Une des perles cachées à laquelle je faisais allusion dans mon précédent essai, une de ces
paroles du Christ que les chrétiens modernes ignorent, c’est son injonction à ses disciples
d’être parfaits, tout comme Dieu est parfait. Mais c’est encore pire, car non seulement
l’ignorent-ils, mais ils en nient même la possibilité, révélant ainsi leur désaccord
présomptueux avec le Maître qu’ils prétendent suivre.
Il n’y a pas d’injonction plus fondamentale dans toute la Bible que celle-ci, puisque c’est
l’injonction de réaliser l’identité suprême, car comment pouvez-vous être parfait sans être
Un avec le Père ? Le Christ a dit lui-même que seul Dieu est bon (Marc 10.8). De plus, il a
rappelé à ses critiques juifs la parole de leurs propres Ecritures : ‘’J’ai dit : vous êtes des
dieux’’. Il appelait les hommes ‘’fils de Dieu’’ et leur disait de s’adresser à Dieu en tant que
‘’Père’’ et St. Paul leur a aussi dit qu’ils étaient tous des fils de Dieu dans le Christ. Alors, si
un homme est le fils de Dieu, qu’il peut être appelé un dieu et (comme le Christ l’a
également dit), il possède en lui le Royaume des Cieux, qu’est-ce que ceci, sinon la
suprême identité ?
Cette injonction marque le christianisme comme une religion complète qui envisage et qui
recherche ce but identitaire suprême ou réalisation du Soi que l’hindouisme dénomme
moksha, que le bouddhisme dénomme nirvana et que le soufisme dénomme fana. En
niant cette possibilité, les adeptes obtus et bornés du Christ ont dégradé leur religion
qu’ils honorent toujours nominativement à un niveau inférieur qui n’envisage que l’objectif
proche d’une individualité purifiée dans un paradis formel. Il s’agit sans aucun doute d’un
but élevé, mais il ne s’agit pas du but le plus élevé, il ne s’agit pas de la perfection que le
Christ a prescrite, il ne s’agit pas de la réelle bonté, car ‘’seul Dieu est bon’’.
Toutefois, le mental humain dispose de tellement de ressources que les théologiens
aveugles qui ont réfuté l’injonction du Christ et limité sa religion sont arrivés à retourner la
situation et à faire passer l’infériorité ainsi acceptée pour de la supériorité ! Ils
reconnaissent la vérité de la parole du Christ, ‘’Moi et mon Père, nous sommes Un’’, mais
la limitent à lui seul, de sorte que s’il n’y a qu’un seul homme parfait, les autres religions
n’en n’ont pas du tout.
Une telle croyance témoigne d’un niveau d’intelligence douloureusement bas. Les lois
divines sont universelles. Même physiquement, c’est évident, et d’autant plus,
spirituellement ! La vraie doctrine de l’identité est simple et simultanément,
intellectuellement satisfaisante. L’Être est Un ; par conséquent, vous ne pouvez pas être
différent, puisque l’autre n’existe pas. Par conséquent, si vous réalisez votre véritable Soi,
vous réalisez votre identité avec l’Un, avec le Père, et vous êtes parfait, comme Il est
parfait. Ce ne sont que les imperfections de votre nature individuelle apparente qui vous
font sembler différent. Par conséquent, si vous les supprimez et devenez parfait, comme
l’Un qui est parfait, vous réalisez votre identité préexistante avec l’Un. Ils proposent à la
place un mythe comme article de foi : un Être parfait, mais ni infini, ni universel (comment
pourrait-Il l’être, s’il exclut des ‘’autres’’ ?) crée une multitude d’êtres imparfaits et distincts