PARALLÈLE ENTRE LA TRINITÉ HINDOUE ET LA TRINITÉ CHRÉTIENNE DAVID CARSE (Chapitre extrait de son livre ‘’Perfect brilliant stillness beyond the individual self’’) ‘’Je suis la Présence. Pas, ‘’je’’ suis présent ou ‘’vous’’ êtes présent ou ‘’il’’ est présent. Quand on voit la situation, Comme elle est réellement, Qu’aucun individu n’est impliqué, Que Ce qui est présent est la Présence globale, Alors, à l’instant où ceci est perçu, Il y a Libération.’’ - Nisargadatta Maharaj Diriez-vous que tout sentiment, toute émotion est la Conscience qui apparaît sous la forme de ce sentiment (par exemple l’angoisse ou le calme) ou est-ce simplement que ces sentiments apparaissent dans la Conscience ? La même question s’applique aux pensées. Comme je le vois, la colère ou la compassion ne sont en essence pas différentes du stylo que j’utilise. Est-ce vrai ? Dans un sens, cela dépend de la finesse avec laquelle vous voulez diviser l'atome, pour ainsi dire. Au niveau le plus fondamental ou ‘’le plus vrai’’, il n’y a rien. Ramana Maharshi disait : ‘’Tout ce qui n’est pas là dans le sommeil profond n’existe pas.’’ Tout ce qu’il y a dans le sommeil profond, c’est cette Conscience primordiale, originelle qui n’est même pas consciente d’Elle-même. Ce que Maharaj appelle votre ‘’état naturel’’. Le koan zen ‘’Quel était votre visage originel avant de naître ?’’ vise cela. Avant la naissance du corps (et qu’apparaisse la conscience identifiée) et encore après sa mort, vous êtes la Conscience (Présence) non identifiée.1 Même pendant la vie du corps, vous n’êtes pas autre que cela, bien que l’identification rend ceci difficile à voir. Il n’y a rien d’autre que cette Conscience. Les pensées apparaissent dans cette Conscience, les automobiles apparaissent dans cette Conscience, des nébuleuses, des rêves, des souvenirs, des accidents, des émotions…Quand on lui demandait si les dieux de la mythologie hindoue étaient réels, Ramana Maharshi disait qu’ils sont aussi réels que ce monde. Les mythes et le monde physique sont similairement ‘’réels’’. Les sentiments, les pensées et les stylos ont la même ‘’réalité’’ ― la même ‘’irréalité’’. Les physiciens nous disent que quand vous l’observez d’assez près, la ‘’réalité’’ physique n’est pas du tout matérielle, mais de l’énergie immatérielle. Le concept que j’essaye parfois d’exprimer, c’est que l’élément constitutif de base de ce que nous expérimentons autour de nous ― ce qui inclut nous-mêmes et les mondes des choses matérielles, des énergies et des pensées ― est ce à quoi il est fait référence en tant qu’Ananda dans l’expression hindoue ‘’Sat-Chit-Ananda’’. On traduit la plupart du temps le terme sanskrit ‘’Ananda’’ par Félicité, aussi les gens ont-ils des idées curieuses à ce sujet. Mais il y a quelque chose de beaucoup plus vaste par rapport à cela et j’essaye parfois d’en parler, mais il est extrêmement compliqué de rendre cela compréhensible. 1 C’est ainsi que le Christ a pu dire : ‘’Avant qu’Abraham fût, JE SUIS’’, NDT. Dans le concept de Sat-Chit-Ananda, il y a un parallèle avec la théologie mystique chrétienne de la Trinité. Les deux s’accordent sur le fait qu’en premier, il y a l’Origine, la Source immuable, l’Etre Lui-même, la Conscience au repos (‘’Sat’’, le ‘’Père’’). Puis, imperceptiblement, il y a une vibration, un mouvement, une respiration, quelque chose de cet ordre dans cette Totalité immuable originelle. C’est le Logos, la Conscience reflétée/réfléchie, qui n’est elle-même pas différente de cette même Conscience. C’est la Conscience, qui est maintenant consciente d’Elle-même et qui cependant n’est pas autre, ni distincte de la pure Conscience (‘’Chit’’, le ‘’Fils’’). C’est peut-être l’aspect intelligence de la Conscience. Le commencement de l’Evangile de Jean (‘’Au commencement, il y avait le Verbe (Logos), et le Verbe était avec Dieu, et le Verbe était Dieu. Il était là au commencement avec Dieu…’’) évoque ce même indicible. Donc, il y a cela. Mais ensuite, il y a encore autre chose, encore plus indicible. La tradition hindoue, comme la tradition chrétienne voit qu’il y a (conceptuellement) quelque chose de plus, d’une certaine façon. Dans le christianisme, ce ‘’plus’’ s’appelle ‘’l’Esprit’’ de Dieu que l’on décrit ou que l’on définit parfois comme ‘’l’Amour entre le Père et le Fils’’. Donc, pas quelque chose de réellement séparé, mais l’Amour qui opère dans ce mouvement, la respiration, la vibration de la Conscience, un Amour si total qu’Il n’est Lui-même pas autre que Dieu. C’est l’Amour pur, neutre, non-identifié. La nature de cet Amour est telle qu’Il ne peut pas être contenu et qu’Il déborde de Lui-même en Lui-même. Il jaillit et Il déborde, pour ainsi dire. Cet Amour est inimaginable et j’hésite même à parler d’amour. Il est tellement intense, ardent, vif, puissant, paisible et glorieux ― éclat, splendeur et lustre flamboyant. Complètement saturant pour l’expérience et la capacité humaine de comprendre. ‘’Ananda’’ est un terme aussi pathétiquement inadéquat que le mot ‘’amour’’. Et la tradition chrétienne, comme la tradition hindoue, sont toutes les deux bien claires par rapport au fait que cet Ananda, cet Esprit, cet Amour n’est pas autre chose que Dieu, l’Etre, la Conscience. Dieu ou Brahman est Un. Le Père, le Fils et l’Esprit ou Sat-Chit-Ananda sont juste trois concepts conjugués pour essayer de trianguler Ce-qui-est. Tout cela est conceptuel, le mental luttant et s’étirant pour comprendre. Il n’y a aucune Vérité absolue dans ces concepts et dans ces expressions qui ne sont, peut-être, que des indications/indicateurs utiles.2 Lorsque Maharaj fit son commentaire énigmatique par rapport au fait que tout est constitué d’amour ― toute la manifestation existant et étant soutenue, entretenue et nourrie par, dans et sous la forme de cet Amour primordial et absolu ― c’est ce qu’il disait. Cette effusion d’Ananda divine, de Félicité, de Beauté, d’Amour, de Grâce, d’Intensité, de Puissance, d’Esprit, de Silence, de Perfection et de Radiance, c’est ‘’l’Energie’’, la seule Energie qu’il y a. Elle est la Totalité. C’est l’énergie que les 2 Ici, je me permets de reprendre les paroles du mystique chrétien, Jean Tauler, disciple de Maître Eckhart : ‘’Ainsi, laissons les discours érudits aux savants, mais vous, vous devriez permettre à la Sainte Trinité de naître au cœur de votre âme, non pas en usant de la raison humaine, mais en Essence et en Vérité, non pas en mots, mais en Réalité’’, NDT. physiciens détectent, quand ils observent les particules subatomiques et quand ils ne détectent pas de matière, mais une explosion énergétique. Une partie de la vision que j’ai eue dans la jungle était la vision de cette Energie en tant qu’effusion de la Source (et même ceci est un concept, un aperçu de l’indicible) et se diffusant en tant que ceci ― ce que l’on expérimente ici comme le monde. C’est ce que j’essaye d’exprimer ici : ‘’Dieu’’ ou ‘’l’Amour’’ ou ‘’l’Ananda’’ ou ‘’l’Esprit’’ est précisément la ‘’substance’’ à partir de laquelle tout ceci est ‘’constitué’’, et c’est pourquoi ceci n’est pas différent de Cela. C’est Cela, constitué à partir de Cela. Une autre manière de penser à la Trinité, Sat-Chit-Ananda, c’est de réaliser que tout ce qu’il y a, c’est la Conscience, Chit. La Conscience au repos, immobile, est Sat. La Conscience en mouvement, active et qui déborde est Ananda. C’est tout à fait la même, tout en Une. Ainsi, c’est votre ‘’Essence’’ ou la ‘’Totalité’’. Ce ne peut être que la Totalité, si Elle est tout ce qu’il y a, si tout ce qu’il y a, c’est Elle. Donc, tout ce qui ressemble à autre chose n’existe pas ; c’est Elle. Cela est déjà tout depuis toujours et est toujours toute chose. Lorsqu’on parle du samsara ou de l’illusion, ce n’est pas qu’il n’y a rien, là. Il y a la Totalité, là ! L’illusion, c’est de percevoir ceci comme étant des choses matérielles séparées, ce qui n’est pas le cas. C’est Dieu, l’Amour, l’Ananda. Cela ressemble juste à des choses – de la colère, un stylo, un chat, une prière, le solstice, un colibri, la mort, des œufs brouillés…pour la conscience identifiée, pour les organismes corps/esprits qui croient qu’ils sont des individus vivant une vie dans un monde. Voici ce qui se passe dans la tradition mystique chrétienne, quand il y a toutes ces discussions sur l’amour de Dieu qui est ce ‘’feu purificateur’’ ardent et intense qui consume tout. Ceci est mal compris, comme un genre de Dieu vengeur, mais ceux qui virent cela à l’origine virent ceci : quand cette effusion est perçue, vue, ‘’comprise’’ à l’intérieur, rien de l’expérience humaine ne peut le supporter : tout est consumé, tout s’en va. Il n’en reste rien : uniquement cet Amour qui est la Totalité. Seule demeure la Présence qui déborde ― et celle-ci peut prendre l’apparence de la gadoue pulvérisée par les roues d’une voiture en ville au mois de janvier, d’un mari que l’on envoie servir en Afghanistan, du cancer ou du cœur défaillant d’un ami, d’une mère qui embrasse son enfant, de mes vieilles pantoufles ou de votre stylo à bille…Personne ne La voit, mais il s’agit manifestement de l’effusion d’un Silence éclatant et parfait. Enfin, il est intéressant de noter que la tradition chrétienne et la tradition hindoue reconnaissent toutes deux que ni Sat-Chit-Ananda, ni le Père, le Fils et l’Esprit ne sont l’Absolu. Ceux-ci ne vont qu’aussi loin que l’esprit humain peut aller et aussi près qu’il peut s’approcher de la compréhension de ce qui ne peut pas être compris. Sat- Chit-Ananda est une tentative pour décrire Brahman, qui Lui-même émane du Parabrahman, ce qui est au-delà de Brahman. Le Père, le Fils et l’Esprit décrivent le Dieu trinitaire qui provient de la divinité au-delà de Dieu. Dans l’ensemble, c’est un parallèle remarquable, un élément de la sagesse éternelle qui opère dans deux traditions très différentes. Voilà. Et alors, quoi ? Il est impossible de parler de l’incompréhensible. Tant que ceci n’a pas été intérieurement perçu, cela n’a pas de sens ou ce ne sont au mieux que des concepts, que des idées. Quand c’est intérieurement perçu, c’est inutile. Il y a donc un argument valable (et des maîtres qui disent) qu’il est inutile de diviser aussi finement l’atome. Ainsi, tout ce qu’il y a, c’est Dieu, mais dans quelle mesure cela aide-t-il la personne moyenne ou le chercheur moyen ? Cela ne paraît pas être le cas. Ils sont frustrés. Et donc, on élabore souvent un enseignement qui les aide à mieux vivre ce Rêve. Osho, Da Free John, Ramesh S. Balsekar, Robert Adams me viennent à l’esprit comme seulement quelques-uns de ces maîtres bien intentionnés qui commencent avec un message radical, mais qui avec le temps le diluent en ‘’principes’’, en ‘’étapes’’ et en ‘’pratiques’’, parfois même en petits rappels quotidiens ‘’inspirants’’ insipides, si les gens ne comprennent pas ou ne répondent pas à l’enseignement pur et simple. Et toute la tradition bouddhiste, aussi belle qu’elle est, est notoire pour institutionnaliser ce genre de choses. Ken Wilber a même donné une base théorique à ceci en disant que ceux qui possèdent la clairvoyance et la connaissance de Ce-qui-est ont véritablement une ‘’obligation’’ de proposer une version moins radicale que le chercheur ordinaire peut comprendre. Ici, c’est différent. Il y a (il y a maintenant, il y a toujours eu et il y aura toujours) des tas de versions, de variantes aisément accessibles de méthodes pour vivre, s’améliorer, élever le niveau de fonctionnement de l’individu ou pour se sentir mieux dans la vie quotidienne. Il y a des millions d’enseignants qui peuvent et qui sont prêts à enseigner ces méthodes. Néanmoins, il y en a apparemment peu qui voient Ce-qui-est. Il y a vraisemblablement un certain avantage à avoir les quelques-uns qui voient et qui disent ce qu’eux seuls peuvent dire. Pourquoi se préoccuper du nombre de personnes qui peuvent comprendre ceci ou même le concevoir et l’apprécier ? Ce n’est pas ce qui est visé, ni le but. Toute une variété et une diversité d’aides sont accessibles et disponibles dans la vie quotidienne. Ce n’est pas ainsi que cela fonctionne, ici. L’expression de cette compréhension aide-t-elle certains individus ou les perturbe-t-elle ? Je l’ignore et je consacre peu d’énergie à me tracasser par rapport à cette question. Il est pris soin de cela suivant des modes ou des modalités que nous ne pouvons pas connaître. Cela, comme tout le reste au sein du Rêve, n’est pas ‘’mon’’ problème. Il n’y a aucune ‘’intention’’ ici. Tout ce qui peut être fait ici, c’est de dire ce qui est connu.3 3 ‘’Je’’ partage exactement la même philosophie, en ce qui concerne ‘’mon’’ site web et ‘’mes’’ traductions qui se trouvent sur ce site, NDT. Les choses ne sont pas ce qu’elles paraissent être. Rien de ceci n’a de l’importance. Il n’y a pas de ‘’vous’’, ni de ‘’moi’’. Il n’y a pas d’individus en tant qu’entités séparées. Il n’y a ‘’personne’’, ici. Toujours et partout un Silence éclatant et parfait, Vacuité ineffable qui se dilate constamment, Amour limpide et parfait, Présence infinie, perçus ici, maintenant et toujours, non à partir de ce corps/esprit, mais de ce même Silence, de cette même Présence qui est la Totalité, peut-être ‘’par l’entremise’’ ou ‘’sous la forme de’’ cet instrument corps/esprit, car ce Silence, cette Présence est ce que le ‘’Je’’ est. Amen. Svaha !4 Partage-pdf.webnode.fr 4 Ainsi soit-il, NDT.