Mathews, Gordon (2015), African Logistics Agents and Middlemen as Cultural Brokers in Guangzhou, in: Journal of Current Chinese Affairs, 44, 4, 117–144 Article paru dans le Journal of Current Chinese affairs en 2015 Gordon Matthews : professeur et directeur du département d'anthropologie à l'Université de Hong Kong mots-clé : agent logistique, intermédiaire, courtier culturel, « low-end globalization », * Résumé : Cet article pose la question de l'adaptation des commerçants d'Afrique Subsaharienne à la ville de Canton en Chine, s'élevant approximativement au nombre de 20 000 personnes, et dont 30% sont des femmes. Matthews avance que les agents logistiques et les intermédiaires commerciaux africains jouent un rôle essentiel en tant que courtiers culturels pour ces commerçants. * Le concept de courtier culturel est peu utilisé bien qu'il soit selon Matthews essentiel à une analyse anthropologique de la globalisation. Propose une définition du terme « cultural broker » ou "courtier culturel" d'après Michie, Jezewski et Sotnik en 2001 et 2003 p.119-120 : une personne qui facilite le passage entre les frontières culturelles, l'acte de relier, de faire la médiation entre des personnes ou groupes de personnes de différents milieux culturels, dans l'objectif de réduire les conflits ou de produire du changement.1 * L'article explore le cas de dix agents logistiques/ intermédiaires issus du Kenya, du Nigeria, du Ghana et de la République démocratique du Congo (l'étude s'est déroulée sur un peu plus d'une année entre 2013-2014 et basée également sur des entretiens avec 200 commerçants africains). Les agents logistiques s'occupent notamment d'identifier les fabricants su rplace, d'organiser les transactions ainsi que la vérification et sle transport des marchandises commandées par les commerçants africains qui seront ensuite acheminées dans des containers vers l'Afrique. Matthews reprend ici le terme de « low-end globalization », globalisation d'en bas, pour qualifier ce régime de transactions 1 “a person who facilitates the border crossing of another person or group of people from one culture to another culture” (Michie 2003) p.120 the act of bridging, linking, or mediating between groups or persons of differing cultural backgrounds for the purpose of reducing conflict or producing change” (Jezewski and Sotnik 2001: 21) commerciales, soit le flux transnational de personnes et de produits impliquant de petites quantités de capital et des pratiques informelles et semi-légales de transactions, souvent attribuées au pays du Sud mais visibles partout dans le monde dans les faits. Le nombre réduit de structures institutionnelles officielles implique un fonctionnement où tout est basé sur les relations de confiance plutôt que sur des contrats ou des lois. En tant qu'agents logistiques en résidence prolongée, ces personnes aident leurs clients, souvent issus du même groupe ethnique ou de la même nationalité d'origine, à s'adapter à la vie chinoise en leur donnant des conseils d'ordre pratique et culturels au quotidien (où et comment se loger, se nourrir, démarches administratives, juridiques, qui accepte les pots-de-vin, etc.). Ils le font en partie pour des raisons de conscience civique (leurs clients les contactent à toute heure du jour et de la nuit, ils restent la plupart du temps la journée entière dans leur bureau, parfois ils les accueillent même dans leur propre appartement pour les épauler) et en partie pour garantir la fidélité de leurs clients et la prospérité de leur commerce. Malgré leurs propres opinions ambivalentes sur la Chine en tant que lieu de vie, ils jouent un rôle essentiel dans l'harmonisation des relations entre les clients africains et les fournisseurs chinois, endossant parfois le rôle de médiateur en situation de conflits commerciaux, et ce bien qu'ils ne se considèrent pas comme des courtiers culturels mais comme de simples hommes d'affaires. Leur action se limite cependant au fait qu'ils restent encore majoritairement dépendants de l'aide de leurs proches chinois pour certains aspects clés des transactions. p.130 ex : Ici 7 sur les 10 agents logistiques ne parlent pas bien la langue Chinoise, et 5 d'entre eux dépendent entièrement de leurs employés chinois, copines ou femmes chinoises pour de l'aide linguistique. Les courtiers culturels ne sont généralement pas chinois, bien qu'il s'agisse parfois de jeunes femmes chinoises anglophones employées par les agents logistiques. Matthews l'explique pour des raisons qui semblent liées : notamment en raison de la courte durée de séjour des commerçants, la barrière de la langue, (la majorité parlent des langues européennes très peu le chinois, et inversement), un certain racisme et la prégnance d'un sentiment de distance entre les Chinois et les personnes étrangères (la conception de l'identité chinoise serait basée sur des critères ethniques et non de citoyenneté nationale). Cependant il souligne également que, comme nous avions commencé à le voir au cours du séminaire du 24 mars dernier au sujet du développement de la ville de Canton qui l'amène aujourd'hui à être qualifiée d' « usine du monde » impliquant la multiplication des relations à l'international, Matthews note que depuis une dizaine d'années de plus en plus de chinois parlent la langue anglaise, française, portugaise, et la communication ainsi que les relations entre chinois et africains se sont approfondies. Pour finir il pose également la question de l'avenir de leur rôle, étant donnée que de plus en plus d'entreprises chinoises s'implantent directement avec leurs propres agents dans les pays clients notamment en Afrique. Question critique : aurait aimé en savoir plus sur les perceptions du rôle des courtiers culturels par les commerçants africains et les vendeurs chinois eux-même + complément intéressant à l'article d'Haugen présenté juste avant, via le prisme des enjeux autour de la spatialisation des containers et approfondissement modes relations entre les différents acteurs commerciaux (que ce soit avec le 1er article présenté par Elise, celui d'Haugen et celui de Matthews, souligne importance du rôle des relations montrant que les relations ne se jouent pas simplement dans l'espace mais sont également « space-making »2) 2 (« Relations do not merely play out in space, they are space-making. »