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Acquisition du langage et interactions (Sciences du langage)

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ACQUISITION DU LANGAGE ET
INTERACTIONS
Fiches de lectures à rendre :
-Jisa, Harriet et Richaud, Fédérique (1994), « Quelques sources de variation
chez les enfants ». Revue AILE Acquisition et interaction en langue étrangère,
n° 4, pp7-51.
Pour 26 février
-Bassano, Dominique (1998), « Sémantique et syntaxe dans l’acquisition des
classes de mots : l’exemple des noms et des verbes en français ». Langue
Française, n°118, pp 26-48
Pour 12 mars
-Juliane Ingold, Christine Da Silva, Christina Corlateanu, Séverine Gendre et
Stefano Rezzonico (2008), « Diversité des étayages des mères d’enfants toutvenant et dysphasiques dans deux situations d’interactions », TRANEL
(Travaux neuchâtelois de linguistique), n°49, pp 69-82.
Pour 30 avril
A envoyer en PDF par mail.
CT : commentaire de texte ou dissertation.
Intro. :
Domaine foisonnant de recherches multiples, une synthèse à la fois :
- Classique -> les différents aspects du langage chez l’enfant pour lesquels les
connaissances sont déjà bien établies :
- L’acquisition des sons (phonétique / phonologie),
- De la grammaire (morpho-syntaxe),
- De significations (lexique, sémantique).
- Novatrice -> le langage non plus de façon isolée, mais à chaque fois que cela
est possible, à travers une nouvelle fenêtre :
- Le contexte social de son utilisation,
- La relation qui existe entre les formes de la langue et les
situations de
communications dans lesquelles des interlocuteurs les utilisent,
- Les sciences de la vie -> les bases cérébrales (IRM)…
A partir de 12 ans, quand on apprend une LE c’est avec l’accent de la LM =
philtre phonatoire / crible phonologique.
Il y a 4 mois d’écart entre le moment où l’enfant comprend le mot et le
moment qu’il le dit.
1
Il y a 4 mois d’écart aussi entre les filles et les garçons.
Est-ce que le fait de prononcer le /a/ chez les bébés et le même pour tous les
bébés de langues différentes ? -> universaux.
Estimation : de la naissance à l’âge de 6 ans, le vocabulaire moyen passe de 0 à
14 000 mots.
Comment en arrive-t-il à un tel exploit en si peu de temps ?
Cette question est au cœur des recherches sur l’acquisition du langage. En
effet, la maîtrise par l’enfant de sa langue maternelle implique l’acquisition
rapide d’un ensemble de connaissances complexes.
Par exemple, un enfant non seulement doit maîtriser la prononciation des
mots, mais doit aussi savoir quelles sont les suites de sons permises dans sa
langue.
Pour que l’enfant acquiert du vocabulaire, il faut :
-Interagir avec l’enfant, lui lire des histoires,
-Faire jouer l’enfant d’un instrument de musique vers 4 ans pour entraîner sa
mémoire,
-Demander ce qu’il a fait pendant sa journée d’école.
Communauté : latin -> communis -> cum (« ensemble » / « avec ») et munis
(forme adj, de munus) ou munia : un bien, une ressource, ou bien au contraire
une obligation, une dette.
Communauté = groupe social constitué de personnes partageant les mêmes
caractéristiques, le même mode de vie, la même culture, la même langue, les
mêmes intérêts… Elles interagissent entre elles et ont en outre un sentiment
commun à ce groupe.
Acquérir / apprendre sa L1 / ses L, parvenir à une maîtrise de l’expression orale
et écrite.
L’acquisition du langage oral puis du langage écrit s’inscrit dans un cadre
développemental global.
-Quand l’enfant apprend à parler il apprend aussi à marcher, à utiliser les
objets, à jouer à faire semblant, à dessiner…
-Ces acquisitions se réalisent de concert pendant les 2 premières années de la
vie et fusionnent à l’enfant un bagage cognitif non négligeable quand il entre à
l’école maternelle.
Deux périodes essentielles :
-La période prélinguistique = l’enfant ne communique pas encore
2
-La période linguistique = l’enfant commence à produire les premiers
sons.
-Est-ce lié à une activité (spécifiquement) humaine qui nous permet de
communiquer avec nos congénères et de nous représenter le monde ?
-L’acquisition du langage par l’enfant constitue une véritable prouesse
intellectuelle. Pourtant, ce phénomène est généralement considéré comme
allant de soi et passe le plus souvent inaperçu.
-Bloomfield (1933) écrivait à ce sujet qu’il s’agit, indéniablement, du plus grand
tour de force intellectuel accompli par un individu au cours de sa vie.
-Activité hautement valorisée par la famille (dans nos sociétés), qui souvent
guette les progrès de l’enfant et s’inquiète de ses éventuels « défauts de
langage ».
De plus, il doit :
-Connaître un grand nombre de mots ainsi que leurs particularités d’usage et
de significations.
-Savoir fabriquer de nouveaux mots à partir de mots déjà connus.
-Pouvoir combiner les mots afin de former des phrases compréhensibles, ce qui
implique qu’il doit également connaître l’ordre dans lequel les mots doivent
apparaître…
Que signifie acquérir / apprendre une langue, sa langue ?
L’approche innéiste estimant que l’enfant a déjà en lui les règles du
fonctionnement du langage.
« Nous pouvons concevoir l’état initial comme un « un dispositif
d’acquisition du langage » (language acquisition device), qui reçoit l’expérience
comme « entrée » et donne la langue comme « sortie » - laquelle est représentée
intérieurement dans le cerveau » Chomsky, 2005.
L’approche interactionniste considérant l’importance du cadre culturel et des
expériences langagières pour le développement du langage.
« La compétence humaine est à la fois biologique par son origine et
culturelle par les moyens à travers lesquels elle s’exprime » Bruner, 1987
Pour Canut (2004), la démarche adoptée par le chercheur, en fonction de son
inscription théorique, possède « des implications pour la vision que l’on peut
avoir de l’enfant apprenti-parleur : soit un enfant « cérébral » dont on s’attache
3
à déterminer des étapes de développement, soit un enfant « social » dont veut
expliquer le processus d’évolution en fonction des apports dont il bénéficie
dans son environnement proche. »
-Acquérir le langage ne consiste pas à apprendre des règles grammaticales de
manière décontextualisée mais c’est donner du sens et agir sur
l’environnement.
-La signification n’est pas donnée à priori mais elle se construit dans et à
travers l’interaction.
-Dans le processus d’acquisition, l’adulte à un rôle actif : il maintient au sein de
l’interaction un « réglage minutieux », permettant à l’enfant de régler de
l’interaction l’usage du langage, il offre des formes et des structures
langagières dont il peut déjà avoir connaissances mais dans des contextes
différents et à travers différentes pratiques langagières.
-Les structures du langage émergent de l’usage du langage (Tomasello, 2003)
et l’enfant fait expérience d’unités langagières par leurs valeurs dans les jeux
de langage (François, 1993)
Au cours de sa socialisation, l’enfant est alors confronté à la tâche d’apprendre
à la fois :
-Le fonctionnement de langage – à savoir l’outil que les membres de son
entourage emploient pour communiquer.
-Et son usage approprié dans des contextes socialement convenables
(Tomasello, 1999)
Les infos concernant ces formes linguistiques sont accessibles à travers les
interactions avec :
1. Les proches
2. Les pairs et l’ensemble de l’entourage social.
Le fait que l’enfant ait acquis l’essentiel d’un tel savoir dès l’âge de 4 ans, et ce,
sans effort apparent, est un mystère qui intrigue les chercheurs depuis
longtemps.
Comprendre ce phénomène représente un enjeu de taille, car si nous
parvenons à l’expliquer, nous aurons une meilleure idée du fonctionnement du
cerveau humain. C’est la raison pour laquelle le « mystère » de l’acquisition du
langage continue à susciter autant de recherches et à soulever autant de
controverses.
4
On examinera ce qui se construit à la naissance, avant et avec les premiers
mots.
Qu’est-ce que l’on acquiert et à quel stade de développement ?
Quelles sont les grandes théories d’acquisition du langage ? Certains
considèrent que nous sommes ses sortes d’animaux préprogrammés pour
acquérir le langage.
Quel est le rôle de l’entourage dans l’acquisition du langage ?
Le développement langagier ne peut pas être dissocié non plus des autres
aspects du développement : cognitif, affectif, psychomoteur, social…
Une autre question importante : la généralisation des phénomènes observés à
différentes langues -> l’acquisition du langage est-elle la même pour toutes les
langues ou existe-il des spécificités (universel vs spécifique) ?
Prise en compte des différences individuelles -> pourquoi tous les enfants
n’ont-ils pas la même maîtrise de leur langue ?
Est-ce que la période critique existe ? (Lenneberg, 1967) ?
I Définitions et apprentissage
1. L’acquisition
Le développement de savoirs et/ou de savoir-faire (des connaissances d’une
langue) :
-En environnement naturel
-De façon spontanée
-Inconsciente
-Implicite
-En se focalisant sur le sens
L’enfant dans sa famille et dans son environnement proche (voisins, quartier,
amis)
Les parents ne sont pas des enseignants de langage, ils communiquent
naturellement avec leurs enfants et ceux-ci acquièrent le langage en général.
5
2. L’apprentissage
Le développement de savoirs et/ou de savoir-faire (des connaissances ou d’une
langue) :
-En milieu institutionnel
-De façon guidée
-Sous une forme artificielle
-Consciente
-Explicite
-Une focalisation sur la forme
Ecole (maternelle ; souvent dès la crèche).
Il a alors affaire à des personnes dont le métier est de lui apprendre à vivre et à
communiquer avec les autres.
3. Acquisition vs apprentissage
Krashen (1981, 1983) : modèle du moniteur appelé aussi la théorie du contrôle.
Le modèle se fonde sur la distinction de deux notions fondamentales :
l’acquisition et l’apprentissage.
L’acquisition :
- De la langue cible signifie la mise en place de modes opératoire non
conscientes et non réfléchis.
- Se fait par la communication même, à l’instar de l’enfant qui apprend sa
langue maternelle,
- Au niveau de la production linguistique, une acquisition accomplie se
manifeste à travers la maîtrise d’automatisme langagières.
- « L’acquisition est plus orientée vers la signification que vers les formes. »
C’est donc un processus inconscient qui résulte de l’application de stratégies
universelles comme le démontre l’ordre naturel de l’acquisition de certains
aspects grammaticaux par les adultes et les enfants.
L’apprentissage (learning) :
- Se base « sur le savoir, la connaissance explicite, réfléchie et consciente chez
l’apprenant du système de règles de la langue.
- Il s’attache plus à l’aspect formel de sa langue qu’à la signification ».
- C’est donc un processus conscient d’intériorisation de règles explicites.
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D’après Krashen, la maîtrise d’une langue étrangère est due aux stratégies
cognitives d’acquisition. Toutefois, ces stratégies peuvent être complétées dans
l’actes d’énonciation par des règles apprises qui jouent alors le rôle d’un filtre
ou d’un moniteur face aux automatismes acquis et, si besoin interviennent en
tant que correcteur au niveau de la construction progressive d’interlangue.
L’apprentissage s’explique donc par l’intervention d’un moniteur qui apparait
lorsque l’apprenant centre son attention sur la forme et non pas sur le
contenu (pas de contraintes pour la production). Dans ces situations qui ne
sont pas en temps réel, les apprenants produisent des erreurs plus irrégulières
et l’ordre universel n’est pas si net.
Problèmes du modèle de Krashen :
« Les clivages entre acquisition naturelle (hors classe) et artifice de la classe,
entre environnement non-institutionnel (supposé naturellement propre à
l’acquisition) et milieu institutionnel (réputé rebelle à cette même acquisition)
ont eux-mêmes été déplacés et la ligne de partage passe plutôt aujourd’hui
entre le « guide » et le « non guide ».
La théorie du moniteur est destinée à expliquer et à prévoir les modes
d’acquisition des L2 par les adultes.
Ce serait un système de modulation, d’ajustement formel conscient de la
performance, d’éditeur qui modifie les formes des énoncés avant ou après
l’émission (comme lorsque l’on se corrige par ex.)
Le moniteur c’est l’ensemble des règles formulées, des connaissance explicites
de la compétence consciente de l’apprenant qui se manifeste surtout au
moment de l’énonciation et pour contrôler la grammaticalité des énoncés.
Dans le développement de la compétence deux processus mentaux distincts
entrainent en jeu, un processus implicite axé sur le sens (acquisition) et un
processus explicite conscient axé sur la forme ou la grammaire, l’apprentissage.
Pour Krashen, l’acquisition est un processus inconscient qui construit à une
compétence inconsciente (les usagers ne sont pas conscients des structures
acquises) et l’apprentissage ne devient jamais acquisition, il n’y a pas de
passage d’un processus à l’autre, ce sont deux processus indépendants qui ne
s’influencent jamais.
7
Les notions de connaissances conscientes et inconscientes sont difficiles à
évaluer et à mesurer.
Les deux plans n’arrivant pas à se croiser on en conclurait, paradoxalement que
d’une certaine façon ce que l’on apprend consciemment n’arriverait jamais à
être automatisé (acquis).
4. Appropriation
La notion d’appropriation est intéressante et opératoire :
Plus englobant, elle couvre les 2 types de comportements et évite de les isoler
l’un de l’autre.
Elle souligne, plus que les termes d’acquisition et d’apprentissage, le fait que
les enfants sont « actifs » dans leur développement et s’« approprient » le
fonctionnement langagier.
Les conduites d’acquisition et d’apprentissage ne sont pas toujours faciles à
identifier et à cloisonner.
-Les parents ont souvent des comportements d’enseignants.
-Les enseignants ont souvent des comportements spontanés.
II Repères historiques
Expérimentation du pharaon Psammétique III (663-610 av. J-C) (Hérodote vers
500 av. J-C).
Le premier mot prononcé par les enfants : « bécos » (signifiant « pain » chez les
Phrygiens).
La question était alors politique : admettre l’antériorité de la langue phrygienne
sur la langue égyptienne (implicitement position innéiste).
 Hypothèse innéiste
 Hypothèse environnementaliste
Ce questionnement de l’origine du langage s’est poursuivi à travers les siècles.
13ème siècle, Empereur Frederick Hohenstaufen -> L’expérience n’aboutit pas
car les enfants moururent.
14ème siècle, James IV d’Ecosse -> la rumeur de l’époque veut que les deux
enfants aient parlé hébreu.
16ème siècle, Empereur mongol de l’Inde Akbar le Grand -> l’intuition que
l’acquisition du langage était réalisée en interaction avec autrui.
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Le jour de la rupture de l’isolement, les enfants n’étaient pas capables de
produire un seul mot.
Les philosophes comme Descartes dans quelques-uns de ses écrits ou Rousseau
dans l’Emile, ou de l’éducation abordent le problème du langage.
Le traité de J. Rousseau se donne pour objectif « L’art de former les hommes ».
Les premiers livres décrivent l’éducation idéale d’un jeune garçon fictif, Emile :
les questions éducatives abordées d’un point de vue chronologique. Rousseau
n’a pas collecté de corpus.
1. Les précurseurs des recherches scientifiques
Fin du 18ème et surtout au 19ème siècle, apparaissent les précurseurs des études
scientifiques.
Dietrich Tiedmann (1787) ; Charles Darwin (1877) -> ont observé leur propre
enfant avec des méthodes visant à l’objectivité du recueil des données.
L’intérêt pour le langage a aussi été marqué par la découverte d’un jeune
enfant sauvage supposé être resté sans contact humain jusqu’au début de
l’adolescences, Victor de l’Aveyron, étudié par le Dr. Jean Itard en 1801.
Emile Egger (1879), le développement de l’intelligence et du langage chez
l’enfants.
Antonio de La Calle (1881), La glossologie, essai sur la science expérimentale du
langage. Il réalise une observation assez précise de la variété et de la valeur
sémantique des premiers phonèmes prononcés par l’enfant au cours des
premiers mois.
Bernard Perez (1882), La psychologie de l’enfant. Il y décrit l’évolution du
langage en l’intégrant dans un contexte de vie quotidienne, position qui
caractérise aussi les recherches les plus récentes.
2. Le XXème siècle
Un tournant capital dans les études sur le développement de l’enfant :
-Alfred Binet (1903), l’étude expérimentale de l’intelligence.
-Alfred Binet et Théodore Simon, (1905 et 1907) L’échelle métrique de
l’intelligence.
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Pour l’école de ma République, l’apprentissage du langage oral et surtout écrit
avait une importance fondamentale. Binet propose une méthode connue
aujourd’hui sous le terme de « test mentaux » :
-Mesurer le niveau intellectuel en utilisant une batterie d’épreuves dont on a
défini l’âge de réussite par des enfants tout-venant.
-Utiliser ces épreuves pour déterminer un âge mental à un âge chronologique.
Ces travaux ont abouti à la définition du quotient intellectuel (QI = âge mental
/ âge chronique), qui permet de définir un niveau global le développement.
Parmi les épreuves proposées, certaines sont verbales et permettent d’estimer
le niveau de langage de l’enfant.
« Nous ne mesurons pas l’intelligence considéré séparément d’une foule de
circonstance concrètes, l’intelligence qui sert à comprendre, à être attentif, à
juger. C’est un tout bien plus complexe que nous mesurons ; le résultat
dépend :
-de l’intelligence pure et simple
-d’acquisitions extra-scolaires, pouvant se faire bien avant l’heure
-d’acquisitions scolaires, qui se font à date fixe
-d’acquisitions relatives au langage et au vocabulaire, qui sont à la fois
scolaires et extra-scolaires, peuvent dépendre en partie de l’école, en partie du
milieu familiale » Binet et Simon 1907)
Pendant la même période, la linguistique naissante a permis le développement
d’observation de jeunes enfants consistant en prises de notes journalières et
régulières des productions langagières.
On peut citer les travaux de :
Jules Ronjat (1913) pour le français et l’allemand (Louis)-> associé une langue à
une personne, chaque parent parle sa langue à l’enfant
Clara et Wilam Stern (1907, 1928) ont publié le premier journal entièrement
consacré au langage de l’enfant, die Kindersprache.
Ils proposent la première description par stade du développement du langage
chez l’enfant, ils ont continué à tenir de journaux sur tous leur 3 enfants (Hilde,
Günther, Eva) (seulement 2 ont été publié) pendant une durée totale de 18 as
(24 journaux pour 3 enfants)
10
Antoine Grégoire, linguiste (l’apprentissage du langage, 1937) sur le langage de
ses deux fils, Edmond et Charles, de la première année à 3 ans et au-delà,
marque une étape dans la volonté de systématisation de l’observation.
Aleksandr Gvozdev, son fils Zhenya, jusqu’à 9 ans -> des observations et des
analyses très précises sur le développement de son système phonologique, sur
la structure de ses énoncés, sur les catégories grammaticales.
Le journal de Werner Leopold en 4 volumes est un des plus cités pour le
développement de l’anglais et l’allemand de sa fille Hildegarde. Il décide de
tenir un journal au moment où il entend les premières productions vocales de
sa fille quelques jours après sa naissance et ce jusqu’à ses 15 ans et 7 mois.
Il a mis l’accent sur les facteurs sociaux et familiaux dans l’acquisition
simultanée de deux langues (sur la phonologie, le lexique et la syntaxe)
Ces études ont fourni les premières infos précieuses permettant de déterminer
les étapes de l’acquisitions du langage.
3. Les bases biologiques du langage
Le langage et le phénomène de son acquisition ne peuvent être étudiés
indépendamment de leurs bases biologiques.
Tant sur le plan du cerveau
Que sur celui des organes de phonation et d’audition.
4. La physiologie du cerveau
Les idées de localisation des fonctions mentales dans le cerveau remontent au
XIXème siècle. Franz Joseph Gall (1758-1828) : la théorie sous le nom de
phrénologie.
En 1861, Paul Broca (1824-1880) émet l’hypothèses que l’hémisphère gauche
est le siège du langage : le lobe frontal (gauche) est le centre de la production
des sons du langage et de leur traitement phonologique.
Carl Wernicke (1884-1904) autopsie des patients produisant un jargon
dépourvu de sens. Là encore les lésions sont à gauche mais dans la région
postérieure du lobe temporal gauche.
11
5. L’aire de Broca
L’aire de Broca (le lobe frontal gauche) est spécialisée dans les mouvements de
la bouche et de la langue, nécessaire à la production de la parole.
Joue un rôle important dans la compréhension et production de la grammaire.
De lésions de cette aire provoquent l’aphasie de Broca.
On observe chez les patients des difficultés à parler, à articuler des mots, à
construire des phrases grammaticales même lorsque la compréhension du
langage reste possible
Les traitements syntaxiques sont affectés alors que les traitements
sémantiques peuvent être relativement bien préservé
6. L’aire de Wernicke
L’aire de Wernicke (lobe temporal gauche) joue un rôle important pour la
compréhension du langage
Lésion de cette aire -> aphasie de Wernicke
Elle est caractérisée par une difficulté dans la compréhension des mots et plus
globalement des phrases.
Cette aphasie affecte le sens des propos mais pas leur grammaticalité.
Dans ce cas-là, les traitements sémantiques sont affectés alors que les
traitements syntaxiques sont plutôt bien préservés.
7. La perception des sons du langage
La capacité des sons de l’humain diffère aussi selon qu’il s’agit de sons du
langage ou d’autres sons.
Lorsqu’on écoute parler quelqu’un, on traite de 20 à 30 phonèmes différents
(et parfois même jusqu’à 50) (Pinker, 1994)
Lorsqu’on perçoit des sons autres que ceux du langage, on en traite seulement
7 par seconde.
Il s’agit d’une preuve éloquente de l’adaptation et de la spécialisation du
cerveau humain en ce qui a trait à la perception du langage articulé.
Les mots prononcés ne sont pas constitués de sons juxtaposés. Ils se fondent
les uns aux autres.
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Synthèse :
Les études concernant l’acquisition du langage existent depuis près d’un siècle.
D’abord dans le domaine psychologique, puis linguistique, puis
psycholinguistique et enfin sociolinguistique, suivant en cela l’histoire des
disciplines.
Pendant une longue période (entre les années 50 et 80), les recherches en
acquisition en linguistique s’intéressent aux enfants monolingues de milieux
cultivés.
Une double réduction :
-Commencer par ce qui paraissait le plus simple : l’enfant face à une seule
langue
-Une facilité méthodologique : la question de la représentativité de
l’échantillon
III Positionnement disciplinaires
1. Apports de la linguistique
Les 4 apports de la linguistique :
L’intégration progressive du linguistique au discursif : déplacement de
l’intérêt des problèmes de la langue vers les problèmes de discours et la
nécessité de définir les rapports entre eux = s’intéresse au discours de
l’enfants.
La prise en compte de l’antériorité des acquisitions communicatives sur les
acquisitions linguistiques.
-L’enfant comprend les énoncés en langue que lui adresse son entourage bien
avant de pouvoir en produire.
-Il s’agit par conséquent, de reconnaître l’importance des interactions
précoces de la première année de la vie.
La compréhension précède la production.
L’intérêt pour les aspects cognitifs et réflexifs de l’activité langagière :
-La précocité des conduites métalangagières chez l’enfant
-Le très jeune enfant (à partir de 4 ans environ) modifie sa manière parler
lorsqu’il s’adresse à un adulte ou à un enfant plus jeune que lui.
La réhabilitation de l’enfant comme un sujet parlant de plein droit, autonome
et agissant.
13
-Prise en compte de l’enfant pour ce qu’il est, en dehors de tout
« adultocentrisme ».
L’enfant qui apprend à parler ne fait pas qu’imiter ce qu’il entend : il crée des
formes en langue et en discours qu’il n’a jamais entendues.
On désigne généralement par « bonnes fautes » les productions enfantines
non conforme à la norme adulte, mais qui témoignent d’une activité d’analyse
et de construction de règles :
Ex. : J’ai pendu le train
L’enfant qui apprend le langage se socialise et se construit en personne
singulière.
-L’appropriation langagière est ainsi le moyen le plus important de la
socialisation de l’enfant
-On parle de « biographie langagière » pour désigner l’expérience langagière
unique que font les individus.
-On ne peut comprendre le développement langagier d’un enfant qu’en
étudiant les effets de son entourage (familiale, scolaire, amical…) sur sa
construction en tant que sujet parlant et interagissant
4 périodes dans l’évolution des idées :
-Les années 50 : les théories de l’info et des fondements structuralistes (pour la
linguistique) et behavioristes (pour la psychologie).
-Les années 70 : la grammaire générative transformationnelle et la psychologie
expérimentale.
-Les années 80, 3 orientations :
-Poursuite des recherches en grammaire générative -> idée qu’il existe une
faculté de langage, spécifique de l’esprit humain.
-Orientation sémantique-énonciative-pragmatique : se détourne des théories
qui visent ç décrire la compétence d’un locuteur-auditeur idéal sans réalité
sociale et essaie de rendre compte des stratégies de sujets réels placés dans
des conditions concrètes d’interprétation et de production.
-Orientation interactionniste : participe aux travaux sur la communication et
situe l’acquisition du langage dans le domaine des relations verbales.
-Les années 2000 : les théories se multiplient et deviennent hétérogènes, à
côté des mouvements cités, il y a aussi :
-Le connexionnisme
-L’émergentisme
-Le socio-cognitivisme
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-Des théories dynamiques et statistiques
2. Apports de la psycholinguistique
Prise en compte des facteurs de diversification de l’activité langagière de
l’enfants, une diversification des :
-aspects cognitifs retenus pour l’analyse
-théories linguistique
-méthode de recueil des données : abandon des expérimentations (avec le
danger de fabrication d’artefacts) et recours à des observations de situations
quotidienne (naturelle et non fabriquées) -> questionnaire aux parents (=CDI),
La psycholinguistique actuelle ne s’intéresse plus simplement à la langue, à la
compétence ou à l’énoncé bien formé, mais à la parole vivante.
Les dernières années, 2 tendances fortes :
-Un développement des recherches de terrain,
-Un retour en force de références à des traditions intellectuelles européennes :
la psychologie développementale, l’interaction et la théorie des genres.
Mais aussi des études plus neurologiques (psycholinguistique cognitive), des
études plus sociales (psycholinguistique fonctionnelle).
3. Apports de la sociolinguistique
Analyser les effets de la structuration sociale dans son ensemble sur la
dynamique de l’acquisition du langage.
Analyser le développement de l’enfant en étroite relation avec les conditions
sociales de l’appropriation du langage, conditions très diversifiées (à la fois
pour des raisons économiques, culturelles, idéologiques et politiques).
Homogénéité et hétérogénéité :
-La psychologie ignore totalement le problème de l’hétérogénéité, mais elle le
traite à sa manière : la « normalité » ou la « déviance » par rapport à un ordre
prévisible de développement expérimentalement mis en lumière.
-La sociolinguistique actuelle : une opposition aux conceptions mécanistes,
behavioristes (Skinner), er innéistes, génératives (Chomsky).
Montrer ce qui est universel ou spécifique à l’acquisition d’une langue donnée.
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La sociolinguistique s’intéresse à l’acquisition qu’avec la montée en puissance
du problème de l’échec scolaire (début des années 1970).
Polémique entre les problématiques de la :
-déficience linguistique (B. Bernstein, 1971, 1975)
-différence linguistique (W. Labov, 1976).
P. Bourdieu (1982) : le rôle dans la « reproduction sociale », l’enfant fait
l’expérience souvent brutale de l’imposition des normes et du rejet de
certaines catégories sociales.
4. Pistes de recherche en acquisition
Une sorte de « ventilation » entre disciplines de recherche en acquisition du
langage par l’enfant.
Un certain partage des terrains :
-Une psycholinguistique : traite du jeune enfant en milieu familial et n’envisage
la variation des conduites verbales que sous son aspect interactionnel.
-Une sociolinguistique : traite de l’enfant plus âgé en milieu scolaire et
s’intéresse essentiellement aux aspects socio-différentiels des pratiques
langagières.
Une nécessaire complémentarité :
Les divers terraines, conceptualisations, problématique, méthodologies sont
susceptibles d’apporter des éclairages originaux.
IV Théories en acquisition du langage
1. Qu’est-ce qu’une théorie
Théorie = ensemble d’énoncés qui permettent, dans un champ de
connaissances donné d’effectuer une observation adéquate des faits, d’en
fournir une explication cohérente et, en conséquence, de faire des prévisions.
Une théorie est une hypothèse sur le comment et le pourquoi d’un ensemble
de faits et elle doit régulièrement testée et validée au moyen de diverses
expériences et observations.
Une théorie n’est pas neutre vis-à-vis des faits qu’elle observe. Elle conditionne
non seulement les faits observés, mais aussi la façon dont ils le sont. En effet,
16
des faits semblables seront examinés différemment, selon le cadre théorique
adopté par l’observateur.
La théorie constitue en quelque sorte une grille d’observation. Elle établit les
fondations de toutes étude scientifique et les résultats de ces études aident les
experts à affiner et, quelquefois, à revoir leurs théories.
2. Les théories en acquisition du langage
En ce qui concerne le développement du langage, une bonne théorie doit
fournir une description et une explication adéquate des données observées.
Elle doit aussi faire des prédictions sur le déroulement de l’acquisition du
langage, par exemple prévoir quelles sont les erreurs de prononciation que fera
un enfant francophone en début d’acquisition.
Elles se différencient en fonction :
-Des savoirs sur le développement de l’enfant : rupture des années 80 (le bébé
est une personne…)
-Des points de vue adoptés sur l’enfant (psychologique, linguistique,
sociolinguistique, anthropologique, historique, religieux).
-Des modes d’observation de l’enfant.
-Du type de relation adulte-enfant.
Avant 1975 : optique culturelle :
-Le langage comme phénomène social/
-L’homme est un être de culture entièrement façonné par la société,
l’expérience, l’apprentissage
Avant 1975 : optique cognitiviste :
-Le langage comme phénomène mentale
-L’esprit humain est un programme interne de traitement de l’info guidé par
une logique interne.
Perspective théorique :
-L’empirisme : bain de langage
-Le behaviorisme
-Le générativisme
-Le constructivisme
-Le socio-constructivisme
17
-L’interactionnisme
-Le cognitivisme
3. L’empirisme
John Locke (1632-1704) : père de l’empirisme, pour lui « aucun savoir pour
l’homme n’est inée »
David Hume (1711-1776) : « Toutes nos connaissances devient de
l’expérience. »
La théorie empiriste considère que :
-La pensée fonctionne par enregistrement des données de l’expérience.
-Toute connaissance provient de nos perceptions sensorielles.
-C’est à travers l’expérience sensorielle que les connaissances vont se
développer.
-Le langage apparaît grâce à une bonne perception auditive et à l’imitation.
« Bain de langage » : placer l’enfant en présence de parole, bain dans lequel il
apprend de façon naturelle en imitant.
4. Le behaviorisme ou le compormentaliste
L’être humain comme animal // conditionné et conditonnable
Le behaviorisme vient de la tradition anglo-saxonne de la philosophie
empiriste.
Il se développe aux E-U entre le début du XXème s. et les années 1960.
Ses principaux penseurs sont :
-John Watson 1878-1958
Ivan Pavlov 1848-1936
-Burhus Frederick Skinner 1904-1990
Selon la doctrine behavioriste élaborée par Watson (1913) les comportements
constituent l’unique champ observable de l’activité psychologique des sujets.
La possibilité d’accès à une conscience et à la pensée des sujets n’est pas
envisagée car ceux-ci ne correspondent pas à des données directement
observables.
Selon cette théorie, le langage est vu comme un comportement comme una
autre.
Le langage n’est pas forcément différent des autres facultés humaines.
18
La situation expérimentale :
1. Une cloche sonne
2. La nourriture est présentée
3. Activation des glandes salivaires
Après quelques répétitions de cette procédure
4. Le chien salive quand la cloche conne.
Le stimulus « cloche » est devenue un stimulus conditionné.
John Watson 1878-1958
L’une des expériences les plus célèbres en psychologie comportementale et
cognitive : « Little Albert experiment »
En 1920, John Watson, souhaite observer comment l’aversion et les émotions
négatives peuvent naître d’un processus de conditionnement.
Afin de lui apprendre à avoir peur de ces rats, les psychologues lui présentent à
nouveau un rat et lorsque l’enfant va le prendre, un chercheur fait retentir un
bruit violent très fort. Albert, assis sir un matelas, tombe à la renverse et se met
à pleurer.
L’équipe répète ce procédé plusieurs dois : Albert pleure et se met à trembler à
la simple vue du rat.
19
Skinner :
Le conditionnement opérant : on part d’une action quelconque d’un
organisme vivant et grâce à des renforcements, on peut modifier l’action
initial : les organismes vivants apprennent par renforcement, répétition.
Le comportement est l’ensemble des réactions objectivement observables
qu’un organisme généralement pourvu d’un système nerveux exécute en
réponse aux stimulations du milieu, elles-mêmes objectivement observables et
qui exercent à leur tout un effet sur le sujet.
On n’étudie que les comportements observables en refusant de s’intéresser à
ce qui peut se passer dans le cerveau : « la boîte noire ».
L’apprentissage débute par l’imitation des phrases des adultes et des enfants
plus âgés (comportement d’imitation).
Renforcement positif : procédure par laquelle la probabilité de fréquence
d’apparition d’un comportement tend à augmenter suite à l’ajout d’un stimulus
appétitif contingent à la réponse.
Ex. : ajout d’une récompense, félicitations…
Renforcement négatif : procédure par laquelle la probabilité de fréquence
d’apparition d’un comportement tend à augmenter suite au retrait d’un
stimulus aversif contingent à la réponse.
Ex. : retrait d’une obligation, d’une douleur…
20
Le modèle de base de la théorie behavioriste :
-L’apprentissage débute par l’imitation des phrases des adultes et des enfants
plus âgés (comportements d’imitation) -> un organisme produit une certaine
réponse à un stimulus.
-Cette réponse est ensuite renforcée ou non par le milieu.
-Le modèle : stimulus, réponse, renforcement.
-S’il y a renforcement -> un processus de discrimination permet à la stimulation
de devenir un agent susceptible de faire réapparaître.
-Le comportement verbal est considéré comme une variété de comportement
ayant un effet sur l’environnement (l’entourage de l’enfant est sensible à ses
productions verbales et sonores) -> cet environnement exerce en retour un
effet sur le sujet ayant émis ce comportement (l’entourage réagit aux
productions de l’enfant).
Florin (2016) :
-Par exemple, lorsque l’enfant dit [aba] pour obtenir un verre d’eau
-Cette production sonore si elle est comprise par l’adulte va permettre à
l’enfant d’obtenir un verre d’eau.
-L’obtention de la boisson désirée constitue le renforcement.
-Si cette production est plusieurs fois suivie de l’effet escompté, elle va
acquérir une certaine force.
-Dans un premier temps, une approximation de l’expression « à boire » va être
renforcée par l’entourage.
-Les adultes exigeront progressivement une forme plus proche des mots de la
langue.
-Les productions de l’enfant qui ne sont pas renforcées finiront par disparaître.
-Critique : l’acquisition du langage peut-il vraiment résulter uniquement de la
liaison entre les stimulations, mêmes complexes, et une « réponse » ? -> un
enfant qui acquiert une langue fait bien autre chose qu’imiter les adultes.
Synthèse :
Le modèle de base de la théorie behavioriste :
L’enfant développerait ses capacités langagières par imitation ou par simple
réponse à un stimulus, suivi d’un renforcement.
-Les comportements adéquats à un stimulus vont être encouragés et
récompensés (par des sourires, des répétitions) afin que ce comportement soit
répété par l’enfant pour être finalement intégré.
-D’autres comportements seront à l’inverse réprimandés et sanctionnés afin
que le comportement soit modifié par l’enfant.
21
-Le développement du langage est ainsi envisagé comme une somme
d’apprentissages, de savoirs, actifs ou passifs, successifs et indépendants les
uns des autres.
-Les tâches de la théories behavioriste, telles qu’elles sont définies par les
thèses de Skinner, se limitent à 3 processus : prédire, modifier et contrôler les
comportements observables.
L’individu est envisagé sous l’angle de réponses comportementales à des
stimuli extérieurs, et les différences interindividuelles s’expliquent par « les
conditionnements provenant du milieu dans lequel chacun évolue. »
Le behaviorisme a été largement critiqué -> l’individu ne peut être envisagé
sous le seul angle de l’apprentissage sans prendre en compte la complexité des
relations entre un individu, son environnement, le contexte, les autres… et peu
à peu abandonné.
5. La vision de l’enseignement selon le behaviorisme
La psychologie de laboratoire recherche et énonce des lois de l’apprentissage
et des mécanismes de modifications des comportements.
La psychopédagogie intègre ces recherches dans la formation des enseignants
selon le modèle des sciences appliquées.
L’enseignant en classe applique les connaissances psychopédagogiques aux
situations concrètes.
Il est un gestionnaire des comportements des élèves. L’enseignant a pour rôle
de maintenir, développer certains comportements et d’en faire disparaître
d’autre chez certains élèves grâce à des renforcements (Ex. : points, images,
bonnes notes…). Les comportements adéquats sont renforcés.
6. Le générativisme
Chomsky (1959) :
-Les imitations ne suffisent pas à rendre compte la capacité à s’exprimer des
enfants !
-L’acquisition du langage est basée sur l’innéisme.
22
Les bribes de langage perçues par l’enfant apparaissent comme imparfaites,
incomplètes et trop limitées pour que l’enfants puisse en extraire les règles
générales de fonctionnement de sa langue maternelle -> « pauvreté du
stimulus » (Chomsky, 1980)
« L’enfant construit son langage simplement à partir des performances d’autrui
qui sont tout en lacunes erreurs et sous-entendu. »
« On peut envisager une grammaire, représentée d’une manière ou d’une
autre dans l’esprit, comme un système qui spécifie les propriétés phonétiques,
syntaxiques et sémantiques d’une classe infinie de phrases possibles.
(Chomsky, 1979)
A partir d’un système fini de règles, l’enfant peut comprendre et générer un
nombre infini de phrases, sans les avoir entendues ou produites auparavant.
 « Grammaire générative transformationnelle ».
Le monde environnant ne vient que déclencher et alimenter des programme
préétablis.
Chomsky : la construction du langage résulte d’un mélange personnel de
créativité et d’imitation.
-Imitation pour les modèles
-Créativité pour la production de « phrases jamais entendues »
-Si les enfants ne faisaient qu’imiter les adultes, les parents ne seraient
pas à ce point charmés par les « mots d’enfants ».
Les humains naissent avec une connaissance innée d’une grammaire
universelle (GU), une compétence de base sous-jacente à toutes les langues,
qui contiendrait des infos sur des universaux de la langue (phrases, syntagmes
nominaux et verbaux).
L’enfant dès la naissance est génétiquement préprogrammé pour Chomsky
pour acquérir tous types de langues naturelles.
Trois notions importantes :
-l’opposition compétence / performance
-le caractère inné du langage
-la créativité.
23
-La compétence : la possibilité illimitée que possède tout individu de construire
et de comprendre un nombre infini de phrases, pour la plupart, il n’a jamais
prononcé ni entendues auparavant.
Tout sujet parlant possède donc des aptitudes langagières acquises dans son
enfance. Il s’agit d’une aptitude individuelle, créatrice (proche du concept
saussurien de la langue -> représente le savoir linguistique implicite des sujets
parlants le « système grammatical existant virtuellement dans chaque
cerveau. » (Saussure, 1916)
Chaque individu possède une grammaire intériorisée, cad une connaissance
intuitive de l’ensemble des règles qui permettent d’expliciter les règes de
grammaire de sa langue et rien que celles-ci.
La capacité de construire et de reconnaître l’ensemble des énoncés
grammaticalement corrects.
Ma grammaire doit rendre du fait que le verbe « aller » comme auxiliaire ne
peut être utilisé au futur ou au subjonctif ; les énoncés :
-*Il faut que j’aille venir.
-*Il ira venir
-Il faut qu’il aille chercher un taxi.
-Il ira chercher un taxi.
L’idée de base de Chomsky est bien le concept d’innéisme selon lequel tout
locuteur natif possède une connaissance innée des mécanismes du langage. Il
peut distinguer une phrase grammaticale d’une phrase agrammaticale.
-La performance : l’utilisation que fait le sujet de ce savoir linguistique, ce que
chacun fait de sa langue dans les situations de communication, (proche du
concept saussurien de la parole).
L’ensemble des facteurs comme la mémoire, l’attention… qui définissent le
sujet psychologique et les facteurs sociaux ou historiques qui définissent la
situation.
Compétence = innée, ce qu’on a en nous.
Les productions de l’enfants peuvent ne pas correspondre à ce qui est attendu
dans la langue.
24
Devant l’extraordinaire rapidité des acquisitions de langage, Chomsky pense
qu’il ne peut s’agir d’un apprentissage mais de l’émergence de structures
fonctionnellement prêtes à l’usage. « Tout esprit humain dispose d’une
structure innée qui permet de construire une grammaire à partir de données
qui sont fournies par l’environnement ». Le cerveau est constitué comme un
ordinateur préprogrammé.
Cette aptitude à acquérir les structures de la langue est décrite comme un
dispositif inné du langage : Language Acquisition Device (LAD).
-La créativité du langage :
L’aptitude à produire et à comprendre des phrases nouvelles qui n’ont peutêtre jamais été prononcées auparavant, en appliquant tout à fait
inconsciemment des règles grammaticales.
Tout être humain est infiniment créatif, et ce dès l’enfance.
L’auditeur comme le sujet parlant, possède une créativité infinie au sens où les
sujets parlants peuvent produire une infinité de phrases, et les auditeurs
peuvent comprendre chacune de ces phrases, pourvu qu’ils appartiennent à la
même communauté linguistique.
Pour Chomsky, différente signification selon qu’on applique au sujet parlant ou
à l’auditeur.
Le sujet parlant a bien la liberté de « créer » des phrases nouvelles à volonté,
dans le sens du mot « créer » + ou – proche de son sens ordinaire.
L’auditeur ne fait qu’enregistrer passivement ce que le sujet parlant a créé.
2 types de créativité :
-La créativité qui change les règles : localisé dans la performance, consiste en
ces multiples déviations individuelles qui finissent en s’accumulant pour
changer le système.
-La créativité qui est gouvernée par les règles : relève de la compétence et
tient au pouvoir récursif des règles qui constituent le système.
Prise en compte des facteurs de variation propres à chaque langue naturelle.
Un constat évident : on n’apprend pas à parler tout seul !
25
Les critiques des théories chomskyennes ont surtout porté sur la négation de
l’aspect interactif du langage humain et le fait que Chomsky ne s’intéressait
qu’à la syntaxe.
L’existence de la grammaire universelle postule :
-Une compétence de base sous-jacente à toutes les langues.
-Contenant des infos sur des universaux du langage.
-L’existence de phrase, de relation telles que SVO, des syntagmes nominaux et
verbaux, d’une deixis sont communes à toutes les langues.
Chaque langue pose à l’enfant qui l’apprend de nombreux problèmes
spécifiques.
7. D. Slobin (1982, 1985, 1994…)
Contrairement à ce que pensait Chomsky, l’examen des langues parlées dans le
monde ne fait pas apparaître une grammaire ou un petit ensemble de
grammaire mais un très grand nombre de grammaire extrêmement diverses.
Le marquage grammatical est particulièrement inventif ey peut varier
considérablement d’une langue à une autre.
8. Le constructivisme
Au début du XXème s., les travaux de Piaget (1923 / 1989) ont permis de
considérer le langage comme une aptitude humaine parmi d’autres, qui se
développe au fur et à mesure que l’enfant grandit.
Contrairement à la théorie behavioriste pour Piaget, le langage est à la fois
dépendant du développement cognitif et des interactions avec
l’environnement. L’acquisition du langage ne peut se résumer à des
apprentissages et imitations sur le modèle adulte, sans tenir compte de la
manière dont la connaissance se construit chez l’enfant.
Il n’existe pas de connaissances résultant d’un simple enregistrement
d’observations sans une structuration due aux activités du sujet.
26
Piaget rappelle que les actions qui sont exercées par le bébé puis par l’enfant
dans son environnement, sont importantes pour la structuration de ses
propres connaissances.
Divergences entre Chomsky et Piaget :
Pour Piaget, le langage se construit en suivant le développement cognitif de
l’enfant. Pour lui, les capacités cognitives ne sont ni totalement acquises : elles
découlent d’une construction qui est progressive où l’expérience et la
maturation interne entre en jeu.
Il n’existe pas chez l’homme de structures cognitives a priori ou innées . Seul le
fonctionnement de l’intelligence est héréditaire et il n’engendre des structures
que par une organisation d’actions successives exercées sur les objets.
Le développement cognitif est le fruit d’interactions complexes entre la
maturation du système nerveux et du langage et que cette maturation dépend
des interactions sociales et physiques avec le monde qui nous entoure.
Pour Piaget, c’est en agissant que son environnement que l’enfant construit
ses premiers raisonnements.
Ces structures cognitives (= schèmes de pensée), au départ complétement
différent de ceux de l’adulte, s’intériorisent progressivement pour devenir de
plus en plus abstraites.
Piaget a posé une continuité entre le langage égocentrique et le langage
socialisé : le développement cognitif individuel est une condition préalable au
développement des interactions sociales.
Pour Piaget, les premières productions ne permettent pas de transmettre une
info à son interlocuteur, du fait que l’enfant ne puisse pas encore saisir les
intentions de celui-ci. Ce n’est que progressivement qu’il pourra entrer dans
des interactions sociales.
Le langage est solidaire des acquisitions faites au niveau de l’intelligence
sensori-motrice :
-Le langage n’est pas un développement en soi, particulier
-Il dépend de ce qui va être mis en place au cours de la période sensori-motrice
et notamment avec l’émergence de la représentation.
-Le langage « se développe à travers des systèmes successifs dont chacun
possède une cohérence suffisante pour fonctionner à son propre niveau. »
27
-Pas de système distinct d’acquisition du langage : « la caractéristique
spécifique de l’homme n’est pas le langage, mais la disposition de structures
cognitives, dont dépend l’émergence du langage.
-Apprentissages par manipulation.
-L’apprentissage consiste en adaptation de nos structures cognitives (=
schèmes de pensée) à de nouvelles données du réel. Pour Piaget, cette
adaptation peut se faire de 2 façons :
-Par assimilation
-Par accommodation
-L’assimilation consiste à interpréter les nouveaux événements à la lumière des
structures cognitives déjà existants.
-L’accommodation est le processus inverse, c’est-à-dire changer sa structure
cognitive pour intégrer un nouvel objet ou un nouveau phénomène.
Pour Piaget, on passe constamment de l’assimilation et l’accommodation
durant les processus de compréhension du monde qui nous entoure.
Durant certaines périodes du développement, l’une des deux peut toutefois
être temporairement plus utilisée que l’autre.
4 stades de développement :
-Stade sensorimoteur : de la naissance à environ 2 ans
Développement d’une intelligence pratique (qui précède le langage) sur la
base des réflexes innés.
Cette période débouche sur des comportements de plus en plus complexes
grâce à la construction de schèmes (sorte de connaissance « en acte » qui
permet d’assimiler le monde mais qui doit aussi s’accommoder à ses
particularités.
Le contact qu’entretient l’enfant avec le monde qui l’entoure dépend
entièrement des sensations qu’il éprouve et des mouvements / actions qu’il
fait.
Chaque nouvel objet est brassé, lancé, mis dans la bouche pour en
comprendre progressivement les caractéristiques par essais et erreurs.
C’est vers la fin de sa 1 ère année que l’enfant saisit la notion de permanence de
l’objet, c’est-à-dire le fait que les objets continuent d’exister quand ils sortent
de son champ de vision.
28
-Stade pré-opératoire : de 2 ans à 6-7 ans
Cette période se caractérise par le passage de l’intelligence représentative :
construction de la fonction symbolique (avènement du langage articulé ->
l’enfant devient capable de penser en terme symbolique, de se représenter des
choses à partir de mots ou de symboles).
L’enfant saisit aussi des notions de quantité, d’espace et la distinction entre le
passé et le futur.
Cependant il demeure beaucoup orienté vers le présent et les situations
physiques concrètes, ayant de la difficulté à manipuler des concepts abstraits.
29
-Stade des opérations concrètes : de 6-7 ans à 11-12 ans
Les opérations de ce niveau correspondent à l’intériorisation des
coordinations de l’action. Cette intériorisation rend possible la réversibilité :
« on peut revenir sur le passé par la pensée ».
Ces opérations sont elles-mêmes coordonnées en structure totales
(classement, sériation, correspondance terme à terme…) mais elles ne sont
applicables qu’aux seuls objets. Il commence aussi à conceptualiser et à créer
des raisonnements logiques qui, nécessitent cependant encore un rapport
direct au concret.
Avec l’expérience du monde qui s’accumule en lui, l’enfant devient capable
d’envisager des évènements qui surviennent en dehors de sa propre vie.
Un certain degré d’abstraction permet aussi d’aborder des disciplines comme
les math où il devient possible pour l’enfant de résoudre des problèmes avec
des nombres, de coordonner des opérations dans le sens de la réversibilité,
mais toujours au sujet de phénomènes observables. Résoudre des problèmes à
plusieurs variables en le décortiquant de façon systématique demeure
exceptionnel à ce stade.
30
-Stade des opérations formelles : de 11-12 ans à 15 ans
Les nouvelles capacités de ce stade, comme celle de faire des raisonnements
hypothético-déductifs et d’établir des relations abstraites, sont généralement
maîtrisées autour de l’âge de 15 ans.
A la fin de ce stade, l’adolescent peut donc, comme l’adulte, utiliser une
logique formelle et abstraite.
Il peut aussi se mettre à réfléchir sur des probabilités et sur des questions
morales comme la justice.
Le groupe INRC. Selon Piaget, structure logique caractéristique de la pensée
formelle dans laquelle chaque représentation identique (I) est à la fois l’inverse
ou la négation d’une autre (N), et la réception d’une troisième (R), celle-ci
également la corrélative (C) de la première opération.
31
Les processus de l’assimilation et de l’accommodation :
Au-delà du modèle de Piaget :
Plusieurs critique -> le concept de stades de développement fixes et
séquentiels à travers lesquelles tous les enfants progressent.
Lev Vygotsky (1886 – 1934) -> le développement d’un être humain est trop
complexe pour être défini par des stades.
Vygotsky, et d’autres après lui, ont accordé une importance beaucoup plus
grande que Piaget aux influences sociales et environnementales sur le
développement cognitif.
9. Le socio-constructivisme
Dimension-sociale : la vraie direction du développement ne va pas de
l’individuel au social, mais du social à l’individuel -> Relation sujet /
environnement est médiatisée par le groupe social auquel appartient l’enfant.
Le rôle des interactions est essentiel :
-L’enfant commence à développer ses capacités en présence des autres, et
l’adulte joue un rôle de médiateur dans le rapport de l’enfant à son
environnement.
32
-C’est l’intervention de l’adulte qui lui permet de construire et d’intérioriser le
sens des situations vécues et de résuire l’écart existant entre ce qu’il peut faire
à l’aide de son entourageet ce qu’il peut réaliser seul.
-Les adultes parlent au bébé dès les premiers jours de sa vie, lui prêtent la
capacité de comprendre, le considère comme un partenaire de dialogue,
interprètent tous les signes renvoyés par l’enfant : il y a communication avant
le langage. Le parler « bébé » des adultes et un mode d’accès à la
compréhension et il est universel.
Vergnaud (1999 – 2000), Gavens (2018) -> contrastes Piaget et Vygotski.
Piaget -> prône l’action et le rôle de cette actio, venant de l’enfant sur son
environnement dans son développement cognitif.
Vygotski y oppose le langage au lieu de l’action, le rôle du contact direct et
continu entre individus qui rend possible une médiation à travers l’interaction
adulte-enfant.
Vygotski : interaction sujet-sujet
Piaget : interaction sujet-objet
Vygotski (1934-1985) en dresse une analyse critique et remet en cause la
notion d’égocentrisme à la fois pour la pensée et le langage dans la théorie de
Piaget.
Piaget (1924) : la pensée égocentrique est comme intermédiaire entre une
pensée non dirigée (la pensée autistique), et une pensée socialisée, dirigée,
celle de l’adulte. Le langage égocentrique est alors considéré comme un
intermédiaire entre « l’autisme et le langage socialisé ».
Vygotski (1934 – 1997) : la pensée égocentrique opère exclusivement avec ce
qui environne l’enfant et l’expérience qu’il a dans cet environnement.
Vygotski : La pensée égocentrique de Piaget présuppose que l’enfant ne
possède pas encore la capacité d’interaction sociale.
Le développement du langage :
3 moments d’évolution :
1.Langage social
-Dès le début de la vie
-Fonction de communication
-Echange, action sur l’environnement et les autres.
2.Langage égocentrique
-Fonction autonome (ne s’adresse pas à autrui)
33
-Aide au raisonnement, orientation mentale
3.Langage intérieur
-Non sonore mais pas seulement
-Reflet de la pensée
Développement et apprentissage :
Apprentissage = condition préalable au processus de développement
Débute dès les premiers jours de la vie
Notion de Zone Proximale de Développement :
-La différence entre le niveau de résolution de problèmes avec l’aide de l’adulte
et celui atteint seul, définit la ZPD : celle dans laquelle l’éducation est efficace.
-En dessous : l’enfant n’apprend rien / en dessus exigences de la tâche trop
élevées.
« L’individu est être biologique et social. »
Biologique car : facteurs internes à l’origine de la maturation biologique
->Loi immuable de développement
->Succession régulière des étapes
Social car : immaturité biologique à la naissance
->besoin du social pour survivre
->L1er objectif : adaptation au milieu humain
-> Besoin de mettre en place des relations avec lui
Au départ, mouvement (corps, cris, pleurs) -> biologique
Puis acquisition d’une signification grâce à l’entourage -> social :
1.Le stade impulsif (0 à 3 mois): ce sont des sensations internes et les facteurs
affectifs entretenus avec l’entourage. Sur le plan moteur, cette période est
caractérisée par la faible maîtrise motrice et donc un désordre gestuel. C’est la
qualité des réponses de l’entourage du nourrisson qui vont lui permettre de
passer du désordre gestuel à des émotions différenciées.
2.Le stade émotionnel (3 – 12 mois) : émergence d’un commencement de
reconnaissance de soi au travers du regard des autres. Apparition de quatre
émotions : la joie, le chagrin, la colère et la douleur. Le bébé ne fait pas encore
la différence entre lui-même et les autres.
34
3.Le stade sensori-moteur et projectif (de 1 à 3 ans) : influence du monde
extérieur. L’intégration de cette influence externe va favoriser l’éveil de 2 types
d’intelligence :
-La manipulation d’objets et l’exploration de l’espace proche permettent le
développement d’une intelligence des situations (intelligence « pratique »)
-L’imitation et l’appropriation du langage (intelligence « discursive »)
4.Le stade du personnalisme (3 à 6 ans) : prédominance, à nouveau, des
fonctions affectives sur l’intelligence.
Vers 3 ans, l’enfant tend à s’opposer à l’adulte dans une sorte de crise
négativiste, dire « non » lui permet de renforcer son autonomie de pensée.
Vers 4 ans, il va entrer dans une phase de séduction -> son comportement va
changer sous les regards d’autrui, il va aussi généralement vouloir tout bien
faire afin d’être aimé.
Vers 5 ans, il s’agit d’une période d’imitation motrice et sociale, ce qui lui
permet d’intégrer des rôles sociaux.
5.Le stade catégorielle (6 à 11 ans) : ce sont les facultés intellectuelles qui
semblent prendre le pas sur l’affectif.
Pendant sa scolarité, l’enfant acquiert des capacités d’attention, d’effort, de
mémoire volontaire.
Son intelligence accède à la formation des catégories mentales qui conduisent
aux capacités d’abstraction des choses.
6.Le stade de l’adolescence (11 ans et +) : une primauté des préoccupations
affectives. La puberté provoque aussi un réajustement du schéma corporel et
un remaniement de la construction de sa personnalité, sa conscience se
développe en parallèle.
10.Du socio-constructivisme à l’interactionnisme
Années 60 : une montée en force des théories interactionnistes en linguistique.
Quelques éléments du contexte intellectuel de l’époque.
11.Approche pragmatique et interactionnelle
35
Les travaux de Bruner ont porté sur de nombreux domaines dont : la
perception, la catégorisation, le récit, le développement cognitif, le langage
chez l’enfant, l’éducation.
Objectif :
-Comprendre l’être humain dans toutes ses dimensions (psychologique, sociale,
linguistique, culturel…)
-Observer le nouveau-né, le bébé (moins de 2 ans) en milieu familiale
-Considérer l’être humain d’abord comme un être de culture (-> son approche
dans sa continuité de Vygotski avec des influences walloniennes).
12.L’interactionnisme
Ce que Bruner a observé et analysé :
-Les adultes parlent au bébé immédiatement,
-Ils lui prêtent la capacité à comprendre,
-L’enfant est considéré comme un partenaire de dialogue,
-Les adultes interprètent tous les signes renvoyés par l’enfant (grimaces, rictus,
sourires, pleurs, cris…),
-Il y a communication AVANT le langage,
-Le « mamanais » ou « motherese » est un mode d’accès à la compréhension.
-Il est universel.
Années 70 : on s’intéresse aux échanges mères / enfants.
Toute action conjointe mettant en présence au moins deux acteurs : chacun
d’eux modifiant son comportement en fonction des réactions de l’autre.
L’adulte accorde son discours avec celui de l’enfant dans le cadre d’une
interaction et sert de support à l’apprentissage.
L’approche de la pragmatique développementale : acquisition des
compétences socio-pragmatiques pour l’usage social et la participation dans la
vie sociale avec autrui.
Les interactions mère-enfant (interaction dyadique) : chaque comportement
de l’enfant (mimiques, gestes, premières vocalisation, expressions faciales… ->
attribution d’une valeur communicative) est interprété par la mère comme le
signe d’abord d’un désir ou d’une intention qu’elle peut alors, nommer,
permettant ainsi l’enfant d’accéder au langage.
Cet échange implique une attention partagée entre la mère et son enfant ->
dès sa naissance celui-ci est considéré comme un être social à part entière et
interactif.
36
Pour faciliter cet échange collaboratif, les mères adoptent leur langage de
manière à faciliter la compréhension de l’enfant en ayant recours à des
stratégies de :
-Verbalisation des intentions de l’enfant
-Reformulations
-Clarifications
-Périphrase
Objectif : créer une ambiance coopérative et une compréhension mutuelle.
L’input joue un rôle primordial : les répétitions de l’adulte reprennent tous les
types d’erreurs faites par l’enfant sur le plan phonologique, morphologique,
lexical et syntaxique.
A travers les répétitions, l’adulte présente à l’enfant un modèle de la forme et
de l’usage de la langue ; l’enfant s’approprie ce modèle et ainsi apprend sa
langue.
Pour Bruner,
Le nourrisson et l’enfant ne progresseront pas seul :
-Le développement cognitif, l’acquisition du langage et de la culture
s’effectuent dans le cadre d’interactions permanentes avec l’entourage, avec
autrui, et non pas le seul déploiement autonome de capacités mentales.
-La compétence communicative de l’enfant est à la fois biologique par ses
origines et culturelle par les moyens à travers lesquels elle s’exprime.
-Entre les capacités biologiques de l’enfant et de la culture, il existe un
« pont », qui permet à la culture de fonctionner comme mécanisme pour la
mise en œuvre des capacités innées de l’enfant.
Ce « pont », c’est l’adulte qui procure à l’enfant une sorte de système de
support à l’acquisition du langage. (LASS)
Le concept de LASS -> notion de ZPD.
Dans des scénarios transactionnels de routine, le LASS assure la continuité
entre la communication prélinguistique et l’apparition du langage verbal.
D’où l’importance d’étudier le LAE (Langage Adressé à l’Enfant) et l’input
langagier qui guident l’enfant dans ses pratiques langagières.
L’imitation assure une fonction d’apprentissage par observation du parent.
37
Au départ la mère invite l’enfant, puis l’introduit dans le jeun l’aide à prendre
son tour dans les échanges.
Ainsi l’imitation interactive va permettre à l’enfant, dans des situations
routinières fréquentes de faire ses premières acquisitions.
L’interaction de tutelle :
-Il s’agit de l’aide dont va bénéficier l’enfant de personnes qui sont plus
expertes que lui,
-C’est le type ordinaire de la situation de tutorat dans laquelle l’un des
membres « connaît la réponse » et l’autre ne la connaît pas).
Bruner, va développer la notion d’étayage = ensemble des interactions de
soutien et de guidage mises en œuvre par un adulte ou un autre tuteur pour
aider l’enfant à résoudre seul un problème qu’il ne savait pas résoudre au
préalable.
Cette notion est liée au concept vygotskien de ZPD.
Ces scénarios de transaction, d’interactions standardisées
-qu’o peut appeler aussi des routines, des cadres familiers
-constituent ce que Bruner appelle donc un « système de support à
l’acquisition du langage » (LASS)
Le processus d’étayage, de soutien, de tutorat implique 6 fonctions :
1.L’enrôlement : comportements du tuteur (adulte ou enfant) par lesquels il
s’attache à engager l’intérêt et l’adhésion de son ou ses) partenaire(s) envers
les exigences de la tâche. -> Il s’agit d’éveiller l’intérêt de l’enfant, de faire en
sorte qu’il soit intéressé par la tâche à réaliser.
2.La réduction des degrés de liberté : procédure par lesquelles le tuteur
simplifie la tâche par réduction du nombre des actes requis pour atteindre la
solution. -> Le tuteur décompose l’objectif principal de la tâche en sous-buts
que l’enfant parviendra aisément à atteindre.
3.Le maintien de l’orientation : il s’agit de maintenir l’intérêt de l’enfant, sa
motivation, son attention de manière à ce qu’il poursuive un objectif défini.
4.La signalisation des caractéristiques déterminantes : le tuteur indique ou
souligne par divers moyens les caractéristiques de la tâche qui sont
pertinentes, déterminantes pour son exécution.
38
5.Le contrôle de la frustration : faire en sorte que l’exécution de la tâche ne
soit pas éprouvante pour l’enfant, qu’i vive bien ses erreurs.
6.La démonstration ou présentation de modèles : la présentation d’un modèle
par l’adulte, d’un essai de solution. L’enfant peut alors l’imiter et parachever sa
réalisation.
En s’adressant à la notion de l’échange collaboratif entre la mère et son enfant,
Bruner considère que ce type d’échange forme des formats d’interactions ou
des scénarios routiers.
Les premiers formats consistent en jeux et fournissant un modèle d’élaboration
des premières formes de communication.
Les scénarios de jeu sont faits d’événements dont l’adulte établit les règles et
qu’il construit par le langage.
Un format : un modèle d’interaction standardisé caractérisé par la création
d’un micrcocosme entre un adulte et un jeune enfant, qui distribue les rôles
délimités susceptibles de devenir réversibles plus tard.
Au sein des formats, l’adulte et l’enfant créent un univers à part grâce aux
capacités socio-pragmatiques de l’attention partagée.
Au sein des contextes se développent, en collaboration, des « formats
spécifiques ».
Un format : une situation d’actios-échanges dont on peut décrire les variables
et les supports -> tel type d’activité, avec telle séquence intention-réalisation,
feed-back ; dans tels contextes humains, et où jouent simultanément divers
langage et divers codes…
Ex. de format : les routines ritualisées du bain, ritualisées où, les activités de
l’un et de l’autre, simultanées ou successives, prennent sens pour les deux
partenaires.
Les rituels (toilettes, repas, coucher, jeux) : des moments de langage
spécifiques et des scénarios langagiers qui accompagnent l’action,
Parler AVEC l’enfant en faisant quelque chose ensemble.
Parler à propos d’un objet qui a une fonction culturelle, qui donne à parlerpenser ensemble (construire la co-pensée),
Bruner, a longuement étudié la mise en place du récit chez l’enfant et ses
fonctions :
-Conduite langagière universelle
-Conduite langagière la plus fréquente,
-Ancrage dans une culture
39
-Recherche d’un sens face à un événement, un constant une action inattendue,
inconnus, sidérants…
Synthèse approche pragmatique / interactionnelle :
Dans les interactions verbales entre l’adulte et l’enfant, l’attention conjointe
se développe au départ par le contexte de regard ou grâce à l’introduction de
l’objet comme cible de l’attention conjointe.
Bruner, étayage : un ensemble des interactions d’assistance de l’adulte,
permettant à l’enfant d’apprendre à organiser ses conduites afin de pourvoir
résoudre seul un problème qu’il ne savait pas résoudre au départ.
L’enfant est ainsi guidé par l’adulte, qui est une personne culturellement et
socialement expérimentée et capable de lui transmettre non seulement le
langage, mais les valeurs culturelles et sociales d’une société donnée.
Dans l’interaction avec adulte, l’enfant acquiert non seulement la manière
d’exprimer ses intentions, mais aussi à travers le langage il accède à la
reproduction de l’ordre social, des connaissances culturelles, des croyances,
valeurs et des idéologies.
L’enfant n’est pas considéré comme un récepteur passif de la culture, mais, au
contraire, il est le contributeur actif dans la construction du sens et dans le
déroulement de l’interaction.
En mettant l’accent sur la primauté des pratiques langagières et de l’input.
13.Les théories fonctionnalistes
Le langage émerge de l’interaction entre les capacités cognitives de l’enfant et
son expérience langagière, dans un environnement social où il est exposé à un
input langagier (= modèle de langage qu’apporte les parents, les personnes de
l’environnement)
C’est à travers l’usage du langage pour communiquer que nait la structure
même du langage que l’enfant va intégrer.
Elles ont en commun que, comme le souligne N. Akhtar (2004), elles « croient »
au développement et se proposent de l’expliquer.
Sans pour autant nier l’existence des prédispositions ou contraintes
biologiques, ni les particularités linguistiques de l’acquisition du langage, elles
soulignent le rôle central des déterminants environnementaux et sociaux et
des déterminants cognitifs généraux dans le développement langagier.
40
Elles s’appuient sur les avancées de divers secteurs de recherche, allant de la
psychologie et neuropsychologie développementales à la modélisation et à la
linguistique théorique.
Et notamment des progrès considérables concernant le développement du
cerveau ont été réalisés dans les 20 dernières années grâce à l’essor des
études d’imagerie et des études lésionnelles.
Il est aussi apparu que l’enfant avait à sa disposition, à la fin de sa 1 ère année de
vie, un ensemble de mécanismes d’apprentissage beaucoup plus puissants
qu’on ne le pensait à l’époque du behaviorisme et qui contribuaient à
l’émergence du langage.
Diverses capacités communicatives et cognitives se mettent en place de
manière convergente pour former, vers 8-10 mois, un ensemble de conditions
préalables et nécessaires à l’émergence du système linguistique.
La motivation à communiquer, les capacités de catégorisation, d’imitation,
d’attention, de mémoire à court terme, et, plus particulièrement, les capacités
de perception, de segmentation et de production des sons de parole.
Un autre domaine en plein essor : la modélisation :
-Le connexionnisme : ces modèles s’intéressent davantage aux processus
d’apprentissage.
-La théorie des systèmes dynamiques, Thelen, et Smith, Van Geert mettent en
œuvre des outils mathématiques et statistiques explicitement destinés à
rendre compte du développement -> s’intéressent plus à la trajectoire, la
nature, la forme et les causes de changement.
Importance de l’input langagier dans l’usage et l’acquisition du langage. Les
partisans d’un fonctionnalisme probabiliste / d’un fonctionnalisme basé sur
l’usage.
Ils ne rejettent pas la conception probabiliste, mais, ils insistent sur le fait que :
l’enfant arrive à développer, construire de plus en plus à partir d’énoncés de
contexte particuliers.
Selon Daviault, le fonctionnalisme basé sur l’usage insiste sur le fait que :
l’enfant est attentif aux attentions de gens qui l’entourent et se base sur ses
interprétations de ces intentions pour interpréter les mots et les phrases.
41
On peut faire le parallèle avec les propos de Daviault étant donné l’importance
de l’entourage social de l’enfant qui nourrit :
-Le processus interpsychique, d’une part
-Et, d’autre part, « l’enfant attentif », interprétant les intentions des autres
dans l’input langagier et ainsi intégrant le langage, ce que décrit le processus
intrapsychique.
Dans cette même perspective, l’engagement de l’enfant dans ce processus fait
écho à celui d’appropriation du langage et des langues étayés pas Castellotti.
Dans le processus d’appropriation, l’enfant acquiert le langage en se
mobilisant, en adoptant une conduite réflexive sur son expérience en relation
avec celle des autres.
L’appropriation englobe l’apprentissage, qui met plutôt l’accent sur le résultat
de l’appropriation.
Ce processus donne lieu à une transformation qui ne peut pas s’entendre au
sens de prendre possession. Il convient plutôt de la définir comme « entrer
dans une relation avec les autres, dans une rencontre qui engage chacun avec
toute personne ».
14.L’approche cognitive : linguistique fondée sur l’usage
Cette approche remet en cause l’idée que la dimension structurale et la
dimension pragmatique-discursive sont a priori dissociées.
Le langage est vu comme une entité qui émerge de l’interaction entre
l’expérience de l’enfant et ses capacités cognitives.
Bruner : avant même d’avoir recours au langage verbal, l’enfant est capable de
transmettre des intentions communicatives par des geste ou des vocalisations.
La linguistique fondée sur l’usage est une approche fonctionnelle dans le sens
où les partisans de cette approche voient dans la fonction communicative du
symbole linguistique la force directrice dans le processus acquisitionnel.
Les travaux de Bates ont mis en évidence la valeur pragmatique de la
communication non verbale, en observant que les premiers mots de l’enfant
viendraient se greffer à des gestes produits antérieurement à ces premiers
mots (par ex. l’adv déictique « là » associé à un geste de pointage)
Behrens, distingue trois axes de recherches au sein de la LFU :
42
-Les adultes des processus cognitifs de l’enfant et ceux de l’adulte : Les
catégories chez le jeune enfant ne sont ni abstraites, ni générales mais
spécifiques au lexique.
-Les études de la corrélation entre l’input langagier et le développement de
l’enfant : les travaux observent l’expérience positive que les enfants reçoivent
au cours de l’acquisition du langage. L’hypothèse principale est que les progrès
langagiers de l’enfant corrèlent positivement avec les propriétés
distributionnelles de l’input (= tout ce que reçoit l’enfant) parental.
-Les recherches qui visent à expliquer les différences individuelles : en
acquisition du langage par les capacités sociales et cognitives générales, ce que
relève des processus d’apprentissage général, ce qui relève des processus
d’apprentissage général.
Ces recherches reposent sur la considération que l’usage du langage dans le
contexte comme la principale explication de son organisation, de son
fonctionnement et de sa genèse.
Les formes linguistiques émergent de l’usage du langage. Les capacités
linguistiques que l’enfant possède résultent de l’accumulation de l’expérience
langagière qu’il acquiert à travers l’événement d’usage tout au long de sa vie.
L’enfant construit son système linguistique par un processus d’abstraction à
partir des données disponibles dans son environnement langagier.
Les interactions avec l’environnement verbal de l’enfant favorisent son
développement sociocognitif tel que :
-Les capacités d’expression de ses propres perspectives,
-L’inclusion des perspectives d’autrui,
-Et de compréhension d’existence de perspectives multiples qui sont
présentées dans l’input parental.
Au sein de la Linguistique Fondé sur l’Usage, ce système interagit avec d’autres
processus et au cours d’une rencontre verbale, il est modifié par l’usage et
n’est plus considéré comme « un ensemble de représentations sous-jacentes,
homogènes, stables et invariantes, actualisées dans une performance
fluctuante ».
Les processus langagiers émergent des interactions entre les capacités sociales
et cognitives, d’une part, et les caractéristiques de la langue et des
comportements de l’entourage de l’autre.
Tomasello énumère 4 séries de processus impliquées dans le développement
langagier :
-La lecture des intentions qui permet les apprentissages symboliques.
43
-Les processus (probabilistes et implicites) de schématisation et d’analogie.
-L’enracinement distributionnelle contextualisée (également statistique et
implicite) d’où émergent les capacités.
Cette vision intégrante des représentations de l’enfant par la LFU emprunte ses
orientations à différentes conceptions qui l’ont précédée :
La LFU retient les conceptions des mécanismes cognitifs élaborés au sein des
approches :
-probabilistes
-connexionnistes
-et de la psychologie développementale
L’approche cognitive :
-Le fonctionnalisme : la linguistique fondée sur l’usage ou le socio-cognitivisme
-L’émergentisme
-Le connexionnisme
Des approches probabilistes, elle retient les propriétés distributionnelles et la
mesure de traitement de l’info, c’est-à-dire, les suppositions de traitement
d’une quantité d’info donnée dans une variable particulière.
Des approches connexionnistes, elle retient la manière dont les connexions
neuronales participent dans la découverte des propriétés structurelles.
L’hypothèse principale : l’expérience langagière guide l’enfant de manière
fonctionnelle dans la découverte des structures qu’il entend.
De la psychologie développementale, la LFU retient l’idée que les catégories
ont des frontières floues et le progrès développemental n’est pas un processus
linéaire, mais montre une variabilité de plateaux hauts et soudains.
Chaque individu est considéré comme un système dynamique, donc le progrès
peut être prédit par ses expériences.
Contrairement au :
-behaviorisme, qui renonçait au rôle de toute capacité cognitive dans
l’acquisition langagière, la LFU cherche à rapprocher les processus cognitifs à
l’usage du langage, et donc à l’interaction entre l’adulte et l’enfant.
-Générativisme, où dominait la conception innéiste et universelle du langage, la
LFU voit l’acquisition du langage par l’enfant dans la construction graduelle à
partir de l’input et l’échange entre l’adulte et l’enfant.
44
La faculté du langage n’est pas conçue comme une faculté autonome, mais
comme une faculté émergente relevant de mécanismes cognitifs généraux qui
sont à relier à l’expérience cognitive en général. Le langage est enraciné dans le
génome humaine comme toute autre capacité humaine.
D’après l’hypothèse émergentiste, l’acquisition du langage n’est pas le produit
inné, mais par les interactions entre les capacités cognitives générales de
l’enfant et l’environnement linguistique les catégories linguistiques sont
construites progressivement.
15.L’émergentisme
Selon Hilton, une théorie émergentiste est un modèle où les connaissances et
compétences langagières émergent des interactions entre les capacités
sociales et cognitives d’un bébé d’un côté, et les caractéristiques de la langue
maternelle et les comportements de son entourage de l’autre.
L’émergentisme accorde une importance à la théorie de l’évolution et à la
biologie, la maturation biologique de l’être humaine, la neurobiologie et la
génétique, pour prendre en compte des interactions à tout niveau possible :
des gènes à l’environnement social.
MacWhinney précise un certain nombre de divergences entre l’émergentisme
et l’innéisme.
Tout d’abord, l’émergentisme réfute une prédisposition spécifique au langage
chez l’être humain et s’oppose à une théorie de l’acquisition du langage soustendue par ka GU.
Dans la théorie émergentiste, contrairement à l’innéisme, le langage n’est pas
modulaire et isolé, toutes ses composantes sont en interactions.
Alors que les innéistes s’attachent à un système de règles structurant la GU et
discréditent le rôle de l’input, les émergentistes lui donnent un rôle primordial
45
puisque sa richesse apporte à l’enfant les indices permettant de comprendre
comment des schémas récurrents surgissent dans l’usage de la langue.
Les structures linguistiques émergent de ces schémas qui sont organisés et
généralisés par l’enfant.
Contrairement aux innéistes, le langage est présenté comme émergeant des
interactions sociales dans une communauté.
L’émergence des connaissances et compétences langagières est donc
conditionnée par des facteurs jugés comme universel puisque partagés par
tous les êtres humains mais qu’il est difficile de hiérarchiser par ordre
d’importance dans l’acquisition du langage.
16.Le connexionnisme
Les modèles connexionnistes se sont développés depuis la fin des années 80.
Ils sont issus des modèles computationnels et représentent l’aspect
dynamique des processus cognitifs dans une perspective développementaliste
et interdisciplinaire en prenant en compte l’environnement de l’individu.
Ils envisagent le langage comme un réseau de connexions de neurones formels
qui rappellent les systèmes neuronaux physiologiques en soulignant leur
adaptabilité au contexte dans lequel l’individue évolue.
Certains neurones du modèle reçoivent des informations de l’input, ce qui
déclenche un processus d’activation / inhibition au sein du système neuronal
modélisé.
Dans cette théorie, on essaie de comprendre le fonctionnement du cerveau
pour expliquer la structure du langage de par les changements neurologiques
qui ont lieu à l’apparition de nouvelles connaissances linguistiques.
Le langage est représenté à travers l’organisation de réseau de nœuds et de
connexions neuronales qui se transforment, s’adaptent et s’améliorent en
fonction de l’input langagier que l’enfant a à sa disposition.
Les modèles connexionnistes supposent une architecture parallèle, i.e
l’activation simultané de processeurs multiples qui provoquent des interactions
46
inhibitrices ou stimulatrices entre le réseau de nœuds, notamment pendant la
lecture de phrases.
Selon Elman et al., les neurosciences ont permis d’intégrer à des systèmes
computationnels inspirés par l’intelligence artificielle.
Ainsi, le connexionnisme envisage une interaction entre l’innée et l’acquis,
mais en redéfinissant l’innéisme. Les connexionnistes s’opposent à l’idée que le
langage soit hérité génétiquement.
Pour eux l’acquisition du langage peut alors être envisagée comme le fruit de
l’interaction entre apprentissages rendus possibles grâce aux expériences de
l’individu dans son environnement et un fonctionnement biologique et
neurologique, certes propres à l’espèce humaine, mais dont l’architecture et
les contraintes sont influencés par l’héritage génétique.
17.Le connexionnisme vs l’émergentisme
Ellis a souligné l’intérêt et l’adéquation des modèles connexionnistes avec les
théories émergentistes comme un outil de recherche pertinent.
V La socialisation langagière
Schieffelin présente la socialisation langagière comme « le processus par lequel
les enfants et autres novices sont socialisés par la langue ».
Par ce processus, l’enfant peut « apprendre comment utiliser la langue pour
produire des énoncés qui aient un sens » afin d’être compris et inséré dans sa
communauté.
Pour Schieffelin, la socialisation « débute dès la naissance puisque la manière
dont on s’adresse ou pas à l’enfant est régie et organisée par la culture dans
laquelle on s’insère ».
47
Weil-Barais, Lacroix et Gaux (2007) (schéma exclusivement focalisé sur une
dimension occidentale / européenne) :
-Le microsystème : (famille, assistante maternelle, crèche) a un impact direct
sur le développement du jeune enfant à travers les activités, les rôles et les
relations interpersonnelles dont il fait l’expérience.
-Le mésosystème : les relations entre les différents systèmes microsystèmes au
sein desquels l’enfant est inséré (un même enfant peut être gardé par une
assistante maternelle en journée, avant de retrouver ses parents le soir).
-L’exosystème : la famille élargie et les lieux comme l’école, les lieux
d’interactions sociale (boulangerie, poste…)
-Le macrosystème : la communauté dans laquelle évolue l’enfant et les
caractéristiques de celle-ci (législation, coutumes, valeurs).
Dichotomie entre pratiques langagières dans le cadre familial et en milieu
institutionnels.
Socialisation langagière : une vision classique binaire qui cache une grande
complexité :
Deux formes de socialisation langagière :
La « socialisation première » dans le cadre des relations familiales (au sens
large ; voir les relations langagières intergénérationnelles)
La « socialisation secondaire » dans le cadre des structures éducatives (au sens
large ; l’institution scolaire et les autres instances institutionnelles)
Complexité de la notion qui présente plusieurs dimensions :
Bien évidemment :
-Celle du nombre et du statut de la/des langue(s)
-Celle de la variation des usages oraux et écrits
Mais aussi :
-Celle de la nature des divers interlocuteurs
-Celle des attitudes et représentations langagières des usages et des usagers
Delamotte & Akinci (2014) relativisent cette conception classique et binaire de
la socialisation (première dans le cadre familial et secondaire dans le cadre
éducatif).
Contexte plurilingue de Mayotte > pour les enfants mahorais > diverses
instances de socialisation.
La socialisation du langage peut donc varier selon les milieux et leur
structuration, milieux déterminés par leur histoire propre.
48
Socialisation plurilingue des enfants mahorais : instances de socialisation :
FIN
Lieux des usages langagiers :
Socialisation des enfants mahorais : usages écrits :
-dans la famille : très peu d’écrit des langues locales
-dans l’espace public : mélanges (dominance du français)
-dans l’institution scolaire : français
-dans les écoles coraniques : arabe
49
Socialisation plurilingue de l’enfant : des cas de figures multiples :
-Contexte monolingue :
-Familles monolingues : de la même langue de l’environnement, mais qui
ont choisi pour leur enfant une éducation bilingue.
-Familles migrantes : parents de même langue, mais la langue de
l’environnement en est une autre.
-Familles mixtes : parents de langues différentes, mais la langue de
l’environnement est l’une de ces deux langues.
-Familles double-mixtes : parents de langues différentes, mais la langue
de l’environnement en est une troisième.
-Contexte plurilingue :
-Acquisition en famille dès la naissance (avec ou non la langue de
l’environnement) : Bilinguisme comme première langue
Bilinguisme simultané
Acquisition de deux langues maternelles
Bilinguisme natif
-Acquisition monolingue en famille (langue autre que celle de
l’environnement) puis acquisition de la langue de l’environnement en
institution éducative précoce : bilinguisme consécutif distingue
cependant 2 cas selon l’âge -> un bilinguisme précoce (2ème langue entre
12 et 24 mois) et un monolinguisme suivi d’un bilinguisme (2 ème langue
entre 2’ et 36 mois)
-Situations de plurilinguisme complexe : plusieurs langues familiales et
plusieurs langues autres dans le pays de résidence.
La socialisation langagière :
Pour les enfants occidentaux, certaines spécificités de l’environnement
peuvent également influencer certains aspects du développement langagier de
l’enfants.
Par exemple, l’étude d’E. Hoff (2003) révèle que le statut socio-économique
pourrait jouer, de façon indirecte, un rôle sur le développement langagier de
l’enfant.
50
En se focalisant sur 6 variables du discours maternel, montre que les mères qui
possèdent un statut socio-économique bas ou moyen présentent un discours
moins riche que les mères possédant un statut socio-économique élevé.
Elle pose que ce facteur pourrait expliquer en partie les différences que l’on
peut observer dans le développement langagier des enfants.
E. Hoff parle à ce propos d’ « environnemental specify hypothesis ».
Au cours de sa socialisation et lors de l’acquisition et du développement du
langage, l’enfant a pour tâche d’apprendre, d’une part, le fonctionnement de
la langue (l’outil que son entourage et sa communauté emploient pour
communiquer) et son usage adéquat dans des activités socialement
signifiantes.
R. Ely et J. Berko Gleason (1995) : schéma en trois temps pour évoquer la place
et le rôle des parents dans le processus de la socialisation de l’enfant. Le
langage des parents :
1. Il exercerait une fonction injonctive (impérative) qui sélectionnerait le
comportement enfantin adéquat dans le but de faire respecter l’ordre social.
2. Serait impliqué dans des situations spécifiques permettant à leur enfant de
sélectionner des formes linguistiques appropriés aux contexte communicatifs
(salutations, éléments de politesse…)
3. Transmettrait de façon indirecte les attentes sociales suscitant l’enfant des
comportements qui se conforment aux rôles assignés en fonction du sexe du
locuteur.
VI Les interactions adulte – enfant
Les interactions adulte – enfant -> échanges asymétriques -> adultes =
« expert »
François (1993) : 2 types d’étayages :
-L’étayage global : celui qui se manifeste par la présence même de l’adulte, par
une attention enveloppante qui met l’enfant dans des conditions favorables
pour inter-réagir, et par le fait « d’accepter ce que dit l’autre, de lui manifester
de l’intérêt « en l’accompagnant dans ses acquisitions et ses apprentissages.
-L’étayage spécifique ou local : celui qui consiste à apprendre à l’autre à réussir
dans une tâche où il échoie, autrement dit une interaction de guidage.
51
Snow Perlmann et Nathan, (1987) : ajustement ou réglage minutieux (finetuning) entre le langage que l’adulte adresse à l’enfant et le niveau de
développement langagier de l’enfant.
Nelson et al. (1983) : rôle fondamental des adultes -> la notion de « catalyseurs
positifs ».
Les reprises et les reformulations (= « recasts ») témoins de cet ajustement de
l’adulte à l’enfant.
L’étude des formes et des fonctions des reprises / reformulations chez les
enfants entre 2 et 4 ans.
Les répétitions et les reformulations sont fréquentes dans le discours des
adultes en interaction avec de jeunes enfants en fonction de son
développement langagier :
Davantage de reformulations le discours des tout jeunes enfants et de
répétitions à l’âge pré-scolaire ou scolaire.
Veneziano (1997) -> le rôle de la reprise ou de l’imitation dans les échanges
conversationnels entre une mère et son enfant.
1. Le rôle de la reprise par l’enfant (E2) de l’interprétation de la mère (M1)
de l’énoncé source de l’enfant.
2. Le rôle de la reprise initiative d’un autre mot non produit
précédemment par l’enfant et présent dans l’énoncé de son
interlocuteur, pour le développement syntaxique et la production
d’énoncés à plusieurs mots
Interactions adulte (la mère) / jeune enfant -> les observations des reprises ->
des modifications sur les formes phonologique, lexicale, morphologique et
syntaxique.
Les reprise -> au développement et à la continuité du dialogue entre
interlocuteurs.
52
Clark et Choinard : suivi longitudinal de 2 enfants (francophone de 2 ; O1, 19 à
3 ; 03, 12 / anglophone de 2 ; 04 24 à 4 ; 01), -> les parents se focalisent
davantage sur la structure des énoncés que sur la morphologie ou la
phonologie :
+ de reformulations syntaxiques à tous les âges (entre 2 ; 0 et 3 ; 11, 67 à 50%
de reformulations -> suite a un énoncé syntaxiquement erroné de l’enfant.
Ils ont également pris en compte des réactions de l’enfant -> 3 possibilités,
l’enfant :
1. Rejette explicitement la reformulation car elle ne correspond pas à son
intention, il réitère son énoncé.
2. Accepte explicitement la reformulation et la répète,
3. Accepte la reformulation mais la ratifie de façon implicite, en
poursuivant l’échange.
Les reformulations permettent aux enfants de participer à l’élaboration
discursive et d’intégrer le mécanisme des tours de parole.
Cette étude souligne la nécessité d’une compréhension mutuelle des locuteurs
pour la poursuite de l’échange.
2 grands groupes d’enfants, en interaction avec leur mère :
L’âge des enfants (âgés de 2 ;03 et 3 ;06) -> une influence sur les fonctions des
reprises.
Les mères font des reprises des énoncés des enfants de 2 ;03 pour contrôler
l’intention de l’enfant et apporter une modification sur la forme.
Les enfants de cet âge utilisent en majorité la reprise pour ratifier un énoncé
de l’adulte.
Les enfants de 3 ;06 ans -> ajouter une ou des informations nouvelles
parallèlement les mères reprennent les énoncés des enfants pour ajouter une
ou des infos nouvelles mais aussi pour ratifier.
53
La fratrie offre à l’enfant une occasion supplémentaire de s’engager dans un
contexte socio-interactionnel.
Si les enfants ont approximativement le même âge, les frères et sœurs jouent
le rôle de premiers pairs.
La proximité des âges et l’appartenance à la même génération donneraient à
l’interaction entre frères et sœurs davantage de réciprocité, voire de
complicité, comparée aux échanges avec les parents.
Les interactions frère aîné / sœur aînée - enfant et les interactions parentenfant n’ont donc pas les mêmes caractéristiques.
L’adaptation du discours de groupes d’ainées (âgés de 4 à 5 ans pour le 1 er
groupe et de 7 à 8 ans pour le 2 ème groupe) au discours du plus jeune (âgé de 1
an ½ à 3 ans)
Comparaison avec celle de la mère au discours du plus jeune.
Résultats : les ainés adaptent moins bien leur discours aux propos de leur petit
frère ou de leur petite sœur que les enfants de 7 ou 8 ans, ces mères étant euxmêmes moins performants que les mères.
Dyades mère-cadet et dyades ainé-cadet :
Les cadets : 01 ;10 à 02 ;02 ans / les ainés : 03 ;07 et 06 ;04
54
Les dyades ainés-cadet parlent moins et ont des échanges plus courts que les
dyades mères-cadet.
Les frères et sœurs posent moins de questions que les mères mais se montrent
en revanche plus directifs.
Les aînés réparent 2 fois moins que les mères les perturbations ou les
interruptions dans la conversation.
Les cadets ont le même style conversationnel qu’ils soient en interaction avec
la mère ou bien avec leur aîné.
Interactions dans la fratrie :
Des différences entre le groupe des enfants gardés par leur mère et les 2 autres
groupes sur :
-les plans structural (critère de la LME)
-et pragmatique (participation de l’enfant à la conversation en comptant le
nombre de tours de parole sur un enregistrements)
Marcos et al -> « le mode de garde aurait un certain effet sur le développement
des conduites dialogiques. »
VII Le langage adressé au enfants (Le LAE)
Le LAE : la façon dont les AD ou des enfants plus âgés peuvent s’adresser à des
nourrissons ou à de jeunes enfants.
Le LAE -> traduction littérale de l’expression : infant / child direcetd speech
Le LAE -> baby talk (traduit par langage bébé en français)
Le LAE :
Motherese / mommy talk (mamanais en fr) : langage par la mère lorsqu’elle
s’adresse à son enfant
Fatherese / Daddy Talk : langage employé par le père lorsqu’il s’adresse à son
enfant ;
Parentese / Caretaker Talk / Caregiver Talk : LAE par les parents ou par les
personnes qui s’occupent + ou - quotidiennement de l’enfant (grands-parents,
assistantes maternelles, puéricultrices, etc.).
Le LAE : des caractéristiques structurales spécifiques (Jisa & Richaud, 1994 pour
une synthèse).
Prosodique et phonologique :
-un rythme/débit ralenti, + lent des unités phoniques (moins de mots par
minute) (Kail, 2012 : 45),
55
-une hauteur mélodique importante (il est souvent comparé à une « voix flutée
») (Garnica, 1977),
-une hauteur de ton + élevée,
-une accentuation des mots à contenu (noms et verbes essentiellement) avec
les contours intonatifs exagérés (Garnica, 1977 ; Karmiloff & Karmiloff-Smith,
2001/2003),
-une hyper-articulation des voyelles.
Les AD tendent à produire davantage de pauses pour marquer la délimitation
des énoncés. La prosodie permettrait de rendre plus saillant le discours en
l’organisant en groupes syntaxiques.
Lexical et sémantique : le LAE comporte un vocabulaire plus réduit que le
répertoire lexical de la langue adulte (Kail, 2012).
-La diversité lexicale est moindre,
-usage de verbes sémantiquement légers (tels que look, put, see, qui sont
présents dans 53 % des énoncés à l’impératif en anglais, et tels que faire, aller,
mettre, regarder, prendre en français (Chenu & Jisa, 2005),
-un registre ancré dans l’ici et maintenant (Kail, 2012 : 45) et aux objets et
actions visibles.
-Des champs lexicaux sont privilégiés >
à la famille/entourage de l’enfant,
les termes qui renvoient à des parties du corps,
à des jeux,
ou encore à la nourriture (François, 1977).
-Des termes sont associés à un procédé hypocoristique :
l’emploi d’affixes diminutifs,
l’abrègement et/ou la duplication d’une des syllabes des prénoms,
l’emploi d’expressions conventionnellement hypocoristiques
Morpho-syntaxique,
-Les énoncés sont courts (LME), + simples et grammaticaux que ceux relevés
dans la langue adulte (Brown & Bellugi, 1964).
-Les constructions complexes sont relativement rares (subordonnées et
passives),
La parataxe est + fréquente que la subordination ou que la coordination
(Shatz & Gelman, 1973).
-Peu d’hésitations et + d’énoncés interrompus,
-De nombreuses répétitions (la redondance) ou du discours de l’enfant
accompagnées d’expansions grammaticales et des extensions sémantiques.
56
(Brown, Cazden, & Bellugi, 1969 ; Newport, Gleitman, & Gleitman, 1977 ; Clark
& Chouinard, 2000),
Deux constructions > fréquents dans le LAE des mères :
-les constructions à l’impératif,
-les dénominations ou les demandes de dénomination de type
[this/that/here/there/it + is+what/where].
Pragmatique :
-Pine (1994) > il y a – d’énoncés déclaratifs dans le LAE que lors de
conversations entre adultes.
-La part de questions est + importante.
-Cameron-Faulkner et al. (2003) > les énoncés sont fréquemment des questions
(31 % dont 15 % de questions fermées et 16 % de questions partielles-wh) et
des impératifs (9 %).
Les caractéristiques du LAE > non figées > relèvent d’un processus dynamique
entre l’enfant et l’adulte (van Dijk & van Geert, 2011).
Veneziano (1987 : 102) : « le registre des mères ne présente pas un phénomène
monolithique ».
Un langage adapté à la fois au niveau actuel de l’enfant et à son niveau
potentiel > offrir ce dont il a besoin pour son développement (Tomasello &
Brooks, 1999).
Le langage modulé s’inscrit dans la ZPD de l’enfant (Vygotski, 1936) et s’ajuste
finement aux compétences langagières en cours d’acquisition.
Le LAE : un processus culturel non universel :
Le LAE > observé dans des communautés linguistiques parlant des langues
typologiquement très éloignées (Ferguson, 1978),
Le LAE > un processus répandu culturellement, mais pas universel (Ochs,
Schieffelin & Platt, 1979).
Par ex., certaines communautés linguistiques non occidentales n’utilisent pas
ou développent peu le LAE.
-Les Kwara’n des îles Salomon (Watson-Gegoe & Gegeo, 1986), les
Basotho de Lesotho en Afrique du sud (Demuth, 1986), les Kaloulis,
(Schieffelin, 1985) > les adultes ne parlent pas aux enfants au stade prélinguistique.
57
Schieffelin (1981, 1985) > la façon dont les adultes du peuple Kaluli (PapouasieNouvelle-Guinée) s’adressent aux tout jeunes enfants :
Les enfants ne sont pas considérés comme des interlocuteurs à part entière
tant qu’ils ne commencent pas à entrer dans le langage.
Dès cette étape franchie, les adultes ont directement recours au langage
adulte pour s’adresser aux enfants, sans le moduler par ≠ caractéristiques du
LAE.
Schieffelin & Ochs (1984) > la communauté Kaluli a recours à des modalités
d’adresse ritualisées et routinières, qu’elles nomment les elema routines.
Schieffelin & Ochs, 1984 : 292-293 > une mère, sa fille Binalia (5;00), son fils
Wanu (2;03) et leur cousine Mama (3;06). Tous sont en train de cuisiner. Cet
exemple illustre les elema/Say like that routines.
Ochs (1982) > observations similaires > le peuple polynésien des Samoa, > le
statut de l’enfant et le fonctionnement de la communauté ne présentent pas
les mêmes fondements que les sociétés occidentales.
Rabain-Jamain (2001) > chez les Wolof > les jeunes enfants sont auditeurs de
conversations dans lesquelles ils ne sont que rarement intégrés. Une fois que
l’enfant commence à parler, davantage d’attention est accordée à l’enfant.
Rabain-Jamain > relève des caractéristiques des échanges avec des enfants de
2;00 : elle identifie des formes de discours rapporté (« il a dit… ») chez les
mères et les aînés de l’enfant, mais aussi des formes de discours dicté (« Dislui… »). Ils suggèrent des éléments pertinents à adresser à un tiers (adulte ou
enfant plus âgé).
Rabain-Jamain > montre que les conduites de discours rapporté possèdent une
fonction étayante par la répétition en interaction polyadique.
Le LAE >varie en fonction de la classe socio-économique des parents ou des
activités en cours.
Enfants (à 2;5 ou 3, 4-5 ans) > Une part importante
des impératifs dans LAE dans des situations de jeux libres,
d’énoncés déclaratifs dans une situation de lecture de livre (Fahim &
Rahimi, 2013).
Lecture de livre, les mères (américaines ou chinoises) produisent + de noms
que de verbes alors qu’elles produisent + de verbes en situation de jeu (Tardif,
Gelman & Xu, 1999).
58
Le LAE : Langage maternel et langage paternel :
Les apports de la mère et ceux du père ne sont jamais complètement
superposables (Le Camus, 2005),
les pères d’aujourd’hui sont autant impliqués que les mères.
Ce constat est moins évident lorsqu’il s’agit de déterminer si les apports
langagiers de la mère et ceux du père présentent des traits communs lorsqu’ils
s’adressent à leur enfant.
Trois limites :
1) un intérêt préférentiel pour l’input maternel au détriment de celui du père
(Le Camus, 2001 ; De Houwer, 2000) ;
2) une approche comparative entre le LAE par les mères et le LAE par les pères
limitée à leurs seules spécificités structurales ;
3) un recours à des mesures ou à des variables de nature corrélationnelle entre
les productions de l’enfant et celles du parent trop générales qui ne tiennent
pas ou peu compte du contexte discursif.
Trois conclusions :
1) il existe des similitudes prosodiques, phonologiques, lexicales,
syntaxiques dans le langage que les deux parents adressent à leur enfant.
2) il existe certaines spécificités du discours maternel et du discours
paternel sur ces mêmes plans.
Bruner (1983 : 33) : « les parents prennent une part bien plus active dans
l’acquisition du langage que le simple fait de donner des modèles et de fournir
pour ainsi dire la matière à un dispositif d’acquisition du langage (LAD) ».
 3) il existe des différences minimes entre le LAE mères et le LAE
pères au niveau structural, mais que l’on observe des divergences
plus marquées entre les mères et les pères au niveau pragmaticodiscursif et dans les conduites des deux parents.
Tomasello, Conti-Ramsden & Ewert (1990) :
Les pères ont tendance à poser + de questions partielles (whquestions/questions du type qui ? où ? pourquoi ?) ou ouvertes ;
Les mères ont surtout recours à des questions totales, où la réponse
attendue de l’enfant sera minimale (oui vs. non).
Cependant, les pères tendent à poser globalement + de questions que les
mères.
Le nombre important de demandes > conséquence une rupture du dialogue +
fréquente dans les dyades père-enfant que dans les dyades mère-enfant.
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Ochs & Taylor (1996) : les pères semblent être plus directifs que les mères, et
poseraient de ce fait – de questions à l’enfant que les mères.
Malone & Guy (1982), Walker & Armstrong (1995) : les pères seraient
également + exigeants et axés sur le contrôle de l’orientation de l’interaction
que les mères.
Dans des conversations ou des situations de jeu en présence d’objets, les pères
adressent deux fois + de requêtes de clarification et de demandes d’action que
les mères.
Ils sont portés à produire + de demandes de reformulation tandis que les mères
auraient davantage recours à la reprise/répétition.
Dimension pragmatico-discursive du LAE par les mères et le LAE par les pères >
la Bridge Hypothesis (Hypothèse du Pont), (Berko Gleason, 1975 ; Barton &
Tomasello, 1994).
Le père aurait recours à un langage qui se distingue de celui de la mère afin
d’aider son enfant à développer des compétences linguistiques et
pragmatiques qui lui seront nécessaires pour conventionnaliser son discours et
se rendre compréhensible par d’autres personnes, extérieures au cercle familial
proche.
Barton & Tomasello (1994) > 4 points dégagés par rapport à la mère, le père
serait un interlocuteur :
– « répondant » (less communicatively responsive) et aurait tendance à
ignorer + souvent les initiatives de l’enfant dans le dialogue ;
– « accompagnant » (less communicatively supportive) dans le dialogue, du
fait de son utilisation moindre de procédés pour maintenir un thème dans le
dialogue ;
– « compétent » (less conversationally competent). On relève chez eux + de
ruptures et – de réparations dans les dyades père-enfant que dans les dyades
mère-enfant. Les échanges entre le père et l’enfant tendent à être + courts que
ceux entre la mère et l’enfant.
imposerait + fréquemment les thèmes abordés dans le dialogue et
influencerait + souvent le comportement de l’enfant.
Pour conclure sur le LAE des parents… :
Des ≠ entre les mères et les pères.
Becker-Bryant (2001) : ≠ assignables aux ≠ rôles sociaux joués par les parents.
Le père, caregiver secondaire, aurait – de contacts avec son enfant et inciterait
ce dernier à communiquer de façon + claire et appropriée que lorsqu’il
s’adresse à sa mère.
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Hwang (1986) : père suédois ayant pris un congé paternité >
malgré l’implication importante des pères en termes de tâches familiales et
éducatives, des ≠ dans LAE et dans les soins donnés,
des ≠ qui dépasseraient les rôles de caregiver primaire ou secondaire.
Pour conclure sur le LAE… :
Dès sa naissance, un enfant est confronté à des situations langagières.
Il peut être l’interlocuteur et recevoir le langage qu’on lui adresse (LAE), être
spectateur et entendre le langage adressé à d’autres interlocuteurs.
Le LAE présente des caractéristiques spécifiques au niveau prosodique,
morphosyntaxique, lexical et pragmatique.
Il varie en fonction des activités, du niveau linguistique des enfants, des
cultures.
LAE n’est plus observé de manière isolée mais analysé dans la dynamique des
échanges conversationnels.
Dans le LAE, certaines interventions sont considérées comme étayantes au
niveau linguistique. L’étayage verbal fourni par les adultes, en interaction avec
des enfants, oriente, guide et les aide à développer de nouvelles compétences.
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