans les souvenirs que les bribes du passé
: les "masques" et non les participants à la fête ; "les flocons de laine”
et pas les brebis, ou encore les cheveux et les mains et non la femme
aimée. Ce sont seulement des métonymies, les souvenirs se
miniaturisent comme la faible partie d'une totalité qui échappe à la
mémoire. Le temps subsiste seulement par fragments et il passe, perçu
comme une transition depuis le début du poème, de la jeunesse à la
mort, de l’amour à la solitude. Il est fragile, comme l’existence.
Par une tonalité pathétique et lyrique, il nous entraîne dans sa
mélancolie et dans sa nostalgie du passé amoureux. Le souvenir le
raccroche à Marie, mais, comme elle, il s’éloigne avec le temps qui
passe.!
III) Une page se tourne, l’espérance pointe
- l'errance et la rêverie sont terminées
= poète nous situe dans un temps ultérieur (‘je passais’ v.21)
- ‘Un livre ancien sous le bras’ (v.22), quel livre ?
= l’histoire de leur amour, définitivement terminé (‘ancien’)
> semble alors vouloir tourner la page
- vers un dépassement de la souffrance ?
> ‘sous le bras’, il semble avoir repris les choses en main
- la peine est toujours là, mais elle est devenue poésie
> l'intarissable écoulement du fleuve évoque désormais l'infini
murmure de cette mémoire devenue chant poétique
- on ne peut s’empêcher de penser au Pont Mirabeau
= même métaphore filée du temps, pareil à la Seine
- espérance oui, car le poète prend sa revanche sur le temps
= ‘Quand donc finira la semaine’
> il fallait donc que tout meurt
pour que la poésie apparaisse et soit plus forte
>> en vient donc à souhaiter une fin plus rapide
ainsi ‘donc’ laisse penser que la souffrance peut trouver
conclusion avec la fin de la semaine
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