Le problème, ce n’est pas la matière, mais le matérialisme. De même, il n’y a
aucun problème avec l’Esprit, mais le spiritualisme est problématique. A partir
du moment où nous encapsulons une idée ou une pensée dans un ‘’isme’’,
nous posons les fondations de la pensée dualiste. L’univers – uni-vers – n’est
qu’un seul chant, un seul poème. Il contient des formes infinies qui dansent
ensemble dans l’harmonie, qui chantent ensemble de concert, qui s’équilibrent
dans la gravité, qui se transforment dans l’évolution et pourtant, l’univers
conserve son intégrité et son ordre implicite. L’obscurité et la lumière, le haut et
le bas, la gauche et la droite, les mots et leur sens, la matière et l’Esprit se
complémentent, à l’aise dans leur étreinte mutuelle. Où est la contradiction ? Où
est le conflit ?
La vie nourrit la vie, la matière nourrit la matière, l’Esprit nourrit l’Esprit. La vie
nourrit la matière, la matière nourrit la vie et l’Esprit nourrit à la fois la matière et
la vie. La réciprocité est totale. C’est la vision du monde orientale. C’est une
vision du monde ancienne que l’on retrouve dans les traditions tribales des
cultures préindustrielles où nature et Esprit, terre et ciel, soleil et lune sont
éternellement dans la réciprocité, l’échange et l’harmonie.
Les cultures dualistes modernes considèrent que la nature est sanguinaire,
avec les plus forts et les plus doués qui survivent et les plus faibles et les plus
doux qui disparaissent, le conflit et la compétition étant la seule et unique vraie
réalité. De cette vision du monde ressort la notion d’une division entre le mental
et la matière. Une fois que le mental et la matière sont scindés, il s’ensuit alors
un débat pour savoir si le mental est supérieur à la matière ou si la matière est
supérieure au mental.
Cette vision du monde du clivage, de la rupture, du conflit, de la compétition, de
la séparation et du dualisme a également produit l’idée de la séparation entre le
monde humain et le monde naturel. Une fois la séparation entérinée, les
humains se considèrent comme l’espèce supérieure et ils se préoccupent du
contrôle et de la manipulation de la nature à leur profit. Dans cette vision du
monde, la nature existe pour le bénéfice des humains qui peuvent la posséder
et se l’approprier, et si la nature est protégée et conservée, le but n’est que le
bénéfice humain. Le monde naturel – les plantes, les animaux, les rivières, les
océans, les montagnes et le ciel – est dénué de la Conscience. Si l’Esprit existe,