Jacques Crepieux 3A - Entrepreneuriat & Innovation Sociale Année Universitaire 2018 - 2019 Pourquoi et comment vivre un mode de vie alternatif Les écolieux sont-ils un modèle pour l’avenir ? Mémoire réalisé́ sous la direction de Martin Durignieux En vue de l’obtention du Master Manager de Projets Internationaux Remerciements Je tenais tout d’abord à remercier les écovillages qui m’ont ouvert leurs portes durant mes voyages. Merci, car grâce à vous j’ai compris ce que cela signifiait la vie en communauté, merci de m’avoir montré le meilleur et le pire de vos expériences. C’est grâce à vos informations précieuses que j’ai pu affiner mon propre projet. Je voudrais remercier particulièrement ceux qui avait pris le temps de répondre à mes questions pour des entretiens, notamment Benjamin Lesage qui ouvert des portes de compréhension qui m’échappait jusqu’alors. Merci à toutes les personnes présentes au festival Utopia édition 2019, ces échanges ont nourri ma réflexion sur les modes de vie alternatifs. Merci d’avoir trouvé les mots rassurants sur l’effondrement et merci d’avoir attisé ma curiosité sur de nouvelles façons de la vivre, car le mécontentement ne peut être la seule réponse. Merci à mes amis Robin, Guillaume et Boris qui depuis 5 ans accompagnent ma démarche de changement. C’est grave à vous que j’ai eu ce fameux « déclic » qui fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Merci de construire avec moi un projet qui nous permettra de vivre enfin en accord avec nous même Je voudrais également remercier toute la promotion 2019 – 3A EIS avec laquelle j’ai noué une bonne complicité. Merci pour votre bienveillance et pour votre accueil chaleureux, merci de m’avoir donné les codes de l’école de commerce alors que je venais du monde universitaire. Grâce à vous je maîtrise davantage les normes pour pouvoir mieux m’en affranchir. Je vous souhaite de tous réussi pour rendre ce monde meilleur. Merci aux professeurs qui ont nourri mon intérêt pour la discipline et qui m’ont donné de nouvelles pistes de réflexion dans ma démarche. C’est aussi grâce à vous que j’ai choisi ce sujet. Merci à mon tuteur Martin Durigneux pour ses conseils et sa culture très étendu sur la question. Merci à toute mon équipe de l’été qui a su être compréhensive quand le temps me manquait. Et enfin merci à ma maman pour sa relecture avisée, je te promets cette fois c’est la dernière ! 2 Introduction De Nicolat Hulot qui déclarait vouloir une « union nationale dans la guerre pour le climat » à Emmanuel Macron qui parlait de créer un « conseil de défense écologique », les discours politiques autour de l'écologie se sont récemment teintés d’un vocabulaire martial. Même s’il ne s’agit là que de mots, l’analogie est forte : c’est a priori un véritable combat qui s’annonce pour la survie de notre écosystème et pour la vie des générations futures, et contre des habitudes ancrées dans nos consciences depuis trop longtemps. À la fin du XVIIIe siècle, un courant de pensée apparaît : l’humanisme. Développé par les penseurs de la Renaissance, qui s'inspirent eux-mêmes des philosophes grecs, ce terme est par la suite repris par les philosophes des Lumières et renvoie à une doctrine qui prend l’Homme pour fin et valeur suprême et qui vise l’épanouissement de la personne humaine et le respect de sa dignité (Neuvième Dictionnaire de l’Académie française). Une grande ambition émerge alors de contrôler la nature, dont Descartes disait que la science permettrait à l’homme de se rendre « maître et possesseur » ; c’est d’ailleurs dans ce contexte que sont créés les « Jardins à la Française ». L’arrivée de Buffon et Marx, conjointement au développement économique, scientifique et technique exponentielle du XVIIIe siècle, va achever de mettre en marche cette « maîtrise du monde », bouleversant profondément le contexte socioéconomique contemporain. Face aux dérives du terme originel, le philosophe et sociologue Edgar Morin appelle en 2008 à un humanisme concret. Il rejette la définition de « faire de l’homme le maître et le possesseur de la nature » ; pour lui, il s'agit avant tout de la capacité des hommes à diriger leurs cités et à s’autogouverner par la démocratie. Il pense, comme d’autres historiens, que l’humanisme est instrumentalisé par l’idéologie capitaliste et le monde managérial, qui le rendent « absurde » et « arrogant » : selon ses propres mots, « la maîtrise de la nature […] conduit à la dégradation non seulement de la vie, mais aussi de nous-mêmes ». Cette tendance narcissique à placer l’être humain au cœur du projet d’entreprendre et au cœur du monde a en effet entraîné la disparition d’espèces animales et végétales. Si cette destruction existe depuis le Moyen Âge, l’accélération a été fulgurante en cinquante ans. Persuadé de pouvoir prélever des ressources naturelles de manière infinie tout en connaissant une croissance démographique excessive et en adoptant des modes de consommation de plus en plus énergivores, l'homme a provoqué une augmentation des émissions de gaz à effet de serre (GES) de plus de 80 % entre 1970 et 2010. 3 Le monde est de plus en plus urbain, le lien entre population, urbanisation, développement et écologie de plus en plus critique. Face aux grands enjeux démographiques, écologiques et sociétaux de demain, il devient donc indispensable d’imaginer une autre façon de concevoir notre société. Nous devons relever le défi d’un modèle durable, respectueux de l’environnement. Mais l’enjeu est également humain : à l’heure où notre consommation est à l'origine des plus grands désastres planétaires, l’inscription de l’homme dans la société capitaliste telle qu'elle existe actuellement, entre surexploitation des ressources et accentuation de nombreux clivages (le fossé entre riches et pauvres se tenant en tête de liste) n’est plus tenable. Ces questions concernent l’humanité tout entière, dans la mesure où nous vivons tous sur la même planète et où l’effort d’un changement efficient ne peut se faire que par des mesures collectives. La préoccupation écologique est de fait de plus en plus présent dans les esprits. De nombreuses initiatives émergent pour tenter de contenir les tendances actuelles et les nouvelles générations se montrent plus ouvertes à l’idée d’un changement pour lutter contre un possible effondrement. Par exemple, les écovillages sont de plus en plus nombreux, de même que les initiatives individuelles aussi. De nombreux « process » pour réduire son impact personnel sur l’environnement sont largement disponibles en open data et la possibilité d’une évolution individuelle est plus que jamais possible. Les critiques sont de plus en plus vives et notre façon de vivre de plus en plus contestée, comme en témoignent les différents mouvements sociaux qui se multiplient un peu partout. Néanmoins, l’absence de vision d’ensemble et le manque d’éducation à ces problématiques rendent tout un pan de la population complètement indifférent à ces enjeux et lui font préférer le maintien de ses habitudes — d’autant que, malgré leurs déclarations convaincues, la plupart des politiques n’encouragent pas concrètement l’adoption de nouveaux modes de vie et de consommation. En effet, si le ministère de la Transition écologique et sociale a été créé dès 1971, marquant la naissance de la question écologie dans l’esprit des collectivités et de l’État, il n’a pas réussi, au fil des gouvernements, à prendre une place centrale dans l’organisation de la politique générale. Les financements croissants d’actions de développement durable ne suffisent pas à contrebalancer le manque d’ambition de l’État en la matière, et le déni dont il fait preuve écarte l’hypothèse de mesures législatives fortes. De leur côté, les associations (ONG) et les entreprises de l’Économie sociale et solidaire (ESS) travaillent elles aussi à trouver des alternatives viables. Les premières cherchent à 4 préserver notre acquis naturel et participent au lobbying pour la protection écologique, tandis que les secondes tentent d’inventer une façon de vivre plus éthique au sein de notre société. Mais elles le font en restant fortement dépendantes du fonctionnement du système social et des volontés politiques. Devant ces blocages multiples et l’urgence de la situation, j’ai donc décidé de parler de ces enjeux et de la nécessité de participer à la préservation de l’écosystème terre dans lequel nous vivons, voire de le reconstruire. Pour la rédaction de ce mémoire, je me suis notamment référé aux travaux du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). Ce dernier, créé en 1988 par le Programme des Nations unies pour l’environnement, se compose d’une centaine de chercheurs de 52 pays. Si le prochain rapport d’évaluation du GIEC ne sortira qu’en 2022, il a publié en 2018 un rapport spécial de 1 200 pages intitulé « Conséquences d'un réchauffement planétaire de 1,5 °C ». Suivi d’un « Rapport au décideur » destiné aux chefs d’État du monde entier, ce texte fait un constat accablant : si nous ne limitons pas le réchauffement climatique, la vie telle que nous la connaissons pourrait disparaître. À travers ce travail plurisdiplinaire, je tâcherai donc de montrer qu’il existe bel et bien des alternatives à la société « classique », à travers une réflexion autour des modes de vie alternatifs et de l'adhésion croissante qu’ils emportent. Je parlerai par la suite des théories de l’effondrement, qui prédisent l’écroulement du système actuel. La résilience, c’est-à-dire la capacité de se relever du traumatisme qu’engendre la destruction planétaire, est un aspect essentiel dans le développement de mode de vie alternatif. Comment en est-on arrivé là ? Pourquoi vouloir vivre en dehors de la société ? Quelle alternative se présente à nous ? Comment s’y préparer ? Ces questions nous poussent à la problématique suivante : Comment l’évolution systémique a conduit une partie de la population à créer des espaces d’autonomie relative ? Pour cela, je conduirai une réflexion en trois axes. Le premier parlera de la prise de conscience et de l’évolution des pratiques écologique ; le second parlera des alternatives au système actuel, pour finir par une analyse de la méthode de création d’un éco-lieu. De nombreux scientifiques annoncent la huitième extinction de masse si nous poursuivons notre mode de vie. 5 Sommaire Table des matières Introduction ....................................................................................................................... 3 I) Vers un changement des pratiques, comment s’adapter aux dérèglement climatique ? 8 A) Un éveil des consciences mais des politiques publiques trop limité. .................................... 8 a. Le début de la prise de conscience de 1990 à 2010 ............................................................................ 8 b. Une accélération du dialogue les année 2010-2020.......................................................................... 10 c. Un constat planétaire mais des politiques publiques timide............................................................. 12 B) Une société en transition : une évolution des pratiques et écologie militante ................... 15 a. Les pratiques de consommation : Végétarien, Végane, 0 déchet, made in france ........................... 15 b. Énergie et construction écologique : vente énergie verte, maison 0 consommation ; nouvelle construction plastique ou terre ; ................................................................................................................. 17 c. C) Le militantisme et l’activisme écologique .......................................................................................... 19 Un changement radical des mentalités est-il possible ? ..................................................... 21 a. D’après les scientifiques comment se présente le réchauffement climatique dans l’avenir ? .......... 21 b. Les mouvements de colapsologie et du survivalisme : se préparer à la fin du monde. La seule solution possible ? ..................................................................................................................................................... 24 c. II) Comment vivre avec la fin du monde ? La solapsosophie et la vision positive. ................................ 27 Une société alternative et autonome la seule solution de survie ?............................. 30 A) Un Consumérisme Éthique : l’idée de l’ESS ............................................................................ 30 a. L’idée générale : Qu’est-ce que c’est ; Pourquoi c’est fait ? Des exemples ....................................... 30 b. La reconnaissance par l’état : quelle loi ? pourquoi ? Qu’est-ce que ça change ? Les différents statue (coopératif, statue ESUS, scop…) ................................................................................................................ 32 c. Les avantages et les limites de l’ESS. Une méthode qui ne va pas assez loin ? ................................. 34 B) Vers des écosystèmes autonomes : un système en devenir ?................................................. 36 a. Se passer du système : une tâche ardue............................................................................................ 36 b. Les pratiques écologique et issu des traditions : une alternative aux nouvelles technologies ?… (Lowtech ; toilette seches, do it yourself: un petit tour des pratiques) ...................................................... 38 c. Pourquoi fonder un éco village ? Se réapproprier le savoir faire; redonner du sens à son éthique : être en accord avec ses valeurs écologiques, communautaires ; vivre en harmonie avec soi-même ................ 41 6 C) Les « éco-lieux », des premières expérimentations aux communautés abouties : un système en développement. ........................................................................................................................ 42 a. Les premières communautés et l’apparition des éco-villages ........................................................... 43 b. Les écolieux en France : La communauté village, les villages écologiques, des écolieux divers ....... 45 c. A l’international : quels pays sont en avance ? ; Quelle notion utilise t-on ? Comment se structure les écovillages ? Quelques exemples. ............................................................................................................... 49 III) Vers la création d’un écolieux ............................................................................... 53 A) Les premières étapes de sa création ...................................................................................... 53 a. Les conditions à réunir pour devenir éco-village. .............................................................................. 53 b. Se lancer et Les débuts : L’achat du lieu et l’installation (débloquer les fonds ; les problématiques liées à l’argent), le business plan ; mettre en place un lieu de vie. ............................................................. 56 B) Créer un éco village viable : la seconde étape plus longue et difficile. ............................... 58 a. La mise en place des projets : quoi ? pourquoi ? avec quels moyens ? ............................................. 58 b. Les gouvernances existantes et des proposition de gouvernance .................................................... 61 C) Limite et difficultés des modes de vie alternatif : .............................................................. 64 a. Un problème de sémantique autour du mot écovillage .................................................................... 64 b. Le facteur humain : la plus grosse inconnue...................................................................................... 65 c. Un pied dans le système, un pied dehors. ......................................................................................... 67 Conclusion........................................................................................................................ 69 Bibliographie :.................................................................................................................. 71 Annexes ........................................................................................................................... 76 Résumé ............................................................................................................................ 90 7 I) Vers un changement des pratiques, comment s’adapter aux dérèglement climatique ? A) Un éveil des consciences mais des politiques publiques trop limité. a. Le début de la prise de conscience de 1990 à 2010 Au XXie siècle, la dégradation globale et locale de l’environnement s’intensifie à cause des activités humaines polluantes liées notamment à l’industrialisation et aux progrès techniques. La prise de conscience de ces phénomènes fins du XIXe s amène l’idée de protection de l'environnement qui devait devenir un enjeu majeur pour le siècle à venir. Elle se manifeste notamment lors du Sommet de la Terre de 1992 à Rio, qui inclut dans un des trois piliers du développement durable. C'est aussi le 7e des huit objectifs du millénaire pour le développement, considéré par l'ONU comme « crucial pour la réussite des autres objectifs énoncés dans la Déclaration du Sommet du Millénaire ». Ce type de rendez-vous prend de l’importance, en 2002 à Johannesburg les entreprises et les ONG sont représentées et discutent des enjeux majeurs pour le développement durable. Ces sommets « généralistes » sont accompagnés de sommets plus ciblés sur des problématiques spécifiques lié aux problèmes de l’environnement : Conférence des Parties, Sommet mondial de l’eau… La reconnaissance des enjeux entraîne la mise en place de politique publique spécifique. L’agenda 21 est un plan d’action des politiques de développement durable dans les collectivités territoriales, il est signé par 120 chefs d’État en 1992. Les entreprises, les universités, les grandes écoles en France, les centres de recherche sont invités pour imaginer des solutions innovantes pour l'avenir. L’Europe a fortement contribué à la mise en place de recherche sur ce problème, dès 2001 elle impose aux états d’avoir une stratégie de développement durable, elle incite fortement les entreprises dans cette voie par le concept de Responsabilité Sociale des Entreprises. Un document dans lequel les entreprises intègrent les préoccupations sociales, environnementales, voire de bonne gouvernance dans leurs activités et dans leur interaction. En 2004 sous l’ère Jacques Chirac la France intègre l’environnement dans la constitution. Dans les villes de plus de 50 000 habitants, un rapport annuel de développement durable doit être produit. Il ne s’agit ici que de mesure phare mais qui accompagne de nombreuses autres initiatives de régulation des pouvoirs publics... 8 En Europe aussi les lignes bougent, elle va créer de nombreuse instance : Agence européenne des produits chimiques (ECHA) ; agence européenne pour l’environnement, le Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs (CSSC) et comité scientifique des risques sanitaires, environnementaux et émergents (CSRSEE) dans l’Union européenne. Elle va mettre en place des directives contraignantes pour les états on peut citer par exemple :la directive 2004/35/CE qui fixe le principe du pollueur payeur ou la directive membre appelée « Directive Énergies renouvelables 2009/28/CE ». Mise en place en 2009 par le e paquet climat-énergie cette dernière, met en œuvre des dispositions contraignantes pour les états. Elles fixent les objectifs de chaque pays concernant la part que doivent représenter les énergies renouvelables dans la consommation d’énergie finale. Elle prévoit également que le secteur des transports, dans chaque État, utilise au moins 10 % d'énergie produite à partir de sources renouvelables. Le paquet climat-énergie prévoit aussi d'améliorer et d'étendre le système d'échange de quotas d'émissions de CO2 en renforçant son champ d'application, ses procédures de contrôle et son coût pour les pollueurs. L’UE va mettre en place des labels, des principes de précautions, des instruments de gestions (ex EMAS)…En 2005 la mise en place du marché Carbonne est censé révolutionner les émissions de GES en les monétisant et en imposant des quotas. Ainsi plus on est écolo, plus on gagne de l’argent. La société civile a également joué un rôle important dans le soutien à ces enjeux. Les associations et les organisations non gouvernementales (ONG) mettent en œuvre des démarches pour la responsabilité sociétale et environnementale. Elles mettent en œuvre à l’échelle mondiale des campagnes de sensibilisations publiques ainsi que des actions concrétées. Les ONG environnementales (ONGE) sont devenues des partenaires pour de nombreux États et institutions telles que l'ONU. Mais elles s'opposent parfois à certaines activités ou projets des États, peuvent avoir un rôle de lanceur d'alerte, de contributeur aux évaluations environnementales. La plupart ont aussi des programmes de formations, information, sensibilisation et promeuvent l'écocitoyenneté. Parmi les plus connus, on retrouve : WWF, Greenpeace, Worldwatch Institute, Conservation International, Sea Shepherd Conservation Society… Ils participeront notamment à la forte progression du nombre de licences des éco labels de 224 en 2004 à 1357 licences en 2011, elles feront reculer les états sur certain sujet. 9 Progressivement durant ces 20 ans le développement durable rentre dans les manuelles scolaires, il devient une pédagogie à enseigner. En Europe, le développement durable est progressivement intégré dans l'enseignement supérieur. Des formations en ligne sont ouvertes à tous, apparition de MOOC, (massive open online course en anglais) sur le thème du développement durable ou de la protection de l’environnement sont développées sur les plateformes comme FUN, Coursera et l'université des Colibris. Ces enseignements ont globalement participé à une prise de conscience, de plus en plus massive, surtout chez les jeunes. b. Une accélération du dialogue les année 2010-2020 Depuis les années 2010 la prise de conscience semble s’accélérer ou tout du moins les initiatives qui vont dans le sens de la protection de l’environnement. Les jeunes qui ont commencé à entendre parler d’environnement sont devenus des jeunes adultes, et la prise de conscience s’accélérer et s’approfondit. Nous allons en voir quelques exemples du plus général au plus particulier. L’accord de Paris est sans contexte un événement important dans le dialogue planétaire sur l’environnement. C’est le sommet climatique le plus médiatisé depuis la conférence de Copenhague fin 2009 qui avait échoué à trouver un accord global prolongeant le protocole de Kyoto. Il fait suite aux négociations qui se sont tenues lors de la Conférence de Paris sur le climat (COP21) et des dialogues sur le climat à l’ONU. Après d’âpres négociations Laurent Fabius ministre des Affaires étrangères et du Développement international et président de la cop, présente un accord. Le 7 novembre 2017 et après ajout de la signature syrienne, 196 pays sur les 197 que compte l'ONU ont signé ou se sont engagés à signer l'accord de Paris sur le climat, ce qui fait de ce texte le plus largement et le plus rapidement signé de l'histoire de l'humanité. Depuis les états unis se sont retirés de l’accord. Dans les grandes lignes l’accord de Paris c’est de contenir le réchauffement climatique en dessous de 2°C d’ici 2100 ; de désinvestir les énergies fossiles, de tendre à la neutralité carbone ; de mettre en place des plans nationaux avec des actions concrètes, une aide financement des pays « du sud ».. Un bilan des actions menées par chaque pays doit être effectué en 2023 et les pays devront revoir à la hausse leurs engagements en 2025, puis tous les cinq ans (sauf décision contraire conclue lors d’une prochaine Conférence Climat). Plusieurs pays dont la France prévoit un premier bilan en 2020. 10 En marge, on peut évoquer également le défi de Bonn dont le contenu a été revu, il vise désormais à reboiser 350 millions d’hectares avant 2030 ou les maires des 91 plus grandes villes au monde se sont engagées à exclure de leurs territoires les énergie fossile. Parmi elle, 12 ont la volonté qu’une « partie importante » de leur ville « soit zone à émission zéro d'ici 2030 ». L’Europe aussi intensifie ses efforts pour la protection climatique. Nous pouvons évoquer les succès du parti vert au parlement européen. D’abord chez les Allemands en 2014 avec Die Grune qui fait un excellent score en Allemagne pour les élections européennes puis en France avec le beau succès de Yannick Jadot en 2019 pour les élections présidentielles. Les verts ont le vent en poupe. Succès des verts aux Européennes pour encourager et accompagner ces changements et mettre en œuvre les accords de Paris la France met en place des politiques publique environnementale à destination du milieu professionnel qui est l’un doit accompagner ce changement. L’Europe c’est le troisième émetteur de GES, elle doit jouer un rôle et prendre une place de premier ordre dans les négociations sur le climat. En 2014, elle annonçait l’objectif de réduction à 40% de ses GES d’ici 2030, elle veut pour cela porter les énergies renouvelables à 27% de la consommation d’ennemie, et de réduire cette dernière du même nombre. Les villes européennes s’engagent aussi pour l’écologie et se structure au sein du réseau C40 pour mettre en commun leurs initiatives et avoir des retours d’expériences. On peut noter aussi que ces préoccupations atteignent tous les niveaux de la société même ceux que l’on pourrait penser réfractaires à ce changement, dont la religion et les milieux d’affaires. Les papes Benoit XIII à notamment fait mention dans son livre que la mauvaise compréhension du dogme catholique avait conduit à mettre l’homme au centre de l’univers en le séparant de la nature (Humanisme religieux). Alors que les deux ne sont qu’un. En accord avec cette analyse les frères de la Communauté Saint-Jean ont ouvert en 2018 l’Académie pour une Écologie intégrale. Leurs objectifs : inviter tout le monde à rentrer dans une démarche de transition écologique. Les moines développent aussi des solutions de production agricole respectueuse de l’environnement, de l'homme et du partage. Reprise par l’extrême droite cette école de pensées fait l’objet de nombreuses critiques. Dans les milieux d’affaire, qui génère une grande partie de l’activité polluante, la préoccupation existe aussi. Lors du forum économique de Davos qui réunit chaque année les grands dirigeants d’entreprise, des responsables politiques du monde entier, les menaces environnementales ont été classées en tête de liste pour la troisième année consécutive, tant en termes d'impact que de probabilité. Les phénomènes météorologiques extrêmes, accentués par le changement climatique, sont considérés comme le risque le plus 11 probable au cours des dix prochaines années. Le rapport qui accompagne la clôture du forum prévient :« De tous les risques, c'est clairement par rapport à l'environnement que le monde avance en somnambule vers la catastrophe », prévient le rapport. Pour le consommateur, l’offre de produit « éthique » se fait plus accessible (cf Annexe 8); petit focus sur la consommation et son évolution. Le bio ne s’est jamais aussi bien porté, 85 % des Français se déclarent intéressés par des produits bio et locaux. Entre 2011 et 2018, le nombre de producteurs bio a progressé de 41 %, les transformateurs et distributeurs de 22,3%. Sur la même période, les surfaces agricoles biologiques ont gagné 563 000 ha (+60 %). En 2019, le rythme global de nouvel engagement au label bio continue une croissance stable. En 2016, en France, le « bio » est vraiment considéré comme rentable avec ses 7 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Le marché grandissant à forte valeur ajoutée séduit les producteurs. La transition vers les produits d’origine biologique est accompagnée par les pouvoirs publics notamment par des fonds particuliers de la PAC ou des « programmations de conversion ou de maintien de l‘agriculture biologique ». Si la consommation concerne essentiellement des produits de consommation elle s’étend de plus en plus aux « produits de vie » en 2019 les Français consommaient bio pour le textile (30% des Français) ; jardinage (44%), cosmétique (57%) ; produit ménager (61%). Les labels « AB » ou « Bio européen » sont des certifications qui portent sur la qualité d’un produit et sur son respect environnemental. Le nombre de produits certifiés est en augmentation de 20% par rapport à la consommation de l'année 2018. Néanmoins en 2019 la consommation du bio se stabilise pour près de la moitié des Français et n’augmente plus contrairement aux années précédentes. Ces chiffres nous indiquent que les Français ont modifier leurs habitudes de consommation pour avoir une consommation plus responsable, mais que des obstacles conduisent à un ralentissement des nouvelles adhésions à ce marché. Pour l’optimiste la consommation bio c’est un pas vers la prise de conscience, pour le pessimiste consommer bio c’est soi acte pour se donner conscience soi une activité lucrative. c. Un constat planétaire mais des politiques publiques timide. À l'échelle de l'humanité, c’est en moyenne 200 millions de personnes qui sont, d’une façon ou d’une autre, touchées par les catastrophes naturelles et environ 70 000 qui en périssent1. Comme 1 Centre for Research on the Epidemiology of Disasters 12 en témoignent les bilans annuels des catastrophes et anomalies climatiques2 (catanat.net), nous assistons « impuissant » à des signes avant-coureurs. Des signes que nous observons scientifiquement, mais pour lesquels des changements structurels sont difficiles à mettre en place. L’état étant conscient du risque, mais ne souhaitant, ne pouvant pas ou ne voulant pas mettre en place de politique publique drastique au risque d’être le seul dans un système mondialisé. Car elle serait à ce moment là désavantageuse par rapport aux états continuant de suivre un modèle et des politiques publiques « classiques » . D’autres refusent complètement la notion de dérèglement climatique. Au cours de ces 5 dernières années, le continent américain a mis au pouvoir deux climatoseptiques que sont Jair Bolsonaro et Donald Trump. Ce dernier, au cours de ses 100 premiers jours à la maison blanche, a mis en œuvre 4 décrets concernant l’environnement. Il n’a pas caché sa volonté de revenir sur des mesures prises par son prédécesseur, celle du 28 avril 2017 autorise les forages en mer arctique, il justifie son choix par le fait que son pays « a la chance d’avoir des ressources naturelles incroyables, parmi lesquelles des réserves abondantes de gaz et de pétrole offshore » ; il avait deux jours plus tôt remis en cause les « monuments nationaux » décidés par ses trois prédécesseurs qui visent la protection de 40 000 hectares dans l’Ouest américain, que Mr Trump juge comme « appropriation outrancière de terres par le gouvernement fédéral ». Il a remis en cause la clean Power de 2015 en rouvrant la porte de l’exploitation des mines de charbon avec 600 millions de tonne rendues de nouveau exploitables, en argumentant sur l’autonomie énergétique des États Unis. Le plan Clean Power mis en œuvre par l’Agence pour la Protection de l’Environnement (EPA) est vidé de sa substance et pour empêcher des rébellions internes le président américain va diviser le budget de l’agence d’un tiers et en y mettre à sa tête un climatoseptique Scott Pruitt. Cerise sur le gâteau, après son investiture le prédisent Trump refusera de signer l’accord de Paris sur le Climat. Le président Brésilien élu en octobre2018 qualifié par la presse de « Trump des tropiques » suit une politique environnementale similaire à celui de son homologue américain. Dès le début de son mandat, il a fondu le ministère de l’Environnement pour l’intégrer à celui de l’agriculture, ce qui montre le peu de cas qu’il fait de cet enjeu. Il a été largement soutenu durant toute la durée de sa campagne par des lobbys industriels de l’agroalimentaire. Leur but ? Transformer l’Amazonie en champs de soja pour nourrir l’élevage et ainsi abreuver le monde 2 planete.info/terre/risques_naturels/catastrophes_naturelles.php 13 de viande bovine peu coûteuse. Pour cela le président favorise les expropriations de culture indigène, il a réduit de 30% les montants des amendes qui visaient à verbaliser les délits environnementaux, il a certifié 239 pesticides jugés par l’Europe de « toxique ou très toxique ». Nous faisons preuve d’un ethnocentrisme certain quant à la question environnementale, mais la préoccupation est bien planétaire et l’Asie tout en étant l’un des premiers pollueurs mondiaux, multiplie les mesures positives en faveur de l’environnement. Comme le disait Braudel, l’Asie est devenue le cœur de « l’économie du monde ». Si en occident un grand nombre de penseurs parlent de ralentissement de croissance, l’Asie fait le choix stratégique de miser sur les nouvelles technologies et l’innovation pour polluer moins. La chine est face à un paradoxe : désireuse de participer à l’amélioration climatique elle est cependant une des premières pollueuses mondiales, à elle seule elle produit environ 24% des rejets mondiaux de CO2 qui causerait la mort d’environ 4000 décès prématurés par jour. La chine a bien conscience de l’enjeu du dérèglement climatique, car elle sera une des premières touchées (et l’Asie de manière générale qui comporte des petits pays) . En effet en étant un des pays avec la démographie la plus importante au monde elle doit commencer à s’adapter sans quoi, à terme, elle ne pourra plus faire face à un certain nombre de question comme l’énergie, la pollution de l’air… Lorsque Pekin connaît des épisodes de pollution record le gouvernement n’hésite pas à mette en place des mesures drastiques : les usines tournent aux ralenties, les grands chantiers sont interrompus… L’écologie est un enjeu politique et économique majeur, déjà en 2014 Li Keqiang affirmait que la Chine était « en guerre contre la pollution. Pour cela le pays souhaite porter d’ici 2020 la part des énergies « renouvelables » à 15% de la consommation d’énergie nationale, à 20% , elle souhaite fermer une partie de ses 4000 mines de charbon, taxation des entreprises polluantes… C’est devenu le premier producteur mondial d’énergie renouvelable en profitant de la sortie des États-Unis des accords sur le climat, la chine souhaite se positionner comme le nouveau leader en matière environnementale. Malgré tous ses efforts de par sa démographie, la chine reste l’un des principaux pollueurs au monde. Je terminerai mon tour du monde en parlant de l’Europe qui n’est pas non plus un exemple du genre. Si la préoccupation écologique est bien réelle de la part de certains « dirigeants », il n’en reste pas moins que les lobbys ont une influence importante sur les mesures qui sont mises en place et les politiques publiques ne peuvent être jugées que timides et insuffisantes pour les écologistes convaincus. Les accords de libre-échange type CETA, TAFTA, Mercousour vont 14 accentuer les échanges internationaux et favoriser les grandes entreprises (de l’agro-industrielle notamment) en dépit des petites productions régionale et locale or ces petites productions sont davantage écologiques rien que par l’économie de transport. En eux-mêmes ces accords sont « équitables » dans une logique capitalistique, sur le plan économique ils seront certainement profitables à la croissance dans une idée de rentabilité avant tout. L’Europe est très attachée au modèle libéral, au libre-échange et à la mondialisation pour plusieurs raisons : il a permis une évolution des conditions de vie ; c’est un outil de paix redoutable, car les états sont de plus en plus interdépendants ; il permet l’enrichissement d’une partie de la population. Si bien que même pendant les accords de la COP21, l’Europe a tout de suite dégainé son veto contre la remise en question du modèle libéral. Ça, on ne touche pas. Un autre exemple concerne le GES dans l’aviation (8% des émissions à effet de serre par an). Je conclurais en disant que les politiques publiques sont souvent insuffisantes, car dans l’économie monde, moins de croissance c’est moins de puissance et la croissance a toujours été le signe de domination. La logique libérale capitaliste est encrée et aucun gouvernement ne souhaite toucher à cette logique, si le changement global ne vient pour l’instant pas des états, nous allons voir que les pratiques individuelles commencent à changer. B) Une société en transition : une évolution des pratiques et écologie militante La préoccupation environnementale gagne les têtes et les cœurs des individus. Agir s’impose à tout un chacun, la question est plutôt comment agir ? Pour 82% des Français, la possibilité d’agir par sa consommation (choisir des produits écologiques, locaux…) est privilégiée d’abord parce que la possibilité de le faire s’est améliorée ces 10 dernières années et pour 84%, cela continuera dans les 10 prochaines années. a. Les pratiques de consommation : Végétarien, Végane, 0 déchet, made in France Les attitudes de consommations évoluent chez une partie des populations. Il y a de plus en plus de végétariens flexitariens, de pesco-végétarien, vegan et j’en passe. Tous ces noms barbares qui désignent en fait des personnes qui ont décidé de diminuer (ou de supprimer) un certain 15 nombre de produits d’origines animal de leurs consommations. J’ai interrogé 10 personnes végétarienne et végane pour leur demander de me parler de leurs expériences de du pourquoi et du comment. Est-ce que ça a été dur ? Est-ce que c’est toujours le cas ? Il y a plein de bonnes raisons à devenir végétarien « C’est mieux pour la santé. » Un régime végétarien équilibré c’est l’un des régimes les plus sains que l’on puisse adopter. « C’est mieux pour l’environnement ». Préoccupation centrale dans la conversion à ce régime, cela permet de diviser par 2 « l’empreinte écologique » de son alimentation. L’industrie de la viande utilise d’énormes quantités de terres, d’eau et des combustibles fossiles, tout en produisant 18 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. L’élevage est une des activités les plus polluantes au monde. « C’est mieux pour les animaux ». En France c’est un million d’animaux terrestres qui est abattu chaque jour pour que l’on puisse manger leur chair, plus de 80 % des animaux sont issus d’élevages industriels. Cet argument est davantage utilisé par les véganes, les végétariens participant toujours à l’abattage par leurs consommations de lait qui oblige les producteurs à mettre à mort une partie des veaux. « C’est un acte de solidarité. » Le modèle alimentaire occidental vit sur des ressources que nous ne possédons pas, cela épuise les ressources planétaires au détriment des pays du Sud et des gens meurent de faim. Les véganes ne consomment aucune protéine animale donc en plus des végétariens ni lait ni miel, ni cuire… Jugé extrême par une partie de la population il a le mérite d’initier la question du bien-être animal. Il parait essentiel aujourd’hui que la grande famille des « réductarien » cesse ce que Freud appelait le « narcissisme des petites différences » pour s’unir et s'allier en valorisant leurs point commun plutôt que de se battre entre eux sur qui est le plus « écolo ». Aujourd’hui, on produit environ 350 millions de tonnes de déchets par an, soit 11,38 t par seconde. Ce plastique est notamment abondamment utilisé dans l’alimentation, les objets de consommation (brosse à dents, emballage), les jouets… Nous produisons tellement de déchet que nous ne savons même plus quoi en faire, il n’y a qu’à voir les récents scandales sur les ordures envoyer dans les pays comme la Malaisie, les Phillipines. L’association Aero Clean Nation propose même que nous envoyons même des déchets dans l’espace pour nous en débarrasser. Un grand nombre de déchets fini dans l’océan, environ 200kg par seconde. On estime que d’ici 2050 il y aura plus de plastique que de poissons dans l’océan. Les déchets de nos poubelles sont essentiellement en plastique, afin de lutter contre la problématique de l'impact des déchets sur l'environnement, des mouvements de vie alternative sont développer 16 avec un objectif zéro déchets. En France ce mode de vie a été popularisé par la Béa Johnson qui l’as adopté en 2008 et qui ne produit aujourd’hui plus qu’un litre de déchets par an pour une famille de 4 personnes. Mais pour en arriver là il faut faire de grand changement dans son mode d’alimentation, de consommation. De la cuisine, au ménage en passant par les restaurants entre amis, c’est tout un mode de vie. Les conseils du 0 déchet c’est de trouver des produits durable, réparable ou recyclable… et malgré tous les efforts il reste encore la voiture, le téléphone l’ordinateur. Il faut donc coupler ce mode de vie avec l’achat de seconde main. Cela donne une nouvelle vie au produit, cela permet d’éviter la surconsommation, un produit éthique et économique. Cela se développe beaucoup depuis quelque année, les friperies sont de nouveau à la mode, on trouve des applications Vinted, le bon coin, Falaise et même Facebook lance son marketplace. La seconde main un bel avenir devant elle. b. Énergie et construction écologique : vente énergie verte, maison 0 consommation ; nouvelle construction plastique ou terre ; Le BTP est l’une des activités les plus polluantes au monde. L’association du béton-Ciment est aujourd’hui la plus rependue, car très résistant et très performant en isolation thermique. Bien que le Béton soit fait de matériaux naturel et recyclable, sa conception entraîne une grande quantité d’énergie qui vient d’une part, de son acheminement (transport en camion du béton ou des matières premières) et d’autre part de sa confection auquel s’ajoute de la consommation électrique pour brasser mécaniquement de grandes quantités de bétons. La fabrication du ciment est responsable d’environ 7 à 8 % des émissions totales de CO2 à l'échelle du planétaire. À l’aube du XXIe siècle, le Béton comme matériau de construction s’avère inadapté, car très peu durable, c’est un matériau qui connaît un vieillissement non négligeable. Nous allons présenter des alternatives de matériaux de construction, pour savoir où se place le béton vis-à-vis de ceuxci en termes de consommation d’énergie et de caractéristiques de construction : fer, bois, brique de terre, chanvre, chaux, ciment, verre. Le fer est un excellent alliage, mais sa faible résistance à la corrosion et son impact de fabrication est énorme ; la brique en terre cuite est un matériau très ancien et très résistant aux intempéries, mais sa conception demande une grande quantité d’énergie à sa création ; la chaux demande de faire rentrer la roche en fusion (1500°C) donc très énergivore ; le verre (surtout utile pour la miroiterie et la verrerie) est une industrie très polluante même s’il existe des façons de dépolluer le process de fabrication. Les deux alternatives qui semblent intéressantes sont le 17 chanvre et le bois. Le premier, car c’est un matériau très isolant et non porteur il sert à fabriquer un type de béton renouvelable facilement, recyclable et de fabrication peu polluante ; l’alternative pourrait être une maison en bois ressource théoriquement inépuisable. C’est c’est un matériau durable et très fiable il n’y a qu’à voir les églises norvégiennes en bois construit il y a mille ans, par ses nombreuses variétés il peut s’adapter à tout type de demande. Depuis quelques années (notamment avec l’huile de palme) la déforestation est une préoccupation en Europe néanmoins la mafia du bois reste une des plus puissantes au monde. L’éco habitat peut être une solution au différent problème cité ci-dessus. Ce sont des constructions qui utilisent de matériaux locaux, respectueux de l’environnement et que la maison par ce procédé de construction à un coût climatique minime. On a par exemple les maisons basses consommation, sous le label BBCo ; et les habitats passifs qui ont une consommation quasiment nulle au mètre carré ou tout du moins compensé par une énergie renouvelable ou les usages interne à la maison ; enfin les maisons à énergie positive ou « nZEB » (nearly Zero Energy Building), c’est-à-dire qui produit plus d’énergie qu’il n’en consomme, Labelisée Bepos en France. Ce type de construction ambitionnait de devenir obligatoire d’ici 2020. De nombreux concepteurs en Europe, comme cabinet d’architectes belge Jan Stranger, Maison Serge Olivier, Karawitz Architecture… Ils ont présenté tous les droits des maisons qui sont comprises entre 1200 et 2000€ du mètre carré. Mais la spécificité de ces constructions entraîne des savoir-faire particuliers qui sont peu nombreux et quand l’offre devient plus rare que la demande, les prix augmentent. Il n’existe aucune aide particulière à la construction passive, seulement des travaux de rénovation qui vise la passivité d’un habitat. L’ensemble des aides pour l’habitat est réuni dans le guide des aides financières de l’ADEME. En revanche les producteurs d’énergie verte sont de plus en plus nombreux lié à des sociétés créer ex-nilo ou à la conversion de géant comme EDF, total, ENI… En plus des distributeurs régionaux comme à Grenoble des distributeurs nationaux existe à ‘image de ENERCOP, ils s’engagent à fournir une électricité 100% issue des matériaux renouvelables. Elle ne représente que 10% de l’énergie en France encore très dépendante du Nucléaire. Parlons un peu de ce dernier, il serait utopiste de penser que l’on peut aujourd’hui totalement s’en passer, d’abord, car il produit une grande quantité d’énergie à faible coût, cette énergie n'émet que peu de CO2 mais elle présente le net inconvénient de l’impossibilité de traiter ses déchets qui sont enfermés sans que l’on sache ce qu’ils deviendront. . L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie' (ADEME) a publié en 2016 un livre intitulé changer les comportements, faire évoluer les pratiques sociales 18 vers plus de durabilité. Ce document propose des concept et pratique de bases pour les professionnelles qui travaillent sur le changement de comportement environnemental énergétique des individus, il présente une approche pluridisciplinaire avec des disciplines issues des sciences humaines et sociales (économie, psychologie, sociologie, etc.) en abordant ce sujet de manière complémentaire. L’ouvrage liste aussi des existants permettant aux acteurs publics et associatifs l'information, la sensibilisation, des normes marketing, les incitations économiques, des législations utilisables à différentes échelles territoriales. C’est un exemple intéressant, car l’idée de la transdisciplinarité comme solution à l’effondrement est également évoquée dans le livre de Pablo Servigne. En somme, nous avons trouvé des alternatives qui fonctionnent, mais qui sont encore trop peu répandues, car elle coûte cher ou que le changement n’est pas intégré dans les mœurs. L’état français à même inventé la Carte de compensation carbone, pour racheter ses GES. Inconnu du grand public cette carte se destine à une minorité. Il est indispensable d’informer d’avantage les gens sur leurs pratiques, c’est l’idée du militantisme. c. Le militantisme et l’activisme écologique Souvent les actes responsables pris individuellement sont liés à une volonté active d’engagement à la cause écologique. Cet engagement peut venir d’un constat : les entreprises ou les partis au pouvoir sont extrêmement influencés par les lobbys, les individus comprennent que les actions nécessaires au changement n’arriveront que si le grand public s’implique en force et/ou par la force. De plus, par expérience personnelle je constate que plus on en sait, plus on la volonté de partager son savoir. Le militantisme écologique, ou l’activisme écologique, se veut fondé sur la solidarité, les combats écologiques sont au-delà de toute organisation ou parti politique, ils sont simplement vitaux. Ces protecteurs de la nature sont convaincus que nous devons utiliser tous les outils à notre disposition pour convaincre le plus grand nombre de maintenir en bon état l’écosystème. Ils disposent pour cela de plusieurs outils. La manifestation par exemple, elle est un outil de communication essentiel. D’une certaine manière ces mouvements vont favoriser la désobéissance civile c’est dire refuser d’appliquer les lois qu’il juge contraires à leurs principes moraux. Le militant se positionne souvent comme un véritable objecteur de conscience. C’est 19 une forme d’insoumission et de résistance passive à certains paradoxes du système. On va également retrouver des actions comme le boycott qui se structure avec des collectifs comme Iboycott ; la vente directe « au black » ; la pétition, le tractage… Souvent l’activisme ou le militantisme écologique renvoie une image négative de leurs actions. Lors d’un cercle de parole sur la question j’ai pu constater que certaine personne voyait ces militants comme des personnes violente ou dangereuse ce qui les empêchait de prendre part à ce mouvement. En effet , les personnes extrêmes d’un mouvement ont toujours tendance à effrayer les plus novices ou les personnes âgées. Nos convictions n’évoluent pas toutes de la même façon et l’image que les activistes renvoie à la population peut être contre-productive. J’ai constaté pendant ce cercle de parole que les chemins qui menaient vers l’activisme étaient très variés. Le militantisme touche des catégories très différentes de la population et les combats sont multiples : protection animale, environnement, droit social ; économie locale… L’activisme peut prendre la forme d’action isolée, de revendication de deux ou trois personnes qui vont mener « un raid » dans un élevage par exemple. Heureusement de plus en plus d’association organisent et structurent ce type d’action. Elles offrent une protection juridique, un cadre, plus de membres et des financements, mais en échange les militants doivent respecter certaines règles. Greenpeace, WWF mène des actions d’activisme à travers des groupes locaux. Il est généralement plus simple de commencer au sein de ce type de structure qui intégreront plus facilement les nouveaux membres. Certains nouveaux groupes comme Extinction Rebellions font montre d’une relative méfiance envers les nouveaux venus, redoutant l’espionnage. L’intégration y est donc plus difficile. Les actions menées par ces groupes associatifs vont du blocage de la circulation à la communication auprès des consommateur, la prise de parole lors de réunion politique, la libération d’élevage, et parfois la destruction volontaire… Pour conclure on constate que les gens sont de plus en plus auteurs et acteurs de leurs façons de consommer. Ils consomment mieux : des produits bio, plus naturels, plus locaux, plus sains. La santé est devenue en 10 ans un des premiers critères d’achat, les produits consommés sont plus en lien avec l’éthique et leurs valeurs écologiques et morales (sens du collectif). Mais surtout ils consomment plus malin pour gaspiller moins, pour éviter les intermédiaires, donner 20 une seconde vie aux produits. Ainsi, le consommateur d’aujourd’hui est beaucoup plus critique sur ses choix de consommation. Il faut néanmoins nuancer ce propos. Si les pratiques « écolos » n’ont jamais, jusqu’alors, rencontré un tel succès elles restent tout de même limitées à une minorité de la population. Elles concernent le plus souvent des personnes appartenant, ou issues, des catégories socioprofessionnelles élevées ; au cours de mes voyages, les personnes ayant adopté ce mode de vie avaient eu un parcours universitaire et avait été élevés par des ingénieurs, des professeurs, des banquiers… Le militantisme veut toucher un large éventail de personne, il vise à sensibiliser les consciences pour opérer un changement de pratique. Mais les cultures sont encrées et modifier une attitude est une entreprise longue et ardue. C) Un changement radical des mentalités est-il possible ? Bien que le dialogue autour de l’environnement n’a jamais été aussi important depuis quelques années, bien que des pratiques émergentes vont dans le sens de la protection de la planète, la plupart des scientifiques font le triste constat que nos actions ne permettent pas de rattraper le retard que nous avons pris. De nombreuses personnes se mettent donc à se préparer à l’effondrement. a. D’après les scientifiques comment se présente le réchauffement climatique dans l’avenir ? Nous entendons beaucoup parler des climatosceptiques depuis quelques années, l’un d’entre eux arrivant même à se faire élire à la tête du premier pays consommateur au monde. Pourtant le constat du plus grand nombre des scientifique est sans appel et les prévisions des grands organismes accablantes. Nous détruisons notre planète et nous sommes loin de tout mettre en œuvre pour atteindre les objectifs que nous nous sommes nous-mêmes fixés comme celui du seuil de 2°C de réchauffement à l’Accord de Paris sur le Climat. 21 Le GIEC, cette instance supranationale, a remis son 5e rapport en 2014, dedans elle explique que le réchauffement climatique est « sans équivoque » au cours du dernier millénaire. Il est « extrêmement probable » (à plus de 95%) que l’activité humaine ait un impact direct sur le réchauffement climatique. À cause de cela, la température aurait augmenté de 0,85C depuis l’époque préindustrielle. Il présente deux scénarios : • Celui dit « émetteur », si l’être humain ne fait pas d’effort suffisant pour lutter contre le réchauffement climatique (comme il l’a fait durant les vingt dernières années) il pourrait atteindre 4 à 5 degrés d’ici 2020 avec une probabilité de plus de 66%. Les conséquences sont jugées irréversibles : acidification des océans, perte de biodiversité, problèmes alimentaires, manque de ressources en eau, augmentation du nombre de « réfugiés climatiques »,… • Celui dit « sobre » dans ce scénario l’état met en places des actions qui limiteront le réchauffement à une température de 2°C d’ici 2100. Même si les externalités négatives continuaient d’exister elle resterait « supportable ». ` Pour que ce second scénario fonctionne le GIEC a calculé que les émissions de Gaz à effet de serre (GES) dues aux activités humaines devraient être inférieur à 1000 milliard de tonne d’ici 2100 ce qui équivaut à 20 ans d’année humaine à notre rythme de consommation actuelle à l’échelle planétaire. En somme, il faudrait que les émissions baissent de 40 à 70 pour cent d’ici 2050 et ensuite avoir une consommation quasiment neutre sur les dernières 50 années. Or depuis les années 2000, les émissions de GES augmentent d’environ 2% par an. L’extraction des énergies fossiles ainsi que leurs exploitations pèseraient à elles seules 65% de toutes les émissions de GES, pour atteindre l’objectif il faudrait laisser dans le sol 80% de ces énergies. Mais aux accords de Paris l’Arabie saoudite refusait que le sujet soit abordé. Les effets du réchauffement climatique se font déjà ressentir. Je vais ici les diviser en sept catégories et parler des conséquences que cela entraîne : 1) Les températures caniculaires sont de plus en plus habituelles, leur « fréquence et l'intensité a augmenté au cours des trente dernières années" selon météo France qui dispose de relevé datant de 1947. D’après les scientifiques c’est lié à l’aérosol de la haute atmosphère qui laisserait passer les rayonnements solaires, car ils s’affaiblissent avec les GES. D’après World Weather Institution notre température moyenne est plus élevée de 4°C par rapport à il y a un siècle et les épisodes caniculaires comme celui de 2019 seront de plus en plus fréquent. 22 2) Les océans se réchauffent et montent, ils se seraient élevés de 22 cm depuis 1880 et de 2 cm depuis les années 2000 alors qu’ils n’avaient augmenté que de 5 cm par siècle durant les deux derniers millénaires. Ce phénomène serait dû à la fois à la fonte des glaciers, mais aussi à cause des chaleurs qui augmente la température de l’eau et par ricochet son volume (on parle de dilatation thermique de l'eau). Cela entraîne une migration des espèces marines, la disparition d’écosystème et d’espèce. La montée des eaux de 2M d’ici 2100 aurait des conséquences désastreuses. 3) Les forêts brûlent de plus en plus, l’assèchement général de la plante et des sols, et l’air plus sec va, selon Christopher Williams de l'Université Clark dans le Massachusetts, accentuer le phénomène des feux de forêt. La saison des feux qui se limitait en Europe du Nord juillet/août s’étend maintenant de juin à octobre. Ces feux sont dramatiques dans le sens ou les forêts absorbent aujourd’hui 45% du carbone, si elles ne sont plus là le réchauffement s’accélère. 4) Les catastrophes naturelles type tsunami, cyclone… pourraient devenir de plus en plus fréquentes. D’après un rapport de 2018 du Conseil des Académies des sciences européennes (EASAC) ces phénomènes ont doublé entre1980 et 2016. Les phénomènes liés à l’eau (inondation, tsunami) ont pratiquement quadruplé, les sécheresses ont doublé. Ces risques difficiles à prévoir font courir un grand danger aux populations, notamment celle de zone à risque comme les îles. 5) Le réchauffement climatique a des conséquences sur la santé et la mortalité des populations: durant la canicule de 2003, l’Europe a référencé 70 000 décès supplémentaires; les grands feux qui ont touché la Californie ont augmenté par 10 le niveau de pollution atmosphérique selon New England Journal of Medicine de janvier 20193; la quantité de pollen donc les allergies ont triplé en 20 ans; la transmission des maladies transmises par voie virale a augmenté. Selon ce même journal, le réchauffement entraînerait une diminution des qualités nutritionnelles des céréales produites notamment en vitamine B. 6) Le dernier constat, certainement le plus dramatique, est celui de la disparition d’un million d’espèces animales et végétales liée à l’activité humaine (source : rapport pour les décideurs du Giec). La période actuelle connaitra donc la pire déstructuration de d’espèce depuis l’extinction des dinosaure il y a 65 millions d’année. Aberrant. Les causes sont multiples, dérèglement climatique, utilisation des terres agricoles, exploitation des ressources, augmentation des températures… Que ce soit l’Ours blanc, la baleine, ou la flore, les extinctions sont massives. 3 https://www.nejm.org/doi/10.1056/NEJMra1807873) . 23 Gabrielle Martin du Muséum d’histoire naturel française explique que les mouvements d’espèce sont nombreux pour s’adapter à ces changements. La flore à quant à elle du mal à supporter tous ces changements les hêtres supporte mal les hausses de chaleurs, les pins souffrent de la sécheresse…. Tous ces faits alarmants sont accentués par le triste constat du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) qui a évalué que « même dans le cas d'une mise en œuvre intégrale des engagements pris à Paris, les émissions prévues d'ici à 2030 entraîneront une hausse des températures mondiales de 2,9 à 3,4 °C d'ici la fin du siècle ». Il faut néanmoins souligner que ces observations sont dépendantes des analyses scientifiques de leurs temps. Les analyses scientifiques et les statistiques ne remontent que rarement au-delà du dernier siècle. De plus les scientifiques ne sont pas certains de leurs analyses sur les dérèglements climatiques des deux derniers millénaires, il ne s’agit-là que de suppositions. C’est la raison pour laquelle il faut nuancer ces analyses précédentes même si force est de constater que sur le dernier siècle l’emballement climatique est bien réel. b. Les mouvements de colapsologie et du survivalisme : se préparer à la fin du monde. La seule solution possible ? Comme je l’explique en introduction, le terme colapsologie désigne l’étude de l’effondrement de la civilisation moderne et tout ce qui pourrait lui succéder. Ainsi l’étude de la colapsologie est pluridisciplinaire, elle mêle anthropologie, géographie, histoire, démographie, politique, climatologie. C’est une sorte de synthèse scientifique de tous les risques d’effondrement. La colapsologie est indissociable d’une certaine approche spirituelle de l’écologie. On peut lui associer les termes de « deep écologies » qui est la défense de la valeur intrinsèque des êtres vivants et de la nature; « l’ecopsychologie » qui étudie les relations entre la nature et le genre humain ; ou encore « l’écocentrisme » qui est une philosophie qui met le rapport entre les hommes et l’environnement au centre des préoccupations sociétales. En somme, la colapsologie met en perspective le lien entre homme et nature. Pour les colapsologue la société va s’effondrer, en remettant en question l’ensemble de nos modes de vie. En effet, il paraît très compliquer de vivre de manière infinie comme nous le faisons dans un monde qui lui est fini, c’est-à-dire un monde dans lequel les ressources ne sont pas illimitées. Comme l’explique le livre « Comment tout peut s’effondrer » aujourd’hui notre dépendance aux énergies notamment pour se nourrir est très problématique. Nous faisons toutes nos courses en allant en voiture au supermarché, toute notre 24 consommation est très dépendante du pétrole (plastique, acheminement des produits…). Mais le véritable problème dans tout ça c’est que nous ne savons pas faire par nous-même. Finalement dans mon entourage très peu de personnes ont un jardin ou les connaissances pour en faire un, ce qui permettrait un début d’autonomie sur le plan de l’alimentation. La question qui se pose naturellement c’est comment en parler aux gens ? Comme dirait Pablo Servigne « comment dire à quelqu’un que sa maison est en feu ? ». Car le mot effondrement résonne dans l’imaginaire collectif comme synonyme de apocalypse, très mise en scène dans le cinéma avec des invasions de zombies, ou des catastrophes qui anéantissent l’humanité. Il y a plusieurs types de réaction le déni, la colère, la tristesse, la dépression, l’acceptation. Mais le déni (ou le manque de connaissance) rassemble la majorité de la population. Les colapsologues parlent d’effondrement avant 2050, mais il n’existe pas de fait scientifique qui valide cette date. La durée de l’effondrement serait plus ou moins rapide selon les convictions. Les thèses de « l’effondrement » de notre civilisation, défendues par des chercheurs, des experts et quelques hommes et femmes politiques, rencontrent un succès inattendu auprès du grand public. La partie de la population qui croit en cette thèse (de l’effondrement) ne doit pas tomber dans la facilité et la fatalité en considèrent qu’il n’y a rien à faire donc autant ne pas changer soimême et continuer à profiter et consommer. Bien que je comprenne ce type de raisonnement je me demande comment il est possible de regarder ensuite les futures générations et de leur dire « je savais, mais je n’ai rien fait » c’est, à mon sens, bien pire que de dire « je ne me rendais pas compte ». Néanmoins, de nombreuses personnes subissent cette prise de conscience, la "peur chronique d'un environnement condamné" est devenue une maladie qui touche une partie de plus en plus importante de la population. Dans l’écoanxiété (ou solastagie) la dimension du désespoir marque la différence avec une simple anxiété, nos actes semblent insignifiants et la capacité du monde à changer de voie impossible. Comme l’explique la docteur Alice Desbiolles (médecin en santé publique spécialisée en santé environnementale dans un entretien accordé à Mr Mondialisation) « toute absence d’alternative peut se traduire par une souffrance morale ». Il ne faut pas que la colapsologie écrase l’avenir mais que ce soit un tremplin vers le champ des possibles. On peut raconter un effondrement en parlant aussi de renaissance pour ouvrir de nouvelles perspectives. Pour réagir face à cette écoanxiété des médecins conseillent de devenir éco citoyen, vivre davantage en harmonie avec les écosystèmes, cela commence avec des petits gestes du quotidien et cela s’approfondit au fur et à mesure des prises de conscience (qui est propre à chaque individu). L’association internationale pour l’éco thérapie invite même les 25 personnes souffrant de se symptôme de se mettre à l’activisme écologique. Au cours des nombreux cercles de paroles auxquelles j’ai eu la chance de participer sur la question de l’effondrement on a souvent deux camps, ceux qui l’ont accepté et ceux qui sont en colère contre la société et l’absence de prise de conscience globale. Colère que je comprends, mais qui ne résout aucun problème qui désert au contraire les causes, la colère a tendance à braquer les personnes qui débâtent. En bref, il est très difficile de réaliser que l’effondrement est une solution du domaine du possible et ensuite il est difficile de vivre avec cette idée dans la tête. Depuis environ 10 ans la thèse de l’effondrement est défendue est rendu plausible, voir défendue par plusieurs experts, chercheurs, personnalités politiques. Elle a parlé à un large public qui se prépare une fin possible de la civilisation que nous connaissons. Les plus radicaux des colapsologues sont les survivalistes. Pour eux l’effondrement est inévitable, et ce n’est pas forcément une mauvaise chose. Ce mouvement naît bien avant la colapsologie, il est né dans les années 60 dans un contexte de guerre froide. Si à l’époque nous avions l’image caricaturale d’un homme armé, habitant reclus, gérant ses rations, force est de constater que, aujourd’hui, le colapsologue a davantage le visage d’une personne « ordinaire ». Comme ledit Gerald Celente, fondateur du « Trends Research Institute « Il s'agit donc d'un survivalisme de toutes les façons possibles : se cultiver soi-même, être autosuffisant, faire autant que possible pour se débrouiller aussi bien que possible par soi-même » que ce soit en zone urbaine ou rurale. Aujourd’hui, le mouvement survivaliste est protéiforme, il rassemble à la fois les « radicaux » et des personnes qui l’adoptent plus comme un mode de vie du quotidien en développant des solidarités locales et en apprenant à faire plus les choses par eux même. Le survivaliste français Vol West habitant aux états unis disait « Quand je stocke six mois de nourriture comme le faisaient nos ancêtres, ce n'est pas dans l'anticipation de la fin du monde, mais bien dans une intention d'indépendance face à un système juste à temps. ». Dans un reportage Kombini est partie à la rencontre de « Bernard le prévoyant », mais le reportage pointe sur l’aspect marginal de ce monsieur, qui a un sac de survie, qui fait des simulations d’effondrement qui tient des propos très tranchés du type « les gens sont devenus complètement cons, j’espère que le monde va se casser la gueule pour remettre les pendules à l’heure à certains ». Quand il dit que les gens sont devenus cons c’est de la société dont il parle, du mode de vie adhérent, mais les gens entendent ici que se sont eux « les cons ». Bien qu’il explique être content de vivre dans son pays, mais pas dans cette société, le reportage décrédibilise ses propos en les décontextualisant. 26 Le manque d’ambition forte des politiques publiques condamne à un désagrément systémique des ressources disponibles. Les personnes qui pensent l’effondrement ont tendance à se préparer à une telle chose par davantage d’autonomie. Il faut néanmoins préciser que cette discipline est considérée « d’analyse prophétique » par ses détracteurs. En lisant ces théories pour la première fois, on peut tomber dans une forme de fatalisme, mais envisager l’effondrement comme un phénomène négatif est discutable, nous allons voir comment le penser autrement c. Comment vivre avec la fin du monde ? La solapsosophie et la vision positive. Au fil de mes recherche j’ai compilé une partie des discours de ces experts en effondrement pour tenter d’apporter une réponse sur cette peur du XXI e siècle. Pour l’ensemble des chercheurs qui vont suivre la théorie d’un effondrement dans les vingt prichaine année est acté. Leurs réflexions interviennent suite à cet effondrement. Pour certains l’effondrement laissera place à une “nouvelle organisation sociale et culturelle”. C’est le cas de trois membres de l’institut Mementum : Agnes Sinaï professeur à Science Po, Pablo Servigne qu’on ne présente plus, et l’ancien ministre Yves Cohets. Ces derniers défendent la thèse de “dynamique biorégionale”. C’est à dire la mise en place de forme politique territoriale qui travaillerait a la résilience des entreprises humaine. Ces nouveaux territoires se nommeraient biorégion, ils se substitueraient au découpage administratif actuel. Cette nouvelle organisation aurait comme caractéristique un ralentissement des besoins en mobilité et en énergie, et davantage de coopération. Il imagine un système de bourg et de quartier qui viendrait remplacer les villes ultra connectées, des zones autoprodutrices en énergie. Qui dit société résilience dit société de proximité car une grande ville actuelle a besoin d’une connexion au monde pour se fournir en énergie, elle ne peut pas la produire elle-même. Pour ces trois chercheurs, l’effondrement a du bon : il remet en cause la croissance éternelle de notre modèle. Marianne Durano philosophe, distingue deux types de scénarios. Le premier est le plus optimiste, l’effondrement signifie davantage la fin de notre façon de fonctionner, ce n’est pas la fin du monde, mais la fin de notre monde et avec cela la chance d’en créer un nouveau. Plus 27 durable, plus vert. Mais elle reconnaît rapidement cette thèse se rapproche del’utopie surtout quand on voit les mesures politiques (cf I.A.c.). Le deuxième scénario ce serait la fin de la “société d’abondance” dans laquelle nous vivons. Les besoins de bases ne sont plus fournis par l’état et chacun doit se débrouiller par lui-même. Elle explique que la perspective de la fin du monde doit donner un sens a notre vie, elle affirme que nous “devons cultiver notre autonomie individuelle et collective, ce n'est pas seulement dans le but de survivre à la fin du monde, mais parce que c'est la condition réelle de notre liberté”. Ce professeur de lycée et ses trois enfants ont intégré récemment un écovillage dans la Loire, non pas pour se préparer à l’apocalypse ditelle, mais pour vivre en accord avec ses valeurs. Sylvie Brunel est géographe, écrivaine et professeure à l'université Paris-Sorbonne, pour elle le changement climatique n’est pas forcément une mauvaise nouvelle. Pour elle, le mal fait à la planète n’est pas irréversible, “le changement climatique n’est pas forcément une mauvaise nouvelle”. À la bonne heure. Elle croit en une troisième révolution agricole qui se préoccuperait des antibiorésistances, des invasions biologiques, des maladies infectieuses, du dérèglement climatique des sols, de la biodiversité... Elle voit le verre à moitié plein, elle fait le constat que plus un pays est riche plus sa préoccupation environnementale augmente, les individus sont de plus en plus nombreux à atteindre la classe moyenne (environ 200 000 millions par ans). Mais sa vision est de mon point erroné, elle ne correspond pas avec les orientations que prend notre mode de vie à l’échelle globale. En effet plus nous sommes riches, plus nous consommons et plus nous polluons. Elle écrit notamment que le massacre des animaux ne se fait que dans les pays pauvres ou l’état de droit est faible. Mais je rappelle que ces pays pauvres élèvent et tuent des animaux pour la consommation des Occidentaux. Croire en un effondrement positif pourquoi pas, mais sans se trouver des excuses c’est mieux. Virginie Maris est chercheuse au CNRS en philosophie de l’environnement. Pour elle le monde qui va disparaître c’est celui de la nature sauvage. Au vu de ce qui est expose deux parties plus hautes nous ne pouvons être que d’accord avec cette analyse. Selon elle la nature commence déjà à se rebiffer contre cette tentative de contrôle de l’homme elle en cite plusieurs exemples : antibiorésistance, invasions biologiques, maladies infectieuses, dérèglement climatique. Il faut résonner plus d’espace à la nature, il faut la préserver et l’entretenir plutôt qu’essayer de se l’approprier et la détruire. Le monde naturel se reconstruit d’ailleurs assez rapidement il faudrait 28 certainement moins de temps pour la reconstruire que nous avons mi de temps à le détruire. Mais si certaines choses sont certainement déjà trop tard. Le dernier courant de pensée que j’exposerai pense que nous serons sauvés dans l’avenir par la technologie. Au vu de la dégradation actuelle de la planète, la seule solution pour s’en sortir passera par le progrès technique. Ce dernier sera capable de limiter au maximum l’impact des êtres humains sur leurs environnements. La course au progrès est donc non seulement souhaitable, mais indispensable à notre survie car c’est grâce à elle que nous trouverons notre salut. C’est d’ailleurs l’hypothèse la plus répandue dans le monde du cinéma hollywoodien ou l’homme arriverait à s’exiler sur d’autre planète. Mais dans tous ces cas de figure, le nombre survivant est très limité. Un contre-courant dont Sylvain Tesson fait partie considère qu’il faut au contraire fuir se progrès « Vivre mieux aujourd’hui consiste à échapper aux développements du progrès Chaque intellectuel à sa propre vision de la fin du système tel que nous le connaissons et chacun à sa propre vision de ce qu’il adviendra après l’effondrement et sur les méthodes à mettre en place pour que l’humanité survive. Au cours de cette partie nous avons donc pu voir que l’éveil des consciences était un phénomène relativement récent, mais que les politiques écologiques étaient trop timides face à l’ampleur du mal déjà causer par l’activité humaine. Les mentalités changent et les pratiques évoluent, mais elle ne semble pas se répandre assez rapidement et largement pour empêcher l’effondrement du système dans lequel nous vivons. Le constat scientifique fait froid dans le dos et pour s’échapper à ce système qui fait de nous des destructeurs de la vie animale et végétale un certain nombre de personnes développe des sociétés alternatives en quête d’une plus grande autonomie. 29 II) Une société alternative et autonome la seule solution de survie ? Au vu des éléments précédents il semble compliqué à l’échelle de l’humanité de vivre de manière responsable en conservant la société actuelle. Le modèle capitaliste et libérale de notre société impose un mode de vie sociétale qui ne semble pas compatible avec l’écologie. Nous verrons que cette idée est combattue par des acteurs qui pensent que l’on peut vivre éthiquement au sein de la société avec l’ESS. Nous ferons ensuite un tour non exhaustif des alternatives qui existent pour vivre éthiquement au sein ou parallèlement à la société. A) Un Consumérisme Éthique : l’idée de l’ESS a. L’idée générale : Qu’est-ce que c’est ; Pourquoi c’est fait ? Des exemples L’ESS est un concept intéressant, il désigne un ensemble d’entreprise dont le fonctionnement interne et les activités sont fondés sur un principe de solidarité et d'utilité sociale. L’idée est de proposer une alternative éthiquement responsable au sein de la société économique. Le but est de rendre cette société plus durable en prenant en compte les problématiques sociales. Le rendement et le chiffre d’affaires ne sont plus l’unique priorité de ces entreprises, la hiérarchie est repensée pour rendre les salariés acteurs et propriétaires de leurs activités. Globalement ces entreprises mettent en place des modes de gestion démocratiques et participatifs. L'utilisation des bénéfices réalisés est encadrée, le profit individuel est proscrit et une grande partie des bénéfices générés est réinvestie. Les entreprises de l’ESS peuvent se présenter comme des entreprises lambda, c’est « un mode d’entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l’activité humaine »... Ainsi une activité « traditionnelle » comme un bar peut être une entreprise de l’ESS dans la mesure où elle répond aux critères cités ci-dessus. Prenons l’exemple du Bieristan à Lyon pour illustrer ce propos. De prime abord rien ne différencie ce bar/restaurant de ces concurrents, mais quand on se penche un peu sur son organisation interne, on se rend compte 30 que le différentiel est énorme. Déjà le Bieristan appartient aux salariés qui y travaillent, en arrivant chacun achète pour 4000€ des parts de la société, et est tenu de les revendre quand il part. Pour ceux qui ne pourraient pas se permettent de sortir cette somme, une partie de leur salaire est prélevée chaque mois jusqu’à atteindre la somme en question. La hiérarchie vise à l’horizontalité, c’est-à-dire que les décisions sont prises par l’ensemble du collectif : salaire, politique structurelle, représentant institutionnel… Tous ces éléments sont discutés chaque année et les décisions sont prises au maximum par consentement (un système de vote peut être mis en place si le consentement n’est pas trouvé). Un système de « team » est mis en place, chaque team correspond à une tache nécessaire au bon fonctionnement de l’entreprise, chaque salarié appartient à plusieurs teams. Chaque team à ses propres compétences et est capable de prendre des décisions conjoncturelles pour optimiser l’organisation et ne pas perdre de temps sur des questions qui ne nécessite pas une décision collective. L’idée c’est que les salariés ne soient pas affectés à une tâche monotone, chaque personne à plusieurs missions et ils consacrent une partie de ses 35h à la comptabilité, au service au bar, à la cuisine, à la communication à la gestion… Néanmoins une grande partie des entreprises de l’ESS explore des activités génératrices de revenus innovantes. C’est par exemple le cas de Phoenix. Cette entreprise cherche à donner une seconde vie aux produits, surplus, déchets, elle permet à chacun de s’inscrire dans une économie plus respectueuse des ressources, plus responsable et solidaire. Pheonix se présente comme une structure qui « aide les entreprises à réduire le gaspillage en réveillant le potentiel de leurs déchets ». Elle s’engage pour un développement durable de la société. Pheonix part d’un constat simple : le gaspillage règne dans notre société et cela même si certains sont extrêmement précarisés, ces deux phénomènes coexistent ce qui semble aberrant. Phénix est une jeune startup qui a trouvé sa place et son rôle dans la société en cherchant une solution à ce paradoxe. Elle a ainsi développé plusieurs types d’activité : un partenariat avec l’agroalimentaire pour aider la grande distribution, l’industrie ou le secteur événementiel à réduire leur gaspillage via des circuits d’économie circulaire ; un outil collaboratif qui connecte l’offre des émetteurs avec les besoins des repreneurs ; un cabinet d’étude qui permet d’identifier les sources de gaspillage en amont et de trouver des solutions adéquates pour la réduction des déchets; une application antigaspillage (filière de seconde vie ou de calorisation d’un produit) ; et enfin une application qui fait le lien entre les commerçant qui ont des invendus et les clients qui peuvent bénéficier de produits à prix réduits (à l’image de To Good To Go). 31 L’intelligence de l’entreprise c’est d’avoir un modèle économique basé sur la défiscalisation, les grands groupes gagnent de l’argent et du temps avec cette solution et ils sont plus enclins à entrer dans une dynamique écologique. Il existe un grand nombre d’entreprises de l’ESS pour l’ensemble des domaines d’activité. Il est possible de retrouver sur le site de la CnCRESS plus de 38000 établissements référencés. b. La reconnaissance par l’état : quelle loi ? pourquoi ? Qu’est-ce que ça change ? Les différents statue (coopératif, statue ESUS, scop…) Bien que l’on puisse historiquement remonter au XVe siècle avec la création des hospices de Beaune pour parler du concept d’ESS, le mode d’entreprendre et de concevoir l’entreprise de l’ESS au sein de notre modèle sociétal n’a une reconnaissance juridique que récente notamment avec la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 dite « loi Hamont » relative à l'économie sociale et solidaire. Avec cette loi l’ESS « est reconnue comme une alternative pertinente, une autre façon de faire de l'économie se souciant du partage des richesses produites, du développement local des territoires, de la qualité des emplois créés, de l'implication des citoyens dans les projets, de responsabilité sociale ou sociétale » Cette loi a donné un second souffle à ce type d’économie, elle en a défini le cadre légal, elle renforce ses capacités d’actions, elle facilite les possibilités de création d’entreprise. Elle fixe aussi les conditions sinéquanones à la reconnaissance par l’état de ce type de société. Parmi ces conditions on retrouve : le principe de partage des bénéfices, de gouvernance démocratique et la constitution d’un fond de développement c’est-à-dire le réinvestissement d’une partie des bénéfices au développement de l’activité. Chacune des sociétés citée cidessous, et qui se revendique de l’ESS devra obligatoirement répondre à ces conditions. En 2015, le décret n° 2015-90 renforce l’action de l’ESS en imposant aux collectivités locales des achats socialement plus responsables et durables. En 2018 le gouvernement met en place un pacte de croissance pour l'économie sociale et solidaire dans le but de favoriser via la commande publique les entreprises de l’ESS. Les statuts des entreprises de l’ESS sont extrêmement variés. On trouve des coopératives dont le fonctionnement correspond aux critères de l’ESS (banque coopérative, coopérative de commerçants, société coopérative d’intérêt collectif…). Les SCOP 32 ont été pensées pour l’ESS, définies en partie par le décret n° 2014-1758 du 31 décembre 2014 et le n° 2015-858 du 13 juillet 2015. Les entreprises de l’ESS peuvent également prendre la forme d’association loi 1901, de mutuelle ou de fondation. Toutes ces « sociétés coopératives et participatives » sont des sociétés commerciales qui peuvent prendre la forme d’une SA, SARL, SAS. Elles se distinguent des autres sociétés par : la détention du capital par les salariés, la société ne peut pas avoir plus de 49% du capital détenu par des associés extérieurs ; elle doit être constituée par deux associés « co-entrepreneurs » au minimum ; le bénéfice est réparti en trois parts « travail » pour les salariés (25% minimum), la part « capital » c’est-à-dire les dividendes (maximum 33%) et la part réserve (16% minimum). Ces sociétés bénéficient de mesures fiscales avantageuses comme l’exonération de la Contribution Économique Territoriale.(CET) Par ailleurs, le statut ESUS apparaît au sein de la loi du 31 juillet 2014. Ce label permet de valoriser les entreprises qui ont un haut niveau d’exigence quant à l’impact social. Il facilite les financements par les particuliers et les investisseurs peuvent avoir accès à des réductions d’impôt. Pour obtenir le label il faut que l’entreprise poursuive une utilité sociale et qu’elle puisse prouver que cette utilité sociale a un impact économique (ex la réinsertion de prisonnier qui coute, qui désengorge les prisons et qui coute moins cher au Ministère de la Justice). Elle doit disposer d’un compte de résultat stable. Au sein de l’entreprise la moyenne des salaires et primes des 5 salariés les mieux payés ne doit pas excéder un plafond fixé à 7 fois le SMIC, la rémunération versée au salarié le mieux payé ne doit pas excéder un plafond annuel fixé à 10 fois le SMIC et enfin le capital de l’entreprise ne doit pas être mis sur un marché financier. En somme toutes ces règles visent à faciliter l’équité d’un système en empêchant certaines dérives du marché. Elles permettent de tendre vers la meilleure éthique possible. Pour obtenir ce label, il faut faire des démarches auprès de la Direction régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi (Direccte) il est accordé pour une durée de 2 ou 5 ans en fonction de la date de création de l’entreprise. On constate ici que l’état prend conscience de l’importance de mettre en place une dynamique favorable à ce type d’entreprise, cette reconnaissance (tardive) permet la création d’un cadre 33 légistatif fiable dans lequel ces entreprises peuvent évoluer et concurrencer les entreprises traditionnelles. c. Les avantages et les limites de l’ESS. Une méthode qui ne va pas assez loin ? Obtenir ou créer une société ESS présente plusieurs avantages. Cela permet de revendiquer des principes éthiques. Cela indique un mode d’entreprendre innovant, cela permet de revendiquer publiquement une façon de travailler soucieuse de l’humain. Comme nous l’avons vu dans le I), les pratiques responsables sont de plus en plus en vogue et le public est de plus en plus sensible à ces questions. De plus l’ESS répond à un vrai besoin social. Les difficultés de ces dernières années en matière de chômage, d’emploi, de bonheur au travail nous amènent à nous interroger sur la finalité de notre économie. La rentabilité avant tout au détriment de l’humain, le scandale des conditions de travail au sein des entrepôts d’Amazon est un exemple. L’ESS repose sur la recherche d’un bénéfice collectif et sur l’impact social autant qu’économique. Elle peut également permettre un meilleur référencement de l’entreprise comme fournisseur responsable. Elle dispose d’un canal de communication supplémentaire puisque les CRESS mettront à disposition du public une liste des entreprises de l’ESS de leurs régions. Être entreprise de l’ESS permet également d’avoir accès à des avantages financiers multiples. Comme nous l’avons vu plus haut elle dispose d’avantage fiscal dans le payement de l’impôt (ainsi que ses potentiels financeurs), mais elle peut aussi profiter de financement particulier : • BPI France : Prêts pour les Entreprises Sociales et Solidaires (PESS) – sous forme de prêts participatifs ; il faut néanmoins que l’entreprise ait plus de 3 ans. • L’État (opérateur Caisse des Dépôts) : Projet d’Investissement d’Avenir (PIA ESS) – sous forme de prêts participatifs ; dotation de 100 millions pour favoriser l’emploi et le développement de ces entreprises. • Amundi – sous forme d’apport en capital et billet à ordre ; • Aides régionales au développement économique des entreprises de l’ESS ; • Plateformes de crowdfunding type Anaxago, SmartAngeks ou Wissed pour la prise de part au capital ou Spear, Babyloan et Prêt de chez moi pour du microcrédit. Ainsi nous pourrions nous demander pourquoi ne généralise-t-on pas les entreprises de l’ESS à tous les secteurs d’activités et à toutes les entreprises existantes. 34 L’idée de l’Économie Sociale et Solidaire a peut-être de beaux jours devant elle, mais elle est perfectible. Le premier obstacle est celui de la rentabilité économique. Même avec tous les avantages cités ci-dessus les exigences sociales et les délais de prises de décision coûtent cher. Il faut trouver un modèle économique innovant pour se faire une place sur le marché, mais selon Ph. Frémaux, l’ESS n’arrive pas toujours à être à l’initiative de nouveaux services. En dehors des entreprises comme Phoenix, la plupart des Entreprises SS ont des propositions commerciales classiques sans offres originales. Par ailleurs, les acteurs de l’ESS qui dépendent des financements publics n’ont qu’une autonomie limitée, inhérente aux volontés de la sphère politique. Le second obstacle c’est le manque de visibilité. Lorsqu’une entreprise de l’ESS intervient dans le champ économique, elle entre dans la sphère marchande, aux yeux du consommateur elle devient une société capitaliste comme les autres. Et lorsqu’elle intervient en proposant des services sociaux elle apparait comme un prolongement des services de l’état, une délégation du service public. Le troisième obstacle est celui de sa démocratie, plus facile à coucher sur du papier qu’à appliquer réellement. Sa mise en place est compliquée, car très lié au facteur humain, certain d’entreprise tombe dans la logique de cooptation. En effet pour pérenniser une entreprise il faut une base solide. Prenons l’exemple d’une coopérative qui voudrait créer un journal, comment conservera-t-elle sa ligne éditoriale mise en place par les créateurs après plusieurs années de travail si de nouveaux entrants veulent en changer ? La réponse est en partie apportée par les SCIC qui incluent les bénéficiaires dans la prise de décision. On peut rajouter que ce mode de gouvernance empêche l’évolution au sein de l’entreprise, chaque personne ayant en théorie le même pouvoir, l’entreprise qui a une croissance douce ne permet pas de grandes progressions de carrière ni de forte évolution de salaire. Le quatrième point est lié à la différence possible entre l’objet social et le statut d’une structure de l’ESS. Une coopérative exemplaire dans sa gouvernance pourrait très bien avoir comme activité l’extraction de pétrole ce qui est un dévoiement total de sa définition. Pour conclure on peut dire que l’ESS est en effet une partie de la solution, mais elle demeure une partie du problème. Elle tente de corriger les travers du modèle capitaliste actuel mais elle s’inscrit tout de même dans le système. Bien que je considère cela comme une force pour changer les mentalités et les façons de faire on ne peut ignorer la persistance de conséquences défavorables. Si nous raisonnons uniquement en termes d’écologie, quel est l’intérêt de produire 35 une activité favorisant la croissance ? Activité certes plus responsable et plus limitée mais qui génère quand même un impact sur nos ressources. Malgré cela l’ESS c’est aujourd’hui 2,4 millions de salariés en France, soit 12,8% de l'emploi privé et un système de consommation qui se veut plus respectueux de la planète et des droits humains. La solution serait-elle pas dans une remise en cause du système actuelle ? B) Vers des écosystèmes autonomes : un système en devenir ? a. Se passer du système : une tâche ardue De nombreuses personnes s’inscrivent à contre-courant d’un système duquel ils veulent s’extraire. C’est une tâche extrêmement délicate, premièrement il est très difficile de se créer son propre mode de vie sans maîtriser les problématiques économiques et sociales qui nous entourent, deuxièmement le regard que la société porte sur ces personnes est très sensible. Je vais parler ici des ZAD qui montrent bien qu’il y a une volonté de vivre parallèlement au système et ensuite des monnaies citoyennes, car c’est un pilier de notre système qu’il faut apprendre à déjouer. De nombreuses initiatives vont dans le sens d’une remise en cause du système et ouvre les portes vers des modes de vie alternatifs, on parlera ici des ZAD qui sont parmi les premiers espaces d’autonomie relative diffusée largement dans les médias. Ces ZAD nous amèneront à réfléchir sur les alternatives du système, notamment en matière économique. Au-delà du combat politique, les zadistes combattent et dénoncent la mondialisation. Les zadistes sont souvent issus des milieux écologiques radicaux et des milieux anticapitalistes4. ce sont des altermondialistes. Mais ce qui est véritablement intéressant c’est l’organisation interne de ces ZAD, car au-delà du combat les ZAD sont des mini sociétés très organisées qui vivent avec très peu de moyens, ses membres ont mis en place des systèmes parallèles à notre économie traditionnelle, ils cultivent et font vivre la terre qui les nourrissent et dépensent très peu d’argent voir aucun. À la ZAD de Bure (55)5 des militants ont acheté des maisons ou terrains pour résister, ils ont élargi le plus possible leur activité de maraîchage pour nourrir tous ceux qui y 4 5 L'idéologie des zadistes, France Inter, 30 octobre 2014 https://burezonelibre.noblogs.org 36 vivent et ceux qui y passent. Un paysan-boulanger bien motivé à commencé à semer et construire son four à pain. D’autres personnes occupent le bois Lejuc avec des autoconstructions terre- paille/ yourtes et surtout les cabanes en hauteur en stratégie de résistance. Toutes les activités (cuisine, agriculture) sont assez spontanées et à prix libre pour les repas. Malheureusement les initiatives et le travail de chacun ne permettent pas de produire assez de légumes ni de couvrir les frais, malgré également les nombreuses récupérations dans des magasins bio. Il y a beaucoup de gens qui passent ces derniers temps ce qui rend encore plus difficile l’organisation quotidienne et la cohésion de groupe. En l’absence de réunions régulières des habitants, et de temps de partage de ressenti, nécessaires au bon fonctionnement d’un écolieu « légal », les régulations sont difficiles. L’argent est un peu toujours le nerf de la guerre, même pour des militants anticapitalistes extrêmes comme ceux des ZAD. Souvent les combats ou les volontés sont encouragés ou matés par l’argent. De nombreuses recherches démontrent que l’on n’est pas forcément plus heureux avec beaucoup d’argent, mais il est un outil qui permet d’acheter et de combler des besoins, plus on en a plus on en veut. Si bien que l’argent matérialise les inégalités sociales, il est devenu source de jalousie. Arte a consacré une série de web épisode sur le sujet, elle parle du rapport que l’on a au travail et à l’argent, je vous encourage vivement à visionner, car elle m’a aussi été précieuse pour le c) de cette partie6. Il est donc important de réfléchir aux alternatives possibles au système monétaire traditionnel et il en existe de nombreuse. Le premier exemple sera celui d’un revenu minimum, il s’agit d’une source de revenu stable, quelle que soit l’activité de l’individu. Le village du Kibboudz de Samar l’a expérimenté, l’ensemble des revenus de chaque individu est reversé au village (que se soit une AGR du village ou les revenus liés à un emploi extérieur), le village paye tout pour la collectivité. L’idée est simple « ce qui est à vous est à moi ». : toutes les responsabilités, les comptes… Dans ce Kibbotz chaque individu est libre de sa journée, il peut aller cultiver les dattes (qui représente 60% des revenus) ou pratiquer une activité qui ne génère pas d’argent. La question est celle de l’équilibre entre les activités déployées. L’argent même s’il est « bien utilisé » est un outil qui peut détruire : le fait d’en posséder ouvre le risque qu’il soit réinvesti dans des projets pas toujours éthiques. 6 https://www.earn-a-living.com/fr 37 Il est possible de créer sa propre monnaie. La monnaie locale garantit une économie circulaire, donc des productions locales et ainsi de diminuer l’impact carbonne. Elle présente toutefois de nombreux inconvénients que je n’aborderai pas ici. L’argent n’est pas la seule solution, Benjamin Lesage lors de sa conférence TEDX parlait de voyager sans argent. Lors de l’entretien (cf annexe 2) il explique qu’il a seulement dû en prévoir pour le VISA et le transport aller puis il a mis en place un système d’échange de savoir ou de compétence qui a permis de se passer de l’argent le plus souvent. La communauté qu’il a créée Utopia fonctionne d’ailleurs uniquement sur le système du don. Il enlève même au troc les vertus que certains pourraient lui trouver en le comparant aux siestes monétaires actuelles (cf annexe 2). C’est d’ailleurs le pari que font, nus et culottés, deux jeunes qui voyagent sans une pièce, sans un bagage. Parfois mis en difficulté ils expliquent que la raison est liée à un manque d’habitude, mais que dans l’écrasante majorité ils ont reçu un bon accueil. S’émanciper du système n’est pas une tâche aisée, il paraît d’ailleurs impossible de le faire seul et sans argent. Mais avec du temps et à plusieurs, il est possible de créer des alternatives. b. Les pratiques écologique et issu des traditions : une alternative aux nouvelles technologies ?… (Lowtech ; toilette seches, do it yourself: un petit tour des pratiques) Nous avons vu dans le I)B)a) que les pratique évoluaient, mais ces pratiques, bien qu’elles impliquent des changements comportementaux importants, restent relativement accessibles car elles s’intègrent plus ou moins bien avec le système sociétal dans lequel nous nous trouvons. Avec l’évolution technologique la vie quotidienne s’est simplifiée et il devient difficile de retourner aux pratiques d’autrefois car elles sont plus couteuses en temps, en énergie et souvent moins rentable. Même si cette affirmation n’est pas tout le temps exact, ces pratiques « traditionnelles » sont perçues comme moins efficaces et donc délaisser. Pourtant leur impact environnemental est un modèle du genre ! Nous parlerons donc un peu de Lowtech et nous présenterons ensuite quelques pratiques que j’ai eu la chance de rencontrer durant mes voyages. 38 La low tech ou en français « basse technologie » est une technique issue du recyclage qui crée des technologies simples, peu sophistiquées, pour répondre à un besoin. Le service rendu par la Low tech est le même que celui de la hight tech. Il faut être ingénieux, fabriquer ou réparer soi-même des produits, ce concept est proche du Do it Yourself. Il vise à s’affranchir des « hautes » technologies et à se réapproprier les objets. Les objets de lowtech se veulent durables et s’opposent à l’obsolescence programmée. Peu couteux et récupérables ou transformables, écologiques et économiques, proche des mouvements de décroissance et socialement accessible à tous, ces produits technologiques peuvent fournir une alternative éthiquement responsable à de nombreux produits de consommation hight tech. On retrouve la lowtech en musique avec l’utilisation des anciens objets comme un instrument (une machine à coudre) ; dans l’habitat avec l’utilisation de matériaux recyclés (activité développée par l’entreprise colombienne Conceptos Plásticos qui utilise du plastique recyclé pour construire des maisons modulables et peu chères (environ 7000€) ) (cf « Une entreprise colombienne fabrique des logements en plastique recyclé »,7 ; au niveau du matériel agricole avec des « tracteurs à pédales» (même si c’est plutôt des appareil de labour) … En bref la low tech trouve une alternative peu couteuse à l’environnement pour mener à bien la mission d’un appareil de haute technologie, elle a le mérite de remettre un sens entre la pratique de l’homme et son savoir-faire. Je vais ici exposer trois techniques traditionelles que j’ai pu rencontrer durant mes voyages qui sont des alternatives aux produits chimiques : 1. Le bokashi permet de régénérer un sol avec les minéraux et micro-organismes et s’utilise quand on démarre un potager. Il nécessite 15L d’eau, 1 brouette de fumier (minéraux et microorganismes), 1 brouette de terre argileuse (pour la structure), 2kg de sucre, 200g de levain, 1 brouette de paille, 1 sac de son, 1 sac de cendre (pour les minéraux). Il faut mettre le levain dans l’eau à température ambiante pour mieux le répartir dans le mélange. Ajouter le sucre pour nourrir le levain, sur le sol on met les ingrédients par couches (pour faciliter le mélange) en démarrant avec la paille (5cm). Il faut mélanger 2 fois par jour les 2 premiers jours, puis 1 fois par jour la première semaine en protégeant du soleil et de la pluie. 7 France 24, 10 août 2016 (lire en ligne) 39 Quan on voit une couche blanche les micro-organismes ont pris place, ils remplaceront le plus efficace des produits ou engrais chimique. 2,Les micro-organismes actifs (EM) il s’agit de développer de bonnes bactéries pour rendre sain une surface (à utiliser en ménage), un corps (à prendre quelques gouttes par voie orale) ou au jardin en pulvérisation ou eau d’arrosage. Ils existent 6 sortes de bonnes bactéries, 6 mauvaises et les autres, neutres, deviennent bonnes ou mauvaises à leur contact. Ainsi, les souches contenant les bonnes bactéries se donnent ou s’achètent, mais peuvent aussi se développer de la manière suivante : 30L d’eau ; 6kg de sucre ; 18kg de fruits sucrés (oranges par exemple) mis au fur et à mesure des 5 mois minimums et poussés au fond de l’eau chaque jour du premier mois (car stagnent à la surface). Ne pas mettre dans du métal ni fermer. Filtrer pour récupérer le liquide dont on peut se servir et redémarrer un autre avec le reste (gélatineux) et la même proportion d’eau et de sucre ; attendre un an sans toucher. 3 La culture de plantes pérennes à Tempelhof : Les plantes pérennes sont cultivées dans un objectif de produire une alternative aux salades, car elles ont une grande contenance en minéraux et nutriments, elles se récoltent pendant une dizaine d’années et poussent tôt dans la saison. Stephan développe cet espace en prenant le modèle du jardin-forêt avec différents niveaux : les plantes pérennes au sol, des petits fruits comme les cassis et quelques arbres comme l’aulne. Il a choisi de se focaliser particulièrement sur la couverture du sol. Pour la couverture, soit on utilise la paille, soit on la réalise avec des plantes vivantes, ce qui est plus intéressant, car les plantes, par la photosynthèse, créent de la matière organique qui nourrit la vie dans le sol (bactéries et champignons). Le trèfle peut servir de couverture végétale par exemple. Stephan cultive donc une vingtaine de plantes dont : le citron du nord avec plus de vitamine C que le citron classique ; le fenouil ; la consoude ; le lamier blanc ; le sarrasin (dont on mange aussi les feuilles). Dans notre société ultra-connectée, les savoir circulent. Les tutoriels YouTube, les livres spécialisés permettent à n’importe quelle personne qui a du temps et l’envie de faire plus par lui-même. C’est le développement du phénomène du « Do it Yourself ». Les écolos l’utilisent de plus en plus pour un meilleur pouvoir d’achat, pour contrôler la qualité d’un produit et pour des questions écologiques. Les exemples sont multiples et ils vont de fabriquer sa propre maison 40 aux produits cosmétiques (le dentifrice, la crème solaire), à développer des appareils de cuisson alternative (four solaire). Dans le Guide des bonnes pratiques publié par le collectif Notre Village, on retrouve l’ensemble des méthodes et recettes utilisées par des collectivités ou des mairies pour avoir une alternative durable au système traditionnel. c. Pourquoi fonder un éco village ? Se réapproprier le savoir faire; redonner du sens à son éthique : être en accord avec ses valeurs écologiques, communautaires ; vivre en harmonie avec soi-même Le constat d’une grande dépendance au système semble être la première cause de mise en place d’un écovillage. Avec la surspécialisation nous avons confié à des tiers privés des besoins naturels primaires comme se nourrir afin de se consacrer uniquement à son activité et gagner en productivité. À l’heure d’aujourd’hui peu de personnes sont capables de survivre si les supermarchés ferment pendant une longue durée. En cas d’effondrement, au vu du fonctionnement en flux constant des grandes surfaces alimentaire, le stock n’excéderait pas trois jours. C’est l’une des premières motivations d’un écolieux, se réapproprier les savoirs faire de bases et ne pas délaisser aux autres ce qui est vital à notre survie. L’association SOS Maire8 alerte sur la dépendance des petits villages, elle appelle à aller vers plus de résilience à l’échelle locale notamment sur la gestion des ressources vitale comme l’eau et la nourriture. La seconde motivation est certainement la volonté d’être davantage en accord avec ses valeurs. L’émergence de la préoccupation écologique dans l’esprit de la population remet en cause la logique très individualiste du système. Nous prenons conscience de notre responsabilité sur la disparition du vivant sous toutes ses formes, et sur les destructeurs que nous sommes devenues à force de nous préoccuper que de nous-même et de notre confort. Mais changer la société est difficile et il faut d’abord changer soit même et changer les choses par petite touche. Un écovillage est un espace qui permet de définir sa propre norme en regroupant ceux qui partagent nos croyances. Au sein de ces villages c’est l’individu qui compte à part entière au-delà de ce 8 https://sosmaires.org/ 41 qu’il possède ; c’est mettre en place des systèmes de coopération plutôt que de compétition... Selon le Patrick Viveret, ces changements font naître des innovations dans tous les domaines : “éducation alternative, écoconstruction, covoiturage, agroécologie, économie sociale et solidaire.” Le cadre de l’écovillage permet de se défaire des pressions extérieures en appliquant les choix qui nous conviennent le mieux à nous en tant que personne.9 La question qu’est-ce qui motive les gens à créer un écovillage. La raison est souvent liée à un mal-être. On a vu dans le IC) qu’il serait extrêmement difficile pour le genre humain de faire face aux changements climatiques. Les préconisations faites par le GIEC visant à être conforme à l’accord de Paris sont difficiles à concevoir aux vues de nos modes de vie actuels. Pour ne pas tomber dans l’écoanxiété, ou pour vivre pleinement heureux un certain nombre de personnes décide de créer un écovillage. Il constitue un espace relativement « neutre » ou un collectif d’individu pourra constituer ses propres règles de vie et de fonctionnement qui différeront de ceux de la société. De cette façon, les individus pourront vivre pleinement en accord avec leurs valeurs en s’abrogeant des règles qui entrent en contradiction avec leurs valeurs. C) Les « éco-lieux », des premières expérimentations aux communautés abouties : un système en développement. Il existe une infinité d’éco-lieux (il y en a plus de 17 000 actuellement référencé sur le GEN), J’ai tenté de parler de ce que je trouvais le plus significatif ou des tentatives de structuration à l’échelle nationale. Mais de nombreux exemples sont issus d’un choix purement subjectif lié à mes affinités ou à mon vécu. 9 Entretien d’Elfi Reboulleau, À Pourgues, ces villageois expérimentent leur utopie concrète en communauté, Mr Mondialisation, 42 a. Les premières communautés et l’apparition des éco-villages Dans les premières formes de communauté que j’ai pu identifier, il y a les communautés religieuses. Les communautés juives, arabes ou chrétiennes, sont des groupes d’individus qui vivent selon le même idéal religieux. Se structurant progressivement les communautés chrétiennes sont les cousines éloignées de nos communautés autonomes actuelles. Elle prônait un mode de vie simple, les moines cultivaient ce qu’ils mangeaient, ils passaient beaucoup de temps à étudier et partager leurs savoirs religieux. Certains moines acquéraient des savoir-faire artisans précieux et ils pouvaient vivre en quasi-autarcie. On peut également parler des communautés hippies, elle se crée dans les années 60/70 aux états unis dans un contexte de désaccord d’une partie de la population avec la guerre du Vietnam. Beaucoup de jeunes ont commencé à former des communautés qui prônaient l’égalité, ils voulaient vivre librement refusant toute forme d’autorité, dans des relations les plus authentiques possible en rejetant la société de consommation. Chaque communauté avait ses propres règles et son propre fonctionnement, laïque ou religieux, elles partageaient néanmoins un idéal commun, elles travaillent toutes la terre, elles étaient proches de la nature et chaque individu avaient le devoir de se mettre au service du collectif. Selon Timothy Leary, Michael Horowitz, Vicki Marshall dans leurs livres « Chaos and Cyberculture » ce serait ces communautés qui seraient à l’origine du mouvement écologique. Le retour à la nature était primordial, de nombreux hippies rejoignaient des communautés rurales, ils avaient un grand respect pour la planète, ils utilisaient des produits bio et des énergies renouvelables10 les communautés les plus connues sont crée en 1965 comme celle de l'East village à New York ou Haight-Ashbury à San Francisco. Elles sont précurseurs dans les modèles de communauté et d’écovillage moderne car elles remettent en cause le système et repense le système collaboratif et participatif. (image en annexe 4) Le terme écovillage a été défini en 1991 dans la cadre d’un rapport pour Gaia Trust (ONG) par l’astrophyscisien Robert Gilman, pionnier dans le domaine de la durabilité. C’est une des 10 Les hippies avaient raison sur toute la ligne, San Francisco Chronicle, repris dans Courrier international n 894- 895 du 20 décembre 2007 43 premières ONG à s’intéresser aux communautés et aux modes de vie alternatifs. Le terme est ensuite repris lors du Sommet de la Terre de Rio. Suite à cela deux ONG Gaia Trust11 et Global Ecovillage Network (GEN)12 , dans le cadre des Agendas 21, proposent de supporter financièrement des projets d’écohabitat pour tenter une solution au constat du dérèglement climatique. Cela pouvait être des lieux ruraux ou urbains, dans différents types d’habitat, la seule condition était de développer un mode de vie durable. Avec les différentes expérimentations comme au Danemark, la définition d’un éco-lieu se préside en 1994 la GEN intégrait les principes d’échange d’idées et de procédés, le développement éducatif et culturel. L’objectif pour l’ONG est de montrer l’efficience de ces modes responsables pour l’environnement, modes durables et transmissibles aux générations futures. En 1996, lors de la Conférence internationale Habitat II des nations uni, les deux ONG présentent les 20 premiers écovillages. Sur le site du GEN on en compte aujourd’hui plus de 243. La définition du terme écovillage est une façon simplifiée de nommer un ensemble de communautés qui ne se revendiquent pourtant pas toutes sous ce terme. Elles parlent souvent d’éco-hameaux, de communautés intentionnelles, d’un ensemble d’habitats partagés : le mot diffère en fonction des époques et des pays. L’essence même d’un écovillage est d’être un lieu d’expérimentation sur des sociétés alternatives, avec une empreinte écologique minimale. Le concept n’étant pas contrôlé chaque initiative s’apparentant aux caractéristiques citées ci-dessus est susceptible de porter ce nom. Parmi les premiers « écohameau » français (terme utilisé dans les années 70) qui font leurs apparitions, on trouve un fort lien avec mai 68. Un certain nombre de personne liée au mouvement créent des formes alternatives à leur société et l’on voit les premières communautés d’écovillage apparaître. De nombreuses personnes rachètent des hameaux entiers ou même des petits villages et fondent des systèmes de solidarité et de partage local. C’est le cas de Eourres, un petit village post-68 où se pratique le yoga, le maraîchage, la vannerie, des chantiers de volontaires.... Dans les premières expérimentations modernes de communauté autonome on a également celle du Larzac en 1972. Bien que cette communauté se structure autour d’un combat de désobéissance civile, une mini société se fédère sur le territoire, à l’image de ce que l’on 11 12 Gaia Trust | Our History », sur gaia.org Global Ecovillage Network | Connecting Communities for a Sustainable World », sur gen.ecovillage.org 44 rencontrera quelques années plus tard à Notre Dame des Landes. Le lieu est organisé, les terres cultivées, la cuisine collaborative, des petites constructions sortent du sol. L’idée comme les communautés citées plus haut et de recréer un mode de vie qui correspond à l’identité des adhérents de l’écovillage. On parlera donc par la suite d’éco-lieu pour définir l’ensemble des éco-village ; éco hameaux ; habitat alternatif, communauté résiliente ; éco-habitat… termes qui désignent des méthodes différentes, adaptées au contexte pour une philosophie sensiblement identique. b. Les écolieux en France : La communauté village, les villages écologiques, des écolieux divers Je vais parler de la Communauté Emmaeus Lescar-Pau, car c’est un exemple significatif de ce qui peut être mis en place à grande échelle et parce qu’elle rencontre un certain succès médiatique récemment. Depuis le reportage de Brut et de Konbini sur le sujet, ce mode de vie a été mis sur la table chez les 12-35 ans (principaux abonnés de ces chaînes). Ce village est créé en 1982 dans un petit village des Pyrénnées Atlantiques. À l’origine il s’agissait d’accueillir les gens de passage et d’ouvrir un petit « Bric à Brac » pour reprendre le terme des fondateurs. Cinq ans plus tard à force de grossir et à cause de l’insalubrité du lieu la communauté déménage à Lescar (proche de Pau), à partir de ce moment la croissance est exponentielle. La communauté s’étend de 1,7ha à 7ha en 2007. Elle achète des terres agricoles au-delà de sa seule communauté et pratique l’agriculture sur les terres aux alentours. Elle continue à développer des activités variées : on retrouve le Bric à Brac (l’essence du projet) qui fait désormais 10 000m2, une recyclerie/déchetterie et une ferme de 4,5ha qui lui permet une quasi-autosuffisance alimentaire. La communauté dispose de nombreux artisanats : boulangerie, restaurant, cordonnerie ; les revenus du village ont augmenté depuis la médiatisation qui permet une nouvelle forme d’AGR, celle du tourisme (environ 1700 visiteurs par jour en moyenne), au risque de perdre un peu de l’authenticité qui faisait le lieu. L’habitat prédominant fut longtemps le Mobil home pour des raisons de praticité, mais il est remplacé progressivement par de l’écohabitat. Elle prendra le nom de village en 2013 dans une logique intégrative de nouvelle personne. Cependant dans ce village il faut être d’accord avec l’idéologie et « l’utopie » profondément anti-capitalistes, la création de richesse est redistribuée au sein du village puis utilisée pour les nouvelles constructions/rénovations. L’outil appartient 45 au collectif et le valoriser « c’est valoriser l’humain ». Le caractère unique de ce lieu c’est son aspect autonome financièrement et de capacité financière impressionnante comparé aux écovillages traditionnels. Il dégage un chiffre d’affaires de 3,5 millions d’euros par an, ce qui lui permet de vivre entièrement sans subvention d’état. En 2021, la communauté Emmaeus Toulouse devrait ouvrir ses portes sur ce modèle avec un terrain de 5 hectares. Ces communautés Emmaus sont créés de toute pièce, mais certains villages en France déjà existant se sont convertis à l’écologie. Je vais exposer ici deux exemples celui d’un village breton et celui d’un village en Dordogne. Le premier est le village de Silfiac13 situé dans le Morbihan profond, il voit progressivement dans les années 1990 sa population partir. Serge Moëlo alors adjoint au maire veut sauver l’école du village menacée de fermeture. Pour cela il va mettre en place des initiatives originales. La commune va développer le tourisme vert et va mettre en place dès 2001 un « hameau écocitoyen », ce concept développer en Allemagne (comme nous le verrons par la suite), c’est un relatif succès car des personnes en quête d’un tel endroit viennent de toute la France pour investir ce hameau, preuve que la demande existe. Une série d’habitat écologique est bâtie et vendue à des prix raisonnables sur fond de géothermie, d’économie d’eau… Les habitants se fournissent en électricité grâce à trois éoliennes, les eaux usées sont en partie assainies grâce au lagunage, un système poussé de tri de déchet est mis en place, les espaces verts respectent des normes biologiques avancées. Le système est rendu possible grâce au réseau qui se met en place regroupant une centaine de village et grâce aux subventions de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). Le second village est celui Saint-Pierre-de-Frugie, lui aussi victime de la désertification, pourtant aujourd’hui les gens s’y pressent pour trouver un logement. Pour se faire la mairie a d’abord interdit l’usage des pesticides, elle a ensuite mis en place un jardin partagé ou tous les habitants peuvent se former à la permaculture. Ces initiatives durables et écologiques ont fini par faire connaître le village qui a ainsi pu profiter de l’écotourisme. Des sentiers de randonnée apparaissent et le patrimoine du village est restauré. Ce tourisme a permis l’apparition de nouveaux commerces comme une épicerie bio, impensable il y a 20 ans. Le village a même vu 13 • http://www.lefigaro.fr/environnement/2009/11/26/01029-20091126ARTFIG00615-un-village-breton- 100-ecolo-.php 46 ouvrir une école Montessori. La prochaine étape est fixée par la mairesse : un village autonome en énergie. Voilà deux modèles de village qui ont su par l’écologie devenir des lieux d’attraction et répondre par la même occasion à l’enjeu de durabilité qui est celui du siècle à venir. La transition écologique ne doit pas être perçue comme une contrainte, mais au contraire comme une marche, un tremplin pour l’avenir. Maintenant, les habitants plébiscitent même l’écologie. Dans l’héritage des communautés religieuses cité plus haut, on peut citer les exemples de l’écohameau de la chaux à la Bussière-sur-Ouche (21)14 :. Ce écohameau chrétien, reprenant vie en 2009, appartient à l’association Goshen qui loue les lieux à 4 familles. Ils vivent dans une démarche de simplicité volontaire et un de leur objectif principal est l’accueil de tous à prix libre dans un gîte dédié à cela pour une solidarité et équité de vie. Ils sont tous très disponibles pour l’échange, ouverts à tous points de vue et à l’écoute. Ils font aussi de l’animation avec l’organisation de festivals, par exemple, et de l’accueil de groupe (un autre gîte est dédié à cela).Pour le potager, ils ont auto-construit des serres et pratiquent l’agroécologie. Ils ont planté récemment des fruitiers. Ils se retrouvent aussi autour de la spiritualité qui est une chrétienté ouverte, non-prosélyte et alternative puisqu’elle inclut autogestion, altermondialisme, écologisme, décroissance et non-violence. Ils se regroupent plus largement au sein de la tribu TCHAAP. L’Arche de Saint Antoine (3815) : cette communauté qui a plus de 30 ans accueille des formations notamment la FEVE (formation et expérimentation au vivre ensemble). Ils font du maraîchage. Leur argent est mis en commun, mais la communauté paie tous les besoins essentiels. Dans les formes plus modestes il existe une infinie variété d’écolieux parmi eux : La ferme de la Berthe, à St Franc (73)16 par le biais de la foncière Terre de Liens, un collectif d’une dizaine de personnes s’est installé pour faire du maraîchage biologique sur petites surfaces, de l’élevage caprin (fromage...) et de l’apiculture, dont les produits sont vendus en panier à travers la chartreuse et sur des marchés. Ils habitent en commun dans les maisons du site achetées en SCI, mais ils ont aussi construit une yourte et mis en place un système de phytoépuration décidé en 14 http://www.goshen.fr 15 http://www.arche-de-st- antoine.com 16 : http://fermedelaberthe.fr/ 47 commun lors de leur réunion hebdomadaire. Leur association, la Mijote, assure l’aspect pédagogique et culturel (festivals, concerts...). L’accueil, dans une maison commune, à prix libre, de personnes cherchant à se reconvertir est important : stagiaires, compagnons du réseau REPAS et chômeurs en parcours de découverte... Sur leur lieu, j’ai appris à traire des chèvres, à faire du pesto d’ail des ours et de la cramaillotte, à greffer des arbres fruitiers (prunier, poiriers, pommiers et cerisiers. Pèle mêle on retrouve aussi les communs : “La terrasse, 38” est un lieu d'expérimentation, de partage (avec des évènements culturels, espace de gratuité) et de transmission lié à la culture constructive vernaculaire ( autoconstruction en voûte nubienne/sarrasine), “Le mat de Drome” à Valence dans un quartier populaire avec un jardin partagé et pédagogique pour les écoles. http://lemat.hotglue.me/accueil Jardin’envie17 : SCOP cultivant des semences paysannes. À Saussac 18 un lieu regroupant 7 personnes auto-construisent en terre-paille et cultivent des plantes aromatiques et médicinales: Je terminerai par l’exemple de “la suite du monde”, cette coopérative a acheté un immense terrain inexploité donc peu coûteux qu’elle a divisé en 10 lots qu’elle vend pour former de l’habitat partagé. La toute nouvelle entreprise a collecté 150 000 euros en 4 mois. Ce lieu apporte la satisfaction aux élus de la Dordogne car il participe au repeuplement d’un territoire délaissé en séduisant de plus en plus d’urbain à la rechercher d’une nouvelle façon de vivre. Le projet toujours en vigueur cherche de nouveaux acquéreurs19. La suite du monde : On constate que chaque écolieu se construit d’abord sur un projet bien définit que ce soit le marécage de plante médicinale, la permaculture, la culturelle, une brique à braque… Même si la « raison d’être » initiale se dilue au fur et à mesure que le village grandit, il témoigne de la volonté originelle des créateurs et fait la spécificité de ce que deviendra ensuite l’écovillage. Chaque écolieu a ses propres règles et définit son propre mode de vie collectif. Certains seront Vegan, d’autres tournés vers l’éducation, d’autres vers la culture, d’autres vers l’autosuffisance, chacun faisant de ses valeurs le socle de la démocratie interne. 17 http://www.jardinenvie.com/ 18 https://www.fermedesaussac.fr/ . 19 https://www.lasuitedumonde.com/ 48 Une multitude de projets sont actuellement en construction notamment grâce à la Commission d’Analyse et d’Appui du Plan Ville Durable lancé en 2010, commission qui a mené les études relatives aux candidatures des appels à projets Écoquartier et Écocité. c. A l’international : quels pays sont en avance ? ; Quelle notion utilise ton ? Comment se structure les écovillages ? Quelques exemples. En Europe, plusieurs pays sont en avance dans le développement des écolieux. En France ce sont davantage des initiatives en zone rurale, c’est pourquoi je parlerai plutôt ici des initiatives urbaines plus présentes dans le reste de l’Europe, des initiatives rurales existent aussi mais elles se rapprochent de leurs homologues français. L’Europe du Nord est globalement en avance sur ce concept. Ce sont les danois qui seront les premiers à créer des communautés viables. Ils expérimentent dès 1972 une formule de co-habitat à Copenhague pour 27 familles. Aujourd’hui, environ 1,5% des Danois, soit environ 50 000 personnes, vivent dans ce type d’habitat comme dans le quartier de Munksoegaard près de Copenhague. Y cohabitent environ 100 familles avec une dimension de haute qualité environnementale et d'écomatériaux . Le concept de Co-Housing (cohabitat) est inventé au Danemark et s’est rapidement répandu dans les pays nordiques. En Allemagne des expérimentations du genre existent également à l’image de Vauban Fribourgen-Brisgau qui se définit comme un écoquartier. Après l’occupation illégale d’une ancienne base militaire, la municipalité se lance dans une grande rénovation en 1996 avec comme toile de fond le développement durable. Sont ainsi créés 220 « logements alternatifs » se regroupant dans le collectif « SUSI » ; des logements étudiants ; une maison de quartier et un centre social culturel. C’est un lieu d’expérimentation pour les maisons à énergie positive. Ce lieu regrouperait aujourd’hui 5500 habitants sur une superficie de 42 hectares. En Europe « du Sud », la Belgique développe également ses projets depuis les années 70 comme Hameau de Rosières. En 2006, le gouvernement fédéral commandite même une étude sur ces habitats groupés qui se transforment en « Habitat solidaire » et sont intégrés dans les Codes du Logement de Bruxelles et de la Région wallonne. Les Anglais, même s’ils ne sont pas forcément les mieux dotés dans ce type d’habitat ont inventé le terme « Ville en Transition ». C’est Rob Hopkins un enseignant en permaculture qui fonde ce concept. Résolument positif le mouvement est vu comme une occasion de changer son mode de vie, il ne s’agit donc pas d’adapter son mode de vie pour subir les conséquences de la 49 crise comme c’est le cas de beaucoup d’écolieux. Une des premières d’entre elles est Transition Town Totnes qui sera suivi de beaucoup d’autre comme Transition Streets (qui remporte le prix Ashden en 2011). Je conclurais ce paragraphe par les Suisses. Ces derniers, parmi les plus tardifs à développer ce genre de concept, connaissent aujourd’hui une ascension spectaculaire depuis 201020. On peut citer les exemples de l'éco quartier Oberfeld à Berne ou encore 'éco quartier PontaiseBlécherette à Lausanne. Durant mes recherches j’ai trouvé moins de sources concernant les spécificités des villages italiens ou espagnols, ou même ceux d’Europe de l’Est, car leurs médiatisations et les recherches universitaires ne datent que de 2015. Ils sont globalement similaires dans leurs philosophies aux villages français avec des spécificités qui leurs sont propre (comme chaque écovillage) que j’ai détaillé en annexe 1. Vous pouvez découvrir des écovillage européens plus ruraux sur le site eco-villages.eu qui référence un certain nombre d’initiatives. Des pays comme l’Inde et le Sénagal ont mis en place un suivi gouvernemental des écovillages. Le Sénégal dispose d’un organisme appelé l’Agence Nationale des Ecovillage (ANEV) qui a développé près de 500 écovillages. Cet organisme créé en 2008 est le premier en son genre. Sa mission est d’encadrer la transition de 14 000 villages traditionnels vers des écovillages d’ici 2020, un défi de taille. Cet organisme est désigné en 2014 par le GEN pour organiser le tout premier Sommet Mondiale des Écovillages. Le Sénégal a déclaré vouloir mener « politique de croissance misant sur la valorisation des ressources naturelles et favorisant les collectivités rurales ». En 2010, l’ANEV présente son “programme des écovillages”, l‘agence expérimente sur une vingtaine de villages pilotes des méthodes pour définir un procédé qui sera ensuite applicable à l’ensemble des 14 000 autres villages. Elle explore pour les champs de l’agroécologie, la planification, la culture des terres, les énergies renouvelables... L’agence va promouvoir des pratiques telles que l’apiculture, la production d’énergie alternative, le reboisement... Les premiers constats semblent être positifs, la transition aurait permis un meilleur accès à l’eau et à l’électricité, la création d’emplois chez les jeunes. La protection des espaces naturels est une 20 Voir notamment La revue durable no 28, février-mars-avril 2008; Dominique Roten, les écoquartiers : davantage qu’un ensemble de bâtiments écobiologiques in Moneta no 4, 2008, 26 novembre 2008) 50 de ses compétences pour cela l’ANEV va créer 40 écovillages le long de la frontière avec la Gambie. Mais les investissements pour chaque écovillage sont énormes environ (4 millions d’euros) et malgré un co-financement par le Fonds mondial pour l’environnement (Fem), le Programme des Nations Unies pour le développement (Pnud) et la JICA (coopération japonaise) le défi est de trouver de nouveaux partenaires financiers. Le problème de ce genre de projet c’est que les résultats ne sont pas immédiats, ils sont issus de politique structurelle et les réels bénéfices porteront probablement leurs fruits dans quelques années… NB: depuis le 5 août dernier (après l’écriture de ces lignes) l’ANEV a été l’une des premières victimes du programme de réduction des dépenses publiques au Sénégal, l’agence a été fondue dans a nouvelle Agence de la reforestation et de la grande muraille verte.21 L’Inde est aussi un pays qui accueille de nombreuses initiatives d’écovillage. Un des plus connus est celui d’Euroville, la création d’une expatriée française et d’un philosophe indien. Le village est défini par ses concepteurs comme un “lieu d'une vie communautaire universelle, où hommes et femmes apprendraient à vivre en paix, dans une parfaite harmonie, au-delà de toutes croyances, opinions politiques et nationalités »22. Il est devenu un immense écovillage rassemblant une population de plus de 2300 personnes, une population “internationale”. La propriété privée y est interdite, les soins de base, le sport et l’éducation font partie des droits fondamentaux et sont totalement gratuit, un revenu minimum est même mis en place. Pour intégrer le village, il faut faire ses preuves durant un an, sans être rémunéré pour son travail. Pour construire une maison ou en acquérir une il faut faire un don à la fondation. Depuis 1988 le parlement a voté une loi accordant à ce village de 20km2 un statut unique ce qui lui permet de toucher des subventions de la part de l’état et d’avoir certains avantages sur les demandes de visa23.. L'administration est gérée par un conseil de 7 personnes désignées par le gouverneur de l’état parmi les contributeurs du projet. Cette forte dépendance à l’état entraîne une perte non négligeable d’autonomie du village, car le gouvernement peut décider unilatéralement de la dissolution de la fondation24. Néanmoins cet écovillage reste un modèle du genre et un lieu incontournable dans l’étude des structurations des communautés de ce type. 21 https://www.seneweb.com/news/Societe/le-dg-de-l-anev-explique-le-modele-seneg_n_185125.html 22 Auroville : une ville utopique… et bien réelle, Sputniknews, 06.02.2016). 23 http://www.flame.edu.in/images/dip/reports/auroville.pdf 24 Auroville Foundation Act, 1988 51 Il m’est impossible de parler de toutes les spécificités de chaque pays. Je délaisserai volontairement le continent américain qui mériterait à lui seul une partie. Je dirais simplement que les écovillage aux états unis sont les héritiers directs du mouvement hippie, un des plus médiatisés est celui d’Ithaca. Les écolieux sont surtout situés proche des côtes du continent : (cf carte annexe 9) 52 III) Vers la création d’un écolieux Il s’agit ici de prendre à la fois un point de vu entrepreneurial sur la question et de dresser un tableau de ce qui doit être mis en place en amont de la création d’un éco lieux. Ce mémoire tourné vers la recherche vise également un but pratico-pratique. On parlera ici à la fois d’écovillage et d’écoquartier car ils répondent tous les deux à une philosophie de vie commune celle de l’écologie, de la durabilité en ayant une forte dimension participative. Je me concentrais néanmoins sur la création d’un projet d’avantage rurale. Si la méthode exposée par la suite peut être applicable à toute création d’éco-village, il y a aussi un certain nombre de parti pris car nous sommes dans l’optique de créer un éco-village par la suite. Je tacherai donc d’argumenter ces choix. A) Les premières étapes de sa création Je vais tenter d’expliquer à la fois une méthode pour créer un écovillage en l’étayant de ma réflexion personnelle. Ayant moi-même l’ambition d’en créer un je proposerai mon modèle en argumentant mes propositions. Ce modèle original est issu d’un travail et d’une analyse mené par un collectif de 5 personnes, il s’intègre dans le prolongement des réflexions développées et présentées précédemment. a. Les conditions à réunir pour devenir éco-village. L’idée d’un éco village est de prendre plus d’autonomie, de mettre en place une société alternative plaçant au cœur de ses préoccupations la solidarité, le respect, la convivialité, la liberté de croyance, l’ouverture et le respect. Un éco village est un espace de vie, généralement rural, ayant une perspective d'autosuffisance reposant sur deux axes : un modèle économique alternatif et une place prépondérante accordée à l'écologie. La priorité est en effet de redonner une place plus équilibrée à l'homme en harmonie avec son environnement, dans un respect des écosystèmes présents. Le principe de base est de ne pas prendre à la terre plus que ce qu'on peut lui retourner. Chaque écovillage se définit lui-même en fonction de son autonomie économique mais avec un 53 esprit de partage et de solidarité commun. Un écovillage mélange les techniques nouvelles ou traditionnelles visant à construire un futur durable. Tous ces éléments sont également vrais pour les éco-quartiers même si pour ces derniers la perspective d’une autonomie alimentaire est très difficilement envisageable. Les écovillages intègrent des pratiques diverses telles que : • La permaculture/agriculture autosuffisante et le respect du vivant, dans le but d’atteindre l’autonomie alimentaire • L’alimentation végétarienne, voire végétalienne dans une logique antispéciste • Les écoconstructions, car aujourd’hui le bâtiment est une des premières sources de pollution mondiale • Les énergies renouvelables et l’autonomie énergétique • La gestion collective des lieux communs et des activités liées au bon fonctionnement du village • La démocratie participative • Le développement personnel des individus et la spiritualité • Une éducation alternative • La circulation des connaissances et des savoirs et la non-surspécialisation des individus. • La mise en place de moment de partage et d’apprentissage : les chantiers partagés Chaque éco village est, à mon sens, innovant car il définit lui-même son modèle économique, éthique et de gouvernance. Il y a donc dans chaque projet une partie d’innovation et d’expérimentation qui lui est propre et qui aboutit à des décisions différentes en fonction du village. Même si le concept d’éco village est de plus en plus galvaudé et qu’on a l’impression d’y être de plus en plus confronté, il faut rappeler que en réalité il ne concerne qu’une toute petite partie de la population mondiale. Pourtant, ce type de projet pourrait devenir une solution innovante à plus grande échelle… Enfin si l’Homme acceptait de remettre en question son mode de vie. Dans le n° 150 des cahiers Actualité Habitat on trouve sept préconisations qui sont nécessaires au fait de se réclamer éco-quartier : « faire de l'écoquartier un levier de régénération urbaine des territoires dans lesquels il s'insère » ; « activer les ressources et le potentiel socio-urbain du site et de son environnement » ; « s'appuyer sur une articulation des dimensions urbaines et 54 paysagères pour structurer l'écoquartier » ; « favoriser une mixité socio-urbaine basée sur le développement du lien social et de « l'écocitoyenneté »; «concevoir des îlots d'habitat et des bâtiments favorables à un bon fonctionnement social urbain » ; «anticiper les conditions de gestion » des déchets, des eaux et réseaux de chaleur » ; « mettre en place et faire vivre une démarche d'aménagement urbain durable” De plus le guide précise que ce type d’habitat doit vraiment être construit par les citoyens directement et non par des politiques. 25 Il n’y a pas vraiment de condition à remplir pour se prétendre écovillage car il y en a autant que de façon de faire. Il faut se fixer un objectif assez précis pour générer soit une AGR soit une ressource exploitable à son mode de vie. Cela peut être un espace culturel habitat ou la production de plante, le maraichage, le tourisme… du moment que cela répond à une dimension de durabilité. Le facteur humain est un facteur clé du succès d’un écovillage. Il est important de définir un cadre clair et de s’entourer ensuite de personnes qui partagent la même vision de la vie en communauté, en accord avec nos valeurs. Il faut être clair sur les questions de base du type : Comment va être répartie le travail ? Comment seront prises les décisions ? Les questions liées au modèle économique. On sait que dans la majorité des cas, l’échec d’un écovillage est lié au facteur humain. Dans l’annexe 5 on trouve un questionnaire qui peut servir de base pour élaborer un projet avec un collectif ou pour savoir si la personne en face de vous correspond à votre vision du projet. Il est vivement conseillé d’avoir un cadre juridique très solide avant de se lancer dans ce projet. Ce cadre permet de donner une reconnaissance officielle au projet. Il y a trois formats possibles pour l’achat d’un bien immobilier : • Acheter en indivision : c’est le format le plus simple et le moins contraignant car il ne nécessite aucune démarche particulière. Chaque personne est propriétaire du bien à hauteur de ce qu’il a donné lors de l’achat. On possède alors des quote part d’un lieu et non des zones bien définit. 25 Préconisations pour la conception et la gestion d'un écoquartier : les organismes HLM impliqués dans le développement urbain durable », no 150 de la collection des Cahiers d'Actualité Habitat, 168 pages ; 55 • Fonder une association : cela permet de faire acheter le lieux par l’association, ainsi c’est une personne morale et non physique qui en est propriétaire. C’est nottament le choix de l’écovillage Utopia. Cela présente l’avantage d’être facilement mis en place mais cela protège mal les acheteurs. • Acheter en tant que SCI (société civile immobilière) : dans ce cas de figure, chaque bien immobilier appartient à la société et par extension à tous ses membres, il n’y a pas de possession personnelle. Cela présente notamment un avantage lors de l’emprunt, car ce modèle est plus rassurant pour les banques. Il faudra ensuite penser à la forme juridique que devra prendre l’AGR. Généralement dans ces cas-là, l’entreprise appartient au monde de l’ESS, je vous laisse donc vous référer au II)A) pour voir les différents statuts qui lui sont rattachés. Un statut est un outil essentiel à l’épanouissement d’un projet. Il faut qu’il soit compréhensible de tous les membres, il est donc nécessaire d’expliciter les termes notariaux, peut-être à travers une notice située en annexe, la note n’aurait pas de valeur juridique mais éclairerait les collaborateurs sur les fondements du projet. b. Se lancer et Les débuts : L’achat du lieu et l’installation (débloquer les fonds ; les problématiques liées à l’argent), le business plan ; mettre en place un lieu de vie. Le projet a besoin d’un minimum de 5 personnes, et d’un maxima de 7, pour être construit. A terme, il doit accueillir la plus grande diversité de profil possible pour atteindre l’autonomie, avec l’idée d’une intégration progressive d’individus. J’ai retenu cette fourchette, car le groupe doit être assez nombreux pour que les initiatives ne soient pas le monopole de volonté individuelle, mais bien celles d’un projet collectif, et toutefois suffisamment peu nombreux pour conserver de l’efficacité. Parmi les premières connaissances, il paraît indispensable de connaître la permaculture et d’avoir une idée sur les initiatives de transition. Des formations existent, rédigées depuis longtemps en anglais uniquement jusqu’à ce que l’Université des Colibris en propose une en version francophone26. 26 MOOC Conception en Permaculture », Université des Colibris, 17 novembre 2017 56 Le groupe initial devra également avoir localisé les communautés du même type dans les périmètres géographique qui l’intéressent, il devra faire un pré-travail de présentation pour s’intégrer le plus facilement au sein de l’écosystème sélectionné ; définir la terre idéale à ses visions ; établir un premier plan d’action. Une fois que le groupe de pilotage a suffisamment cadré le projet, qu’il a identifié et communiqué autour de ce dernier, il va organiser l’achat collectif d’un grand espace de terre. Cet achat peut être réalisé uniquement par ce petit groupe de personne, puis l’intégration dans un second temps me paraît une solution à privilégier pour être sur ail la compatibilité (?). Certains écovillages comme AVEC ont fait le choix de rassembler une grande quantité d’inconnus qui partageait un idéal pour acheter. Cette solution a échoué car chaque personne avait sa propre vision pour mettre en place cet idéal, si bien qu’il ne reste aujourd’hui que deux des membres fondateurs sur douze. Le patrimoine doit contenir un espace partagé en son centre, un bâtiment de vie principal qui réunit un grand espace cuisine, une grande salle commune, un espace « culture » contenant bibliothèque, accès à internet et un espace de travail. Le lieu sera déterminé par plusieurs critères : • présence d’une source d’eau et d’un pré bâti (car c’est plus écologique); • situation dans le pays d’origine des fondateurs (pour des raisons de simplicité de mise en place, de connaissance du terrain et de la législation locale ainsi qu’en raison de la probabilité relativement proche d’un effondrement), • sur un plateau (pour des raisons climatiques) , • à moins d’une heure d’une ville pour garder un contact économique dynamique et laisser des opportunités professionnelles aux membres; • de préférence une zone où l’état aide à l’investissement et où le maire est en accord avec le projet ; • de 2ha à 5ha minimum pour avoir la capacité d’achat en se laissant des possibilités d’évolution. La mise en place de groupe de travail est une étape essentielle. Elle peut être constituée des membres du village ou de personnes extérieures venues apporter leurs conseils ou leurs expertises (même si ces derniers n’auront par conséquent pas de droit de décision finale sur la solution adoptée). 57 Ces groupes de travail se focaliseront sur la vie quotidienne et sur la vie en communauté, sur l’architecture, la gouvernance, l’alimentation, la consommation d’énergie, les aspects sanitaires… On ne peut pas prévoir qu’elles seront les résultats, car l’essence d’un écovillage est de répondre aux préoccupations profondes des personnes qui le peuplent. Chaque groupe élit un membre qui formera le nouveau comité de pilotage. C’est le travail conjoint des différents groupes qui permet la mise en place d’un plan d’action, et les objectifs opérationnels qui lui sont liés. Prenons l’exemple d’un groupe de travail sur l’énergie, il doit réfléchir aux possibilités liées à la géographie qui l’entoure, des équipements qui peuvent lui être mis à disposition par la municipalité, les ressources de la commune (ressource naturelle, circuit de distribution) il doit identifier les politiques publiques actuelles sur la question. Une des premières étapes est de créer un espace d’autonomie relative. Cela passe par la permaculture qui se déclinera en maraîchage, arboriculture, apiculture, pisciculture et dans la vente d’une partie de ces produits, ainsi que dans la mise en place de solution énergétique comme un puit ou le développement de panneaux solaires…La deuxième étape vise à mettre en place un modèle économique touristique autour de chambre d’hôte en vendant le concept éthique de l’éco village à des personnes frileuses de sauter le pas. La troisième étape se fera par la transformation des produits récoltés pour la vente et la conception d’une réserve. La quatrième étape sera l’approfondissement du modèle social par la mise en place du projet social culturel. Il passera par la mise en place d’une ferme pédagogique en lien avec des structures éducatives, l’accueil de personnes démunies et la mise en place d’un festival culturel pour faire vivre notre mode de vie à travers la culture. Parallèlement, le village se fixe comme objectif secondaire le développement de plusieurs autres activités en vue de son autonomie : forge, ébénisterie, mécanique… Il faudra également être présent sur le plan politique local pour permettre au projet une bonne intégration et de bonnes perspectives d’avenir. B) Créer un éco village viable : la seconde étape plus longue et difficile. a. La mise en place des projets : quoi ? pourquoi ? avec quels moyens ? 58 Le fondement du modèle économique rentable se base sur l’ouverture à l’autre et la découverte du mode de vie par des activités touristiques et pédagogiques : ferme pédagogique, chambre d’hôte, accueil collectif de mineur… Ce seront les mânes financiers principales qui viendront compléter le maraichage. En fonction de la taille du village, les besoins seront extrêmement différents. Cependant en vue de la réduction des achats le “do it yourself” doit prédominer. En ce sens, la ressource humaine est le pilier du modèle économique. L’idée est de définir les ressources humaines nécessaires chaque semaine dans les différents groupes de travail. En fonction du nombre d’heures totales, du nombre de citoyens et de leurs activités professionnelles parallèles, il faudra définir collectivement des quotas d’heure minimum à réaliser sur les différentes activités. Chaque citoyen devra tourner sur différents postes. Cet investissement permettra de bénéficier de la mise à disposition libre de tout l’équipement, de gratuité sur les ressources produites par l’écovillage dans une forme de troc des compétences, de bénévolat et de réciprocités. En termes d’outils un premier apport pourra être fait sur la base des dotations personnelles des citoyens. Il sera ensuite complété par des achats en fonction de l’évolution des activités. Pour nous un modèle économique rentable c’est donc d’abord de pouvoir dégager une somme minimum à réinvestir dans le projet. L’objectif n’est pas de générer des bénéfices chaque mois mais de permettre que l’activité économique rende le village autonome, en parallèle de la société sans se couper du monde qui l’entoure. Nous pensons qu’il sera nécessaire que certaines personnes travaillent à mi-temps pour assurer un revenu régulier qui permet de rembourser les prêts. En terme juridique nous pensons commencer par de l’auto entreprenariat pour le maraichage et d’évoluer sur une scop avec l’augmentation de l’activité puis de demander le statue ESUS. Nous nous intégrerons progressivement aux coopératives locales. Chaque personne aura la possibilité de déposer son propre projet en fonction de ses propres compétences ou de ce qui lui tient à cœur. Par exemple si un individu souhaite mettre en place un espace boulangerie, le collectif pourra prévoir des ressources pour la construction d’un four. Le patrimoine quant à lui pourra être géré à travers une société civile immobilière (SCI) qui permet de gérer son patrimoine et d’exercer d’autres activités non liées à l’immobilier. Le modèle économique devrait aussi tenir compte de l’influence politique locale et notamment de l’échelon le plus proche : la municipalité. 59 La question qui se pose ensuite concerne les ressources mobilisées. Lesquelles et Comment ? La première source de revenu est l’investissement personnel. L’apport d’origine sera sous la forme d’un prêt. Pour cela les futurs concepteurs du village devront avoir épargné à hauteur d’au moins 50 000 euros. Avec l’apparition de la SCI et l’intégration de nouvelles personnes les apports pourront être augmentés. Le gros avantage de ce système c’est qu’il permet des départs et des arrivés de membres sans nécessiter de grandes trésoreries. Le collectif prévoit néanmoins une réserve pour le rachat des parts détenues par les citoyens en cas de départ. Comme indiqué dans le paragraphe précédent l’investissement humain est la clé de la réussite. La seconde sera l’argent public. L’état favorise l’installation dans certaines zones territoriales faibles en densité de population comme dans la Creuse. De plus de nombreuses subventions telles que l’Anah permettent aux propriétaires de bénéficier d’aide de restauration de logement. Région, département, collectivités proposent également de nombreuses aides. Depuis quelques années les pouvoirs publiques favorisent les subventions au travers « d’appels à projet”, il sera important de cibler ceux qui correspondent à nos volontés d’évolution et d’y répondre au mieux. Ces aides sont indispensables dans la mesure où l’écologie et la culture ne sont généralement pas des activités rentables. La logique d’un tel lieu n’est pas de maximiser son profit mais d’avoir un rôle social fort. Nous souhaitons ainsi nous substituer à l’état, là où il manque à son devoir. La troisième source de revenu sera liée à l’activité. Les marges dégagées par les chambres d’hôtes par exemple serviront directement à l’autonomie du village. Un revenu sera attribué aux personnes travaillant uniquement pour la scop afin de leurs permettre de continuer à jouir de certains plaisirs sociétaux (voyager...). Dans l’idée d’une utilisation de low-techs27 il faudra des ressources en matière première que l’on pourra acheter ou récupérer28 . Mais le plus important c’est de faire découvrir son mode de vie au plus grand nombre, c’est selon nous l’essence même d’un tel projet : le partage. Nous devons convaincre et persuader les gens du bien fondé d’un tel mode de vie sans être vu comme un marginal. Pour cela plusieurs canaux sont possibles : 27 http://lowtechlab.org/wiki/Explore 28 http://www.recupe.net/ 60 • L’éducation : on pourrait s’imaginer transmettre notre fonctionnement à travers des séminaires ; on pourrait aussi mettre en place des partenariats avec des écoles d’urbanisme par exemple pour leur demander de monter des propositions d’aménagement de notre projet en échange d’une immersion sur place pendant une semaine; ou encore avec des écoles d’architecture pour des modes d’habitat alternatifs, d’agriculture.... • Les festivals thématiques, à l’image de l’Eofest d’Eotopia. Ce type de “festival” est plus une réunion de personne intéressée par la démarche de vie en communauté. Cette année le thème était “le vivre ensemble”. Chaque année le thème explore les difficultés rencontrées par les protagonistes du village. Une série d’ateliers est organisée toute la journée, un repas est préparé et pris en commun et une veillée regroupe tout le monde autour du feu. On retrouvait des ateliers comme : la sociocratie, la permaculture sociale, l’activisme écologique, des cercles de paroles sur l’effondrement... • Le woofing et l’accueil de résident : le village sera totalement ouvert aux visites, dans la limite des places disponibles et dans le respect du règlement intérieur. • Mise en place d’une caisse de solidarité́ : contribution monétaire mise en place par l’écovillage en vue de permettre à des gens sans revenu d’intégrer l’écovillage en avançant pour eux l’argent pour l'achat des parts de la SCI. On pourrait aussi imaginer un système permettant l'achat de part sur plusieurs années (sans intérêt) avec un prélèvement sur l‘indemnité donné par l’écovillage et/ou sur les revenus (RSA...) Afin de favoriser au maximum les initiatives, l’idée est de fonctionner sur la base du don, avec une gouvernance qui s’efforcera d’être la plus horizontale possible, dans le respect des valeurs du lieu. On prévoit également de s’intégrer de manière active au réseau colibri et ainsi de proposer un accompagnement sur la durée et échanger avec d’autres écovillages pour sans cesse évoluer. b. Les gouvernances existantes et des proposition de gouvernance En tant que collectif autogéré, il s’agit d’expérimenter des systèmes de gouvernance en structure horizontale favorisant la responsabilité et la coopération (qui évitent rapports de force, pulsions de l’ego ou encore quêtes de pouvoir par une personne ou une partie du collectif). Dans ce système, chacun doit se sentir pleinement décideur de l’organisation du collectif dont il fait 61 partie. Chaque écovillage a sa propre façon de fonctionner et sa propre gouvernance. Cette dernière n’est pas forcément formalisée dans un document écrit, car en fonction de la taille ce n’est pas forcément nécessaire. Dans les petites structures, la gouvernance s’apparente plus à une série de bonne pratique autour de la communication avec des réunions régulières... De nombreux groupes de réflexion sur les écovillages se sont penchés sur la question de la gouvernance, car la gestion du facteur humain est un élément clé de la réussite d’un lieu alternatif. La première étape serait de définir une charte éthique qui intégrera des valeurs que nous jugeons fondamentales : l’écologie de la vie, la vie communautaire, simplicité volontaire (ce qui ne veut pas dire la décroissance), droit de subsistance, action environnementale, la pratique philosophique/spirituelle, la compréhension scientifique, la diversité culturelle, l’éducation et la transmission ; et la croissance personnelle. Cette charte servirait de socle à notre mode de vie et à notre mode d’admission de nouvelles personnes. En somme, qu’est-ce qui fait de notre projet un écho de ce que nous sommes et de la ligne directrice que nous voulons suivre ? Il est important de cultiver tout au long de la vie en communauté des moments de cohésions sociales par des actions de “team building”. Il faut également développer tôt un ensemble d’outils de gestion du collectif, car ils seront indispensables pour gagner en efficacité et en communication. On doit donc trouver un document de gestion de conflit, car il est certain qu’il sera un moment donné utile, les statuts, le règlement intérieur (exemple en annexe 6). Ces documents doivent être accessibles par tous. Certains écovillages se dotent même d’un « manuel de gestion » comme à Pougres. Les membres du collectif ont coécrit ce manuel, un effort visant à formaliser leurs procédures de gestion par écrit, et ce pour deux raisons : clarifier en interne les rôles des divers responsables et les politiques et processus de gestion. ; offrir aux autres collectifs une visibilité sur leurs pratiques pour leur servir d’inspiration. Je vais présenter l’exemple de la Ferme du Collet (La Penne : 06) qui est un bon exemple de gouvernance que j’ai pu rencontrer. Ils décident au consentement lors des réunions hebdomadaires. Pour leur organisation, ils utilisent le système de cercles : ils ont le cercle des anciens (consultatif), le cercle des habitants (ceux qui, après une réunion, sont autorisés à rester de manière permanente) et le cercle des présents (incluant aussi les visiteurs). C’est le cercle 62 des habitants qui prend les décisions de manière hebdomadaire avec ceux qui veulent y participer. Ils se mettent en cercle et font un tour d’humeur avant la réunion pour savoir comment chacun se sent à ce moment-là. Ensuite ils décident de l’ordre des points à traiter et choisissent un facilitateur, qui donne la parole, et un scribe pour le compte-rendu. Après, le facilitateur énonce le point et ils posent des questions à celui qui propose le point puis un tour des avis de chacun est fait. Le facilitateur fait la synthèse pour une décision puis redistribue la parole et s’il n’y a pas d’objection la décision est adoptée ou une autre proposition est faite. C’est au consensus de manière horizontale. Une fois par semaine, séparément de la réunion de décision, est fait un partage de ressenti pour que chacun s’exprime sur ce qui ne lui convient pas et se sente bien dans cette vie communautaire. Des cercles, plus sectorisés et indépendants, et ne concernant que certaines activités, et donc certaines personnes, existent pour l’organisation de l’école, le chant... Concrètement, pour nous, la gouvernance se formera de plusieurs groupes par domaine d’activité, d’un conseil intermédiaire avec un ou deux représentants de chaque groupe et des « spécialistes de la question » et d’une Assemblée Générale de tous les citoyens. Chaque citoyen devra participer à la prise de décision d’un ou plusieurs groupes et en définir ses représentants. En cas de problème ou de désaccord, le représentant élu pourra solliciter le conseil qui émettra des préconisations ensuite discutées par l’ensemble du village à l’AG. Il sera important de diviser les prises de décisions conjoncturelles et structurelles ; celles qui peuvent être prises par : les groupes de travail, par le conseil intermédiaire et par l’AG. Il faudra utiliser les outils de Gouvernance partagée, d’Holocratie et la Sociocratie en privilégiant l’idée de faire ensemble. Alors que dans la société capitaliste une action entraîne une voix, dans un écovillage une personne entraîne une voix. On passe d’une logique de rentabilité, ceux qui font plus peuvent décider, à une logique d’égalité. Les enfants eux aussi ont un pouvoir de décision et sont pleinement intégrés au collectif. Au fur et à mesure que le village s’agrandit, de nouvelles problématiques apparaissent et donc la gouvernance évolue. À Pougres des instances ont été créées au fur et à mesure en fonction des problématiques auxquelles ils ont fait face comme le Comité d’Enquête et d’Arbitrage chargé d'arbitrer les transgressions au règlement intérieur. Il joue un rôle majeur dans la protection du cadre, donc de la liberté, de la sécurité et du bien-être des membres. Ce comité est devenu nécessaire quand le nombre de personnes a dépassé la vingtaine. Chaque village invente sa propre forme de comité. 63 Pour qu’une gouvernance fonctionne il est très important de mettre par écrit ses principes. Les statuts, le règlement intérieur et doit être accessible par tous. Certain écovillages se dote même d’un document de gestion. C) Limite et difficultés des modes de vie alternatif : a. Un problème de sémantique autour du mot écovillage Le premier problème réside dans la sémantique du mot « écovillage » qui en fait désigne comme on l’a déjà vu une philosophie davantage qu’une méthode. Chaque écovillage a sa propre spécificité : vocation politique, qualité de vie, création culturelle… La différence est énorme entre un lieu rural alternatif créé par des jeunes, un village autour d’une école créée par des familles ou encore un village créé par des retraités autour de l’écologie. En fait le terme écovillage serait davantage un concept de communauté intentionnelle avec une vie collective, mais rarement communautaire comme on le voit pourtant souvent sur les médias. Cela pose un gros problème pour les fédérer, car il n’existe à ce jour que des listes, non exhaustives, des noms des écovillages sans précisions de leurs spécificités. Il est facile aujourd’hui de se réclamer écovillage. Tout le monde le peut et ce mot n’est soumis à aucune norme ou certification qui attesterait de condition minimale. Les concepts et les normes que je vais décrire n’appartiennent donc qu’à ce que j’ai pu observer et mes analyses personnelles. Le terme écovillage perd un peu de son sens, car comme je le disais en introduction chacun peut se réclamer éco village. Une certaine autonomie et un mode de vie alternatif durable donnerait le droit l’appellation « écovillage » or, à mon sens, pour commencer à parler de village il faut réunir une communauté d’individu important ce qui est loin d’être le cas pour certains que j’ai visité où le nombre d’habitants ne dépassait pas 3. Mais même à 10 peut-on vraiment parler de village ? Néanmoins ce terme a le mérite de réunir un ensemble de personnes qui partage une vision commune, celle de mettre en place un lieu alternatif, avec un mode de vie particulier, éloigné du mode sociétal dans lequel nous vivant, ou il se sentirait plus en accord avec leurs valeurs. 64 Comme aucune norme ou façon de faire n’est uniformisée, impossible de s’y retrouver. Ce phénomène ne facilite pas la communication, la recherche et l’explication de ce concept au reste de la population. Si son caractère protéiforme est un énorme atout, il faut un cadre solide pour l’ensemble des écolieux sans quoi ils ne seront jamais reconnus à leur juste valeur et ils n’arriveront jamais à se fédérer. L’architecte Rudy Ricciotti lauréat 2006 du grand prix d’architecture critique d’ailleurs les termes d’écovillage et de écohameaux qu’il juge racoleurs, pour lui ces termes ont pris une dimension politique, ils générent de l’approximation sur le concept. b. Le facteur humain : la plus grosse inconnue Finalement quand nous y regardons de plus près nous sommes assez peu confrontés aux autres dans notre société. En tout cas, les relations que nous développons avec cet « Autre » restent limitées aux échanges de base. Vivre avec quelqu’un en permanence et s’entendre avec lui est un chemin parsemé d’embûches. Alors, vivre avec une collectivité… Le vivre ensemble est un apprentissage de tous les jours. Lors des entretiens avec Sophie de l’écovillage AVEC elle explique “ce sont les relations qui ont fait capoter le projet “. Sur sept personnes il en a suffi d’une pour créer des tensions et des rivalités. Elle expliquait que c’est parce que cette personne avait investi davantage d’argent à l’origine dans le projet que personne n’osait rien lui dire, si bien que la situation s'est enlisée et que c’est l’ensemble du groupe qui a fini par imploser. C’est un énorme challenge de faire cohabiter des personnes aux personnalités diverses. Les profils sont multiples, on trouve ceux qui souhaitent élever des animaux qui s’opposent aux véganes, ceux qui pourrait vivre nu et ceux que cela dérange, ceux qui ont besoin d’un environnement cadré, rangé et ceux pour qui cela est secondaire. Les besoins quotidiens de chaque personne sont différents. Dans le documentaire de Arte sur le Kibboutz de Samar, l’un des membres fondateurs Yossi Ovnat explique qu’en dehors du Kibboutz il avait un salaire très élevé et que parfois il ressentait une immense colère contre tous ceux qui « ne se décarcassent pas […] pour accroître les revenus du Kibboutz ». Ils expliquent que tant que l’argent ne manque pas il y a peu de conflits, mais dès que ceux qui travaillent doivent se priver alors que son voisin n’aide pas cela créer des 65 tensions. La communication est un facteur essentiel. Car l’apparente liberté dont ce genre de village veut faire preuve n’est possible que si l’ensemble du collectif ne commet pas d’abus. Il faut jouer entre la responsabilisation individuelle, la confiance en l’autre et le savoir communiquer pour faire correctement fonctionner une communauté. Le kibboutz a donc dû mettre en place des sanctions comme la suppression temporaire de la carte bancaire. Au vu de ces contraintes, il est moins difficile de comprendre l’empilage législatif qui étouffe notre société, car il faut régir les relations humaines, et le moyen le plus simple et le plus efficace réside souvent dans l’interdiction. Cette interdiction profite souvent au collectif dans un premier temps, mais cumuler elles peuvent remettre en cause les valeurs fondamentales du projet. (annexe 7) Le problème quand une communauté grossit c’est que l’on a tendance à tomber dans les travers de notre démocratie actuelle. Le changement d’échelle n’est pas toujours facile à mettre en place, et c’est pourtant une étape cruciale si l’on veut conserver une démocratie participative. Un reportage par « Autre JT » expose certains problèmes au village Emmaüs Lescar-Pau. Il explique que la volonté de changement du process n’est pas évidente. Une personne témoigne en expliquant que si l’on fait obstacle à « Germain » (le fondateur) on prend le risque de se faire virer du projet. David un ex-compagnon explique que lorsqu’il est arrivé il était payé 25h alors qu’il en faisait autour de 60, mais que toute contestation est très difficile, car la réponse est toujours « si tu n’es pas content tu n’as qu’à partir ». Tous ces éléments ont fini par remonter aux oreilles de la mairie de Pau qui a adressé une lettre au directeur d’Emmaüs, la logique de groupe entraîne des « violences » (à prendre avec des pincettes) envers ceux qui ne sont « pas dans la norme » et ceux qui n’ont pas d’assez bons rendements. Si bien que le patron d’Emmaeus a demandé un Audit qui a révélé « une absence de vie associative », « un défaut de contrôle des finances » ; « des conditions de travail difficiles » ; « absence de débat ». Bref on s’éloigne des valeurs de démocratie participative et du vivre ensemble qu’est censé rassembler un écovillage. Cela interroge sur deux points : la première comment bien gérer son changement d’échelle, jusqu’où doit grossir une communauté et second point comment les membres fondateurs peuvent-ils trouver une place sans bloquer la démocratie générale29. 29 Lescar Pau, quand l'utopie déraille - L'Autre JT : https://www.youtube.com/watch?v=8BfBVI_zZ34 66 Il faut également apprendre à gérer le regard extérieur, les gens jugent ce qu’ils ne connaissent pas. Les interrogations sont nombreuses de la part des personnes vivant aux alentours, s’agit-il d’une secte ? Pourquoi ne mettent-ils pas leurs enfants à l’école ? Et les préjugés sont nombreux. Il faut faire un travail d’intégration et de communication pour trouver sa place sur un territoire. c. Un pied dans le système, un pied dehors. Créer un écovillage ou en intégrer un témoigne d’un malaise vis-à-vis du système dans lequel l’individu évolue, il essaye de trouver une communauté où il se sentirait davantage en accord avec ses valeurs et ses objectifs de vie. Mais pour créer un écovillage, il faut faire face à plusieurs problèmes. L’accès à la terre est un des freins principaux à ce mode de vie, car il faut trouver le financement, les matériaux, les outillages et les connaissances nécessaires à cette implantation. De plus, mettre en place ce genre de projets c’est prendre le risque de faire face à des années de lutte administrative qui finissent par en décourager certains. Il est primordial pour cette raison d’être en accord avec le pouvoir politique municipale sans quoi le maire peut mettre des bâtons dans les roues à la création du projet. D’ailleurs les réglementations sur place auront un impact sur le projet, chaque endroit ayant des classifications spécificiques (terrain ISO 2000...). De plus, on constate que les écoconstructions sont très chères quand elles ne sont pas construites en autonomie par le village. En effet, ce genre de savoir-faire répond à la loi du marché, il est assez rare et donc l’augmentation de la demande entraîne une hausse du prix des matériaux et de la main d’œuvre. On parle alors d’« éco business ». Les formations en ligne pour la construction des habitats alternatifs sont relativement coûteuses, ce n’est que les chantiers participatifs qui viennent compenser la donne. Mais ces chantiers ne permettent généralement pas une connaissance entière du procédé de construction, ils limitent donc souvent la capacité à le reproduire dans son intégralité. Dans le cas de construction d’écoquartier urbain la carte blanche laissée aux architectes crée également des problèmes. Si la gestion durable des ressources y est pertinente, la complexité de la forme peut aller à l’encontre de toutes les règles d’urbanisme traditionnel, et si la nature y a une grande place cela se fait parfois aux dépens des habitants qui se voient imposer des formes urbaines peu adaptées. En effet la population des écoquartiers n’est pas forcément celle d’écolo convaincu, mais parfois de personnes qui découvrent ce mode de vie. 67 ? dénonce aussi la récupération par des promoteurs immobiliers qui se l’approprient pour finir par ne plus respecter l’essence même de ce pour quoi ce mot existe. De plus, la création de ces lieux n’est soumise à quasiment aucune règle, l’empreinte carbone de la construction n’est pas contrôlée. Ces constructions nouvelles seront toujours plus polluantes que la rénovation d’un patrimoine déjà existant même si elles restent potentiellement moins chères. De plus la rénovation du patrimoine en le rendant « écologique » permet de faire évoluer les comportements (et en quelque sorte l’impose) dans les quartiers déjà existants ou les pratiques sont difficiles à changer30. La recherche de fond et les activités génératrices de revenus sont aussi un problème. En effet comme nous l’avons vu précédemment l’argent est le nerf de la guerre de notre société, il est dur de construire quelque chose sans argent. Lors des entretiens que j’ai pu mener j’ai constaté que, souvent, ceux qui se lançaient dans ce type de projet avec un capital pécuniaire lié à un héritage ou à des économies amassées durant des années passer au sein du système. Dans tous les cas, il n’est pas possible de se passer d’argent pour créer son propre écovillage, comme nous l’avons vu précédemment la recherche de fond et les subventions de l’État sont des éléments extrêmement précieux au développement. Mais l’argent met les personnes face à un paradoxe de valeurs et face à des contradictions qui sont parfois difficiles à gérer. Ce serait un peu comme être végétarien et travailler en boucherie… Ces dissonances morales peuvent créer un sentiment de malaise. Les personnes qui créent un écovillage en zone rurale restent très dépendantes du système, loin des transports en commun elles ont l’obligation d’utiliser une voiture et donc elles sont très dépendantes des énergies fossiles ou des minéraux rares (pour les voitures électriques). Pour conclure, on constate ici que chaque écovillage doit faire face à des obstacles qui peuvent lui être fatals. À défaut d’une innovation écologique, aucun écovillage ne permet de s’affranchir totalement du système dans lequel nous vivons. Il faut rester conscient que malgré toute notre volonté il est important de garder un pied dans la société et de se servir de cette dernière comme d’un moyen et non d’une fin. 30 Michel Bonetti coauteur du guide « préconisations pour la conception et la gestion d'un écoquartier : les organismes HLM impliqués dans le développement durable » 68 Conclusion L’éveil des consciences par rapport à l’enjeu environnemental est bien réel : les mouvements verts et la préoccupation environnementale sont des inquiétudes partagées par de plus en plus de personnes, et la communauté internationale tente de se saisir de ces problématiques et d’y trouver des réponses. Mais l’inscription de longue date de l'homme dans un schéma confortable, favorisé par le libéralisme et la mondialisation, a enlisé nos comportements. Ces phénomènes ne sont pas exclusivement négatifs : ils ont connecté le monde, ils ont fait baisser la pauvreté, ils ont contribué à l’affaiblissement du populisme, ils ont créé une interdépendance entre les États qui a fait diminuer les risques de guerre en Occident. Mais le prix à payer pour cela est la dégradation poussée de la terre. Le changement climatique est donc avant tout un problème culturel qui implique une profonde remise en question et des interrogations complexes : que conserver de nos modes de vie actuels ? Que changer ? C’est d’ailleurs derrière cet « héritage culture » que se cachent ceux qui, malgré les multiples signaux d’alarme, ne souhaitent pas déclencher de modification majeure. La prise de conscience est donc variable et inégale. Pendant longtemps, je me suis questionné sur la meilleure manière d’aborder ces questions. Notre génération est-elle responsable de l’état de notre système ? En vérité, nous en avons hérité ; comment alors demander à des jeunes qui ont par exemple toujours connu Internet de délaisser cette belle invention, au seul motif qu’elle a un coût pour l’environnement ? La finalité ne peut être la suppression de toutes les activités polluantes, mais de sélectionner ce que l’on juge le plus important et d’en compenser l’impact. Il ne s’agit pas de tomber dans l’extrémisme, qui aboutirait au seul repli communautaire et qui verrait disparaître des savoirfaire et des pratiques qui ont considérablement amélioré nos conditions de vie. Les progrès dans le domaine médical, notamment, sont des avances essentielles. Mais ces progrès ne doivent pas se faire en dépit de tout bon sens. Les générations actuelles (vivant en France bien sûr) ne payent pas réellement et directement les impacts de leurs modes de vie. Le dérèglement climatique et toutes ses externalités négatives sont lents à émerger. Les conséquences à court termes n’apparaissent pas encore clairement, mais nous sommes au fait du risque encouru par les générations à venir. Quel monde va-t-il leur rester ? 69 Un premier pas serait de mettre en lumière des paradoxes encore trop prégnant aujourd’hui, malgré l’avancée connue par la cause environnementale ces dernières années. L'éducation et la sensibilisation jouent un rôle primordial dans l'éveil des consciences : normaliser le véganisme, toujours perçu comme un mode de vie extrême et mauvais pour la santé, communiquer sur la surconsommation inutile (et elle aussi mauvaise pour la santé humaine comme pour l’environnement !) en font partie. Cela permettrait de remettre en perspective les déclarations des dits « climatosceptiques » qualifiant les personnes ayant adopté des modes de vie alternatifs d’« extrémistes », quand ce sont ces mêmes climatosceptiques qui sont à l’origine de l’exploitation extrême de la terre et de ces ressources. « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs », disait déjà Jacques Chirac en 2002, soulignant le fait que la Terre est notre unique lieu de vie et que, pour reprendre une formule courante, il n'existe pas de planète B. De plus, les problématiques sociales des pays au faible PIB par habitant, en Afrique et en Asie notamment, sont parfois très nombreuses et graves (problèmes de libertés fondamentales, misère, manque d’accès à l’eau potable…), prenant ainsi le pas sur les questions environnementales qui, loin de constituer une priorité, ne font même pas partie des sujets de politique publique, comme en témoigne par exemple la gestion des déchets au Vietnam ou en Tunisie. Il existe pourtant des actions simples à mettre en place au niveau individuel, comme arrêter de manger de la viande, consommer plus socialement responsable, plus « éthique ». Certains vont déjà plus loin dans la démarche en créant des « écolieux ». Ces espaces tentent de faire ce que nous ne parvenons pas à mettre en place à l’échelle étatique, de faire évoluer le monde que nous connaissons en proposant d’autres façons de vivre. Ils ont tous un cheval de bataille : consommation de viande, autonomie énergétique, communauté sans argent… Ils s’attaquent aussi bien à des questions sociales qu’environnementales. Leurs objectifs sont de trouver une façon d’être heureux sans détruire la nature. L’écovillage devient alors à la fois un modèle de principe et une solution de survie en cas d’effondrement. Pour reprendre l’ouverture de mon mémoire, l’environnement ne devrait-il pas être considéré comme une question de sécurité nationale dont l’ennemi serait l’homme lui-même, qui privilégie son confort personnel à court terme plutôt que sa survie sur le long terme ? 70 Bibliographie : Livres • Jérémie Pichon et Bénédicte Moret, Famille Zéro Déchet, Ze guide , 2017, Le Seuil • Pablo Servigne, Agnès Sinaï, Raphaël Stevens, Hugo Carton, Petit traité de résilience locale, 2015, Éditions Charles Leopold Mayer (ISBN 978-2-84377-186-6) • Emma, Un autre regard sur le climat livre,2 019, Massot éditions, (979-1097160821) • Emmanuel-Yves Monin, Chez les bâtisseurs d'utopies : Des pays de Cocagne, phalanstères, communautés, ashrams, aux éco-villages et autres alternatives post-newage, éd. Yves Monin, 2009, (ISBN 978-2910097110) • Pablo Servigne, Raphaaël Stevens et Gauthier Chapelle, Une autre fin du monde est possible : Vivre l'effondrement (et pas seulement y survivre), Paris, Seuil, coll. « Anthropocène », 2018, 327 p. (ISBN 9782021332582). • Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, L'entraide : l'autre loi de la jungle, Paris, Les liens qui libèrent, 2017, 224 p. (ISBN 9791020904409). • Petit traité de résilience locale, en collaboration avec Agnès Sinaï, Raphaël Stevens, Hugo Carton, Paris, éditions Charles Léopold Mayer, 2015, 144 p.(ISBN 978-2-84377186-6) • `Pablo Servigne et Raphaël Stevens, Comment tout peut s’effondrer : petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes, Paris, Seuil, coll. « Anthropocène », 2015, 304 p. (ISBN 9782021223316). • Nourrir l’Europe en temps de crise, Neufchâteau (Belgique), éditions Nature & Progrès, 2014, (ISBN 978-2-930386-52-2) • Jean-Marc Gancille, Ne plus se mentir, Petit exercice de lucidité par temps d'effondrements écologique, Rue de l’échiquier, Poche, (ISBN 2019978-2-37425-1462) • Emmanuel-Yves Monin, Chez les bâtisseurs d'utopies : Des pays de Cocagne, phalanstères, communautés, ashrams, aux éco-villages et autres alternatives post-newage, éd. Yves Monin, 2009, (ISBN 978-2910097110) 71 • 21 leçons pour le xxie siècle [« 21 Lessons for the 21st Century »] (trad. de l'anglais par Pierre-Emmanuel Dauzat), Paris, éd. Albin Michel, 2 octobre 2018, 375 p., 25 cm (ISBN 978-2-226-43603-0). • Jan Martin Bang, Ecovillages: a practical guide to sustainable communities, New Society, 2005, (ISBN 9780865715387) • Sapiens : Une brève histoire de l’humanité Paris, éd. Albin Michel, 2015, 501 p., 25 cm (ISBN 978-2-226-25701-7) • Homo Deus : Une brève histoire de l’avenir, Paris, éd. Albin Michel, 6 septembre 2017, 463 p., 25 cm (ISBN 978-2-226-39387-6) • Articles et Revues • Rob Hopkins, Energy Descent Pathways:evaluating potential responses to Peak Oil, 2006 • Paul Chatterton et Alice Cutler, Un écologisme apolitique ? : débat autour de la transition, Écosociété, Montréal, 2013 • Luc Semal et Mathilde Szuba, « Les transition Towns : résilience, relocalisation et catastrophisme éclairé », Entropia no 7, automne 2009 • Mathilde Szuba et Luc Semal, « Villes en transition: imaginer des relocalisations en urgence », revue Mouvements, 27 septembre 2010 • Habiter autrement (2003) Co-Housing - Co-Habitat ; Les considérations écologiques donnent un nouveau souffle à ce concept Au Danemark. Cultures & Conflits, (51), 97126. 2012-02-21 • https://positivr.fr/saint-pierre-de-frugie-transition-ecologique-bio-renaissance-village/ • Légendat, « le survivalisme en France », sur resilience-urbaine.com, 27 avril 2017. • Jan Martin Bang, Ecovillages: a practical guide to sustainable communities, New Society, 2005 72 • Pitseys John, « Le concept de gouvernance », Revue interdisciplinaire d'études juridiques, 2010/2 (Volume 65), p. 207-228. DOI : 10.3917/riej.065.0207. • Vermeulen O, Agnès Sinaï, Raphaël Stevens, Hugo Carton et Pablo Servigne '2016), Petit traité de résilience locale. Paris, Charles Léopold Mayer/ECLM, coll. « Momentum », 2015, 116 p, (ISBN 9782843771866). • Thierry Thouvenot, L’empreinte écologique de la France, L'Écologiste, no 8, octobre 2002, pp. 37-40. • Mathis Wackernagel, Le dépassement des limites de la planète, L'Ecologiste no 8, octobre 2002, pp. 31-36. • McIntosh, R. (1985) The Background of Ecology. Concept and Theory, New York: Cambridge University Press Dossiers • Dossier « Principes de la grande transition » sur les liens entre la transition et l'ESS » Transition France • Rapport du GIEC sur le Climat – 2018 • OECD Environmental Outlook to 2050 : Climate Change Chapter [« Prévisions environnementales de l'OCDE pour 2050 : Chapitre sur le changement climatique »], OCDE [PDF] Sites Internet • L'impact du changement climatique en Europe Agence européenne pour l'environnement • Rapports de référence sur les changements climatiques Réseau Action Climat • Village associatif alternatif ; Alternative / Autonomie ; https://decroissons.wordpress.com/habitat/villageassociatifalternatif/?fbclid=IwAR3k0QjQWIPN9EUvX5mLvDzcMT4qhETX4FFTzh HANzlyCHIit0FQvag7H7 • La Chine réorganise sa politique environnementale pour plus d’efficacité, Courrier international, https://www.courrierinternational.com/article/la-chine-reorganise-sapolitique-environnementale-pour-plus-defficacite 73 • Trump et l’environnement : la grande casse ; Le Monde, https://www.lemonde.fr/planete/article/2017/04/29/trump-et-l-environnement-lagrande-casse_5119948_3244.html • Brésil : que prévoit Jair Bolsonaro en matière de sciences et d'environnement ?, Sciences et Avenir, https://www.sciencesetavenir.fr/politique/bresil-le-programmeenvironnemental-de-jair-bolsonaro_128321 • Brésil : que prévoit Jair Bolsonaro en matière de sciences et d'environnement ?, Sciences et Avenir, https://www.sciencesetavenir.fr/politique/bresil-le-programmeenvironnemental-de-jair-bolsonaro_128321 • Site officiel Projets Ecovillages France • Site officiel de Passerel Info • http://habiter-autrement.org/33_collectifs/col_ca.htm Conférence & Documentaire • Inculture de Franck Lepage : https://youtu.be/06LB12rAP_0 ; https://youtu.be/ClYAjeiuVJw • Vivre autrement - Documentaire HD autonomie, autarcie, éco-village, décroissance, permaculture • Replay • Expliquez-nous... La situation paradoxale de la Chine en matière d'environnement Franceinfo , URL: https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/expliquez- nous/expliquez-nous-la-situation-paradoxale-de-la-chine-en-matiere-denvironnement_2532475.html Vidéo • Yves Cochet & l’effondrement sur YouTube, entretien avec Yves Cochet, EffondrementTV, novembre 2013 74 • Comment nourrir l’Europe si le système s’effondre ? sur YouTube, conférence de Pablo Servigne, 19 juin 2014 • Pablo Servigne : penser l’effondrement de notre monde sur YouTube, émission de Joseph Confavreux, Le Champ des possibles, Médiapart, 13 juillet 2015 • Collapse sur YouTube, documentaire de Benjamin Crotty, France 4, 16 juin 2016 • Et si tout s'effondrait ? Pablo Servigne & Vincent Wattelet sur YouTube, conférence de Pablo Servigne et Vincent Wattelet, PointCulture TV, 24 juin 2017 • Vincent Mignerot : Anticiper l’effondrement ? sur YouTube, interview de Vincent Mignerot, Thinkerview, 20 septembre 2017 • Effondrement de la civilisation ? Pablo Servigne sur YouTube, interview de Pablo Servigne, Thinkerview, 23 février 2018 • Effondrement : « Un processus déjà en marche » débat avec Agnès Sinaï, Vincent Mignerot et Renaud Duterme, Arrêt sur images , 20 juillet 2018 • Une autre fin du monde est possible : R. Renucci, P. Servigne, R. Stevens & F. Isidori sur YouTube, rencontre / débat à la Maison des Métallos, 20 octobre 2018 • Le Rendez-vous des Futurs - Spécial Collapsologie sur YouTube, avec Yves Cochet, Clément Montfort et Anne Rumin, 15 octobre 2018 • Pablo Servigne & François Ruffin : une dernière bière avant la fin du monde sur YouTube, 31 octobre 2018 • NEXT, web série documentaire de Clément Montfort, saison 1 (2017–2018) • Mister Phi, La pluralité des cultures fait-elle obstacle à l'unité du genre humain, 2019 • Brut , C’est quoi la colapsologie ? , 2018 • Public Sénat , Eco village dans le Gard: Vivre autrement - Les pieds sur terre (15/08/2013), 2013, • Brut, La plus grande communauté Emmaeus de France, 2018, • Effondrement : seul scénario réaliste ? par Arthur Keller [NEXT] saison 2, épisode 4, 20 juin 2019 75 Annexes Annexe 1 : Des exemples d’écovillage en Europe et leurs spécificités. Ces sources provienne de mes propres voyage et d’un questionnaire que j’ai fait circuler à plusieurs amis backpacker qui faisait une tournée des écolieux en Europe. Annexe 2 : Retranscription entretien avec Benjamin Lesage durant l’EOFEST. ` Annexe 3 : entretien avec les fondateurs de l’Eco village AVEC Annexe 4 : Image de Communauté Hippies. Annexe 5 : Questionnaire pour cibler les orientations individuelles d’un écolieu Annexe 6 : exemple du règlement interieur & du manuel de gestion de Pougre Annexe 7 : Comprendre l’organisation d’un Kibboutz Annexe 8 : L’évolution du Bio en France sous forme de shéma. Annexe 9 : Carte des Eco village sur le continent Américain 76 Annexe 1 : Des exemples d’écovillage en Europe et leurs spécificités. Ces sources proviennent de mes propres voyage et d’un questionnaire que j’ai fait circuler à plusieurs amis backpacker qui faisait une tournée des écolieux en Europe. ITALIE • Ceriana (hauteur de San Remo): un couple restaurent une maison en pierre sèche et font de la culture d’olivier et autres plantes. https://www.autonomiaproject.com/ • Popolo degli el : Nous y sommes allé.e.s à l’improviste car ils n’ont pas de moyens de communication mais accueillent tout le monde pendant quinze jours à prix libre (maison et repas communs). Si une personne veut rester plus longtemps, cela donne lieu à une décision commune lors de leur réunion hebdomadaire. Le peuple el que est dans di érents lieux en Italie et nous sommes allés à Avalon au Nord de Florence (Montevettolini) regroupant une quarantaine d’adultes et une quinzaine d’enfants. Les di érents lieux se retrouvent entre eux à la pleine lune pour une célébration. Ils s’entraident et échangent pour leur moyens de subsistance : dans la montagne ils font des pommes de terre céréales et châtaigne, et à Avalon les légumes et les olives dont la récolte donne lieu à des chantiers collectifs et festifs. Leur moyen de revenu pour acheter le reste de la nourriture est le festival de reggae sunsplash, en Espagne, où ils font des pizzas. Ils font aussi le pain, le miel et des plantes aromatiques eux-mê mes. Les habitants n’ont donc pas à payer pour leurs besoins essentiels qui sont la nourriture et logement dans des villages abandonné s. A Avalon, ils n’ont l’é lectricité que depuis un an et pompent l’eau. S’ils ont envie d’autres choses, ils peuvent avoir une activité ré muné ré e mais à l’exté rieur (beaucoup sont artistes). Pour les tâ ches dans la communauté ils fonctionnent sur l’envie, sans obligation et sans horaires. Donc, selon ce qu’ils pré fè rent, ils font la cuisine, le maraı̂chage, le bois ou l’é cole ou simplement de la musique. Ils font l’é cole sur le lieu dans une petite cabane autoconstruite. Les enfants passent un examen de l’EJ tat une fois par an ce qui é vite des contrô les sur place contrairement à la France. • Francesco d’ingiullo (Palmoli) : il fait partie du réseau de l’école alternative en italie et pratique lui-même l’instruction en famille, organise des camps d’enfants. Il fait beaucoup par lui-même :autoconstruction (enduit terre), potager, plantes, vannerie, sandales en cuir... https://sites.google.com/site/cerchioruraleanimatribale/ 77 • Citta della luce (Trecastelli) : http://lacittadellaluce.org/it La communauté existe depuis 22 ans et a pour principales activités le reiki, l’astrologie, la constellation familiale dont ils donnent des formations sur place et à travers toute l’Italie ce qui leur permet d’arranger le lieu (après de l’autorénovation, ils emploient maintenant des gens externes pour que ce soit plus luxueux car ils n’ont plus le temps), de manger, d’acheter des voitures partagées, d’autres lieux comme la maison des cerises depuis 4 ans, où nous étions, pour la partie agricole en agriculture synergétique et permaculture dont ils donnent des formations aussi. La communauté se compose d’environ 30 personnes qui, après une période de test et d’approbation à l’unanimité, donnent tout ce qu’ils ont à la communauté en y entrant, qui sont nourris, logés (en dortoir pour les célibataires) et demandent à tous en réunion s’ils ont des besoins extra. Le mercredi entier est dédié à leur réunion de décision, dont le facilitateur est toujours le fondateur Akshara (ils se donnent d’autres noms en y entrant), et surtout de partage de ressenti. Ils font parfois des rituels amérindiens en hutte de sudation avec de l’ayahuasca. Ils ont chacun une tâche dé nie et y travaillent beaucoup (6 jours par semaine). En tant que volontaires, nous travaillions 4h/jour sous le soleil, à planter de la lande et à récolter des cerises qu’ils revendent, entre autres à un très bon glacier. En échange nous mangions leur bonne nourriture végétarienne, bio et sans gluten. Cependant nous étions logé.e.s dans nos tentes, et ils nous ont demandé 50€ chacun/semaine (ce que nous avons négocié à 35€ en n’allant pas au yoga et à la consultation astrologique). CROATIE • ZMAG (Vukomeric, sud de Zagreb): https://www.zmag.hr/english ZMAG est une association de permaculture. Leurs activités sont la formation, des conférences (sur une autre économie par exemple), un jardin pédagogique (et des interventions dans des écoles), une banque de semences et l’autoconstruction terrepaille pour les maisons privées, autour de la maison commune, qui sont toutes autonomes en énergie. Nous y avons appris la pulvérisation à base d’oeufs, utilisée pour corriger des carences en calcium chez la tomate, qui se traduisent par une pourriture apicale (tâche marron sur le cul de la tomate) . 78 BOSNIE • Banja Luka : visite d’un jardin collectif dont la dynamique ne prend pas de même que l’AMAP, mais les gens coopèrent beaucoup entre eux en campagne (pour les meules de foin par exemple) et ont tous des jardins vivriers très grands. HONGRIE • Visnyeszeplak: éco-village chrétien, globalement autosu isant (nourriture/autoconstruction, menuiserie) et ayant organisé l’école et le collège sur place (180 personnes). • Krishna valley : communauté krishna (aspect religieux important) développant l’autonomie avec le maraîchage, une conserverie, des semences, leur propre école, l’énergie renouvelable (120 personnes). http://krisnavolgy.hu/ • Nagyszekely : C’est un village où 4 familles coopèrent pour une pépinière d’arbres fruitiers notamment. Ils ont fondé l’association hongroise de permaculture et font donc des formations mais accueillent aussi des wwoofeurs qui voudraient expérimenter ce mode de vie. Une des familles à une grande banque de semences. [email protected] • « le lieu où il fait bon vivre » (Szar) : c’est un lieu de yourtes d’hôtes où sont organisés des camps d’enfants et d’adultes sur se réapproprier des savoir- faire (cosmétique maison, pain...). http://elnijohaz.hu/ 79 Annexe 2 : Retranscription entretien avec Benjamin Lesage durant l’EOFEST. Pourrais-tu te présenter ? « Benjamin Lesage, je suis née à Besançon en Franche-Comté en 1985. Dès le départ j’ai vécu qu’avec ma Maman qui est institutrice. Mon père est parti dès ma naissance c’était un accord commun je le voyais que trois-quatre fois par ans. Lui il avait une entreprise, où il était autoentrepreneur, enfin, il organisait des salons de la mariée. J’ai deux frère et sœur qui sont du même mariage. Étude normale, je suis allé en S, très bon en math tout ça même si moi je voulais aller en langue, mais que j’étais très mauvais. À S ça m’a insupporté du coup j’ai voulu faire une école de théâtre, mais je me suis fait recaller à l’entré car il formait que des acteurs et moi je voulais être réalisateur. J’ai voulu faire science po aussi, mais voilà je n’avais pas trop le moyen de préparer le concourt du coup je suis arrivé très loin. Je travaillais au Quick pour payer mes études à ce moment là j’ai intégré un IUT GEA, gestion à Besançon toujours. Là-bas on m’a proposé de faire une année d’ERASMUS ce qui me bottait bien. Ils sont vachement flexibles là-bas du coup j’ai pu faire un bachelor et finir mes études aux PaysBas A la fin de ces études que j’ai fait un voyage sans argent, t’en à peut être entendu parler ? et c’est là que la transformation a commencé. « Du coup c’est pendant ce fameux voyage que naît l’idée d’écovillage ? Je suis partie avec deux amis un Italien un Allemand. Et lui il était vachement un fond sur le végétarisme et l’écologie, il venait de Berlin donc en avance par rapport à nous, avec lui on à vu beaucoup de docus sur comment on vivait. À la base on avait créé une association pour faire des petits projets pour que les étudiants prennent conscience de l’écologie et sur les relations multiculturelles. Il y a beaucoup de ségrégation aux Pays-Bas. jparle vite ça va être dur pendant la retranscription. *rire* ? Il y avait beaucoup d’ego on voulait montrer qu’on était capable de le faire. Et on à voyager et BIM grosse claque, on s’est inspiré de ce qui se faisait surtout en Amérique latine on à rencontrer énormément de gens et de lieu et on s’est dit c’est comme ça qu’on veut vivre. Au bout d’un moment on s’est séparé, déjà parce que moi je vivais sans argent et en voyage c’est ok mais dès que tu restes à un endroit tu vois vite les limites, c’est beaucoup plus complexe. Et en arrivant au Mexique j’ai rencontré Yasmine avec elle il y a eu le coup de foudre du coup dans ma tête c’était maintenant on fait quoi ? Je voulais me poser, j’avais l’idée de me poser là-bas. Mais la mentalité change-toi toi-même pour changer le monde ne colle pas trop avec les problématiques sociales du bas. Avec les 80 journalistes arrêtés, les indigènes. Voilà quoi c’est difficile là-bas de dire qu’il ne faille pas être en lutte contre un état qui est clairement oppressif. C’était plus cohérent de venir le faire en France sur un public qui était beaucoup plus ouvert à ce type de problématique. Yasmine ça a été dur, mais elle a accepté de venir. Avec Raphaëlle on s’est retrouvé et tous les trois ont à commencer à chercher un lieu où on pouvait acheter. On ne trouvait pas un truc qui mélangeait économie du don et véganisme/végétarisme. Donc il fallait qu’on le crée. Donc l’idée de départ c’est un lieu sans argent et végane. Ouais je crois que c’était les deux piliers principaux. L’idée d’éducation libre c’est rajoutée très vite rapidement car Rachelle avait un enfant. On à 6 piliers, mais quand moi je parle du véganisme c’est plutôt dans l’idée de respecter la nature, ça rejoint la permaculture, écologie. Mais c’est aussi le sans argent l’économie naturelle elle ne fonctionne pas avec le troc. Suite de l’entretien en numérique à l’adresse suivante : https://1drv.ms/f/s!AgpINFK9kt0PgYNxR5V51AvFCXxgOA Annexe 3 : entretien avec les fondateurs de l’Eco village AVEC https://1drv.ms/f/s!AgpINFK9kt0PgYNxR5V51AvFCXxgOA 81 Annexe 4 : Image de Communauté Hippies. Source : espritsciencemetaphysiques.com 82 Annexe 5 : Questionnaire pour cibler les orientations individuelles d’un écolieu Votre prénom :................ (*) Entourer la mention juste Juridique et financier : 1- Souhaitez-vous être propriétaire oui* non* ou locataire en accession à la propriété? oui* non* 2- Sachant que Gilles estime l'investissement préalable à 100 000 euros, quelle somme envisagez-vous d'investir? Dans quel délai? .................. 3- De quelle somme disposerez vous pour finaliser ce projet immobilier (capital ou emprunt)……….. 4- Etes vous soucieux des modalités de transmission et/ou de récupération de votre investissement? Précisez................ 5- Serez- vous autonome financièrement? 6- Désirez-vous* oui* non* acceptez-vous* refusez-vous * que des personnes physiques et/ou morales (ex: société de HLM, mairie) participent au financement du projet? 7- "Pouvez-vous apporter plus d'argent que l'investissement premier et aider ainsi le projet et ouvrir la voie à des personnes sans apports directs." oui* non* Aménagement du lieu 1- Préférez-vous construire ou rénover? (sachant que la construction nécessité plus de temps.) 2- Souhaitez-vous habiter 83 un appartement* une maison* avec jardin privatif* 3- De combien de m2 personnels rêvez-vous de disposer ? ................... 4- Désirez-vous l'aménagement de lieux en commun? oui* non* De quel type? ....................... 5- Souhaitez-vous des logements d'accueil : amis famille visiteurs collectif * privé * (intégré dans chaque foyer) 6- Désirez-vous des locaux pour une activité professionnelle personnes âgées gîte thérapie collectif * privé*( intégré dans chaque foyer) 7- A quelle proximité des lieux de commerce et culture voulez-vous habiter : accessible : à pied* à vélo* en voiture * Organisation de la vie 1- Souhaitez-vous vous insérer dans un tissu social (conseiller municipal, chorale, sport, rando etc.) oui* non* 2- À quelle fréquence aimeriez-vous prendre des repas en commun? 3- Trouvez-vous la participation à des réunions de régulation ? utile* indispensable* A quel rythme ? ................................... 4- Ceux qui ont investi dans l'achat doivent-ils avoir une voix prépondérante pour les décisions concernant de gros investissements financiers? oui* 5- Dans combien de temps êtes-vous prêt à déménager? ......................... 84 non* Rencontres d'élaboration : 1- Tous les mois pensez-vous que cela soit juste* insuffisant* 2- Proposez-vous d'autres réunions ? lieu ……………………………..…….. temps…………………………….…… 3- Avez-vous des propositions pour un vécu commun pendant l'élaboration du projet ? oui* non* lesquelles ? Autres ……………………………………….. ……………………………………….. ……………………………………….. Un nom est proposé : Vous plaît-il? Avez-vous une autre suggestion? 85 OUI ................................. BOF NON Annexe 6 : exemple du règlement interieur & du manuel de gestion de Pougre Règlement Interieur : https://1drv.ms/b/s!AgpINFK9kt0PgYNuusosjQnhejIzBQ Manuelle de Gestion : https://1drv.ms/w/s!AgpINFK9kt0PgYNvF3B95iCQWjCJ7Q Annexe 7 : Comprendre l’organisation d’un Kibboutz 86 Annexe 8 : L’évolution du Bio en France 87 88 Annexe 9 : Carte des Eco village sur le continent Américain 89 Résumé Notre écosystème terre est en danger depuis la révolution industrielle. La pollution grandissante de notre planète entraîne un dérèglement climatique dont les conséquences se font de plus en plus ressentir. Il semble impossible de continuer à vivre comme nous le faisons au risque de ne laisser aux générations futures qu’un endroit non viable. Les politiques publiques et la prise de conscient grandissante ne semblent pas assez rapides pour inverser la tendance. Pour cela nous devons repenser notre façon de vivre et de fonctionner. Le secteur de l’économie sociale et solidaire est une réponse que nous pouvons apporter pour vivre de façon plus éthique au sein de notre société, mais pour vivre selon en harmonie avec des valeurs écologiques de nombreuses personnes font le choix de s’en émanciper pour créer leurs propres systèmes autonomes : les éco villages. Nous verrons donc l’évolution de la prise de conscience sur le dérèglement climatique, la mise en place des éco lieux pour terminer par une méthode de création issue d’une réflexion personnelle. Our earth ecosystem has been in danger since the industrial revolution. The growing pollution of our planet is causing climate change, the consequences of which are being felt more and more. It seems impossible to continue to live as we do, at the risk of leaving future generations only a non-viable place. Public policies and growing awareness do not seem to be fast enough to reverse the trend. To do so, we must rethink the way we live and work. The social and solidarity economy sector is a response that we can provide to live more ethically in our society, but to live in harmony with ecological values, many people choose to free themselves from it in order to create their own autonomous systems: eco-villages. We will therefore see the evolution of awareness of climate change, the establishment of « eco-places » and finally a creative method based on personal reflection. 90